Voeux aux personnels des préfectures et des sous-préfectures

26 janvier 2018

Discours de Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l'Intérieur, à l'occasion des voeux aux personnels des préfectures et des sous-préfectures, à Grenoble (Isère) le 26 janvier 2018


Seul le prononcé fait foi

Monsieur le secrétaire général,

Monsieur le préfet,

Mesdames et messieurs les sous-préfets,

Mesdames et messieurs les représentants des personnels des préfectures et sous-préfectures,

Mesdames et messieurs,

Je me réjouis d’être parmi vous aujourd’hui pour cette cérémonie des voeux aux personnels des préfectures et sous-préfectures. Elle m’offre l’occasion de témoigner de la fierté qui est la mienne de travailler au quotidien, aux côtés du ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, avec le réseau des préfectures et des sous-préfectures.

Je vous prie d’excuser le Ministre d'État qui a dû se rendre aux obsèques de son ami Paul Bocuse.

Vous appartenez à un réseau territorial puissant. Ce réseau permet au ministère de l’intérieur, et à travers lui, à tout l’Etat, d’assurer la gestion des crises et de l’urgence, comme la mise en oeuvre, sur le plus long terme, des politiques décidées par le Gouvernement. Il incarne un point de référence en matière de sécurités, mais est aussi le premier interlocuteur des collectivités et la cellule de base de l’administration territoriale de l’Etat.

Les préfectures et sous-préfectures, leurs personnels, leurs cadres et les membres du corps préfectoral constituent, pour le ministère et plus largement pour le Gouvernement, un atout et un levier incontournable pour mettre en oeuvre les politiques publiques et contribuer à la régulation administrative, économique et sociale du pays.

Voilà bien pourquoi, au sein du Gouvernement, je l’ai souvent constaté, nombreux sont ceux désireux d’adresser des messages, des sollicitations, aux préfectures et sous-préfectures. Ce grand réseau de l’Etat est parfois regardé avec envie, j’ai eu l’occasion de m’en rendre compte.

Voilà bien également pourquoi les préfectures occupent une place à part aux yeux des Français. Au coeur de nos territoires, le réseau préfectoral est en effet le miroir de l’État au quotidien, un État qui incarne la proximité, la continuité, l’autorité, un État qui est, en toutes circonstances et en tous lieux, le garant et le gardien de nos valeurs républicaines.

A ce titre, au travers de votre travail, de votre engagement de tous les jours au service de nos concitoyens, vous êtes tous, collectivement des héritiers, des ambassadeurs et des artisans de l’histoire, de l’identité et de l’image du réseau préfectoral. Vous pouvez en être fiers, vous devez en être dignes. Je connais, à cet égard, l’implication de la préfecture de l’Isère et de ses personnels, dans tous les sujets d’actualité.

Elle est, comme beaucoup d’autres, confrontée aux enjeux et difficultés de la gestion de flux migratoires d’importance. Elle assure, compte tenu des caractéristiques du territoire, un rôle essentiel en matière de sécurité civile et de prévention des crises. Comme l’ensemble du réseau, et peut être un peu plus encore, puisqu’elle est dotée d’un centre d’expertise et de ressources titres pour les permis de conduire, elle a enfin su se mettre en ordre de marche pour mettre en oeuvre une importante réforme de l’activité de délivrance des titres, dans le cadre du plan « préfectures nouvelle génération ».

En 2017, les préfectures ont démontré leur capacité à évoluer et à se réformer

Evidemment marqué par son histoire, le réseau des préfectures et sous-préfectures a été à l’avant-garde de la réforme de l’Etat. Cette capacité à évoluer est en quelque sorte une marque de fabrique des services préfectoraux. En effet, votre activité aujourd’hui n’a pas grand-chose à voir avec celle de vos prédécesseurs de l’après-guerre, chargés de remettre en place les services publics élémentaires. Elle ne ressemble pas non plus aux priorités des années 60 et 70 ; où il s’agissait de susciter et d’accompagner l’essor économique du pays ; ni même à celle des années 2000, où il fallait être l’artisan de la mise en oeuvre d’une nouvelle organisation territoriale du pays, avec une décentralisation renforcée.

Vos missions, vos responsabilités, ont beaucoup évolué. Par exemple, les politiques de prévention de la radicalisation et du terrorisme se sont largement construites autour de votre action. La création de directions de la sécurité dans les préfectures est venue en quelque sorte consacrer le rôle croissant joué par ces dernières dans les politiques de sécurité.

Face à la révolution numérique, qui bouscule les pratiques et fait évoluer les attentes des usagers, l’Etat local ne pouvait pas rester immobile. Voilà pourquoi, avec le plan « préfectures nouvelle génération », dont le déploiement s’achève, nous avons repensé l’organisation de la mission historique de délivrance des titres.

Cette réforme, qui a largement été construite et partagée avec les agents et leurs organisations représentatives, au plan central, comme dans chaque préfecture, poursuivait une ambition forte : numériser nos procédures, pour les simplifier, tout en les sécurisant, dans le respect du principe d’égalité d’accès de tous au service public.

Tout au long de l’année 2017, nous avons donc su, collectivement, déployer cette réforme :

  • dans un premier temps, la dématérialisation et la constitution de « CERT » a concerné les demande de cartes nationales d’identité et de passeports : 27 centres d’expertise et de ressources sont ainsi progressivement rentrés en fonction entre février et mars 2017
  • Ce mouvement a ensuite été étendu, depuis le 6 novembre 2017, aux permis de conduire et certificats d’immatriculation. Désormais, par ce moyen, 80 % des demandes sont traitées automatiquement, sans intervention d’un agent.

Avec la dématérialisation, le recours à de nouveaux fichiers, plus sécurisés, et la mise en place de nouveaux outils de détection de la fraude, ont permis d’augmenter la sécurité des titres délivrés, et de mieux lutter contre la fraude.

Dans le même temps, des milliers d’usagers ont bénéficié de gains de temps conséquents, en n’ayant plus à se déplacer aux guichets des préfectures. Ce sont ainsi d’ores et déjà 1,4 millions de demandes de cartes grises et plus de 660 000 demandes de permis de conduire qui ont été traitées de manière complètement dématérialisée. Comme pour toute réforme d’envergure, cela n’a évidemment pas été sans difficultés. On se souvient, que pour certains maires, l’abandon de missions d’accueil du public a pu être difficile, je m’en suis fait l’écho, lorsque j’étais sénatrice. Aujourd’hui ministre, je constate que les mairies qui ne délivrent plus de cartes d’identité peuvent avoir recours à des dispositifs de recueil mobiles, mises à leur disposition par les préfectures.

Toutes les préfectures en ont été équipées. Et si les mairies le souhaitent, elles pourront contribuer à réduire la fracture numérique, en déployant un nouveau service public d’aide à la demande de titres. Il suffit pour cela d’un ordinateur et d’un agent guidant les usagers. Ce nouveau service, vous l’avez aussi mis
en place à la préfecture de l’Isère, comme dans 300 autres préfectures et sous-préfectures en France. Concernant les cartes grises, des difficultés techniques sont apparues lors de la généralisation du dispositif. Ces dysfonctionnements ont été mal ressentis par les usagers, les premières semaines du déploiement. Une
partie d’entre eux sont liés à la complexité de la réglementation, ou aux particularités des demandes de certains usagers, tels que les importateurs de véhicules.

Leur résolution est en cours : elle mobilise, sous la conduite du secrétaire général, l’ensemble des équipes du ministère.

Je souhaite, à cette occasion, apporter tout mon soutien et mes remerciements à tous les agents, qui, en cette période de difficultés techniques, ont su, dans les services d’accueil, les standards, et dans les centres d’expertise, apporter leur compétence et leur dévouement à la résolution des problèmes rencontrés par les usagers. Le Plan préfectures nouvelle génération a également permis de renforcer les missions prioritaires des préfectures. Dans un certain nombre de domaines, en effet, la succession de suppressions de postes avait affaibli les préfectures.

Entre 2010 et 2017, 3 500 emplois ont été supprimés dans le réseau, soit l’équivalent de 17 préfectures de taille moyenne. Dans le cadre du plan préfectures nouvelle génération, quatre missions prioritaires ont été identifiées: la gestion des crises, la lutte contre la fraude, la coordination des politiques publiques et le conseil et le contrôle des collectivités locales.

Ce n’est pas pour autant que les autres missions des préfectures ne seront plus exercées : les publics étrangers ou demandeurs d’asile continueront d’être accueillis en préfecture et les services préfectoraux continueront de délivrer nombre d’autorisations administratives.

Mais pour ce qui concerne les missions prioritaires, outre des renforts en effectif, des évolutions concrètes ont dès 2017 été mises en oeuvre :

  • Notre organisation en matière de lutte contre la fraude a été revue. Dans chaque CERT, existe une cellule spécifique, en lien avec les référents départementaux
  • Dans toutes les préfectures, des directions de la sécurité ont été créés, pour rassembler moyens et compétences et permettre aux préfets d’exercer pleinement leurs compétences en matière de sécurité
  • Dans le domaine du contrôle de légalité, les équipements individuels informatiques des agents sont en cours de rénovation, tandis que les moyens du pôle de Lyon ont été renforcés
  • Au titre de l’expertise juridique, enfin, six pôles d’appui juridique ont été installés à Orléans, Dijon, Marseille, Limoges, Lille et Strasbourg. Deux autres, à Nantes et Toulouse, viendront compléter le dispositif

Changements d’organisation, mobilités, formations, diagnostics de carrières, ont été au coeur du chantier de la mise en oeuvre du PPNG.

Pour accompagner la réforme, nous avons organisé un repyramidage des corps et une promotion interne renforcée. D’ores et déjà, fin 2017, les préfectures, nous comptons 474 cadres A et 734 cadres B supplémentaires par rapport à la situation qui prévalait avant la réforme. Nous sommes au rendez-vous des objectifs : c’est autant de perspectives de carrière en plus pour les agents.

Nous avons également déployé un plan de formation exceptionnel, qui a bénéficié à plusieurs milliers d’agents et représenté un investissement de plus de 6 M€.

Mesdames et messieurs, si cette réforme a réussi, c’est aussi et surtout parce que la principale ressource des préfectures est la ressource humaine.

En 2017, les préfectures ont connu une activité dense et soutenue dans le domaine de l’asile et des titres de séjour

Comme vous le savez, la dynamique migratoire est particulièrement soutenue depuis deux ans. Votre activité, dans ce domaine, fait l’objet de toutes les attentions. L’exigence du Gouvernement, vis-à-vis des préfets et de leurs services est forte. Mais nous sommes conscients que votre engagement est à la hauteur de cette exigence. Je tenais à vous remercier, en mon nom et en celui du ministre d’Etat, pour votre expertise et votre professionnalisme, dans cette matière si difficile.

Le plan d’action gouvernemental relatif à l’asile et à l’immigration, visant d’une part à réduire les délais de traitement de la demande d’asile, et d’autre part à améliorer la lutte contre l’immigration irrégulière commence à produire des premiers résultats. Pour qu’il produise tous ses effets, les règles de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent évoluer. C’est l’objet d’un projet de loi sur l’asile et l’immigration qui sera prochainement soumis au Parlement.

Mais parce que tout n’est pas qu’affaire de textes, nous avons décidé également d’intervenir concrètement sur la situation des services chargés de cette politique :

  • en allouant des effectifs supplémentaires de personnels titulaires – 150 - aux services chargés de l’asile, des étrangers et de l’éloignement
  • en transférant les points de nouvelle bonification indiciaire libérés par la réforme des titres vers les emplois dans les services des étrangers qui n’en bénéficiaient pas. 26 000 points ont ainsi été redéployés
  • en déployant un plan de formation spécifique sur le droit et les procédures applicables aux étrangers, concernant aussi bien les personnels de préfecture, que les membres du corps préfectoral
  • en expérimentant de nouvelles méthodes de travail, par exemple la spécialisation dans des pôles régionaux de la conduite de procédures complexes, comme celles qui concernent le règlement « Dublin »

Enfin, pour aller plus loin, un groupe de travail partenarial avec les organisations syndicales, relatif à l'attractivité des services a été constitué dès la fin de l'année 2017. Il rendra ses conclusions à la fin du mois de mars.

Pour conclure, je souhaiterais enfin évoquer deux chantiers qui caractériseront 2018

Dans le cadre de la démarche Action Publique 2022 que le président de la République et le Gouvernement ont engagé à l’automne dernier, et à laquelle les agents sont associés, il nous est demandé d’interroger le sens de notre action, pour faire en sorte qu’elle réponde plus précisément aux attentes des Français.

Cette démarche doit également, et il nous faut l’assumer pleinement, dégager les économies de fonctionnement qu’impose la situation de nos finances publiques et les engagements pris par le Gouvernement.

Tous les ministères sont concernés. Les possibilités offertes par le numérique, notamment, sont considérables. Nous le savons bien, dans le réseau des préfectures, pour avoir été précurseurs dans ce domaine. Dans ce domaine, l’heure est encore aux consultations. Aucun arbitrage, aucune décision, n’ont été rendus. Je veux toutefois vous assurer d’une chose. Le ministre d’Etat, comme moi-même sommes particulièrement vigilants à ce que le modèle territorial où les préfets et les préfectures jouent un rôle central demeure. Nous portons cette conviction avec constance et force. Car nous pensons que les préfets sont les seuls à disposer de la légitimité interministérielle qui, le plus souvent, caractérise vos actions, et les mieux à même d’être les interlocuteurs des collectivités locales.

Pour cela, nous pensons que les leviers d’action et les capacités de décision des préfets doivent être renforcés :

  • c’est la raison pour laquelle nous avons demandé et obtenu que les instruments financiers déconcentrés que sont la DETR et la DSIL soient non seulement préservés, mais aussi désormais codifiés, et maintenus à leur niveau le plus élevé (1,6 Md€)
  • c’est aussi la philosophie qui inspire les dispositions désormais en vigueur dans 20 départements et qui permettent aux préfets de déroger à des normes réglementaires. Tout ne doit pas remonter à Paris : les préfets doivent pouvoir décider, à partir de leur analyse de la situation, de leur connaissance du terrain.

Le ministre d’Etat, tout comme moi, sommes convaincus que pour assurer le développement des territoires, mais aussi leur équilibre et leur cohésion, il est nécessaire d’avoir un Etat fort, avec des instruments nouveaux, et s’appuyant sur un réseau territorial solide : celui des préfectures et sous-préfectures.

Notre engagement en faveur de plus de déconcentration vous concerne par ailleurs très directement, mesdames et messieurs. Nous souhaitons en effet, dans le cadre d’action publique 2022, plus de déconcentration dans la gestion des ressources humaines de l’Etat. Cela vous permettra de diversifier plus aisément vos parcours de carrière, de faciliter les mobilités entre les services de l’Etat. Une telle organisation passera d’ailleurs sans doute par un rôle des préfectures renforcé dans la gestion des moyens de l’Etat.

Enfin, nous souhaitons, à l’instar de ce que nous allons mettre en oeuvre pour les collectivités territoriales, que l’organisation de l’Etat prenne mieux en considération la réalité des territoires.

Un territoire urbain n’a pas les mêmes attentes ni les mêmes caractéristiques qu’un territoire rural. Il en va de même pour un territoire de montagne. Notre organisation doit donc s’adapter à ces réalités et doit pouvoir être différente d’un département à un autre. Les collectivités locales le font déjà, l’Etat doit lui aussi pouvoir faire preuve de plus de souplesse en la matière. Il doit pouvoir, lui aussi, mettre en place des organisations différenciées sur le territoire national, lorsque cela est nécessaire. En 2018, nous réfléchirons donc à cela.

Mesdames et Messieurs,

Depuis ma prise de fonctions, je me suis beaucoup déplacée. Ce que chacun m’a dit, c’est que, partout où je me suis rendue, la préfecture, dans toutes ses composantes, a la confiance et l’estime de nos concitoyens et de leurs élus.

Nos ambitions pour les préfectures sont élevées, je vous l’ai dit. Elles sont le socle de l’administration territoriale de l’Etat. Dans un monde qui change, les préfectures ont vocation à continuer d’être un repère, pour nos concitoyens, pour les porteurs de projets, pour les élus locaux.

Permettez-moi donc, pour conclure, de former pour 2018 le voeu que les préfectures et leurs personnels continuent de démontrer par leur vitalité, leur engagement, leur dynamisme, toute leur capacité d’adaptation aux enjeux de de l’action publique et de la République.

C’est dans cet esprit que je vous adresse, Mesdames, Messieurs, tous mes voeux pour l’année qui s’ouvre devant nous.