Le travail d'enquête en milieu périlleux

Personnels mobilisés © MI/SG/Dicom/Unité graphique
6 juillet 2015

Des binômes montagnards-enquêteurs

À 1500 mètres d’altitude, entre deux arêtes montagneuses dans le massif des Trois-Evêchés, le site du crash est une zone hostile, abrupte et escarpée. Pendant les six jours suivant l’accident, elle n’est accessible que par hélitreuillage et implique l’utilisation de techniques d’alpinisme.
Des spécialistes en montagne, gendarmes du PGHM, CRS de haute-montagne ou sapeurs-pompiers du groupe de secours en montagne, sont donc chargés d’assurer la sécurité des enquêteurs sur la zone et d’apporter leur connaissance indispensable du terrain.
Le travail d’enquête et de relevage d’éléments sur la zone est effectué par les personnels de la gendarmerie des transports aériens (GTA), du bureau enquête et analyse de l’aviation civile (BEA), et des techniciens d’identification criminelle (TIC) de l’IRCGN (institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale). Ils sont encordés aux montagnards et progresseront en binôme jusqu’à la fin de la mission.

Hélitreuillage © MI/SG/Dicom/F.Pellier

Travail en altitude

Les hélicoptères des sections aériennes de la gendarmerie (SAG) effectuent dès le jour du crash des rotations entre la zone montagneuse et la drop zone (DZ) pour acheminer les personnels dans la montagne. Deux points d’hélitreuillage sont possibles et définis : l’un sur la partie basse de la zone où sont concentrées les recherches des boîtes noires, et l’un sur la partie haute pour la recherche des corps. Au sol, les montagnards gendarmes, CRS et sapeurs-pompiers s’équipent de baudriers, crampons, casques, piolets, civières d’évacuation, pelles, râteaux, sacs, et s’arment de courage. Ils embarquent également des drapeaux rouges et de la rubalise jaune afin de matérialiser les éléments et délimiter le site.
Les TIC de l’IRCGN ont d’abord effectué un gel des lieux (clichés et balisage de la scène) avant de procéder au relevé d’indices et au relevage des corps et fragments humains. Ces éléments sont ensuite acheminés sur la chaîne médico-légale installée dans la vallée. « Nous devons évacuer un maximum d’éléments, sachant que nous sommes tributaires de beaucoup de facteurs, explique le commandant Emmanuel Gaudry, de l’unité opérationnelle de l’IRCGN.
Le climat, la montagne, la fatigue du personnel... mais il faut s’adapter, l’objectif est que les corps soient évacués, identifiés, et rendus le plus rapidement possible aux familles. Nous ne savons pas évoluer dans ce milieu-là donc nous avons vraiment besoin de nos binômes montagnards pour notre sécurité en permanence. »

Briefing © MI/SG/Dicom/F.Pellier

Lieutenant-colonel Jean-Guillaume Rémy, chef opération du centre de planification et de gestion de crise de la gendarmerie nationale (CPGC) :

« Le CPGC a été très rapidement mis en place dans une tente. C’est un appui technique équipé de matériel informatique qui permet le commandement des troupes sur place. D’ici je peux coordonner l’ensemble des unités de gendarmerie : les spécialistes criminalistique, les enquêteurs judiciaires, les spécialistes montagne, et les gendarmes mobiles et départementaux chargés de l’ordre public pour maintenir à distance la foule de journalistes. Nous avons aussi une unité sécurité routière avec des motards qui escortent les familles ou les autorités arrivant ici. Enfin, un pool logistique assure le soutien de toutes ces composantes. »

Capitaine Yves Naffrechoux, commandant le PGHM des Alpes-de-Haute-Provence :

« Nous sommes sur une opération d’envergure avec énormément de personnel. Cela nécessite un gros travail de préparation en amont : connaître les effectifs dont on a besoin, être capable de relayer les équipes sur le terrain car la mission est difficile pour eux. Nous travaillons également avec une psychologue qui est présente le soir lorsque les secouristes reviennent à la DZ. Les pilotes d’hélicoptère font un travail remarquable en nous hélitreuillant sur site toute la journée. C’est un travail de collaboration entre les SAG et les TIC que nous devons préparer pour être hélitreuillés. »

Capitaine Olivier Cousin, commandant la CRS de montagne de Briançon :

« Il y a sur place des CRS de toutes les unités de la CRS Alpes : Nice, Briançon et Grenoble. Le commandant des opérations de recherches nous a donné la mission de sécuriser les enquêteurs. Chaque jour nous définissons les effectifs et la mission du lendemain en fonction du nombre de personnels à sécuriser, des besoins, de l’urgence... Nous intégrons un énorme dispositif géré par la gendarmerie. Nous ne sommes qu’une pièce du dispositif mais un élément essentiel de terrain car sans secouristes de montagne, le travail d’enquête ne peut pas se faire. »

Hélicoptère EC145 © MI/SG/Dicom/F.Pellier

Capitaine Michel Dossolin, responsable du GSMSP (Groupe de secours en montagne des sapeurs-pompiers) :

« Comme le PGHM et les CRS, nous sécurisons la zone et les intervenants pour qu’ils puissent faire leurs relevés en toute sécurité, dans cette zone où la progression est très délicate. Sur le département des Alpes-de-Haute-Provence, nous travaillons régulièrement avec le PGHM et les hélicoptères de la gendarmerie. Nos effectifs sont à la disposition de la gendarmerie. Cette mission est un peu différente de notre quotidien car c’est un travail minutieux et qui s’inscrit sur une période de longue durée. »

Un technicien d’identification criminelle de l’IRCGN :

« Je faisais partie du premier binôme intervenant sur la zone le jour du crash. On procède comme pour une scène de crime : nous la figeons de loin d’abord, puis on se rapproche, et nous récupérons les éléments techniques et biologiques en vue de leur rapatriement. C’est une première de travailler avec des personnels montagne de la gendarmerie nationale. On a toute confiance l’un envers l’autre, il m’assure et a ma vie entre ses mains ! »

Recherches crash A320 © MI/SG/Dicom/F.Pellier

Reportage : Floriane Boillot