Le Cher relance sa politique de la ville

Le quartier du Vernet à Saint-Amond-Montrond © MI/SG/Dicom/A.Lejeune
15 janvier 2016

Quatre quartiers du Cher sont concernés par la nouvelle politique de la ville mise en place par le Gouvernement en 2014 : deux à Bourges, un à Vierzon et un à Saint-Amand-Montrond. Les contrats de ville viennent d’être signés.


« La loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine a défini une nouvelle géographie prioritaire, et nous nous attendions à ce que le Cher sorte du zonage de la politique de la ville, explique Thierry Bergeron, directeur départemental de la cohésion sociale et de la protection des populations, dont la direction est chargée depuis 2010 de la mise en œuvre de cette politique. Pourtant, le département compte un quartier prioritaire supplémentaire, celui de Saint-Amand-Montrond ». 

« Le commissariat général à l’égalité des territoires a décidé de faire rentrer dans le périmètre de la politique de la ville des communes plus rurales et Saint-Amand-Montrond est l’exemple type », précise Marie-Christine Dokhélar, préfète du Cher. 

Même si les difficultés y sont moins « spectaculaires » que dans les quartiers des grands centres urbains, celui de Saint-Amand-Montrond concerné par la politique de la ville est caractérisé par « une très forte concentration de pauvreté, malgré de nombreuses actions conduites par la municipalité, comme le rappelle Thierry Bergeron. Nous y observons par conséquent des ruptures, des clivages identiques à ceux que l’on peut constater dans des grands ensembles. Le fait d’habiter en zone rurale ou dans une petite ville ne prémunit pas contre la pauvreté et la désintégration sociale ». 

Au niveau départemental, la politique de la ville concerne un petit nombre de personnes puisque les quatre quartiers prioritaires identifiés ne regroupent que 17 700 habitants (12 190 à Bourges, 4 090 à Vierzon et 1 420 à Saint-Amand-Montrond). Mais, comme le souligne Thierry Bergeron, « si nous examinons plus précisément ces données, il ressort que, pour la ville de Bourges, près de 20 % de la population est concernée, et autour de 15 % pour Vierzon et pour Saint-Amand-Montrond. Une telle proportion d’habitants disposant d’un revenu médian inférieur à 9 000 euros par foyer, cela nous interpelle forcément. Et s’ils résident dans des quartiers ayant bénéficié d’un large programme de rénovation, le maintien des liens sociaux et le chemin vers l’emploi constituent une véritable priorité pour les signataires des contrats ». 

Les contrats de ville « nouvelle génération » sont désormais signés, avec une dotation globale de 776 730 euros, 
- 509 730 pour Bourges, 245 000 pour Vierzon et 22 000 pour Saint-Amand-Montrond 
- Priorité à la jeunesse, 406 250 euros sont prévus pour les deux programmes de réussite éducative de Bourges et de Vierzon. 

« Il ne faut pas s’attendre à des miracles. Personne n’a la naïveté de penser qu’ils régleront l’ensemble des problèmes, mais je crois beaucoup en ces contrats de villes, à leur approche intégrée, interministérielle reposant sur trois piliers - développement économique et emploi, développement urbain, cohésion sociale -, et le fait que les délégués du préfet soient au cœur de ce dispositif permettra de mobiliser des compétences plus larges au service de la préfète .» 

Thierry Bergeron n’hésite pas à parler de nouvelle aventure. « Nous changeons de paradigme. Nous avons une vision stratégique partagée dans les quartiers beaucoup plus importante que par le passé, notamment avec les collectivités locales. Et en partageant la gouvernance des contrats avec les acteurs de quartiers, en soutenant l’action des associations au quotidien, en nous nous appuyant sur une meilleure connaissance des quartiers à travers les conseils citoyens, nous obtiendrons, j’en suis persuadé, des résultats. » 

Vierzon raccroche ses jeunes 

Une action singulière a été menée de mai 2014 à août 2015 au bénéfice de dix jeunes Vierzonnais. « Il s’agit de jeunes de 16 à 18 ans déscolarisés qui cumulent des problèmes sociaux et comportementaux, explique Éric Boucourt, le sous-préfet de Vierzon. La plupart ont déjà un casier judiciaire et sont consommateurs de produits stupéfiants. Tous les dispositifs d’insertion ayant échoué, il fallait bien entreprendre quelque chose pour ces jeunes, sous peine de les perdre définitivement.» 

« Le programme de réussite éducative (PRE) de la ville de Vierzon constatant que ces jeunes n’avaient pas la capacité d’intégrer les dispositifs d’insertion de droit commun existants, nous avons décidé de mettre en place un parcours d’insertion plus souple avec néanmoins un objectif précis : l’insertion professionnelle durable, relate Mohamed Farhan, coordonnateur du PRE à la mairie de Vierzon. Il s’agit d’un projet d’accompagnement personnalisé dont les objectifs sont définis avec les jeunes. 

Il repose sur le principe de l’adhésion et s’inscrit dans une proximité avec les familles.» Concrètement, pendant plus d’un an ces dix jeunes ont intégré le chantier d’insertion de l’association C2S services afin de suivre une préparation au CAP maintenance de bâtiments de collectivités en alternance. « Mais nous ne nous sommes pas contentés de cette préparation. Les jeunes ont également reçu un accompagnement social et sanitaire et suivi une remise à niveau des savoirs de base. »  

Quant au bilan, Éric Boucourt l’estime plus que satisfaisant, « au regard de la situation initiale de ces jeunes ». Sept d’entre eux ont présenté l’examen du CAP et trois l’ont réussi. Cinq ont trouvé un emploi en CDD, qui pourrait se transformer en CDI pour trois d’entre eux. « Pour réussir ce pari, nous avons fait le choix du mode sans échec, c’est-à-dire que toute absence par exemple n’entraînait pas automatiquement l’exclusion du jeune. Les partenaires, - C2S Services, le GRETA, la Ville ou l’État- ont fait preuve d’une réelle souplesse. Pour certains, ce fut une petite révolution. »  

Frank Canton