Hommage funèbre aux trois militaires de la Gendarmerie nationale décédés dans l'Oise

Hommage funèbre aux trois militaires de la Gendarmerie nationale décédés dans l'Oise
29 décembre 2016

Discours de M. Bruno Le Roux, ministre de l'Intérieur, lors de l'hommage funèbre aux trois militaires de la gendarmerie nationale morts en service dans l'Oise le 23 décembre 2016 - Beauvais, le 29 décembre 2016.

- Seul le prononcé fait foi -

Monsieur le Ministre, Président du Conseil régional des Hauts-de-France,

Monsieur le Préfet,

Monsieur le Député,

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Mesdames et Messieurs les élus,

Mon Général, Directeur général de la Gendarmerie nationale,

Monsieur le Directeur central de la Sécurité publique,

Mon Général, Commandant la région de gendarmerie Hauts-de-France et la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Nord,

Mon Colonel, Commandant adjoint de la région de gendarmerie Hauts-de-France, commandant le groupement de gendarmerie départementale de la Somme

Mon Colonel, Commandant le groupement de gendarmerie départementale de l’Oise,

Mesdames et Messieurs les autorités judicaires, civiles et militaires,

Mesdames et Messieurs les officiers, sous-officiers et gendarmes adjoints volontaires d’active et de réserve, personnels civils du groupement de gendarmerie départementale de l’Oise, et plus spécialement de la compagnie de gendarmerie départementale de Méru et du Peloton de Surveillance et d’Intervention de la Gendarmerie de Méru,

Mesdames et Messieurs, et je me tourne bien sûr tout particulièrement vers les familles de Florian GUSTAVE, Yassaad BOUMSSIMRAT et Théo DELPIERRE.

C’est là une semaine noire que le ministère de l’Intérieur vient de connaître.

Une semaine durant laquelle six des siens, quatre gendarmes et deux sapeurs-pompiers, parmi les plus valeureux, ont trouvé la mort en service, à chaque fois dans des circonstances dramatiques et alors qu’ils accomplissaient leur devoir au service de la France et des Français. Leur disparition brutale nous a frappés d’une affliction d’autant plus cruelle qu’elle est venue nous saisir en ces jours de Noël où chacun d’entre nous s’apprête à partager un moment de bonheur simple en famille.

Le 23 décembre, il y a une semaine, le gendarme Florian GUSTAVE et les gendarmes adjoints volontaires Yassaad BOUMSSIMRAT et Théo DELPIERRE nous quittaient en effet à la tombée du jour, sur une route de l’Oise, lors d’un tragique accident de la circulation.

Alors que nos concitoyens se préparaient à fêter Noël, vos trois camarades veillaient. Ils étaient là, fidèles au poste et à leur mission. Fidèles à leur serment de protéger les Français en toutes circonstances. Fidèles à l’esprit et aux lois de la République. Leur unité était chargée de surveiller les commerces et les résidences à un moment de l’année qui est, hélas, propice aux vols et aux cambriolages. Ils étaient en patrouille, en mission de sécurité publique dans un secteur difficile, à Berneuil-en-Bray, lorsque leur véhicule a été violemment percuté par une camionnette qui arrivait en sens inverse, puis par une autre voiture.
Aujourd’hui, nous sommes tous rassemblés pour leur rendre un dernier hommage et accompagner leurs familles, leurs proches, leurs camarades, dans cette terrible épreuve. Car c’est bien toute la communauté du ministère de l’Intérieur qui est en deuil. C’est la Nation tout entière qui pleure la perte de trois de ses fils.

Le drame de vendredi dernier a coûté la vie à trois jeunes gens de valeur, profondément attachants, qui étaient à l’orée de leur carrière et qui avaient encore toute la vie devant eux. Chacun d’entre eux était une promesse. Leur mort représente une terrible injustice et une lourde perte pour la Gendarmerie nationale.
Mes pensées vont avant tout à leurs familles. Elles sont pour leurs parents qui vivent la douloureuse épreuve qu'est la perte d'un enfant. Elles sont pour leurs amis et leurs proches, qui ont partagé l’intimité et chéri l’amitié de Florian, Yassaad et Théo. Elles sont enfin pour leurs camarades du Peloton de Surveillance et d’Intervention (PSIG) de Méru – auquel tous trois appartenaient –, et plus largement pour le groupement de gendarmerie départementale de l’Oise.

En entrant dans la Gendarmerie nationale, Florian, Yassaad et Théo avaient fait le choix d’un métier exigeant, difficile. Ils n’étaient pas devenus gendarmes par hasard ni par défaut. Comme chacun d’entre vous, ils connaissaient les risques et les dangers, qu’ils acceptaient d’encourir. Comme chacun d’entre vous, ils accomplissaient une vocation, une noble vocation. Ils avaient tout simplement fait le choix de servir leur pays, l’Etat, la République. Ils étaient fiers de leur engagement, et ils avaient raison de l’être. Car, tout comme vous, ils étaient des « soldats de la loi ».

Le gendarme Florian GUSTAVE était un jeune homme brillant, travailleur, motivé, riche d'un avenir particulièrement prometteur. Dès 2012, il s’était engagé comme volontaire au 1er régiment de parachutistes d’infanterie de marine de Bayonne, unité d’élite des forces spéciales de l’armée de terre. Très vite, il avait cependant fait le choix d’une carrière dans la Gendarmerie nationale. En 2014, après avoir réussi le concours, il avait ainsi intégré l'Ecole des sous-officiers de gendarmerie de Montluçon, où déjà son sérieux, ses compétences, sa volonté de progresser, mais aussi son grand sens du service public, l’avaient fait remarquer de ses supérieurs.

Après sa formation, Florian a choisi de servir en région Picardie. En août 2015, il est ainsi affecté à la brigade territoriale autonome de Mouy, sur le ressort de la compagnie de Méru. Désireux de se spécialiser dans le domaine de l’intervention, c’est avec succès qu’il se présente aux tests régionaux de sélection, recevant, le 16 septembre dernier, son affectation au PSIG de Méru. Tirant profit de son expérience militaire de haut niveau, il s’est rapidement intégré dans cette unité, où il a su gagner l’estime de ses camarades et le respect de ses supérieurs, grâce à sa rigueur, son dynamisme et son goût de l’effort physique.
Il s'épanouissait dans ses missions au service des brigades territoriales de sa compagnie, n’hésitant jamais à venir prêter main forte à ses camarades lorsque la situation l'exigeait. Il aimait la Gendarmerie et il aimait son métier. A 25 ans, Florian venait d’obtenir le certificat d'aptitude technique consacrant sa capacité à devenir gendarme de carrière. Il avait enfin, et tout simplement, trouvé sa voie.

Yassaad BOUMSSIMRAT avait lui aussi fait le choix des armes pour servir son pays, la France. Engagé volontaire, le 3 février 2016, au sein du prestigieux Régiment de Marche du Tchad de Meyenheim (Haut-Rhin), il s’était, tout comme Florian, orienté finalement vers la Gendarmerie nationale. Devenu gendarme adjoint volontaire, il intègre, le 8 août dernier, l’École de gendarmerie de Tulle. Tout juste sorti de sa formation, originaire de la région, de Margny-Lès-Compiègne précisément, Yassaad a été immédiatement affecté au PSIG de Méru. Il n’aura eu le temps d’y servir que durant deux mois, particulièrement intenses. Passionné de voyages, grand sportif et toujours disponible, il s’était lui aussi parfaitement intégré parmi ses camarades.

Cet engagement dans la Gendarmerie, c’est aussi celui que Théo DELPIERRE avait choisi, dès la fin de sa scolarité au lycée. En septembre dernier, il avait rejoint l’Ecole de gendarmerie de Fontainebleau, au sein du détachement de Beynes, dans les Yvelines, comme gendarme adjoint volontaire, avant d’être affecté, le 10 novembre, au PSIG de Méru. Tout aussi passionné que Florian et Yassaad, grand sportif comme eux – il était ceinture noire de judo –, il manifestait déjà de très belles aptitudes qui l’avaient légitimement conduit à se porter candidat au concours d’entrée de l’Ecole de sous-officier. Il promettait de devenir à son tour un grand gendarme.

Le 23 décembre, Florian GUSTAVE, Yassaad BOUMSSIMRAT et Théo DELPIERRE sont allés au bout de leur engagement, au bout de leurs valeurs de courage et d’abnégation.

C’est grâce à des femmes et à des hommes comme eux que nous pouvons vivre dans une société régie par le droit et par les lois de la République. C’est grâce à eux que la loi du plus fort jamais ne triomphe. C’est grâce à eux que le juste et le faible trouvent protection.

A travers Florian, Yassaad et Théo, c’est donc aussi à l’ensemble des gendarmes et des policiers que nous rendons hommage, ces femmes et ces hommes qui n’hésitent pas à donner leur vie pour protéger celle de leurs concitoyens.

Cette année, dix-sept gendarmes ont été tués en service. Plusieurs milliers d’autres ont été blessés. Je pense bien sûr au gendarme Régis KESSLER, de la brigade de Matoury en Guyane, qui a lui aussi perdu la vie lors d’un accident de la route, ce même soir tragique du 23 décembre. Je pense au brigadier-chef Sharona RENFURM et au gendarme adjoint de réserve Kévine VAYABOURY, blessés au cours du même accident. Je pense au chef d’escadron Christian RUSIG, mortellement percuté, le 26 novembre dernier, par le véhicule suspect qu’il s’apprêtait à contrôler. Je pense à ces dix-sept gendarmes et à leurs familles dont le chagrin est aussi le nôtre. Leur disparition tragique rappelle à chacun d’entre nous, à chaque Français, les exigences et les risques qui s’attachent à votre métier.

Depuis janvier 2015, face à la menace terroriste, nos concitoyens ont pris pleinement conscience des sacrifices que les gendarmes et les policiers consentent pour garantir leur sécurité. De nombreux actes de courage et d’héroïsme ont été accomplis. Certains de vos collègues et camarades ont pris tous les risques. Quelques-uns d’entre eux y ont laissé la vie.

Mais cet héroïsme ne s’éprouve pas seulement lors des crises les plus graves, lorsque le pire survient et que le pays est attaqué.

L’héroïsme, c’est votre mission quotidienne.

C’est lutter contre la délinquance qui empoisonne la vie des Français dans certains territoires, et notamment ici, dans le département de l’Oise.

C’est lutter contre toutes les formes de violence et de criminalité, des plus insidieuses aux plus spectaculaires. C’est faire en sorte d’entraver les trafics d’armes ou de stupéfiants.

C’est lutter contre la violence routière.

C’est se retrouver confronté aux drames et aux noirceurs propres à toute société moderne.

C’est aussi faire face aux agressions inacceptables dont les forces de l’ordre sont elles-mêmes la cible.

C’est, enfin, comme vos trois camarades, répondre présent, de jour comme de nuit, en tout point du territoire national, à chaque fois que l’on fait appel à vous.

Le drame qui nous réunit ce matin nous rappelle donc une fois de plus tout ce que nous devons aux gendarmes et aux policiers.

Aujourd’hui, la République exprime sa profonde gratitude et sa reconnaissance à celles et ceux qui l’ont servie jusqu’au bout. En dépit de leur jeune âge, le gendarme GUSTAVE et les gendarmes adjoints volontaires BOUMSSIMRAT et DELPIERRE étaient de ces héros dont notre pays a besoin. A ces trois âmes bien nées, comme eût dit le poète, la valeur n’avait point attendu le nombre des années

Puisse l’exemple de leur bravoure et de leur dévouement inspirer la jeunesse de France.