La lutte contre les drones malveillants est lancée

Drone volant à côté de la Tour Eiffel © MIPAN-Viche81 - Fotolia
22 janvier 2016

Chargé de mission à la direction générale de la Gendarmerie nationale, le colonel Jérôme Bisognin évoque la menace des drones malveillants et les réponses qui peuvent être apportées.


Civique : Les drones nous menacent-ils ?
Jérôme Bisognin : Lors de récents travaux sous l’égide du secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN), un groupe de travail a été spécialement dédié à l’analyse de cette menace. En effet, facile à mettre en œuvre et à bas coût -moins de 1000 € pour un microdrone -, elle peut occasionner des effets asymétriques.

Par exemple, le simple survol d’un aéroport parisien par un drone pourrait perturber voire interrompre le trafic aérien à l’instar d’exemples récents à l’étranger ! Une veille permet d’évaluer également la menace qui peut aller de la simple violation de domicile à l’attentat terroriste. Un engin de ce type peut transporter 20 à 30 % de son poids total, soit par exemple une grenade ou un explosif pour un drone de faible poids. Par ailleurs, on a pu assister dernièrement à des survols de sites sensibles, à des atteintes à la vie privée, à des manquements à la réglementation de la circulation aérienne (vols en ville, au-dessus des personnes, de nuit, en zones interdites...).

Enfin, nous travaillons aussi en partenariat avec des industriels et des laboratoires de recherche. Nous échangeons avec les autres services de sécurité français et avec nos homologues étrangers.

Civique : Comment répondre à cette menace ?
J. B. : Il faut une réponse globale permettant de détecter, identifier et neutraliser les drones lors de survols illégaux, avec un système de commandement adapté. La réponse doit être graduelle, nécessaire, proportionnelle et être en cohérence avec la défense aérienne. N’oublions pas que le drone a une faible empreinte visuelle et sonore, d’où la difficulté à le détecter et à le neutraliser. L’intérêt n’est pas  forcément de détruire l’engin mais si possible d’en prendre le contrôle et d’interpeller son télépilote pour établir une procédure judiciaire. Dans tous les cas, il convient de bien s’assurer au préalable de l’emploi hostile du drone par le télépilote.

Civique : Concrètement, est-ce que la Gendarmerie nationale est prête à répondre à cette menace ?
J. B. : Nous avons beaucoup progressé depuis onze mois. Des solutions imaginées avec nos partenaires institutionnels et industriels commencent à arriver à maturité technique et tactique. L’option retenue est de pouvoir apporter une réponse avec de multiples capteurs pour la détection. Cela va des yeux entraînés des gendarmes, aux radars, aux réseaux de caméras autour de la zone sensible, à la radiogoniométrie (détermination de la position d’un émetteur radioélectrique)... Pour la neutralisation, l’idée pourrait être de brouiller le drone si le risque consécutif pour l’environnement est maîtrisé. Enfin, la menace doit pouvoir être traitée au plan local et pas simplement par des services spécialisés, ce qui induit des procédures de décision décentralisée et la formation des gendarmes pour y répondre. Et naturellement de continuer nos exercices pratiques dans ce domaine.

Propos recueillis par Joël Beck