Les statistiques produites par le SSMSI reposent sur deux piliers qui se complètent et s’enrichissent : les données administratives et les résultats des enquêtes de « victimation ».
A) Les « données administratives » : Dans le cadre de leur activité judiciaire, les services de police et de gendarmerie rédigent des procédures relatives à des infractions avant de les transmettre à l’autorité judiciaire qui est susceptible de les requalifier par la suite. L’analyse de ces données permet de suivre l’évolution dans le temps de la sécurité en France. Elles fournissent des informations détaillées sur la localisation des infractions, les dates, les caractéristiques des victimes déclarées et celles des auteurs présumés. Ces infractions ont pu être enregistrées à la suite d’une plainte, d’un signalement, d’un témoignage, d’un flagrant délit, d’une dénonciation ou encore à l’initiative des forces de sécurité.
À partir de 1972, les services de sécurité (police et gendarmerie) se sont dotées d’un outil standardisé de mesure de l’activité judiciaire des services basé sur des comptages mensuels, appelé « État 4001 ». Au-delà de cet « État 4001 historique », les procédures enregistrées par la police et la gendarmerie nationales depuis 2016 fournissent des données détaillées sur les infractions enregistrées, les victimes associées et les mis en cause correspondants. Ainsi, le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) constitue des bases statistiques relatives aux infractions enregistrées, aux victimes associées et aux mis en cause correspondants.
Les données administratives découlent d’un processus de gestion ce qui signifie que ces bases de données sont toujours susceptibles d’être impactées par des changements de règles de gestion ou d’outils d’enregistrement. Ces déclarations administratives ne fournissent pas au SSMSI des informations directement diffusables au public. Il reste au statisticien tout un travail à réaliser en aval afin de pouvoir les exploiter car elles ne sont pas utilisables telles quelles (correction des doublons, imputation de données manquantes, mise en cohérence entre les outils de la police et ceux de la gendarmerie, définition d’unité statistique, etc.).
Ainsi le SSMSI effectue une mise en forme et une mise aux normes de qualité statistique des données. Elle vient se substituer à la mise en forme et à la mise aux normes administratives d’origine. Les bases ainsi constituées sont documentées et peuvent être exploitées pour élaborer des statistiques dont la méthodologie est définie et dont la production est reproductible par un tiers.
B) Les résultats des enquêtes de « victimation ». Ces enquêtes recensent auprès des ménages et des personnes interrogées divers éléments tels que les atteintes subies, les comportements en matière de signalement auprès des services de police et de gendarmerie, le sentiment d’insécurité et la satisfaction à l’égard de l’action des services de sécurité et de justice. En matière d’enquêtes de victimation, le SSMSI a conduit en 2021 l’enquête européenne Genre et sécurité(GENESE) sur les violences liées au genre. Depuis 2022, le SSMSI conduit l’enquête Vécu et ressenti en matière de sécurité(VRS) auprès d’un large échantillon de 200 000 personnes, de 18 ans et +, en France métropolitaine, Martinique, Guadeloupe et à La Réunion, dispositif piloté dans le cadre d’une large concertation. Avec l’appui de l’Insee, il a en effet conçu un protocole multimode innovant (internet, téléphone, papier) dans le cadre de la refonte de l’enquête Cadre de vie et sécurité [1] .
Les enquêtes statistiques de victimation permettent de compléter les faits de délinquance enregistrés par la police et la gendarmerie car les victimes d’infractions ne déposent pas toujours plainte.Ainsi, l’utilisation systématique des enquêtes de victimation en regard de ces statistiques issues de l’activité des services constitue un complément indispensable pour appréhender l’ensemble des facteurs tant conjoncturels que structurels qui caractérisent les phénomènes délinquants.
[1] L’enquêteCadre de vie et sécurité (CVS), réalisée chaque année de 2007 à 2019 et en 2021 par l’Insee en partenariat avec l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP, supprimé fin 2020) et le SSMSI (créé en 2014), avait pour objectif d’évaluer et de décrire les victimes d’infractions (cambriolages, vols, actes de vandalisme, violences physiques et sexuelles notamment) et de recueillir leur perception en matière d’insécurité. Elle était conduite auprès d’un échantillon de la population de 25 000 ménages.