Entretien au Figaro Magazine : les propositions de Brice Hortefeux pour renforcer l'efficacité de la chaine pénale et mieux lutter contre la délinquance

18 septembre 2010

Dans un entretien accordé au Figaro Magazine et publié le samedi 18 septembre 2010, Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur de l'outre-mer et des collectivités territoriales dévoile ses propositions pour améliorer le fonctionnement de la chaine pénale.


Entretien Figaro Magazine

Afin de "mettre les criminels hors d’état de nuire", le ministre de l’intérieur se prononce pour un "traitement global de la délinquance" allant de l’interpellation jusqu’à l’incarcération », Cela implique que chacun – police comme justice – tienne son rôle ; or pour Brice HORTEFEUX, de récents faits divers, dont il souligne qu’ils "ne sont divers que pour ceux qui ne se sentent pas concernés", ont montré le décalage existant entre la souffrance des victimes et la réponse pénale apportée par une minorité de magistrats. Et le ministre de l’intérieur d’affirmer sans détour : "j’aurai toujours plus de respect pour le droit de la victime que pour celui des délinquants".

Prenant l’exemple du meurtrier de Natacha Mougel, dont il a assisté aux obsèques lundi dernier, Brice Hortefeux demande :

"

est-il normal qu’aujourd’hui des assassins ou des violeurs, condamnés par une cour d’assises, puissent sortir de prison avant la fin de leur peine parce que des magistrats professionnels l’ont décidé ? », et de regretter : « si ce criminel n'avait pas été libéré avant la fin de sa peine, la vie de la jeune femme aurait été épargnée.

"

Pour le ministre de l’intérieur, "les magistrats ne disent pas uniquement le droit, ils jouent aussi une fonction sociale indispensable à l’équilibre de notre société" car "la justice est rendue au nom du peuple français".

C’est ainsi qu’il suggère d’une part, que la décision de mise en détention provisoire soit prise par un collège de magistrats et d’autre part, qu’à l’instar du jury populaire qui décide aux assises de condamner quelqu’un à la réclusion criminelle, un droit de regard soit accordé au peuple sur toute libération intervenant avant le terme de la peine fixée.

En effet, Brice Hortefeux estime que "quelle que soit la déontologie des magistrats", il n’est "pas possible qu’ils puissent toujours se substituer à l’expression de la volonté populaire". De la même manière, il considère que "les tribunaux correctionnels pourraient fort bien être composés de jurys populaires tirés au sort ou par un système d’échevinage qui associe les jurés populaires à des magistrats professionnels".

Citant Roederer, député de la Constituante, "le pouvoir judiciaire, le pouvoir d’appliquer les lois est plus voisin de pouvoir de les faire : il y touche de si près qu’il ne peut jamais être aliéné par le peuple", Brice Hortefeux ouvre également le débat de l’élection des juges, en rappelant que, sous la Révolution française, les pères fondateurs de la Déclaration des droits de l’homme avaient inspiré la loi du 16-24 août 1790 qui instaura notamment un nouveau statut des magistrats, fondé sur le principe démocratique de l’élection pour six ans.

Trouvant "intolérable" que les agresseurs de policiers puissent non seulement ressortir libres du tribunal malgré des condamnations en apparence sévères mais aussi narguer l’autorité publique par des "merci la France !", le ministre de l’intérieur a fait adopter par le Sénat une mesure prévoyant des peines incompressibles pour les actes criminels visant les policiers, les gendarmes, les pompiers et les magistrats. Concrètement, l’assassin d’une personne détentrice de l’autorité publique sera désormais assuré d’effectuer au minimum trente ans de réclusion lorsque la cour d’assises le décidera.

Brice Hortefeux se déclare, en outre, favorable à ce que la rétention de sûreté – qui permet d’isoler un criminel dangereux à l’issue de sa peine de prison – puisse être prononcée contre les condamnés à dix ans de prison, au lieu de quinze actuellement.

Brice Hortefeux propose que les aménagements de peines de prison ne soient possibles que pour celles d’une durée d’un an maximum, contre deux aujourd’hui. En effet, pour le ministre, le dispositif actuel est "totalement incompréhensible pour les policiers et les gendarmes" et "parfaitement inadmissible pour les citoyens", en ce qu’ils "ne peuvent admettre d’être sanctionnés dès qu’ils dépassent de deux kilomètres/heure la limite de vitesse autorisée, tandis qu’un délinquant condamné, lui, à dix-huit mois de prison pour vol avec violences, cambriolage ou trafic de stupéfiants ne passera pas un seul jour en prison".

Enfin, et de la même manière, Brice Hortefeux ne se résout pas à ce que des mineurs, qui arrachent le casque d’un policier pour le frapper à la tête à coups de marteau, comme cela fut le cas récemment à Corbeil, soient présentés devant le juge pour enfants.

"

Très honnêtement, j’ai du mal à qualifier d’enfants les auteurs de ce type d’acte

"

s’indigne le ministre, qui, estimant que les principes de l’ordonnance de 1945 ne sont plus adaptés à la réalité contemporaine, souhaite voir évoluer les règles de la justice des mineurs.