Le nouveau laboratoire du SRIJ, livré en octobre 2015, permet de respecter toutes les règles d’hygiène, de sécurité et de traçabilité dans le traitement des scellés, pour en révéler et analyser les traces papillaires. Le service toulousain entre également dans une démarche qualité qui révolutionne ses méthodes de travail.
Le travail des « ijistes » achevé sur les lieux du crime, celui du service sur cette affaire est loin d’être terminé. L’OPJ a en effet décidé de soumettre à l’analyse du laboratoire du SRIJ certains objets et documents intéressants pour la révélation de traces papillaires, placés sous scellés sur la scène de crime par le directeur d’enquête assisté de l’équipe du groupe intervention de l’IJ. Si ceux-ci s’avèrent parlants, l’enquête pourrait faire un pas de géant.
Caroline et Godefroy, deux des trois membres du SRIJ qualifiés « référents qualité » par le service central et habilités à révéler des traces papillaires par procédés physico-chimiques, entrent en action. Une lettre de menace a été découverte au domicile de la victime. Ils doivent en extraire des empreintes papillaires. « Pour chaque scellé que nous traitons, nous recevons un dossier avec la réquisition et la désignation de la personne qualifiée », explique Caroline. Elle brise donc le scellé, stocké jusque-là dans une boîte totalement hermétique, et se concentre sur le timbre autocollant de l’enveloppe, source la plus sûre pour trouver une trace.
Après avoir révélé les traces papillaires latentes, Godefroy décrit minutieusement les détails de l’analyse et multiplie les prises de vue de localisation.
Toutes les techniques de révélation de traces sont susceptibles d’être payantes, qu’elles soient optiques (lumière UV, lumière blanche, longueur d’onde variable selon le fluide biologique recherché), physiques (poudres classiques, fluorescentes, luminescentes) ou physico-chimiques (nihhydrine, cyanocrylate, etc...). Elles sont utilisées en fonction de la matière des supports (papier, plastique, métal, etc...) et de la nature de la trace papillaire elle-même (gras, sang, suie, poussière, etc...). « Quand on sort une trace, on la transmet directement au FAED pour identification, possible dans le délai de GAV ou de flagrance ».
Une fois l’opération achevée, le scellé est étiqueté et classé selon les règles procédurales en vigueur puis conservé dans une salle dédiée. La traçabilité du scellé est garantie de son entrée au SRIJ à sa sortie, lorsque l’OPJ vient le récupérer. « Le strict respect des modes opératoires et des procédures devrait nous permettre dans les mois à venir d’obtenir l’accréditation ISO 17025 par le Comité français d’accréditation (Cofrac), continue Claude Y. Le but, in fine, c’est que la preuve, l’élément que nous apporterons lors d’un procès aux assises, soit incontestable. C’est une démarche qui garantit la qualité, la conformité, la traçabilité de nos résultats. »
Alors que beaucoup considèrent l’ADN comme « la reine des preuves », « les traces papillaires n’ont pas dit leur dernier mot, ironise le chef du SRIJ. Ces traces émanent d’un processus de révélation peu coûteux. Par le biais du FAED, elles restent le moyen le plus rapide d’identification des auteurs puisque le processus complet peut être mené à son terme en quelques heures. En tout état de cause, la révélation de traces papillaires selon la méthodologie appliquée au SRIJ ne compromet en aucune façon la possibilité d’effectuer ultérieurement des recherches de traces biologiques.
Et Caroline d’apporter son regard de scientifique chevronnée : « La science est entrée dans le quotidien du policier. On doit faire dorénavant changer les habitudes, les pratiques anciennes. Certes, la démarche qualité est exigeante, mais elle contribue aussi à la protection et à la sécurité des personnels. La science répond à des normes, des règles. Au final, le protocole permet la garantie de la trace ». Les douze SRIJ du territoire sont en cours d’accréditation auprès du Cofrac.
Trois membres du SRIJ sont habilités « portraitistes ». L’un d’eux nous livre quelques secrets d’une méthode surprenante, tout en psychologie :
« Notre objectif est de mettre en place une procédure d’accueil de la victime ou du témoin permettant sa mise en condition et de lui faire exhumer ses souvenirs. On choisit le moment de « l’interview », car la personne ne doit pas être en état de choc, sans trop attendre non plus pour que les souvenirs ne s’effacent pas. On débute alors la lecture d’un document édité, réfléchi et conçu par des psychologues et des psychiatres, dans lequel chaque mot est étudié. On commence par une mise en confiance. Il faut y mettre le ton, du cœur, pour lui enlever toute pression ou stress. Vient ensuite une phase de contextualisation environnementale et émotionnelle. On la replace dans les conditions matérielles et émotionnelles dans lesquelles elle se trouvait au moment où elle a vu la personne recherchée. Le souvenir se reconstruit petit à petit. On passe ensuite à l’hypermnésie, permettant de lui « booster » la mémoire et de lui faire revenir des détails les plus anodins, flous, imprécis sur le visage, les traits, l’harmonie générale.
Le témoin se corrige parfois de lui-même. On termine par le traitement holistique du visage avec les impressions du témoin, pour aller au-delà de l’aspect physique. La personne avait-elle des traits fermés ? Que dégageait-elle ? Semblait-elle douce, menaçante ? Le but pour nous est de parler le moins possible et de laisser la victime ou le témoin s’exprimer au maximum. Cela requiert une telle approche psychologique qu’il nous faut généralement une demi-journée pour dresser un portrait-robot. Il ne faut pas chercher à harmoniser le visage que l’on construit, ni essayer de guider la personne. Nous jouons les petites mains sans l’influencer. »