Sécurité bâtimentaire : la PP veille !

Sécurité bâtimentaire : la PP veille !
22 janvier 2018

Les missions du service des architectes de sécurité de la préfecture de Police, service sans équivalent au sein du ministère de l’Intérieur, relèvent de la compétence de la direction des transports et de la protection du public, et plus particulièrement de la sous-direction de la sécurité du public. Trois questions à Christophe Aumonier, à la tête de cette sous-direction atypique et de haut niveau technique, chargée de la sécurité et de l’accessibilité du bâti parisien.


Civique : Paris est l’une des villes les plus densément loties d’Europe, et la plus densément peuplée du pays. Dans ce contexte, quelles missions incombent à l’État en matière de sécurité bâtimentaire et quelles sont les caractéristiques et l’organisation de votre sous-direction ?

Christophe Aumonier : La sécurité bâtimentaire recouvre deux notions principales, la vérification du respect des normes de sécurité incendie et d’accessibilité des établissements recevant du public (ERP) d’une part, et le traitement des périls d’immeubles de l’autre. En dehors de Paris, ces missions appartiennent au maire. À Paris, du fait à la fois de la spécificité de l’organisation administrative de la capitale et de celle de son bâti, cette mission était historiquement de la compétence de la préfecture de Police. La récente loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain organise le transfert de certaines compétences de la préfecture de Police à l’administration municipale (voir encadré).
Dans ce domaine, les missions qu’assure la sous-direction de la sécurité du public (SDSP) forment un ensemble cohérent : nous suivons le bâti parisien de sa « naissance » à sa « mort », c’est-à-dire de l’instruction des permis de construire ou des permis d’aménagement jusqu’aux éventuelles démolitions d’édifices en péril – désormais pour les immeubles qui ne sont pas à usage principal d’habitation -, en passant par la vie « normale » des ERP, les autorisations d’ouverture, les visites et contrôles périodiques, les éventuelles décisions de fermeture, etc. Cette compétence concerne les petits comme les très grands projets. Aujourd’hui, ce sont donc pas moins de 60 000 établissements recevant du public (établissements scolaires, musées, théâtres et salles de spectacles, établissements de santé, équipements sportifs, lieux de culte, gares, etc.) qui sont sous notre responsabilité ! 

Aussi, pour mener à bien ces missions, la SDSP est organisée en trois bureaux administratifs (bureau des  établissements recevant du public, bureau des hôtels et foyers, bureau des permis de construire et ateliers) et deux services de contrôle (service des architectes de sécurité et service d’inspection de salubrité et de prévention des risques). En tout, ce sont près de 200 agents, d’une grande technicité et d’un haut niveau professionnel, qui composent cette sous-direction atypique, cadres administratifs, architectes, ingénieurs et techniciens. Nous bénéficions également du concours de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), du laboratoire central de la préfecture de Police (LCPP) et d’un service de police spécialisé, le service opérationnel de prévention situationnelle (SOPS).

Civique : Comment votre action s’insère-t-elle dans l’évolution d’une ville aussi importante que Paris, où le bâti est en perpétuel chantier ?

Christophe Aumonier : Au-delà de la prévention et du contrôle, le rôle de la sous-direction de la sécurité du public, c’est avant tout l’accompagnement des projets. Et d’abord, l’accompagnement économique : nous sommes là pour que les établissements qui reçoivent du public, les commerces, les lieux de vie et de culture, fonctionnent. Si nous sommes chargés d’appliquer les dispositions légales et réglementaires en matière de sécurité et de sûreté, nous ne sommes pas là pour mettre des bâtons dans les roues ! Au contraire, nous nous assurons que toutes les conditions sont réunies pour accueillir résidents, touristes et visiteurs en toute sérénité. Ainsi, la situation de chaque établissement est étudiée au cas par cas, l’évaluation du risque réel et de la dangerosité entrant en ligne de compte autant que le strict respect des règlements. On s’efforce de trouver des solutions pour « sortir » un dossier tout en garantissant le niveau de sécurité. Cet accompagnement se traduit de différentes manières. La première, c’est l’ouverture du service vers l’extérieur, que ce soit pour les grands opérateurs de travaux publics, les professionnels du bâtiment et même les simples particuliers. C’est d’ailleurs ce qu’assurent nos architectes de sécurité lorsqu’ils reçoivent, tous les mardis, toute personne concernée par un projet pour des consultations gratuites dans nos locaux, quai de Gesvres. C’est une vraie mission de service public que la préfecture de Police perpétue au bénéfice des Parisiens ! Et le succès est au rendez-vous puisque, chaque semaine, 200 à 300 personnes viennent ainsi chercher les conseils de nos hommes de l’art. L’accompagnement se manifeste aussi par un suivi thématique dit « grands comptes » pour certains ERP particuliers comme les hôpitaux, les lycées, les lieux de culte ou encore les musées et les salles de spectacle.

L’accompagnement, c’est aussi être vigilant sur le plan de la sécurité incendie. Ainsi, plus de 2 400 ERP à caractère festif ont été recensés sur Paris et font l’objet de contrôles qui se traduisent par des mises en demeure et des fermetures. L’accessibilité aux personnes handicapées est aussi une de nos priorités. En 2016, la réforme de l’accessibilité est devenue une mission à part entière de la direction qui s’est mise en ordre de bataille, avec une mobilisation exceptionnelle des effectifs, pour rendre accessibles les 60 000 ERP parisiens.

Enfin, l’accompagnement s’effectue également pour les établissements de taille importante, dits de 1re catégorie, où des dispositions particulières doivent être prises en matière de sûreté. Sur ce volet, nous travaillons directement avec le service opérationnel de prévention situationnelle (SOSP). Ce service de police nous apporte de précieux conseils en termes de protection bâtimentaire, dans un contexte sensible de risques terroristes. Mais les mesures nécessaires de sûreté et de protection sont parfois antagonistes avec les dispositifs légaux et réglementaires en matière de sécurité incendie ou d’accessibilité ! C’est tout l’enjeu des groupes de travail auxquels nous participons, pour essayer de faire coïncider tous ces impératifs de sécurité.

Civique : Quel bilan peut-on dresser de l’activité de votre sous-direction ?

Christophe Aumonier : D’une manière générale, l’activité de la SDSP est en constante augmentation. Avec plus de 6 200 dossiers d’aménagement et de permis de construire instruits en 2016, ce nombre est en hausse de 15 %. Mais le résultat est concret : sur ces trois dernières années, la sous-direction a accompagné des dossiers majeurs et des chantiers de grande envergure comme seule la capitale peut en compter. Pour ne citer qu’eux, la COP 21 et l’EURO 2016, la Philharmonie au parc de la Villette, la canopée des Halles, le nouveau siège des états-majors des armées à Balard, la rénovation de l’ancien palais omnisport de Paris-Bercy, le nouveau Parc-des-Princes, l’auditorium de Radio-France, la fondation LVMH au bois de Boulogne, la nouvelle cathédrale orthodoxe au pied du pont de l’Alma, le chantier de la nouvelle cité judiciaire des Batignolles, sans compter la rénovation de lieux mythiques comme le Bataclan, l’Elysée-Montmartre ou encore la salle Pleyel... sont autant de projets emblématiques du Paris de demain pour lesquels la préfecture de Police a pris pleinement sa part.

Nul doute que l’expertise et la vigilance des agents de la sous-direction sera mise à profit pour préparer les JO 2024, qui seront l’occasion de nouveaux permis de construire et de manifestations festives de grande ampleur pour lesquelles la sécurité des Parisiens et des visiteurs venus du monde entier seront notre priorité.

L’activité 2016 de la SDSP en quelques chiffres

  • 1 633 commissions de sécurité réalisées ;
  • 6 252 dossiers d’aménagement et permis de construire d’ERP traités ;
  • 6 038 avis techniques délivrés par les techniciens du service d’inspection de la salubrité et de la prévention du risque incendie ;
  • 14 243 dossiers traités par le service des architectes de sécurité ;
  • 13 254 personnes reçues par les architectes de sécurité ;
  • 1 097 signalements reçus au titre des périls ;
  • 985 visites d’hôtels au titre de la sécurité incendie ;
  • 1 800 manifestations festives instruites.

Transfert de missions à la mairie de Paris : quel impact pour la SDSP ?

La loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain impacte directement la sous-direction de la sécurité du public. Son article 25 prévoit en effet le transfert à la Ville de Paris des missions « péril en immeubles à usage principal d’habitation » et « salubrité des bâtiments à usage d’hébergement » (hôtels de tourisme ou à vocation sociale, résidences hôtelières, foyers...). Seuls les périls dans les immeubles qui ne sont pas à usage principal d’habitation (ERP, bureaux, entrepôts...) restent dans le giron de la préfecture de Police. Cette compétence, qui est transférée à la direction du logement et de l’habitat de la mairie de Paris depuis le 1 er juillet 2017, s’est accompagnée d’un transfert de 24 agents. L’expertise technique s’agissant de la mission péril est également transférée à la Ville sous la forme d’une mise à disposition du service des architectes de sécurité pour 10 % de son temps et fait l’objet d’une convention. Le service des architectes de sécurité reste sous l’autorité hiérarchique du préfet de Police puisque 90 % de ces missions restent à la SDSP.

Sur la compétence ERP des plateformes aéroportuaires de Roissy, du Bourget et d’Orly, l’article 33 de la loi prévoit que le préfet de police détient les pouvoirs de police municipale sur les aéroports, mais également tous les autres pouvoirs de police générale municipale, dont les risques d’incendie et de panique dans les établissements recevant du public. Le préfet de Police, à l’instar du maire, se trouve donc également, investi de pouvoirs de police spéciale, en l’espèce, celle des établissements recevant du public.

Cette disposition est applicable depuis le 1er mars dernier pour la plateforme de Roissy - Le Bourget et le sera à compter du 1 er janvier 2018 pour la plateforme d’Orly. Cette compétence de police administrative recouvre la surveillance de 1 500 ERP de taille importante (hôtels, tours de contrôles, magasins, aérogares et gares, etc.).