Lutte contre les rodéos urbains

Lutte contre les rodéos urbains
25 mai 2020

Allocution de de M. Christophe Castaner, ministre de l'Intérieur, le lundi 25 mai au sujet de la lutte contre les rodéos urbains.


Seul le prononcé fait foi

Monsieur le ministre, cher Laurent Nuñez,

Mesdames les députées,

Mesdames et messieurs,

Je l’ai souvent souligné ces dernières semaines, les Français ont fait preuve depuis la mise en place du confinement d’un civisme remarquable dans le respect des règles sanitaires.

Cela rend d’autant plus insupportables ces démonstrations d’incivisme, ces tentatives d’intimidation et d’appropriation de l’espace public, ces nuisances inacceptables que sont les rodéos urbains.

Les rodéos urbains sont inadmissibles :

  • ils gâchent la vie des gens par le danger et la peur ;
  • ils font prendre des risques aux populations et les accidents peuvent être très violents : la semaine dernière, à Strasbourg, ce sont ainsi deux fillettes de 10 et 11 ans qui ont été percutées lors d’un rodéo ;
  • et j’ajoute que les auteurs, souvent jeunes se mettent eux-mêmes en danger. Car il arrive que des participants à des rodéos se blessent gravement, voire perdent la vie. Je pense à ce jeune homme, mort le 20 mai à Nantes, en faisant des acrobaties sur sa moto.

Les rodéos ne sont pas seulement une nuisance, ils sont une plaie. Ils ne sont pas seulement un danger, ils sont un délit. Alors nous avons décidé d’agir et d’agir fort, dans le cadre de la police de sécurité du quotidien.

Jusqu’en 2019, il n’existait pas de délit spécifique pour la pratique des rodéos et les policiers ne pouvaient que sanctionner les infractions au code de la route ou les mises en danger de la vie d’autrui, très difficiles à qualifier. Nous devions muscler notre arsenal juridique et à l’été 2018, nous avons adopté une loi qui nous donne les outils légaux nécessaires pour combattre vraiment les rodéos :

  • en créant un délit spécifique, adapté et qui a permis aux forces de l’ordre d’agir ;
  • en sanctionnant fermement les auteurs avec des peines pouvant aller jusqu’à 5 ans de prison ;
  • en les privant de leurs véhicules, grâce aux confiscations obligatoires des engins ayant servi à commettre ces infractions ;
  • en punissant, aussi, ceux qui sont bien souvent à l’origine des rodéos : ceux qui promeuvent et organisent des rodéos urbains peuvent être punis de deux ans de prison et 30 000€ d’amende.

Grâce à la loi de 2018, une action plus efficace a pu être menée et les résultats sont au rendez-vous.

Cette loi est ferme mais nécessaire. Elle permet d’attaquer les rodéos à tous les niveaux et de préserver des quartiers. Ainsi, depuis son adoption, ce sont 39 051 interventions des forces de l’ordre qui ont été réalisées et 3 596 infractions qui ont été relevées sur son fondement.

Mais nous ne pouvions pas combattre seuls les rodéos urbains. Nous avions besoin d’une action coordonnée avec les communes. C’est pour travailler en commun, pour mieux mener l’enquête, pour réussir une politique de prévention ambitieuse, aussi, que nous avons créé, partout où c’est possible, des cellules anti-rodéos.

C’est grâce à l’action de l’une de ces cellules, créée en août 2019, que 3 pilotes d’engins ont été interpellés au Havre les 10 et 11 mai, et que 5 motocross ont été saisies après plusieurs épisodes de rodéos durant le confinement.

Mais il est vrai que nous avons pu constater une recrudescence du nombre de rodéos pendant le confinement. Pendant les deux mois qui viennent de s’écouler, certains ont malheureusement cru qu’il pouvait profiter des rues vidées par la responsabilité et le civisme des Français pour s’adonner à des rodéos.

Au total, sur la durée du confinement les interventions pour des faits de rodéos urbains ont augmenté de 15%. Il ne s’agit pas nécessairement d’une hausse du nombre de rodéos mais d’un changement de pratiques : les rodéos en groupe plus importants, comme une bravade supplémentaire à la loi, se sont ainsi développés.

Nous ne nous sommes pas laissé faire : malgré le confinement, pendant ces deux mois, 337 infractions ont été relevées.

Je pense par exemple à ces deux interventions, à Évreux, les 12 et 26 avril, quand les rodéos s’étaient multipliés et que la police était intervenue, arrêtant 5 individus et saisissant 5 engins sur les deux opérations.

Sur le ressort de la Direction centrale de la sécurité publique, la lutte contre les rodéos urbains s’est traduite par plus de 30 opérations de police ayant permis d’interpeller en flagrance 33 auteurs de rodéos urbains, et la saisie de 80 deux roues motorisés.

Nouvelle preuve, s’il en était besoin, que la police et la gendarmerie ont contrôlé le bon respect du confinement partout sur le territoire, y compris dans les quartiers. On se scandalise à juste titre des rodéos, mais on oublie souvent de souligner les résultats obtenus par nos forces de l’ordre, je veux, avec Laurent Nuñez, leur rendre justice et les remercier. C'est la raison aussi pour laquelle nous étions présents ici, aux côtés de ceux qui, chaque jour, chaque nuit, sont mobilisés pour empêcher les rodéos. Et je veux le dire clairement : non, les auteurs de rodéos ne restent pas impunis.

Aujourd’hui, le travail continue.

Je pense à l’opération d’envergure et de qualité menée le 15 mai au nord de Paris qui a permis d’interpeller 8 personnes qui participaient à un rodéo urbain. 6 deux roues et une voiture ont été saisis. Au cours de cette opération, un policier avait été blessé, nous l'avons rencontré avec Laurent Nuñez, et nous avons voulu l'accompagner dans sa souffrance consécutive à son accident. Je voulais le saluer. Aujourd’hui, l’enquête avance et la justice est saisie. L’initiateur du rodéo a pu être identifié et comme 5 autres des participants, il a été déféré devant le tribunal de grande instance de Bobigny.

La semaine dernière, à Achères et à Trappes, trois auteurs de rodéos urbains étaient interpellés à bord d’une camionnette transportant des motocross.

Chacun doit comprendre qu’il est difficile et souvent même dangereux d’intervenir sur un rodéo urbain en cours. Alors à chaque fois que nous ne pouvons pas agir immédiatement, parce que ce serait trop dangereux, nous menons un travail d’enquête précis, rigoureux, ambitieux.

Lutter contre les rodéos urbains, c’est un travail de longue haleine et il exige de franchir à présent une nouvelle étape.

2018 et 2019 ont été des années d’appropriation de la nouvelle loi. Des années où les forces de l’ordre ont pu mieux sanctionner, mieux sévir, mieux agir. L’heure est arrivée de mettre en place un nouveau plan d’actions, plus ambitieux encore, plus global contre les rodéos urbains.

Nous devons relever, plus encore, le défi des saisies des véhicules, en nous appuyant davantage sur le renseignement et l’enquête judiciaire. Car en confisquant les motos, les quads et les scooters des délinquants, nous les privons de leur capacité à nuire. Car en menant des enquêtes fines et en montrant que les saisies sont systématiques, nous dissuaderons ceux qui voudraient se lancer dans ces courses du danger.

Nous devons réussir, aussi, à mettre en place un réel continuum d’action autour du rodéo :

  • travailler à la prévention en lien avec les collectivités et les associations ;
  • impliquer plus et mieux les polices municipales ;
  • œuvrer plus étroitement encore avec la Justice : voilà les objectifs de notre plan d’action anti-rodéos.

Pour y réfléchir, j’ai décidé de charger les députées Natalia Pouzyreff, ancienne rapporteure de la proposition de loi sur les rodéos urbains et Catherine Osson, parfaite connaisseuse du sujet, d’une mission sur notre lutte contre les rodéos urbains. Je compte sur elles.

Mesdames et messieurs,

Nous faisons bloc. Nous n’avons jamais cessé de nous battre pour la sécurité du quotidien. Nous sommes prêts, aujourd’hui, et déterminés à continuer avec force.

Je vous remercie.