Sécurité transfrontalière : « Minerve », une brigade dédiée à la frontière

Sécurité transfrontalière : « Minerve », une brigade dédiée à la frontière
13 avril 2017

La délinquance transfrontalière entre Annemasse et Genève nécessite, indépendamment de la police aux frontières, une coordination opérationnelle permanente en matière de sécurité publique entre les services de police français et suisses. Elle est rendue possible par la création de la brigade opérationnelle mixte dénommée « Minerve ».


Créée le 17 janvier 2014, la brigade opérationnelle mixte (BOM) exerce sa mission sur la zone de sécurité prioritaire d’Annemasse. Ce système de collaboration renforce les accords de Paris du 9 octobre 2007 qui régissent la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière. Les « demandes d’entraide » favorisent la réactivité entre les pays. Deux policiers français de la DDSP74 et deux agents suisses de la police cantonale genevoise travaillent ensemble depuis le commissariat d’Annemasse sur des opérations conduites en France ou en Suisse. « Pour les délinquants, les frontières se traversent très facilement, mais nous n’avions pas d’outil suffisant pour répondre à ce type de criminalité, explique le commissaire divisionnaire Emmanuel Kiehl, directeur départemental de la sécurité publique de la Haute-Savoie.

La BOM permet d’aller plus loin que les patrouilles mixtes, en effectuant un travail d’investigation, de filature, de perquisition et d’interpellation ».

Des cultures policières distinctes

Pour ces policiers volontaires, la mission est complexe car le système juridique et la culture policière diffèrent dans les deux pays. Les policiers doivent connaître les codes de procédure pénale française et suisse et les schémas d’intervention respectifs, mais n’en gardent pas moins leur souveraineté et leur spécificité : « Les droits et techniques appliqués restent ceux du territoire concerné, souligne Antoine, major à la BOM. Mais nous devons connaître le système suisse ! Par exemple, la notion de flagrant délit n’existe pas, les perquisitions sont autorisées de nuit, et le recours aux témoins n’est pas nécessaire !

Quant aux gestes d’interpellations, d’interceptions de véhicules ou les techniques de filatures, nous les apprenons en formation pour travailler au mieux avec nos collègues ».

La réactivité, objectif principal de la BOM, est possible grâce aux demandes d’entraides judiciaires générées à la demande d’un seul service national. Les policiers peuvent ainsi poursuivre la criminalité de part et d’autre de la frontière sans passer par une commission rogatoire internationale. « Nous agissons rapidement également grâce à un réseau radio commun entre la Suisse et la France, et grâce à l’échange de renseignements instantané avec nos collègues suisses de la BOM, qui ont accès à leurs fichiers depuis le commissariat », soutient Yannig, brigadier-chef.

Annemasse et Genève sont deux pôles d’attractions importants et attirent une délinquance telle que cambriolages, mendicité agressive, trafic d’héroïne ou encore immigration irrégulière d’Albanais en transit par la Suisse. « Afin de partager et de croiser les informations, des réunions de coopération franco- suisse sont organisées chaque semaine, explique le capitaine coordinateur de la BOM, et chaque mois des réunions portant sur le renseignement ».

La BOM permet également de suivre des dossiers de personnes radicalisées ou en voie de l’être.

Depuis sa création et jusqu’au 31 juillet 2016, la BOM a appréhendé 163 individus dont 90 ont été placés en garde à vue. Treize équipes de cambrioleurs itinérants professionnels ont été interpellées, et la BOM a mené à bien une centaine de perquisitions entre la France et la Suisse.

Floriane Boillot