Partagé et alimenté par tous les SRIJ de France et l’IRCGN, le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) est incontournable et d’une efficacité indiscutable dans la résolution d’enquêtes judiciaires. La saisie, l’identification et la recherche de traces dans cette base requièrent un certain savoir-faire.
Une nouvelle réquisition arrive sur le bureau du chef du SRIJ. L’OPJ en charge de l’enquête sur la femme assassinée à son domicile fait de nouveau appel au service, mais cette fois pour comparer les traces papillaires retrouvées sur la scène de crime et les empreintes de la base de données du FAED. Seuls le SCIJ, les SRIJ et l’IRCGN sont habilités à y saisir, enregistrer et comparer des traces papillaires. En décembre 2015, cinq millions d’individus y étaient enregistrés, soit dix millions de paumes et 50 millions de doigts... « Nous avons donc la possibilité, à chaque fois que nous insérons de nouveaux éléments dans le fichier, de les comparer avec 60 millions de traces enregistrées », explique Armelle, l’une des sept habilités du service toulousain. La règle est simple : « Nous devons identifier douze points caractéristiques pour enregistrer une empreinte, sachant qu’une empreinte digitale en compte 100 et une paume de la main 1 000. »
Douze points caractéristiques ? « Il s’agit d’irrégularités visibles sur les crêtes et les sillons que nous repérons sur la trace, explique Armelle. Lorsque j’enregistre la trace dans le logiciel, je souligne un maximum de points, pas uniquement les douze. Le moindre fragment de trace exploitable est inséré, il est donc extrêmement important que nos collègues réalisent parfaitement la prise d’empreintes lors d’un placement en garde à vue d’un individu. Prendre une empreinte répond à une technique précise : avoir des doigts secs, sans sueur, et dérouler le doigt ». Il arrive parfois que les spécialistes de l’IJ n’obtiennent aucun résultat sur le FAED car les empreintes ont été mal prises au moment de la signalisation. « Ce n’est pas la trace en elle-même qui sera comparée au fichier, mais le nuage de points que nous avons soulignés lors de l’enregistrement », précise Armelle.
L’agent habilité compare les traces qu’il enregistre avec la base : tout d’abord au niveau régional, et si cela n’est pas payant au niveau national. Après comparaison, l’ordinateur affiche une liste d’empreintes pouvant s’apparenter à celle enregistrée. « À moi ensuite d’approfondir et de finaliser la comparaison. » Le logiciel exprime un score entre une trace et une empreinte et donne ainsi une probabilité de concordance. Aucun nom n’est indiqué mais un numéro de « candidat ». « Avec ce numéro, nous consultons ensuite un autre fichier qui nous révélera le nom de l’individu concerné. »
Si aucun résultat ne ressort de ces investigations, la trace est basculée dans une base de « traces non résolues ». Plus de 3000 traces non résolues y sont stockées chaque mois sur l’ensemble du territoire. « Chaque jour nous comparons une centaine de traces non résolues avec toutes les signalisations faites en France. Une trace peut donc être identifiée plusieurs mois après son enregistrement dans la base. » Le FAED peut conserver dans sa base les traces non résolues pour une durée de 15 ans et 25 ans dans certains cas. Des comparaisons avec les autres bases européennes sont également possibles. Ce fichier incontournable pour tout policier est issu d’un décret de 1987 et s’est avéré essentiel dans de nombreuses affaires. C’est notamment grâce au croisement dans le FAED d’une empreinte retrouvée sur une des bombes qui n’avait pas explosé dans le TGV Paris-Lyon, que Khaled Kelkal avait pu être identifié et mis en cause dans la vague d’attentats de 1995. Commun à la police et à la gendarmerie, le FAED est un atout apprécié des enquêteurs : tout peut être traité très rapidement, voire dans la concomitance du temps d’une garde à vue. D’ailleurs, une identification ressort indiscutablement de la comparaison de la trace prélevée quelques jours plus tôt dans notre enquête. De l’intervention à l’analyse en laboratoire, jusqu’au travail des spécialistes du FAED, l’identité judiciaire a développé tout son savoir-faire et son expertise pour apporter un soutien indispensable à la résolution de cette affaire. Dehors, les enquêteurs se précipitent dans leur véhicule. Ils vont immédiatement appréhender la personne mise en cause.
Merci qui ? Merci l’IJ !
Les personnels de l’IJ de Toulouse se sont spécialisés dans certains domaines pour faire face à des situations rares et extrêmes :
L’unité police d’identification de victimes de catastrophe basée à Écully forme des agents des SRIJ pour en faire des référents territoriaux dans le domaine. L’objectif est d’identifier les victimes à travers deux cellules : ante et post-mortem. La cellule ante -mortem collecte auprès des familles des renseignements qui vont aider à l’identification de leurs proches disparus. Le travail de la cellule post-mortem commence lors du relevage des corps sur la scène et se poursuit sur les chaînes d’identification souvent installées à l’institut médico-légal. Ce travail est tout à fait distinct de l’autopsie.
Un membre du SRIJ de Toulouse, ainsi qu’un OPJ de ce SRPJ, font partie de l’unité CONSTOX du SCIJ. Ils sont formés et habilités à réaliser des constatations en milieu contaminé NRBC, pour accomplir la même mission que sur une scène « classique ». En fonction de la menace, OPJ et « ijiste » se déplacent avec une tenue adaptée (combinaison filtrante, combinaison étanche et scaphandre) pour effectuer une mission extrêmement éprouvante, avec du matériel très lourd, un équipement, type ARI, très anxiogène compte tenu de la scène à examiner. Cette unité est composée de près de 70 personnels, enquêteurs de PJ et « ijiste ».
Diplômée dans le domaine en 2014, l’une des membres du SRIJ de Toulouse est l’une des rares scientifiques de la police spécialisée en anthropologie. Cette discipline consiste à se rendre sur un site où des ossements ont été découverts, de le traiter comme une scène de crime et d’analyser les ossements d’un point de vue biologique, comme lors d’une autopsie. Ce savoir-faire peut être un atout primordial pour déterminer les causes et circonstances d’un décès. Il permet de déterminer si les ossements sont d’origine humaine ou animale, de dater la mort, d’établir un sexe, un âge, d’estimer une taille, de mettre en évidence d’ éventuelles pathologies de la victime. Pour un enfant, ce seront les dents qui parleront ; pour un adolescent, la fusion des os, et pour un adulte, les critères de distinction sont visibles au niveau du bassin.