Discours de M. Bruno Le Roux, ministre de l’Intérieur, à l'occasion de l'hommage funèbre au Lieutenant Pascal Hodeau à Milly-la-Forêt, le 2 janvier 2017.
- seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet délégué,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Monsieur le Président du Conseil d’administration du Service départemental d’Incendie et de Secours de l’Essonne,
Monsieur le Maire de Milly-la-Forêt,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Directeur général de la Sécurité civile et de la Gestion des crises,
Mon Colonel, Directeur départemental du Service d’Incendie et de Secours de l’Essonne,
Mon Colonel, Président de la Fédération nationale des Sapeurs-pompiers de France,
Mon Commandant, Président de l’Union départementale
Mesdames et Messieurs les autorités judiciaires, civiles et militaires,
Mesdames et Messieurs les officiers, sous-officiers, caporaux, sapeurs-pompiers, personnels administratifs et techniques du SDIS de l’Essonne, et tout particulièrement les sapeurs-pompiers du Centre de secours de Milly-la-Forêt,
Mesdames et Messieurs les bénévoles des associations,
Mesdames et Messieurs,
Chère Béatrice Hodeau,
Cher Jean-Marc Hodeau,
Chère Marine,
C’est de la plus triste des façons que la nouvelle année commence pour le ministère de l’Intérieur et pour l’ensemble de la communauté du secours et de la sécurité. Entre le 23 et le 26 décembre derniers, six des nôtres – deux sapeurs-pompiers et quatre gendarmes – ont perdu la vie en service, dans des circonstances particulièrement dramatiques. Six hommes qui avaient fait le choix de servir l’intérêt général et de consacrer leur vie à protéger celle de leurs concitoyens.
Leur disparition brutale nous frappe d’une affliction d’autant plus cruelle qu’elle est venue nous saisir au beau milieu de cette période des fêtes, entre Noël et Jour de l’An, où chacun d’entre nous s’apprête à partager ces réjouissances avec ses proches, en famille ou entre amis. Sans doute, comme l’affirmait un ancien Président de la République en d’autres circonstances tragiques, la joie et la douleur se mêlent-elles dans toute communauté humaine, nous rappelant ainsi que nul n’est à l’abri du malheur. Voilà pourquoi, ajoutait-il, le premier devoir de celles et ceux qui ont la chance d’être épargnés consiste à se montrer solidaires de ceux que le sort a frappés. Telle est la raison de notre présence à tous, ici-même, aujourd’hui.
Le 24 décembre, le lieutenant de sapeur-pompier Pascal Hodeau a trouvé la mort sur une route de l’Essonne, dans un accident de la circulation, alors qu’avec son équipe il se rendait en intervention sur un feu de cheminée. À Milly-la-Forêt, là où il était né, où il vivait et où il reposera désormais, nous sommes rassemblés, dans la peine et le chagrin, pour lui rendre un dernier hommage et célébrer l’engagement qui fut le sien, jusqu’au sacrifice ultime.
Pascal était un sapeur-pompier. C’était là un engagement de toute une vie, un engagement de chaque instant. Au service d’un seul et unique objectif – sauver des vies –, il réunissait sa vie professionnelle et sa vie associative, puisqu’il était à la fois logisticien magasinier au sein du Service départemental d’Incendie et de Secours de l’Essonne et sapeur-pompier volontaire au Centre de secours de Milly-la-Forêt. L’essentiel de son temps, il le consacrait donc aux autres et à sa passion du secours, celle-là même qui anime tous les sapeurs-pompiers de France, qu’ils soient professionnels ou volontaires, civils ou militaires.
C’était là la très grande fierté de Pascal. C’était là sa vie, faite de courage et d’abnégation, de solidarité et de générosité, mais aussi de risques assumés et affrontés avec lucidité. Sa mort tragique rappelle ainsi à chacun d’entre nous, comme à chaque Français, les exigences et les dangers qui s’attachent à l’activité de sapeur-pompier. Nos concitoyens en ont d’ailleurs conscience, eux qui n’hésitent jamais à vous manifester leur soutien et leur profonde gratitude.
La disparition du lieutenant Hodeau constitue une perte terrible pour sa famille, pour ses proches, pour ses camarades. Elle l’est aussi pour l’ensemble des sapeurs-pompiers de France, ces femmes et ces hommes qui accomplissent leurs missions avec une humanité et un dévouement hors du commun. Ces femmes, ces hommes sont nos héros. Ils sont des héros de la République, et Pascal Hodeau était l’un d’entre eux.
Aujourd’hui, c’est toute une famille, déjà cruellement meurtrie par le sort il y a quelques années, qui est à nouveau frappée par la douleur. Une famille à laquelle je veux dire toute ma compassion et toute ma solidarité. En cet instant, mes pensées s’adressent à vous, Béatrice, son épouse, et à vous, Jean-Marc, son frère. A vous aussi, Marine, sa fille, que Pascal aimait tant et dont il était si fier. Je pense à toute sa famille et à ses proches, à ses amis et à ses camarades, à toutes celles et ceux qui ont croisé ou accompagné son chemin. Sachez que, dans cette terrible épreuve, vous avez, et vous aurez toujours, tout mon soutien, comme celui de l’ensemble des sapeurs-pompiers de France. Votre chagrin est aujourd’hui le nôtre, et il est le mien.
Dans le véhicule où se trouvait Pascal, il y avait trois autres sapeurs-pompiers, appartenant eux aussi au Centre de secours de Milly-la-Forêt et tous trois sévèrement blessés : le sergent Nicolas Blandin et les caporaux-chefs Dimitri Rivière et Vincent Suard. Ils sont aujourd’hui parmi nous, et je veux leur adresser mes vœux de prompt et complet rétablissement.
Je sais que, depuis cette soirée tragique du 24 décembre, toute une communauté, dont Pascal était l’un des piliers, est rongée par un terrible chagrin. Pour chacun d’entre vous, c’est là un choc très profond auquel vous faites face. Je mesure combien cela va être difficile dans les jours et les semaines qui viennent. Mais vous allez tenir bon. Ce choc, cette douleur, ce traumatisme, vous allez les affronter, avec courage et fraternité. Car un Centre de secours, c’est une grande famille, et dans une famille, lorsqu’un drame survient, on se soutient, on se serre les coudes, on fait face ensemble. Au-delà de Milly-la-Forêt, ce sont tous les sapeurs-pompiers du département de l’Essonne qui se trouvent endeuillés. À vous tous, je veux apporter aujourd’hui le soutien de la Nation.
Je pense aussi, bien sûr, au sapeur-pompier de 1ère classe Emmanuel Regin, tué lors d’un accident de la circulation, à l’aube du 26 décembre dernier, alors qu’il se rendait au Centre de secours d’Aulnay-sous-Bois, où il allait prendre sa garde. Incorporé à la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) depuis le mois de mai dernier, il servait également comme sapeur-pompier volontaire au Centre de secours de Saint-Avold, dans le département de la Moselle. Tout comme Pascal, il avait voué sa vie au secours et à la protection de ses concitoyens.
Aujourd’hui, nous adressons également une pense émue à sa famille, à ses proches et à ses camarades de la BSPP, d’Aulnay-sous-Bois et de Saint-Avold.
Les sapeurs-pompiers de France paient un lourd tribut à la protection des Français. Il convient de ne jamais l’oublier. Pascal Hodeau le savait, lui qui avait toujours souhaité devenir un sapeur-pompier, vivre et travailler dans cet univers du secours et de la protection.
Pascal était en effet un homme passionné, un homme de cœur et de confiance, efficace et solide, sur qui l’on pouvait toujours compter lors des interventions difficiles. Cette vocation, il l’avait embrassée très jeune, à l’âge de 17 ans, en avril 1980, lorsqu’il s’était engagé comme sapeur-pompier volontaire de 1ère classe au Centre d’incendie et de secours de Milly-la-Forêt. Depuis lors, il n’avait cessé de se consacrer à cette belle et noble passion, protéger et sauver des vies.
Au cours de toutes ces années, Pascal a gravi tous les échelons, il a occupé toutes les fonctions ou presque, au sein du Centre de secours, que ce soit sur le plan institutionnel ou sur le plan associatif, avec la présidence de l’amicale pendant de nombreuses années, qui est une fonction centrale dans la vie de la communauté. Son courage, son savoir-faire, sa parfaite maîtrise technique, ainsi que sa très grande disponibilité, expliquent qu’il a finalement été nommé, en juin 2012, lieutenant de sapeurs-pompiers volontaires, avant de se voir proposer, il y a exactement un an, d’assumer les fonctions d’adjoint au chef du Centre de secours de Milly-la-Forêt. Oui, comme je l’ai dit, Pascal était un véritable pilier.
Charismatique, tenace, doué d’une volonté de fer, il s’est illustré à plusieurs reprises en intervention, dans le département de l’Essonne comme en d’autres points du territoire national. Je pense ainsi à sa participation à la colonne envoyée en renfort contre les feux de forêts dans le Sud-Est du pays, au mois d’août 1986.
Profondément convaincu de la nécessité de transmettre sa passion et son savoir-faire aux jeunes générations, Pascal avait également longtemps été responsable des Jeunes Sapeurs-Pompiers au sein du Centre de Milly-la-Forêt. Il les avait formés, il leur avait, au fil des années, inculqué les valeurs de respect, d’entraide, de rigueur et de solidarité. Pour nombre d’entre eux, il était resté comme un repère, pour qui ils conservaient gratitude, respect et affection. Ils étaient nombreux à avoir bénéficié de ses conseils et de ses enseignements, permettant à certains d’entre eux de continuer leur chemin dans le monde de la sécurité civile.
Parallèlement à son engagement parmi les sapeurs-pompiers volontaires, Pascal Hodeau poursuivait, comme je l’ai dit, une carrière professionnelle au sein du Service départemental d’Incendie et de Secours de l’Essonne, où il était pleinement investi. Adjoint technique principal de 2e classe, il était tout particulièrement chargé de l’habillement des personnels et des matériels mis à leur disposition. À ce titre, il était l’une des premières personnes que chaque nouveau sapeur-pompier rencontrait, l’un des tout premiers visages qu’il découvrait, lors de son arrivée au sein du SDIS. Voilà pourquoi tout le monde le connaissait et l’appréciait dans la communauté des sapeurs-pompiers du département. Il était une personnalité connue, reconnue et respectée, qui jouait un rôle absolument indispensable au sein du SDIS.
Dans les missions opérationnelles qu’il a assumées au Centre de secours de Milly-la-Forêt, en tant que sapeur-pompier volontaire, comme dans les fonctions support qui ont été les siennes auprès des sapeurs-pompiers de l’Essonne, le lieutenant Pascal Hodeau n’a jamais cessé de faire preuve, tout au long de sa carrière, d’un très grand sens du service public et de l’effort collectif. Il aimait les gens, ses concitoyens, ses camarades. Il aimait la convivialité et le contact humain. Il aimait découvrir, apprendre, transmettre. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il était aussi très engagé dans la vie associative de sa commune. Pascal ressentait le besoin d’agir pour les autres. Il ne concevait pas la vie autrement. Il était un homme bien, il était un homme de bien. Votre présence aujourd’hui, sur cette place, en témoigne, vous qui êtes venus en si grand nombre pour lui rendre hommage.
Le 24 décembre, c’est une vie belle, riche et généreuse que la tragédie est venue injustement briser.
En considération de son engagement, le lieutenant Pascal Hodeau sera dans un instant promu à titre posthume au grade de capitaine. Il sera également cité à l’Ordre de la Nation, nommé chevalier dans l’Ordre national du Mérite et décoré de la Médaille d’or pour actes de courage et de dévouement.
En cette période si difficile pour notre pays, chaque Français peut méditer sur la signification profonde de la vie qu’avait choisie Pascal, une vie placée sous le signe du service de la République et de ses valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité.
Pascal Hodeau et ses frères d’armes, ses frères de sang, constituent des exemples pour chacun de nos concitoyens. Voilà pourquoi, aujourd’hui, à l’occasion de la cérémonie qui nous rassemble, c’est la Nation toute entière qui exprime sa gratitude et sa reconnaissance à celles et ceux qui la servent jusqu’au sacrifice. Pascal Hodeau était l’un d’entre eux. Il demeurera à tout jamais dans notre mémoire.