Discours de M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’Intérieur, à la clôture du colloque Erignac à la Sorbonne, le 28 septembre 2017.
- Seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet d’Ile de France,
Monsieur le Préfet de Police,
Monsieur le Recteur, Chancelier des Universités,
Monsieur le Président Carenco,
Mesdames et Messieurs les directeurs généraux,
Mesdames et Messieurs les préfets,
Mesdames et Messieurs,
C’est un plaisir pour moi de m’exprimer devant vous, dans ce lieu prestigieux, après des intervenants dont je connais la pertinence des analyses, qu’ils viennent de la sphère politique, de la fonction publique, du monde de l’entreprise ou de celui de l’université et de la recherche.
Je veux remercier chaleureusement Jean-François Carenco, Président de l’association du corps préfectoral et des hauts fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur, pour son invitation. Vous remercier tous de votre présence ce soir. Elle montre combien le corps préfectoral et les hauts fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur, ont le désir profond de se nourrir des apports les plus récents de la recherche, de s’ouvrir aux idées nouvelles, d’entretenir un dialogue fécond avec de grands intellectuels. Et je m’en félicite, car c’est comme cela, en articulant pensée de long terme et action au quotidien que l’on peut faire évoluer un pays, que l’on peut instiller cette dynamique qui nous permettra de répondre aux grands défis de notre société.
Cher Jean-François Carenco, le thème que vous avez choisi : « l’État de la République : quelle démocratie pour demain » est à coup sûr au cœur de notre actualité.
Car aujourd’hui, il y a, nous pouvons le constater, une vraie interrogation sur l’état de la République, et l’avenir notre démocratie. Parmi vos invités, vous avez convié Marcel Gauchet qui met au cœur de ses réflexions la thématique du désenchantement du monde.
Et c’est vrai, la période électorale que nous venons de vivre l’a amplement montré, beaucoup doutent de l’avenir, et après une période où l’on croyait presque unanimement en la promesse d’un progrès sans cesse renouvelé, il y a aujourd’hui une vraie peur d’une régression économique, d’une régression sociale, sur laquelle s’enracine une crise morale qui touche bien des esprits. Cette crainte-là, si elle est prégnante aujourd’hui n’est pas nouvelle dans l’Histoire. Le désenchantement démocratique est né en même temps que la démocratie elle-même : sous l’Athènes classique, des auteurs comme Hérodote ou à Thucydide dissertaient déjà sur ce sujet.
Jamais cependant la crise que nous connaissons n’avait, depuis l’après-guerre, atteint un tel sommet. Vous avez invité pour cette journée quelques spécialistes des enquêtes d’opinion et des analyses électorales. Tous ont souligné comment depuis des années, l’abstention politique montait en puissance dans nos grands pays démocratiques. En juin dernier par exemple, un électeur sur deux ne s’est pas déplacé en France à des élections législatives pourtant déterminantes pour l’avenir du pays.
Au dernier scrutin européen en 2014, plus de 60% des inscrits ne sont pas allés voter, alors même que l’Europe devrait constituer un horizon mobilisateur.
Oui, les Français désertent les urnes.
Et s’ils ne le font pas dans les mêmes proportions que les Slovaques – 87% d’abstention aux européennes de 2014, ou que les Tchèques – 77% d’abstention à ce même scrutin, notre Nation qui fut celle de la reconnaissance des droits de l’homme, qui, la première, institua le suffrage universel, porte aujourd’hui tous les symptômes d’une démocratie malade.
En évoquant la profondeur de l’abstention, je me réfère à la moyenne nationale. Mais comment ne pas voir que dans certaines communes, dans certains quartiers, la situation est plus critique encore. Sait-on par exemple que dans les territoires les plus paupérisés de nos grandes agglomérations, près de 80% d’électeurs ne se déplacent pas.
Sait-on que dans les zones de la France périphérique qu’a décrite tout à l’heure Christophe Guilluy, cette France touchée de plein fouet par la désindustrialisation, il est souvent moins d’un électeur sur quatre à aller voter.
Sait-on que chez les jeunes de moins de 35 ans, dans cette génération qui n’a jamais connu d’autres horizons que la crise et le chômage de masse, l’abstention bat un record ?
Mesdames et Messieurs, quand une frange aussi importante de la population se désintéresse d’échéances électorales qui sont pourtant décisives pour l’avenir d’un pays, quand, au-delà, toutes les institutions démocratiques - organisations syndicales, partis politiques et même sphère médiatique - font l’objet d’un doute profond, quand on préfère aller sur les réseaux sociaux pour se faire une opinion ; alors oui, on peut parler d’une crise de la démocratie.
Et que dire de la montée des populismes ! Quand l’Allemagne donne 13% des voix à un parti d’extrême droite en portant 94 de ses membres au Parlement, alors oui, pour reprendre la formule de Marcel Gauchet, on ne peut que consentir que constater que s’est installé partout en Europe un vrai « désenchantement ».
D’où provient-il ?
Pour moi du fait que nous sommes sans doute aujourd’hui dans l’intervalle entre deux mondes.
Vous connaissez tous la formule de GRAMSCI. « La crise, c’est quand le vieux monde se meurt et que le nouveau tarde à apparaître. Et dans ce clair-obscur surgissent les monstres ». Eh bien oui, il est à craindre que dans la crise que nous connaissons aujourd’hui, ne puissent renaître des monstres. Ils peuvent prendre des formes différentes, renaissance des vieux nationalismes, apparition de nouveaux populismes, nouvelle forme de totalitarisme qui prétend imposer la religion comme hier on prétendait imposer la suprématie de la race. Ces monstres, on voit bien qu’ils prospèrent sur la fin de nos solidarités traditionnelles, sur la difficulté à produire du collectif et où la figure qui domine est ce que le philosophe Gilles Lipovetsky appelle l’« hyperindividu ». Ces monstres prospèrent sur un monde où, les valeurs que nous portons semblent parfois « sonner creux ».
Les uns s’appuient sur la désespérance de couches populaires traditionnelles, frappées de plein fouet par le déclin des industries anciennes et la pensée que la société d’aujourd’hui, faite de technologies nouvelles et d’ouverture au monde, n’est décidément pas faite pour eux. Pourquoi, se disent-ils, ne pas fermer ses frontières, là où l’ouverture a failli.
Pourquoi ne pas privilégier le repli identitaire, là où – pensent-ils - plane la menace d’une dilution de notre nation.
Le passé nous a montré à quelle catastrophe peut conduire un tel désespoir.
Certes les facteurs de radicalisation ne se limitent évidemment pas à des causes sociologiques. Mais elles ont à voir, quelque part, à ce désenchantement qui a gagné nos sociétés occidentales.
Le Président de la République le dit quelquefois : nous avons laissé se développer un terreau sur lequel sont enracinées les pires des vocations.
D’autres causes ont été invoquées pour expliquer notre crise démocratique.
Dans cette journée, on a parlé tour à tour du problème de la déconnexion entre les élites et le peuple, de celui de la représentativité de nos grandes assemblées ; je sais qu’on a pu appeler à réformer nos institutions, à multiplier les espaces démocratiques pour compléter cette démocratie inachevée si bien décrite par Pierre Rosanvallon.
Toutes ces thématiques sont évidemment importantes. Et en tant qu’élu local, j’ai été de ceux qui très tôt ont fait en sorte que dans mes équipes la diversité de la société soit représentée ; comme j’ai été de ceux qui très tôt ont associé les citoyens aux décisions pour que la démocratie ne dure pas le seul temps de l’élection mais qu’elle puisse être un travail, une réalité de tous les jours.
Je suis donc pleinement conscient de tous les manques du modèle démocratique français mais pour ce qui me concerne j’ai une conviction profonde : c’est que la crise démocratique que nous vivons est, avant tout, une crise de résultats.
Une crise de résultats, car quand, dans un pays, on dénombre 3.5 millions de chômeurs et que chacun, dans son entourage, compte une ou plusieurs personnes exclues du marché de l’emploi, on ne peut s’étonner que progressent la désespérance et que les votes se portent aux extrêmes.
Une crise de résultats car quand, dans un pays, une majorité de jeunes étudiants renoncent à leurs études sans l’obtention d’aucun diplôme supérieur, on ne peut s’étonner que beaucoup ressentent quelque amertume vis-à-vis de la société.
Une crise de résultats car quand certains quartiers n’en finissent pas de se paupériser, de se ghettoïser, on ne peut s’étonner d’aboutir à des dysfonctionnements majeurs.
Quand la fracture devient profonde entre les territoires qui réussissent et ceux qui connaissent un inexorable déclin, alors il ne faut pas s’étonner que monte la colère, la lassitude face à ce qui apparaît comme un système auquel certains n’auront jamais accès. Alors monte le sentiment d’une France qui se sent aujourd’hui totalement abandonnée.
Nous vivons une crise de résultats enfin, car de la grande panne économique naît la violence, dans nos villes grandit l’anxiété quant à sa sécurité.
Qui alors peut incarner l’essence même du pouvoir de l’État, ce pouvoir régalien qu’on est de moins en moins capable d’exercer ?
C’est cela, une certaine réalité telle qu’elle est perçue par beaucoup de Français.
Vous, membres du corps préfectoral et de la haute administration, vous qui, par vos fonctions, êtes au plus près de la réalité quotidienne, vous connaissez bien ce que peut être leur sentiment.
C’est une réalité crue, difficile où vous êtes confrontés à des parcours parfois chaotiques ; avec des femmes et des hommes qui ont l’impression que devant eux toutes les portes se referment où partout se développe un sentiment de déclassement, à la fois collectif – on se demande si la France est encore une grande puissance, et individuel – on s’interroge en pensant que soi-même on vit moins bien que ses parents et que ce sera pire encore pour ses enfants.
Mesdames et Messieurs,
Beaucoup a été dit, beaucoup a été écrit, sur cette crise de résultats, sur la grande panne de l’économie française, sur l’incapacité de notre pays à mettre en œuvre ces réformes de structure quand nos voisins allemands, scandinaves, y sont parvenus.
Mais pour ce qui me concerne, je suis un optimiste convaincu. Car je vois partout cette formidable énergie qui pousse une partie de notre jeunesse à innover, à créer, que ce soit dans le domaine entrepreneurial ou dans le domaine associatif.
Car je perçois chez beaucoup de nos compatriotes, une envie d’aller de l’avant, de se rassembler, pour dépasser ensemble nos difficultés. Notre responsabilité à nous, responsables politiques, préfets, hauts fonctionnaires, est de tout mettre en œuvre pour libérer cette énergie.
De faire en sorte que l’État ne soit pas considéré comme un État tatillon comme il a pu être perçu par le passé. Mais qu’au contraire, en partenariat avec les collectivités locales, la puissance publique puisse impulser, innover, accompagner cette transformation en profondeur de notre économie et de notre société.
Pour atteindre cet objectif, ma conviction de Ministre de l’administration territoriale, mais aussi d’ancien Maire, est qu’il convient de s’appuyer, sur nos territoires, sur des préfets forts et des collectivités locales fortes.
Je le dis souvent, alors que depuis des décennies, on inscrit dans nos discours, on se réfère dans nos circulaires, au beau principe de déconcentration ; dans la réalité on constate que s’est parfois opérée une recentralisation rampante de notre État.
En premier lieu parce que, pour décider d’un projet, même très local, il faut souvent défendre sa cause à Paris.
Ensuite parce que le législateur a cherché à légiférer sur tout, à tout réglementer.
Cette logique dont, je le sais, les préfets souffrent, a contribué à creuser un fossé entre le citoyen et un État trop souvent perçu comme un Léviathan lointain et sans visage. Je suis de ceux qui pensent qu’il est impératif d’inverser la tendance, en donnant aux représentants de l’État dans les territoires toute latitude pour faire des choix, pour rapprocher l’action publique des citoyens.
C’est pour cela que, sur un sujet comme la sécurité, j’ai par exemple décidé que dès l’année prochaine, une partie des crédits seraient gérés par les responsables locaux. C’est pour cela aussi que s’agissant des subventions d’investissement dans les territoires, je souhaite que l’administration territoriale joue tout son rôle. Dans le budget 2018, nous avons maintenu à un niveau exceptionnellement de financements, à hauteur de 1.8 milliards d’euros. Ce sera là encore les préfets qui auront à décider des projets financés.
Enfin parce que les contraintes, les besoins, ne sont pas les mêmes dans une ville-monde comme Paris ou au cœur d’un département comme la Lozère, je souhaite donner la possibilité aux préfets non plus seulement d’interpréter la loi et les règlements, mais de l’adapter aux contextes locaux. Il s’agit d’une petite révolution dans notre pays marqué par une tradition jacobine forte. Mais, parce que nous n’avons pas été élus pour faire « comme on a toujours fait », nous la mènerons.
Dès les mois à venir, cette possibilité de dérogation sera expérimentée pour deux régions métropolitaines et une région d’outre-mer.
Vous le savez, les Maires, les élus locaux, sont aujourd’hui les responsables qui recueillent le plus haut niveau de confiance de nos compatriotes.
Ce plébiscite n’est pas dû au hasard.
Il est le fruit d’une juste perception des Français qui les considèrent comme étant proches de leurs préoccupations.
Il faut savoir faire fructifier ce capital. Donner des capacités d’action à ces élus qui, souvent bénévolement, ne ménagent pas leur temps, pour se mettre au service de l’intérêt général.
C’est pour cela que ce gouvernement a souhaité nouer un pacte de confiance avec les collectivités locales. Pour leur donner les moyens de continuer à investir, et donc de porter ces projets qui changent la vie des habitants, leur donnent confiance en l’avenir.
Les concours financiers aux collectivités locales seront ainsi maintenus, la dotation globale de fonctionnement augmentée pour la première fois depuis 4 années de 0.4%.
Mais notre action n’est pas seulement financière. Nous entendons aussi porter une différenciation de notre organisation institutionnelle, pour que les réponses apportées aux populations ne soient plus uniformes mais sur-mesure, adaptées à la réalité socio-économique des territoires.
Ainsi, les plus grandes métropoles pourront, sur la base du volontariat, fusionner avec le département, et ainsi exercer des compétences sociales.
Mesure d’efficacité permettant de réduire la dépense.
Mesure destinée aussi à mieux accompagner ceux qui, dans les villes, se sentent exclues de la mondialisation.
Ils trouveront dans la Métropole un interlocuteur privilégié qui les accompagnera dans leur parcours d’insertion, qui les mettra en lien avec le monde économique.
Il y a ensuite cette France périphérique, qui pâtit à la fois de la désindustrialisation et, double peine, d’un manque d’infrastructures, d’équipements publics, de services publics.
Là, il faut s’appuyer sur des intercommunalités fortes, capables de mobiliser les premières antennes universitaires et, à partir d’elles de créer des centres de recherche, de faire monter en gamme nos PME et nos ETI, de faire surgir, par l’innovation, un premier niveau d’industrie performante. Des intercommunalités capables aussi de développer, une offre de transports communs, une programmation sportive et culturelle, en un mot de redonner un peu de vie à ces territoires.
Oui, je crois profondément qu’aucun territoire n’est a priori condamné.
Partout, il est possible de s’appuyer sur une histoire, des savoir-faire, des atouts, pour porter l’avenir.
Voilà, Mesdames et Messieurs, comment par des réformes de structures, il est possible de répondre à cette crise démocratique.
Ces questions d’organisation sont essentielles, les préfets le savent bien qui dans nos territoires sont comme des orfèvres de l’action publique. Elles n’épuisent pas toutefois le sujet de la réponse à la crise de résultats que j’évoquais. Car il convient aussi être capable d’adapter notre pays à la grande mutation que connaît notre monde.
De mener à bien ces réformes qui, comme le soulignait le Président de la République dans son discours sur la colline de la Pnyx, n’ont pas été menées depuis trente ans. Que dis-je, ces réformes ? Non, c’est une véritable transformation de notre modèle à laquelle il convient de procéder, pour construire une France forte.
Une France forte avec, d’abord une économie forte.
Tous les experts le montrent, depuis le début des années 2000, nos entreprises avaient beaucoup perdu en compétitivité.
Parce que leurs charges étaient trop lourdes, elles avaient du compresser leurs marges, qui ont atteint en 2013 un plus bas historique à 28% contre 40% en Allemagne.
Et parce qu’elles avaient compressé leurs marges, elles avaient cessé d’investir, perdant en vingt ans la moitié de leurs parts de marché mondiales, avec la destruction de 700 000 emplois industriels. La reconquête de cette compétitivité perdue a commencé avec le CICE et le pacte de responsabilité : les marges aujourd’hui se redressent, les créations d’emplois repartent la hausse (300 000 emplois créés ces douze derniers mois).
Il faut aujourd’hui passer à la vitesse supérieure.
En créant un cadre fiscal et réglementaire favorable à l’investissement privé. Et vous savez que budget prévoit ainsi 6 milliards de baisses d’impôts sur les entreprises. En donnant à notre tissu économique davantage de souplesse pour se redéployer, pour éventuellement changer de secteur d’activité : c’est la loi de réforme du code du travail.
En portant l’effort sur l’investissement public, et c’est le plan de 57 milliards d’euros présenté par le premier ministre, qui vise à la fois à soutenir l’émergence de technologies nouvelles et, avec le plan formation, à accroître les qualifications de tous les salariés à commencer par ceux qu’hélas notre système éducatif a laissé sortir sans diplôme.
Tout cela, et c’est évidemment là que la complication devient forte, il faut le faire en réduisant notre dette, car on ne sait ce que peuvent devenir les taux d’intérêt à moyen terme et ce que peut être la volatilité des marchés.
Nous sommes conscients qu’il n’est pas viable de consacrer chaque année plus de 40 milliards d’euros au remboursement des intérêts de la dette, soit l’équivalent des budgets réunis de la Défense, de la Justice et de la Culture.
C’est pourquoi le déficit sera sous la barre de 3% du PIB dès cette année et qu’il sera réduit à 2.6% l’année prochaine.
Cette trajectoire de réduction des déficits est ambitieuse mais elle ne sera ne sera pas menée de manière uniforme. Car nous le savons, le coup de rabot s’est révélé par le passé funeste. La réduction de la dépense publique doit passer au contraire par ces réformes de structure que j’ai précédemment évoquées.
Mesdames et Messieurs,
C’est parce que nous ferons cela que les pays étrangers verront que la France bouge, qu’à l’extérieur, nous retrouverons de la crédibilité et que nous pourrons nous engager sur ce qui doit constituer notre horizon : la construction d’une Europe forte. Car je l’ai dit, le désenchantement français est grandement lié au sentiment collectif de notre déclin, de notre perte d’influence.
A nous seuls, certes !
Si on regarde par exemple le domaine de la Recherche & développement, la France y consacre 55 milliards de dollars, quand les États-Unis dépensent 460 milliards, et la Chine 375.
Mais si l’Europe regroupait ses forces, alors elle deviendrait la première puissance de recherche au monde.
Sur le plan diplomatique et de la défense, nous pesons encore.
Mais regardons quelle serait la force d’une Europe unifiée.
Oui, si nous voulons retrouver notre souveraineté, si nous voulons redonner un espoir à nos concitoyens, j’allais dire produire un récit mobilisateur, il faut que notre pays soit à l’avant-garde de la construction de l’Europe.
Une Europe de l’innovation et de la croissance, capable d’investir dans les infrastructures, de mutualiser les efforts des pays membres pour faire émerger des champions dans les grands secteurs d’avenir, en un mot capable de reconquérir un leadership perdu face aux géants américains et chinois qui, dans un domaine comme le numérique, sont, on le voit bien aujourd’hui, en position hégémonique.
Une Europe de la sécurité et de la défense, capable de parler d’une voix forte sur la scène internationale, de défendre ses intérêts sur des sujets qui la concernent. Et quand le Président Macron évoquait ici-même une force commune de défense, quand il lance l’idée d’une Agence européenne du renseignement, qui serait capable de développer les techniques les plus sophistiquées du monde, évidemment que cela doit nous mobiliser.
Et puis l’Europe, Mesdames et Messieurs, c’est la seule grande puissance à défendre ce modèle si singulier de démocratie sociale de marché, à la fois ouverte sur le monde et protectrice des femmes et des hommes ; c’est la seule grande puissance à défendre une certaine idée de l’homme, née à Athènes voilà 2500 ans, revisitée au XVIème siècle dans les villes françaises et italiennes et qui s’exprime encore aujourd’hui à Paris, à Berlin, à Rome ou à Madrid.
« Quelle démocratie pour demain ? » : telle est la question que, cher Jean-François Carenco, vous posez.
Eh bien je répondrais ainsi : une démocratie qui a à nouveau les moyens d’agir, et, parce qu’elles les a, est capable de réenchanter un avenir commun.
Une démocratie qui pourra alors porter très haut dans le monde ces valeurs humanistes et pourra redevenir, pour bien des pays, une source d’inspiration.
Mesdames et Messieurs,
Je vous ai livré ce soir quelques convictions fortes qui guident mon action comme Ministre de l’Intérieur.
Ces convictions, je les ai formées à partir d’une expérience de terrain, à partir de la pratique d’un Président de grande métropole, à partir d’une connaissance des grandes villes et des grands pays du monde.
Ces convictions ne seraient rien si elles n’étaient pas capables de s’appuyer sur l’action.
Oui, je suis de ceux qui pensent que pour répondre au malheur français il faut de l’action, encore de l’action, toujours de l’action.
C’est cette action qu’en tant que responsables, nous devons impulser partout.
Et le meilleur hommage que nous pourrons rendre au préfet Claude Erignac c’est d’être digne de lui, dans la haute idée qu’il avait de l’action de l’État, qu’il se faisait de la République.
Cette République, vous comme moi, nous y croyons profondément.
Ce sont ses valeurs qui me guidaient hier. Ce sont elles qui me guident aujourd’hui.
Que vive la République !
Et que vive la France !
Merci à tous.
Je vous remercie.