Hommage au sergent-chef Jonathan Lassus-David

Hommage au sergent-chef Jonathan Lassus-David
17 janvier 2018

Discours de M. Gérard Collomb, ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur, prononcé le 17 janvier 2018 à la caserne Champerret de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, à l'occasion de la cérémonie en hommage au sergent-chef Jonathan Lassus-David, décédé après une intervention sur incendie à Choisy-le-Roi (94).

- Seul le prononcé fait foi -

Madame la Ministre des Armées,

Monsieur le Préfet de Police,

Monsieur le Préfet, Directeur Général de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises,

Monsieur le Préfet du département du Val de Marne,

Mon Général, Gouverneur militaire de Paris,

Mon Général, Commandant la Brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris,

Madame la Maire de Paris,

Monsieur le Maire de Choisy-le-Roi,

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,

Monsieur le Président de la Fédération Nationale des Sapeurs-Pompiers de France,

Monsieur le Président de l’association des œuvres sociales de la Brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris,

Monsieur le Premier Vice-président de l’œuvre des Pupilles orphelins de sapeurs-pompiers,

Officiers, sous-officiers, caporaux et sapeurs,

Chère Emilie, Chère Anaïs,

Chers Nicole et Jean-Yves, Chères Aurélie et Manon,

Nous sommes réunis cet après-midi pour rendre hommage au sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID, sapeur-pompier de Paris, mort au feu, parti trop tôt parce qu’il avait fait du secours, de la protection de ses compatriotes, l’engagement d’une vie.

Le drame se noua dans la nuit du 9 au 10 janvier dernier.

Ce soir-là, le sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID était comme souvent affecté à la fonction de « chef d’agrès au premier secours évacuation » dans son centre de secours de Choisy-le-Roi.

A 4h06 précises, la sonnerie retentit.

Un incendie était en cours dans un parc de stationnement couvert, galerie Jean-Jaurès.

Arrivés sur les lieux, les sapeurs-pompiers de la Brigade constatèrent que le feu s’était propagé très rapidement et que les hautes températures faisaient peser une menace sur la stabilité des immeubles d’habitation situés à proximité et sur la sécurité de leurs résidents.

Il fallait donc agir avec célérité.

Trouver au plus vite le foyer de cet incendie.

C’est à cette tâche qu’avec ses hommes, le sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID s’attela.

Il partit en reconnaissance, progressant difficilement dans ce parking souterrain totalement enfumé.

C’est alors que, piégé dans cet environnement hostile et dangereux, il s’effondra, grièvement blessé.

Immédiatement extrait par ses camarades, pris en charge par les équipes médicales présentes sur place, le sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID fut héliporté à l’hôpital d’instruction des Armées Percy à Clamart.

Dans cet établissement, des soins d’une grande qualité lui furent prodigués, faisant renaître l’espoir.

Mais, au cours de la nuit de samedi à dimanche, au terme d’une lutte courageuse, le sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID succomba.

Il était mort au feu, des suites de ses blessures en intervention.

* * *

En ce moment grave et solennel où l’émotion nous étreint, nous pensons tous ici à sa famille.

A vous Emilie, sa compagne, qui, originaire comme lui du Béarn, l’aviez  rejoint ici en région parisienne. A votre petite Anaïs, qui aura deux ans dans quelques semaines – Jonathan était si fier d’être devenu papa ! 

Nous pensons à ses parents, Jean-Yves et Nicole, à ses deux sœurs, Aurélie et Manon, dont il était si proche.

Soyez-assurés de tout mon soutien, de notre soutien à tous.

Nous pensons aussi à vous, amis de Jonathan, ceux d’Oloron-Sainte-Marie comme ceux qu’il s’était fait depuis qu’il était installé en Ile-de-France.

Nous pensons à vous, ses camarades du centre de secours de Choisy-le-Roy, de la 22e compagnie, du 2e groupement d’incendie ; à vous, les 8700 militaires de la Brigade qui perdez aujourd’hui un frère d’armes.

Nous pensons aussi à toute la famille des sapeurs-pompiers, si durement touchée en ce début d’année ; à vous qui, fidèles à votre devise, prenez tous les risques pour protéger les Français.

Aujourd’hui, Mesdames et Messieurs, ce ne sont pas seulement le Ministère de l’Intérieur et le Ministère des Armées, qui se trouvent en deuil.

C’est toute la France qui s’incline devant la bravoure du sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID.

C’est la Nation toute entière qui pleure un de ses enfants.

* * *

Le sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID avait 28 ans.

Sapeur-pompier, il l’était comme volontaire dans sa ville d’Oloron-Sainte-Marie, depuis l’âge de 16 ans.

Devenir un soldat du feu était son rêve de toujours.

Depuis le plus jeune âge, cher Jean-Yves, cher Nicole, il vous faisait part de sa volonté de revêtir cette tenue, de porter ce casque. Il cultivait la belle et noble vocation de consacrer sa vie à protéger les autres.

Au centre de secours, tous ceux qui l’ont côtoyé décrivent un jeune passionné, toujours prêt à monter des gardes, à « décaler ».

Un homme qui était toujours disponible pour le service et pour les autres, et qui savait transmettre son expérience, en assurant la formation des plus jeunes.

A Oloron, Jonathan LASSUS-DAVID avait démontré très tôt des facultés hors normes.

En 2011, à 23 ans, déjà spécialisé en « sauvetage déblaiement », il fut ainsi décoré de la médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement suite au sauvetage d’un homme prisonnier d’un puits de forage.

Malgré son jeune âge, il avait acquis la technique et la maturité des plus aguerris de ses collègues.

Quand, en 2012, Jonathan LASSUS-DAVID fut admis à rejoindre les rangs de la Brigade, aucun de ses proches ne fut donc étonné. Et tous furent fiers de lui.

Comme tous furent fiers de le voir ensuite gravir les échelons jusqu’à être nommé « chef d’agrès premier secours », parce qu’en reconnaissance de son engagement, sa hiérarchie l’avait proposé à l’avancement rapide.

Cette progression était amplement méritée.

Car au poste de commandement de Rousseau puis au centre de secours de Choisy-le-Roi, Jonathan LASSUS-DAVID se distingua par des aptitudes exceptionnelles.

A 5 reprises, il fut ainsi récompensé, recevant même le 1er juin dernier, une lettre de félicitation du général commandant de la Brigade pour avoir maîtrisé un incendie d’ampleur sur son secteur de Choisy.

Sous-officier prometteur, Jonathan LASSUS-DAVID faisait partie de ces jeunes sur lesquels la Brigade comptait s’appuyer pour le futur.

Chacun ici lui prédisait une très belle carrière.

Jonathan était un sapeur-pompier brillant. Il était aussi un homme de fidélité.

Fidélité à ses racines - malgré une vie professionnelle dense, il revenait dès qu’il le pouvait à Oloron, pour prendre des gardes, pour passer du temps avec sa famille.

Fidélité à ses amis, qui tous témoignent d’un homme toujours disponible, qui savait trouver les mots pour encourager, pour susciter l’enthousiasme parmi ses proches. Il se montrait toujours d’un optimisme sans faille face à toutes les adversités.

Et puis, Jonathan LASSUS-DAVID, c’était l’incarnation d’une joie de vivre, forgée au berceau de la grande famille du rugby béarnais, même s’il s’adonnait ici à d’autres activités sportives.

Là encore, il vivait à fond ses passions.

Sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID,

Plus jamais vos camarades, vos proches, ne pourront se reposer sur vos épaules, passer avec vous ces moments uniques qui les remplissaient de bonheur.

Mais votre souvenir, lui, restera bien vivant.

Chaque semaine, votre nom résonnera dans toutes les casernes de la Brigade, aux côtés de ceux qui ont écrit son histoire à la fois tragique et glorieuse.

En reconnaissance de votre sacrifice, vous serez cité dans un instant à l’Ordre de la nation.

Vous recevrez également, à titre posthume, les insignes de chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur.

Sergent-chef Jonathan LASSUS-DAVID.

Une des victimes de ce tragique incendie du 10 janvier dit aujourd’hui de vous : « c’est grâce à lui que nous avons la chance d’être en vie ».

Je sais, Jonathan, que vous seriez infiniment fier de cette réflexion.

Oui, vous étiez « un homme qui sauvait des vies ».

A Choisy, à la Brigade, à Oloron, et partout en France, c’est bien cela que l’on retiendra à jamais de vous.

Vivent les Sapeurs-Pompiers de Paris !

Vive la République !

Et vive la France !

Je vous remercie.