Les chiens, maîtres-chiens, hommes-assistants, dresseurs et moniteurs canins de la Police nationale sont formés au Centre national de formation des unités cynotechniques (CNFUC) à Cannes-Écluse, en Seine-et-Marne, depuis 1965.
Chaque année, environ 120 conducteurs cynotechniciens et 110 chiens sont formés.
« Les chiens sont achetés par le CNFUC et affectés aux moniteurs et dresseurs cynotechniciens pour assurer leur formation. À la fin du stage, le binôme maître et chien est validé, l’animal devient alors propriété de la direction d’emploi dont dépend son unité d’affectation », explique Delphine M., capitaine de police et chef du CNFUC. Les premières semaines des chiens à Cannes-Écluse sont réservées au « débourrage », afin de les préparer au dressage et d’observer leur caractère. Puis à l’arrivée des stagiaires, les formateurs doivent déceler rapidement la personnalité des nouveaux conducteurs canins pour former les binômes. Dès lors, ils ne se quitteront plus ! « Timides, agités, extravertis… nous observons les collègues pour former un équilibre : si le chien est nerveux par exemple, nous l’associons avec un policier calme, explique le major Jean-Marc L., adjoint à la chef du CNFUC et responsable technique des formations. Il faut aussi qu’il y ait un feeling avec le chien, nous appelons ça le « mariage ». Dans tous les cas, ce sera toujours le policier qui devra s’adapter au chien et non l’inverse ». Les 23 personnels du CNFUC dispensent les formations de conducteur cynotechnicien en défense-intervention, recherche de produits stupéfiants, d’explosifs, d’armes et de munitions, recherche de personne disparue, ainsi qu’homme-assistant, dresseur et moniteur. Chaque stage dure douze semaines, quatorze pour les stages de recherche d’explosifs.
Les chiens de défense et d’intervention sont préparés à affronter toutes situations rencontrées en patrouille ou sur des opérations. « En police, nous utilisons la « frappe muselée », qui sert à repousser les individus récalcitrants, et permettre de neutraliser l’individu, indique Rémi, conducteur canin à la brigade canine de Nanterre et homme-assistant stagiaire. Si le chien n’a pas de muselière, il est conditionné pour ne pas attaquer au visage et aux mains. Nous démuselons le chien uniquement dans le cadre de la légitime défense ». Le chien est éduqué à répondre aux commandements réglementaires en usage dans la Police nationale : « Attaque ! », il saute sur sa cible ; « Halte ! », il lâche sa prise au mordant et cesse l’attaque ; « Garde ! » ou « Place ! », il se couche entre les jambes de la personne interpellée.
Depuis 2000, des femelles sont sélectionnées au CNFUC. « Ce qui change, c’est le rapport à l’humain : la femelle a l’instinct maternel de défendre son maître, le mâle va le défendre mais pour la rivalité, la compétition », termine Jean-Marc.
Le chien cherche l'odeur, gratte et son maître lui donne son jouet en récompense.
La technique d’apprentissage est très semblable pour les chiens spécialisés en recherche de stupéfiants ou d’explosifs : « Nous faisons jouer le chien avec un objet (son « jouet », une sorte de poupée tressée), que nous avons mis en contact avec du produit, par exemple du haschich pour les chiens stup. Le chien intègre cette odeur, puis on dissimule son jouet et il va chercher l’odeur. Ensuite nous faisons la transition : on cache du produit, on montre le jouet au chien et il cherche l’odeur. Quand il trouve, on lui donne son jouet en récompense », décrit Jean-Marc. Sur des produits stupéfiants, le chien gratte pour marquer. Quand il s’agit d’explosif, le marquage doit être passif : le chien se couche. « Les techniques d’investigations sont également un peu différentes : en stup, le maître-chien peut aider son animal dans sa recherche en déplaçant des objets, alors qu’en explo nous travaillons de façon plus méthodique et sans toucher à rien ».
Concernant les armes et munitions, les chiens apprennent à rechercher une odeur de poudre brûlée, « car mêmes neuves, les armes sont passées au banc d’essai et ont tiré une fois » précise Jean-Marc. Lors des stages, les conducteurs s’entraînent à interpréter chacun des changements de comportement du chien, « et il faut bien regarder la truffe pour savoir s’il renifle, car il peut nous duper ! », signale un moniteur.
Les hommes-assistants sont formés pour entraîner les chiens de leur brigade une à deux fois par semaine. Protégés par une imposante combinaison, les stagiaires excitent l’animal et simulent des individus violents. « Nous respectons des positions techniques à adopter pour entraîner le chien, explique Loïc, homme-assistant stagiaire et conducteur cynotechnique de la brigade de Tours. Nous accoutumons les chiens aux coups de feu et aux bruits, afin qu’ils deviennent indifférents aux menaces de tout ordre. Sur une intervention, ils doivent intervenir sans appréhension ».
Le CNFUC exporte ses savoirs à l’international et reçoit régulièrement des stagiaires étrangers.
Coté gendarmerie, c’est à Gramat, dans le Lot, qu’est situé le centre national d’instruction cynophile de la gendarmerie (CNICG) depuis 1945. « Nous recrutons et formons les chiens ainsi que les techniciens cynophiles de sécurité intérieure (maîtres de chien), les hommes d’attaque et moniteurs, ainsi que les officiers cynophiles et les conseillers techniques régionaux », explique le colonel D., commandant le CNICG. Les seize technicités cynophiles y sont enseignées, dont certaines rares et spécifiques à la gendarmerie : la recherche de restes humains, de traces de sang humain effacés sur une scène de crime, ou encore la recherche de produits accélérateurs d’incendie. « Nous éduquons certains chiens sur plusieurs matières : les chiens « SAMBI », pour « stupéfiants, armes, munitions et billets de banque ». Ils permettent de travailler sur de la criminalité organisée », précise le colonel D. Enfin, des gendarmes adjoints volontaires reçoivent une formation de suppléants maîtres de chiens de cinq semaines, afin d’aider l’équipe cynophile en brigade.
Floriane Boillot