Seul le prononcé fait foi
Monsieur le secrétaire d’Etat, cher Laurent,
Monsieur le préfet,
Monsieur le préfet, directeur général de la police nationale, cher Éric Morvan,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les directeurs centraux, directeurs et chefs de service,
Mesdames et messieurs les commissaires, officiers, gradés, gardiens, personnels administratifs et scientifiques et adjoints de sécurité,
Mesdames et messieurs les représentants des organisations syndicales,
Mesdames et messieurs,
Policier.
Quel engagement que d’être policier. Quelle responsabilité.
Policier, c’est répondre à chaque appel, mener des enquêtes, protéger l’ordre républicain.
Policier, c’est connaître un territoire, connaître les Français, agir sans relâche pour eux.
Policier, c’est accepter le risque, c’est accepter le danger et le prendre au service des autres.
Alors je veux ici saluer tous les policiers de France, les remercier. Leur engagement est difficile, éprouvant. Ils l’accomplissent avec courage. Nous devons en être conscients, ne jamais l’oublier.
Policier, c’est aussi avoir le droit de faire usage de la force pour combattre les troubles, pour mettre fin aux violences, pour protéger les populations, protéger les Institutions.
Ce droit, c’est une responsabilité lourde – la plus lourde qui soit. C’est prendre la mesure de la situation. C’est faire preuve, toujours, de discernement. C’est dompter ses sentiments, se maîtriser, analyser et agir avec mesure et proportionnalité.
Cela non plus nous ne devons pas le perdre de vue, car l’usage juste et proportionné de la force est ce qui sépare la démocratie de l’arbitraire, ce qui distingue l’ordre et la brutalité, c’est le fondement, aussi, de notre confiance avec les Français.
2020 n’a que quelques jours et pourtant, déjà, toute cette responsabilité et tout le poids de l’engagement de policier reviennent à nous.
Je pense à votre collègue, volontairement percuté par un fourgon qu’il tentait d’interpeller, dans la nuit de vendredi à samedi à Bron.
Je veux saluer son courage. Saluer ses camarades, choqués. Remercier les équipes médicales qui l’entourent.
Ce sont toutes les forces de l’ordre qui ont été touchées. C’est un rappel, aussi, terrible, difficile, à tous les Français, des risques que prennent nos policiers.
Je pense aussi, à cet instant, à votre collègue, gravement blessé à Marseille pour avoir voulu faire cesser un trouble sur la voie publique. Il n’était pas en service, alors. Mais il a montré que le courage et l’honneur ne s’arrêtaient pas aux heures sous l’uniforme. Il a montré tout l’engagement et le sens du devoir qui font l’âme des policiers.
Je n’ignore rien de votre travail. Rien de ce que vous avez accompli, parfois enduré. Mais en ces premières heures de 2020, je pense aussi à Cédric Chouviat, interpellé à Paris la semaine dernière et décédé dans des circonstances qui interrogent et doivent être éclairées.
Depuis un an, je le dis dans chacune de mes visites auprès des policiers et des gendarmes, et je le répèterai aussi longtemps qu’il le faudra : s’il y a un soupçon, il y aura une enquête. S’il y a une faute, il y aura une sanction.
Chaque interpellation, chaque opération, chaque journée est sensible quand on est policier. Chacune exige la même concentration, la même rigueur, la même exemplarité.
Policier ou gendarme, représenter les forces de l’ordre, c’est être un modèle, c’est assumer qui l’on est et porter son RIO. C’est être respectueux, même face à ceux qui ne le sont pas. C’est garder son sang-froid, même face à la provocation, même face à la haine, même face aux coups.
Ces mots, je les prononce avec détermination, avec solennité. C’est notre engagement, c’est notre promesse vis-à-vis des Français.
C’est l’honneur de la police qui est en jeu, on ne fait pas de croche-pied à l’éthique, sauf à s’abaisser, à abaisser la police.
Mais être respectueux n’est pas être passif, subir et laisser faire.
Vous incarnez l’ordre, vous êtes les seuls légitimes à pouvoir user de la force, mais avec proportionnalité, c’est la condition pour que jamais l’usage légitime de la force ne soit contesté. Nous devons être à la hauteur.
Oui, nous devons être à la hauteur, car nous avons beaucoup de défis à relever pour la sécurité des Français.
2019 a été une année éprouvante, intense, difficile.
Les débordements en marge de manifestations ont été nombreux. Nous avons dû évoluer, nous adapter, vite. La République a été menacée. Et si elle a tenu, elle le doit pour beaucoup à l’engagement sans faille des policiers.
L’année dernière, le terrorisme a encore frappé la France et touché la police en son cœur. Je pense aux victimes de l’attaque de la Préfecture de police – nous ne les oublierons pas.
Nous ne les oublierons pas et je veux rendre à cet instant hommage à tous les policiers tombés ou blessés. Ils sont 12 policiers décédés en service ou en mission cette année.
En 2019, comme tous les ans, la police a répondu présent à chaque événement pour assurer la sécurité des Français. Je pense à l’organisation du G7 qui a mobilisé des moyens importants. Je pense à notre lutte contre la drogue. Je pense à toutes les actions de nos policiers, à chaque instant en France, pour combattre la délinquance et le crime.
2019, surtout, a été une année d’avancées pour les forces de l’ordre, d’avancées pour notre sécurité.
Nous avons accéléré le déploiement de la police de sécurité du quotidien et 32 nouveaux quartiers de reconquête républicaine, avec des effectifs supplémentaires, ont été installés. C’est deux fois plus que ce qui était prévu à l’origine.
Nous avons lancé un plan ambitieux contre le trafic de stupéfiants. Avec la création de l’OFAST, notre action va être plus efficace, mieux organisée, plus coordonnée. Le trafic de stupéfiant est le cœur de la violence, le terreau fertile de toutes les délinquances.
Nous devons tous agir, partager l’information, travailler ensemble.
Je sais combien vous vous investissez dans ce combat. La semaine dernière, par exemple, au terme d’une enquête approfondie, une organisation criminelle a été démantelée.
106 kilogrammes de cocaïne ont été saisis et 4 personnes interpellées en métropole et en Martinique, grâce à votre travail et notamment celui de l’antenne de l’OFAST aux Caraïbes. Je peux vous assurer, aussi, de notre détermination, Laurent Nuñez et moi, à mener sans répit le combat contre les trafics.
2019 a été l’occasion, aussi, de nous engager résolument pour les conditions de travail de nos policiers.
59. 59, c’est le nombre terrible de suicides qui ont endeuillé notre police l’année dernière. Et dès les premières heures de 2020, un de vos collègues s’est ôté la vie.
Mais un suicide, c’est une personne, un homme, pas un chiffre. Le suicide est un sujet qui me touche particulièrement, vous les savez, mais au-delà, j’ai décidé d’actions fortes, résolues.
La cellule d’alerte prévention anti-suicide, la CAPS, a été créée. Elle coordonne nos actions et propose des idées nouvelles.
Deux numéros verts ont été mis en place, et il est désormais possible pour un policier d’être mis en relation avec un psychologue extérieur au service, 24 h sur 24 et 7 jours sur 7.
Nous avons décidé de former, aussi, tous les chefs de service. Ils seront ainsi en mesure de mieux appréhender la question du suicide.
Je crois que nous devons continuer sur ce chemin, accélérer nos efforts. J’y serai personnellement très vigilant.
2019 a été également l’occasion de gestes importants et de décisions fortes pour améliorer le métier de policier.
Le protocole du 19 décembre 2018 s’est mis en place et il a augmenté, sensiblement, les salaires. Entre le 1er janvier 2019 et le 1er janvier 2020, ce sont ainsi plus de 100€ supplémentaires par mois qui sont arrivés sur le bulletin de paie de chaque gradé et gardien.
A cette augmentation très nette s’ajoutent les effets du protocole PPCR : 466 millions d’euros en plus pour les gradés et les gardiens entre 2017 et 2022. C’est-à-dire, pour l’heure, déjà entre 70 et 200€ supplémentaires par mois pour chacun.
Dans les murs de cette école qui forme les officiers de police de notre pays, ainsi que de nombreux commissaires, je veux ajouter que les officiers et les commissaires n’ont pas été oubliés.
Des avancées statutaires significatives ont été obtenues récemment et de nouvelles sont sur le point d’être finalisées.
Ces hausses de salaires sont importantes mais nous ne nous sommes pas arrêtés là.
Nous avons engagé une réflexion prometteuse sur la question du maintien en poste dans les fonctions et dans les territoires.
La question des cycles horaires n’avait que trop attendu. Nous nous en sommes emparé et grâce à un travail de concertation fructueux avec les organisations syndicales, nous sommes parvenus à trouver un accord.
Depuis septembre, une expérimentation est lancée. Elle accorde à chaque policier un week-end libre sur deux. Il s’agit d’un week-end de trois jours. Et ce n’est pas tout, car les fonctionnaires de police bénéficient également d’un mercredi sur deux.
Cette expérimentation, c’est plus de temps libre, plus de temps de repos, plus de temps en famille. C’est casser le système précédent qui était devenu un fardeau pour l’Institution toute entière.
Enfin, ces derniers mois nous avons posé les fondements d’un autre chantier, laissé en jachère depuis bien trop longtemps. Fin 2019, 3,5 millions d’heures supplémentaires ont été remboursées.
C’est un premier pas, car j’en fais une nouvelle fois la promesse devant vous : toutes les heures supplémentaires seront, d’une manière ou d’une autre, remboursées.
Nous nous donnons les moyens de cet engagement et le budget 2020 prévoit le règlement de 26,5 millions d’euros pour les heures supplémentaires des effectifs hors CRS et 23 millions d’euros pour les CRS.
*
Mesdames et messieurs,
2020 commence et cette année sera l’occasion d’un changement à la tête de la Police nationale.
Monsieur le directeur général, cher Éric Morvan, vous m’avez fait part, il y a quelques temps déjà de votre souhait de faire valoir vos droits à la retraite. Je l’ai accepté et avec Laurent Nuñez, nous voulions vous remercier, vivement, pour votre service au profit de la police, au profit de nos concitoyens.
Tout au long de votre parcours, vous avez été un grand serviteur de l’État, un homme entièrement engagé au service des Français. Vous avez été à la tête de la police nationale pendant des années éprouvantes et vous pouvez être fier du travail accompli.
Votre successeur aura fort à faire, car dès cette année, nous allons poser les fondements de la sécurité du XXIe siècle.
Nous avons engagé une réflexion profonde et en concertation autour du schéma national du maintien de l’ordre. Il devrait permettre de proposer des méthodes nouvelles, pour appréhender mieux encore les évolutions de l’ordre public et des contestations. Nous le présenterons dans les semaines qui viennent.
Les travaux du Livre blanc sont en cours. Ils seront déterminants. Le Livre blanc va nous offrir un diagnostic complet de la sécurité intérieure aujourd’hui. Il va donner des pistes et proposer des solutions.
Quatre groupes de travail ont été formés, ils travaillent sur 4 questions structurantes pour la protection des Français.
Le premier porte sur nos organisations, afin d’améliorer, encore, nos méthodes et notre service public. Nous devons mener une transformation en profondeur de notre police nationale. Notre idée est claire : une police qui avance dans le même sens, sans rivalités ni fausses notes, et qui donne plus de latitude aux femmes et aux hommes du terrain pour construire une sécurité du sur-mesure, parfaitement adaptée aux territoires.
Le second porte sur le continuum de sécurité, sur la nécessité de bâtir une police du partenariat, avec la Gendarmerie et les services de renseignement, bien sûr, mais aussi avec les acteurs locaux, les collectivités, les acteurs privés.
Le troisième est chargé de se pencher sur la question des matériels et de revoir notre politique RH, pour garder notre attractivité, gérer nos carrières au regard des aspirations d’aujourd’hui et revoir notre formation.
Je parle de formation, bien sûr, avec d’autant plus d’intérêt et de fierté que je sais, depuis cette école nationale supérieure de la police, tout le travail mené par les équipes pédagogiques et les formateurs. Ils sont indispensables à toute notre police. Indispensables, ici, à Cannes-Ecluse, pour notre corps de commandement. Indispensables, aussi, sur le site de Saint-Cyr-au-Mont-d’Or pour nos commissaires.
Enfin, le quatrième groupe de travail du Livre blanc portera sur l’innovation et les nouvelles technologies, car je suis convaincu, comme vous tous, que nous devons garder un temps d’avance sur la délinquance.
Mais autour des quatre groupes de travail, nous avons voulu, avec Laurent Nuñez, une consultation, la plus large possible.
Une consultation des Français, notamment, et j’ai ouvert samedi dernier une conférence des citoyens pour recueillir leurs témoignages et leurs idées. C’est un exerce inédit au ministère de l’Intérieur, qui permet de faire des Français des bâtisseurs de leur propre sécurité. Un panel d’une centaine de personnes au reflet de la société française s’est réuni ce week-end et se réunira à nouveau dans deux semaines pour discuter du sujet crucial du lien entre les forces de sécurité intérieure et la population.
Ils me remettront leurs propositions le 25 janvier. Je les attends avec intérêt et je souhaite qu’elles soient prises en compte dans les conclusions du Livre blanc.
Une consultation des forces et des territoires, aussi, et c’est tout l’objet des Assises territoriales de la sécurité intérieure qui se dérouleront dans les semaines qui viennent dans chaque département.
Ensuite, 2020 devra être l’occasion de continuer la mise en place des politiques lancées.
Notre lutte contre le terrorisme ne faiblira pas. Nous accélérerons la lutte contre la radicalisation. Et je vous demande d’être particulièrement attentifs et vigilants dans notre combat contre le djihadisme et le repli communautaire.
Il s’agit d’une priorité de l’année 2020. J’ai réuni les préfets en fin d’année dernière et je les ai chargés de s’emparer totalement du combat contre le communautarisme. Les policiers en sont des acteurs déterminants et je vous demande d’user de tous les moyens légaux à votre disposition pour le mener.
Cette année sera l’occasion de continuer la mise en place de la police de sécurité du quotidien, bien sûr. En renforçant les partenariats sur le terrain et en multipliant les nouveaux projets.
La lutte contre les trafics de stupéfiants, aussi, et je l’évoquais tout à l’heure, doit encore se renforcer.
Je vous demande une vigilance intense et une lutte résolue contre toutes les formes de violences, qu’elles soient gratuites, racistes, sexuelles et sexistes, qu’elles visent une religion, un genre, une orientation sexuelle.
Toutes les victimes doivent être prises en charge. Toutes les victimes doivent être prises au sérieux et protégées. J’y tiens et je continuerai à suivre très attentivement nos avancées.
Mais je sais que nous ne pouvons rien faire si nous ne vous donnons pas les moyens de votre action. Le budget 2020 est un budget offensif pour notre sécurité.
Il est en nette augmentation pour la police, de 5% par rapport à l’année dernière. Il s’inscrit dans la continuité de l’engagement du Gouvernement depuis le début du mandat, car depuis 2017, le budget de la sécurité de notre pays a augmenté de plus d’un milliard d’euros.
Nous allons continuer à recruter aussi. Il y aura l’année prochaine près de 1400 policiers de plus sur nos rangs. C’est important. C’est une étape de plus pour arriver à l’objectif fixé par le Président de la République de recruter 10 000 policiers et gendarmes en plus d’ici 2020.
2020 sera également l’occasion de poursuivre notre plan immobilier et de poursuivre le renouvellement de votre parc automobile. Mon objectif est clair : vous donner tous les moyens d’agir.
Mais je n’oublie pas que cette année sera également celle de la réforme des retraites.
Cette réforme est utile, nécessaire. Elle permet de mettre en place un système universel, juste, pérenne. Elle est un engagement d’Emmanuel Macron, alors candidat, et elle sera une réalisation de ce Gouvernement.
Samedi, le Premier ministre a proposé un compromis ambitieux, accepté par les syndicats réformistes. Je veux saluer cette avancée, saluer le sens des responsabilités. J’ai espoir que nous puissions trouver une sortie rapide au conflit social autour de la réforme des retraites, dont je sais qu’il mobilise sur le terrain nos policiers pour assurer la sécurité de chaque manifestation.
Cette réforme, nous savons aussi les interrogations qu’elle a pu susciter au sein de la police. Depuis des mois, avec Laurent Nuñez, nous avons entendu vos remarques, vos revendications. Nous avons reçu les organisations syndicales de tous les corps de police.
Je veux le dire clairement. Je ne rentrerai pas dans le jeu des 7 différences entre police et gendarmerie. Nos forces ont leurs spécificités et leurs sujétions, mais elles ont en commun une chose : celle d’accomplir des missions dangereuses au service de la sécurité des Français.
Alors, comme je m’y étais engagé il y a plusieurs mois, cette dangerosité sera prise en compte dans le futur système universel de retraites et les policiers pourront continuer à partir plus tôt à la retraite sans perte de pension.
Je veux ajouter, aussi, comme c’est déjà le cas actuellement, que les fonctions qui ne sont pas spécifiques à la protection des populations feront l’objet d’une politique de substitution par des personnels administratifs, techniques et scientifiques. Et cette politique sera également appliquée aux militaires de la gendarmerie, selon le même calendrier.
Enfin, je veux avoir un mot pour les personnels administratifs et techniques. Ils sont précieux et indispensables pour notre police. J’entends leurs revendications, leurs aspirations. Elles concernent la réforme des retraites, bien sûr, mais la dépassent largement. Je crois aux vertus du dialogue et de l’action.
C’est donc ce que je compte faire et je souhaite que la discussion puisse se poursuivre, Laurent Nuñez a reçu les organisations syndicales mercredi dernier, et que des solutions puissent être trouvées.
*
Mesdames et messieurs,
L’année qui s’annonce est passionnante. Elle sera exigeante, aussi. Elle nous permettra de poser les fondements de la sécurité du XXIe siècle et de continuer à agir, résolument pour la protection des Français.
Elle sera une année de travail. Une année de transformation. Elle sera une année d’exemplarité, aussi. Une année de responsabilité, car face aux défis qui nous attendent, nous avons plus que jamais besoin d’entretenir un lien de confiance avec les Français.
Je compte sur vous, comme vous pouvez compter sur Laurent Nuñez et moi.
Je vous souhaite une belle année 2020.
Vive la République ! Vive la France !