Réunion des préfets

Réunion des préfets
13 décembre 2016

Discours de M. Bruno Le Roux, Ministre de l’Intérieur lors de la réunion des préfets le 13 décembre 2016 à Paris.


Seul le prononcé fait foi

Mesdames les Préfètes, Messieurs  les Préfets,

C’est la première fois que je m’adresse à vous dans ces circonstances et en tant que ministre de l’Intérieur. Le hasard du calendrier a voulu que cette traditionnelle réunion des préfets se tienne quelques jours seulement après le remaniement ministériel et mon arrivée à la tête de la Place Beauvau. C’est là un heureux hasard, qui va me permettre de balayer avec vous les principaux sujets sur lesquels notre maison travaille.

Un changement de ministre peut apparaître, j’en ai conscience, comme un événement un peu déstabilisant. En réalité, il n’en est rien, car l’essentiel, c’est la continuité de l’État en toutes circonstances – j’en veux pour preuve votre présence aujourd’hui, la mienne aussi, dans cette salle des fêtes de l’hôtel Beauvau.

Je souhaite tout d’abord vous dire que c’est pour moi un très grand honneur que d’avoir été nommé à la tête du ministère de l’Intérieur. Je mesure la confiance qui m’est faite par le Président de la République et le Premier ministre. Je mesure aussi la gravité qui s’attache à la responsabilité qui est désormais la mienne, surtout dans le contexte actuel de menace terroriste. Je succède à Bernard CAZENEUVE et à Manuel VALLS, qui resteront tous deux comme de grands ministres de l’Intérieur, et j’aurai à cœur d’inscrire mon action dans la continuité des décisions qu’ils ont eux-mêmes prises au cours de ces dernières années, tout en m’efforçant de contribuer à préparer au mieux l’avenir de notre pays et de notre ministère, à la place qui est la mienne, dans le rôle qui est le mien.

A cet égard, je veux insister sur le fait que nous entrons dans une période décisive pour la vie démocratique de notre pays. En 2017, il nous reviendra de garantir le bon déroulement, dans des conditions optimales de sécurité, de plusieurs échéances électorales majeures : l’élection présidentielle au printemps, les élections législatives à l’été, puis les sénatoriales en septembre. Vous aurez ainsi à vous mobiliser personnellement, de même que vos équipes. Vous recevrez prochainement de nouvelles instructions à ce sujet. Je veux d’ailleurs vous remercier pour avoir veillé au bon déroulement des primaires de la droite et du centre. Les primaires constituent désormais un rendez-vous incontournable de notre démocratie, il nous faut donc répondre présent pour permettre à nos concitoyens de s’exprimer en toute liberté et en toute sécurité. Comme je l’ai dit, vous l’avez fait pour les primaires de la droite et du centre, vous devrez également le faire pour celles de la gauche. C’est là un rôle essentiel assumé par le ministère de l’Intérieur : être le garant de la vie démocratique de notre pays, veiller à l’épanouissement des valeurs de la citoyenneté. En 2017, face à la menace terroriste et dans un contexte de montée des extrémismes partout dans le monde et en Europe même, peut-être cette mission prend-t-elle une signification plus forte que jamais. Elle devra, en tout cas, se trouver au cœur de notre action.

A l’heure où je prends mes fonctions, je veux également vous exprimer ma reconnaissance et vous dire mon entier soutien. En tant qu’élu local et parlementaire, je connais en effet l’importance du rôle joué par les préfets et les sous-préfets, notamment dans l’animation et la coordination des politiques publiques.

Dans les territoires, vous êtes la voix et le visage de la République. Par votre action quotidienne, vous êtes les garants de l’unité et de l’indivisibilité de la République, les gardiens de la continuité de l’État sur toute l’étendue du territoire national, en métropole comme outre-mer, y compris dans les périodes de crise. Les ministres, les préfets se succèdent, mais l’État, lui, demeure. C’est là notre lot à tous. Car nous sommes au service d’une cause plus grande que nous-mêmes : la France et la République.

Voilà pourquoi votre engagement repose sur une conception élevée de l’État et de son rôle, ainsi que sur une éthique de l’action publique particulièrement exigeante. Je ne doute pas que vous aurez à cœur, dans les mois qui viennent, d’incarner les valeurs cardinales de la République. Vous avez là un devoir d’exemplarité et de strict respect de la déontologie. Aux yeux des Français, vous représentez l’État dans les territoires, vous êtes l’État. Aussi, vous devez toujours être irréprochables. Cela emporte plusieurs conséquences, dans la gestion, bien entendu, des moyens mis à votre disposition pour exercer vos fonctions, mais aussi dans l’accomplissement de vos obligations citoyennes. Plus globalement, vous devez avoir une relation égale aux personnes, responsables politiques, personnels de tout grade et fonction, ou tout simplement citoyens que vous croisez sur des manifestations publiques. Car c’est également ainsi que l’on contribuera à renforcer l’autorité de l’Etat et de la République. A cet effet, je demande au Secrétaire général et aux Directeurs généraux, que mon prédécesseur a souhaité mobiliser dans des travaux ministériels sur la prise en compte de la déontologie au sein du ministère, de me faire des propositions en ce sens, à la veille et en complément de la création, au sein de ce ministère, d’une fonction de déontologie.

Mesdames et Messieurs, chacun en a conscience, nous vivons un changement d’époque, les attentats perpétrés sur notre sol depuis janvier 2015 – mais aussi dans bien d’autres pays – en témoignent. Le ministère de l’Intérieur se trouve au cœur de ce changement. A bien des égards, nous vivons une époque de transition, nous entrons dans une période nouvelle de l’histoire de notre pays, marquée durablement par la menace du terrorisme djihadiste.

D’une manière générale, nous sommes confrontés à des menaces ou à des crises qui, de plus en plus souvent, trouvent leur origine à l’extérieur de nos frontières, parfois même sur d’autres continents, mais dont nous devons gérer les répercussions sur notre propre sol. C’est le cas de la menace terroriste, mais c’est aussi le cas de la crise migratoire, ainsi que des crises environnementales. Et il n’est pas jusqu’à la délinquance ordinaire qui ne revête désormais une dimension internationale de plus en plus forte, laquelle rend sa répression encore plus complexe.

Cela implique donc que le ministère s’adapte, se modernise, se projette constamment dans l’avenir pour anticiper, prévoir, prévenir et par là même mieux protéger les Français.

Car le ministère de l’Intérieur est par excellence le ministère de l’État.

A ce titre, il est celui des Sécurités. Et nous devons continuer à renforcer nos dispositifs de sécurité intérieure comme notre modèle de sécurité civile.

Le ministère de l’Intérieur est aussi le ministère de l’administration territoriale, que nous devons continuer à consolider et à réformer, parce qu’elle est la colonne vertébrale de la République.

Il est aussi le ministère des libertés publiques, de la laïcité, des relations avec les cultes. Là aussi, il nous faut continuer d’avancer, de progresser, pour conforter les principes fondamentaux sur lesquels repose notre République et qui s’inscrivent au fronton de nos mairies, dans le quotidien de nos villes : liberté, égalité, fraternité.

Pour ma part, je suis là pour apporter ma pierre à l’édifice. Les chantiers ne manquent pas. Et les menaces ne tiennent pas compte du calendrier électoral de la France. Nous devons donc faire preuve d’une concentration et d’une vigilance maximales. Nous devons continuer à travailler sans relâche au service des Français, et ce jusqu’au terme de cette mandature. Comme l’a dit le Premier ministre, chaque jour compte et chaque jour doit être, pour l’action publique, un jour utile : c’est là ce que les Français exigent de nous.

Je veux tout d’abord évoquer les enjeux de sécurité, et notamment la lutte contre le terrorisme djihadiste, dans un contexte de menace extrêmement élevée, comme l’ont démontré les attentats de l’été dernier, à Nice, à Magnanville et à Saint-Etienne-du-Rouvray, mais aussi les interpellations réalisées au cours de ces dernières semaines et les projets d’attaques que nous avons récemment déjoués.

Nos services sont puissamment mobilisés, et leur engagement, leur travail portent leurs fruits. En 2013, nous avions ainsi déjoué un attentat. En 2014 nous en avons empêché quatre. En 2015, sept attentats ont été déjoués. Et pour cette seule année 2016, nous en avons empêché dix-sept, en tenant compte des sept arrestations auxquelles nous avons procédé, le 21 novembre dernier, à Marseille et à Strasbourg. Cela fait donc une trentaine d’attentats déjoués depuis 2013.

J’ajoute que, depuis le début de l’année 2016, nous avons interpellé plus de 420 individus en lien avec des réseaux terroristes. Depuis le 1er septembre, 143 interpellations ont eu lieu, 52 personnes ont été écrouées et 21 placées sous contrôle judiciaire. Au cours du seul mois de novembre, les services antiterroristes ont procédé à l’interpellation de 43 individus, dont 28 ont été déférés.

Ces chiffres en témoignent : jamais la menace terroriste n’a été aussi élevée sur notre territoire. Mais jamais la réponse de l’État n’a été aussi forte. Et elle doit absolument le demeurer.

Aussi, je veux attirer votre attention sur le fait que nous entrons dans une période à risques, je veux bien sûr parler des fêtes de fin d’année, soit en raison de leur dimension religieuse, soit parce qu’elles suscitent des rassemblements importants, tels que ceux du Nouvel An.

Dans ce contexte particulièrement sensible, garantir la sécurité des Français comme celle des touristes constitue une priorité absolue. C’est la raison pour laquelle, le 25 novembre dernier, Bernard CAZENEUVE vous a transmis une instruction spécifique vous enjoignant d’organiser les dispositifs opérationnels adéquats, permettant d’assurer un niveau optimal de sécurité lors des fêtes de Noël et de la Saint-Sylvestre.

Je ne saurais trop y insister : pour lutter efficacement contre le terrorisme, pour empêcher la commission d’attentats, nous devons faire preuve d’une forte capacité d’anticipation. Car c’est en amont que l’essentiel se joue. Cela est d’ailleurs aussi valable pour l’ensemble des comportements à risques susceptibles d’entraîner des violences sur la voie publique.

Cet effort d’anticipation et de prévention implique évidemment que nous conduisions – que vous conduisiez – des démarches partenariales associant les collectivités locales, les organisateurs de manifestations et de rassemblements, mais aussi les magistrats du parquet dès lors que cela est nécessaire, afin que nous puissions identifier les situations à risques et leur opposer les réponses opérationnelles les mieux adaptées.

Il vous appartient aussi de prendre tous les arrêtés nécessaires pour limiter les comportements dangereux. Je pense à l’interdiction de la vente d’alcool, d’essence ou de pétards. Par ailleurs, vous devez mobiliser les capteurs du renseignement territorial, notamment pour prévenir les violences urbaines.

La dissuasion passe également par la mobilisation de l’ensemble des forces de sécurité publique, les militaires de l’opération « Sentinelle » et les forces contribuant au Schéma national d’intervention, qu’il s’agisse des forces d’intervention spécialisées (le GIGN, la BRI, le RAID) ou bien des forces primo-intervenantes (les BAC et les PSIG Sabre). Je rappelle que vous devez privilégier le principe des patrouilles dynamiques sur les points fixes. Enfin, je vous demande de porter une attention toute particulière au Plan anti hold-up et à la sécurisation de la nuit de la Saint-Sylvestre. A cet égard, je rappelle que, cette année, nous allons engager 96 unités de forces mobiles, soit deux unités de plus qu’en 2015. En outre, je vous annonce qu’à ma demande, un renforcement temporaire de l’opération « Sentinelle » a été décidé par le Président de la République durant la séquence des fêtes. Les besoins exprimés par les préfets de zone seront donc satisfaits. Nous mobilisons les moyens nécessaires pour que cette période de festivités puisse se dérouler dans les meilleures conditions de sécurité qui soient, et j’attends de votre part un engagement d’une vigilance absolue.

Je veux également vous dire quelques mots au sujet de l’état d’urgence.

J’ai présenté, samedi, en Conseil des ministres, un projet de loi de prorogation, rendu nécessaire par le remaniement ministériel, et je le défendrai dès ce soir à l’Assemblée nationale. A cet égard, les échanges qui ont eu lieu au Conseil d’État ont montré que la durée des assignations était au cœur de débats sensibles, qu’il appartiendra au Parlement de trancher cette semaine, lors de l’examen du projet de loi.

Pour ma part, je veux souligner que l’activité même des services de renseignement et des services antiterroristes illustre le très haut niveau de la menace et, par conséquent, la nécessité qu’il y a de prolonger à nouveau l’état d’urgence. Nous avons d’ailleurs déjà obtenu des résultats importants dans le cadre de sa mise en œuvre, et les mesures que vous avez prises se sont révélées décisives pour assurer la protection du pays.

Ainsi, depuis le 21 juillet dernier, plus de 550 perquisitions administratives ont été réalisées. Elles ont donné lieu à 91 interpellations et 64 gardes à vue. Elles ont en outre permis la saisie de 35 armes, dont 2 armes de guerre et 21 armes longues. A l’occasion de ces perquisitions, près de 140 copies et saisies de données contenues dans des systèmes informatiques ont été réalisées. Dans la très grande majorité des cas, l’exploitation de ces données a été autorisée par le juge et a révélé des éléments caractérisant des risques de passage à l’acte terroriste.

D’une manière générale, comme l’a rappelé le Premier ministre samedi, depuis le 14 novembre 2015, près de 4 200 perquisitions administratives ont été réalisées. 653 d’entre elles ont abouti à l’ouverture d’une procédure judiciaire, tous chefs infractionnels confondus. Si l’on exclut les enquêtes ouvertes des chefs d’apologie ou de provocation au terrorisme à la suite de perquisitions administratives – une quarantaine environ –, on recense dix-neuf procédures initiées par la section antiterroriste du parquet de Paris du chef d’association de malfaiteurs avec une entreprise terroriste. Il y a donc bien une forte complémentarité entre l’action judiciaire et l’action administrative. La nécessité de cette articulation s’est d’ailleurs trouvée au cœur de la rencontre qui vous a réunis, le 7 novembre dernier, aux côtés des procureurs généraux et des procureurs de la République, de même qu’elle était l’objet de la circulaire commune diffusée juste avant cette réunion.

Nous devons également continuer à faire preuve de la plus grande détermination en ce qui concerne l’expulsion des prêcheurs de haine de nationalité étrangère, comme en ce qui concerne la fermeture des lieux de culte radicalisés. Quatre fermetures ont eu lieu récemment. S’agissant de Stains et d’Ecquevilly, ces décisions ont été confirmées, la semaine dernière, par les juridictions administratives.

Votre action est tout aussi essentielle dans l’animation et la mise en œuvre des dispositifs territoriaux de prévention et de prise en charge de la radicalisation. A ce jour, on dénombre près de 16.000 signalements actifs dans le Fichier des Signalements pour la Prévention et la Radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Plus de 11.400 d’entre eux ont été pris en compte, plus de 620 sont actuellement en évaluation et plus de 3.700 sont en veille ou bien ont été clôturés. L’EMOPT a déjà visité une quarantaine de départements, une dizaine de chefs-lieux de région et les 7 chefs-lieux de zone. Les équipes du préfet Olivier DE MAZIERES se rendront prochainement dans l’Oise et le Gard. Vous ne devez pas hésiter à les solliciter pour me faire remonter les bonnes pratiques et les dispositifs qui fonctionnent bien ou que nous devons consolider, mais aussi pour me signifier les dispositifs à améliorer, les évolutions à conduire.

Depuis janvier 2015, la lutte antiterroriste a puissamment mobilisé l’ensemble des effectifs de la Police et de la Gendarmerie nationales, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de l’état d’urgence, alors même qu’il fallait continuer à lutter contre la délinquance du quotidien. Je mesure combien la vie personnelle des agents s’en est trouvée, s’en trouve encore, affectée. Je sais qu’ils ont consenti de nombreux sacrifices, sur le plan des horaires de travail comme sur celui des congés. Sans nul doute tout cela a-t-il contribué à amplifier le malaise qui s’est exprimé au cours de ces dernières semaines au sein de la Police et qui a été principalement relayé par des gardiens de la paix.

De ce malaise, dont la tentative d’assassinat de Viry-Châtillon a constitué l’élément catalyseur, je veux également vous dire quelques mots.

La première réponse du Gouvernement a résidé dans les concertations inédites que vous avez organisées, à la demande de mon prédécesseur, aux côtés des Directeurs départementaux de la Sécurité publique. Chaque policier a ainsi pu exprimer ses préoccupations et ses revendications en toute liberté. C’est là un dialogue riche et fructueux qui s’est tenu dans l’ensemble des départements du pays. Vous avez, pour la plupart d’entre vous, déjà fait remonter vos analyses. A leur lecture, il apparaît clairement que les revendications concernent avant tout – outre la question des moyens matériels – la complexification des procédures pénales, le sentiment d’une absence de reconnaissance globale au sein de la société, une forme de crise de la vocation policière, mais aussi la nécessité de mettre fin aux « tâches indues » et de recentrer les effectifs sur leur cœur de métier. L’on constate également que plus les réunions de concertation se sont étalées dans le temps, plus les revendications ont pu être replacées dans une cohérence d’ensemble, votre parole ayant été relayée. Cela prouve que la pédagogie porte ses fruits.

Malgré tout, il nous faut bien reconnaître que quelques regroupements de policiers perdurent de façon sporadique, par exemple aujourd’hui, et qu’un certain scepticisme continue de se manifester face aux mesures que nous avons annoncées. Ce scepticisme, nous devons le combattre. Nous devons démontrer qu’il n’a pas lieu d’être. Certes, bien des commissariats se trouvent dans un état de vétusté qui n’est pas acceptable, et que d’ailleurs je n’accepte pas. Mais précisément, nous nous employons à remédier à ce genre de situations. Et quand nous expliquons notre Plan pour la Sécurité publique, nous sommes entendus et nous sommes compris. Vous êtes vous-mêmes compris dès lors que vous faites œuvre de pédagogie.

Aussi, j’attends que vous rappeliez sur le terrain les décisions que nous avons prises et celles que nous prenons. C’est là une partie de votre travail : expliquer que le travail que nous avons accompli, que les mesures que nous avons mises en œuvre, que l’effort que nous réalisons, bref que tout cela traduit la reconnaissance de la Nation à l’égard du travail des policiers.

Je pense bien sûr tout particulièrement au grand Plan de 250 millions d’euros pour la Sécurité publique, lancé il y a quelques semaines en cohérence avec l’ensemble des mesures prises depuis le début du quinquennat pour renforcer les moyens dévolus aux forces de l’ordre. J’insiste sur le fait que ce Plan a été décidé dans un dialogue constant avec les organisations syndicales, mais aussi en tenant compte des concertations avec les policiers conduites dans chaque département.

Le déploiement des armements et des équipements de protection est d’ores et déjà engagé. Je pense notamment au remplacement des flashballs par les lanceurs de balles de défense, qui sont à la fois plus sûrs et plus adaptés aux missions. La substitution, qui a déjà commencé, sera achevée à la fin de cette année. Parallèlement, nous poursuivons le renouvellement du parc automobile grâce à l’acquisition de 3 080 véhicules sur le budget 2017, dont 1 540 seront spécifiquement destinés aux services de la Sécurité publique. Enfin, concernant l’immobilier, là aussi des décisions significatives ont été prises afin d’améliorer les conditions de travail. Une enveloppe de 16 millions d’euros a ainsi été débloquée afin de pourvoir aux besoins les plus urgents d’aménagement et d’entretien.

Outre ces mesures concrètes, le Plan prévoit également de recentrer les effectifs sur leur cœur de métier, tout en renforçant leur protection juridique. Le remplacement des gardes statiques par un principe de sécurisation dynamique doit ainsi s’appliquer de façon immédiate – j’y insiste – aux lieux de culte et aux lieux confessionnels. Il est déjà en vigueur pour la quasi-totalité des tribunaux et le sera pour les préfectures d’ici au 31 mars 2017.

Par ailleurs, avec le projet de loi Sécurité publique, le Gouvernement souhaite introduire dans notre législation des mesures importantes, susceptibles de satisfaire les revendications légitimes des policiers. Nous entendons ainsi clarifier et unifier les conditions d’usage des armes pour l’ensemble des forces de sécurité intérieure, évidemment dans le respect de nos engagements internationaux. Je pense également au recours au matricule administratif pour les policiers et les gendarmes dont la divulgation de l’identité leur ferait courir des risques. Enfin, il est prévu d’aligner sur le régime des peines encourues pour outrage à magistrat le cas des policiers et gendarmes.

Néanmoins, ces mesures ne doivent pas être considérées comme un solde de tout compte qui nous conduirait à relâcher notre vigilance, ni d’ailleurs à faire preuve de laxisme. Il est donc primordial que vous continuiez à échanger sur ce sujet avec les DDSP et les chefs de service en charge de la police judiciaire afin d’avoir en permanence un état des lieux précis de la situation sociale dans les services concernés.

Je vous demande d’aller au contact des agents eux-mêmes. Allez dans les commissariats de police, dans les brigades de gendarmerie. Parlez avec les fonctionnaires et les militaires, écoutez-les. Montrez leur la considération qui est la vôtre. C’est à vous, j’y insiste, et non seulement à vos directeurs de cabinet, qu’incombe cette responsabilité importante consistant à manifester votre soutien au plus près des forces de l’ordre.

Mais l’indispensable reconnaissance ne va pas non plus sans le rappel tout aussi nécessaire aux principes cardinaux de la Police nationale, ceux-là mêmes que tout fonctionnaire se doit de respecter : la discipline, le respect de la hiérarchie, la loyauté et, il faut le dire, l’obéissance aux ordres donnés. Les actes d’indiscipline, de dévoiement des matériels de l’État pour des motifs extérieurs au service, la falsification de comptes rendus d’activité, rien de cela ne peut être, ne doit être excusé. De la même façon, ne pas sanctionner les infractions routières mettant en jeu la sécurité n’est pas acceptable.

Par ailleurs, dans un contexte sensible pour l’ensemble des forces, je souhaite attirer votre attention sur la grande concertation menée au sein de la Gendarmerie nationale. L’un des objectifs majeurs du Gouvernement consiste à mieux utiliser nos ressources – et à en développer de nouvelles – pour gagner en efficacité, au profit de nos concitoyens. C'est tout le sens de la « feuille de route » participative engagée depuis maintenant trois ans. 370 mesures ont d’ores et déjà été prises, articulées autour de trois axes : le renforcement de l’action opérationnelle et la production de sécurité, l’allègement de l’administration et du fonctionnement de l’institution et la valorisation du personnel et des compétences.  C’est là une démarche de concertation inédite, innovante, grâce à laquelle une institution multiséculaire démontre qu’elle est capable, collectivement, de se réformer elle-même pour le bien de celles et ceux qui la font vivre et, partant, pour le bien de tous les Français.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale  a notamment engagé un travail important pour améliorer la protection des gendarmes et de leurs emprises. Aussi, je vous demande de soutenir les échelons locaux de commandement dans leurs relations avec les collectivités locales sur les questions de l’entretien et de la sécurisation des emprises de la Gendarmerie. Comme pour les policiers, nous devons aux gendarmes et à leurs familles des conditions de vie dignes et des locaux sécurisés, ainsi que des conditions d’évolution de carrière à la mesure des sacrifices qu’ils consentent au nom du bien commun. C’est la raison pour laquelle eux aussi bénéficient, au même titre que leurs collègues policiers, du Plan pour la Sécurité publique, ainsi que du Protocole social  « Parcours professionnels, carrières et rémunérations », accord historique signé en avril dernier avec les organisations syndicales de la Police nationale et le Conseil de la Fonction militaire de la Gendarmerie (CFMG). D’une manière générale, je serai bien sûr très attentif au respect de la parité entre les deux forces, pour lesquelles j’ai un respect égal.

Je veux à présent évoquer la question des flux migratoires, tout aussi importante dans le contexte actuel.

Un mot d’abord à propos de Calais. La réussite de l’opération de démantèlement du campement de la Lande, d’une ampleur inédite, est le résultat d’une impressionnante mobilisation collective des services de l’État, dont nous pouvons tous être fiers. Je veux bien sûr saluer l’action de la Direction générale des étrangers en France, mais aussi, évidemment, celle de votre collègue Fabienne BUCCIO, préfète du Pas-de-Calais, ainsi que ses équipes et l’ensemble des services de la préfecture du Pas-de-Calais.

Le succès indéniable de l’opération doit cependant s’accompagner du maintien de la plus grande vigilance. Le précédent record d’arrivée sur le territoire italien, qui datait de 2014, vient en effet d’être dépassé, avec 170.000 nouvelles arrivées comptabilisées en 2016. Par ailleurs, 300.000 demandeurs d’asile seront probablement déboutés dans les 12 mois à venir en Allemagne, ce qui peut engendrer des mouvements secondaires importants vers la France. C’est la raison pour laquelle nous venons d’ouvrir 15 ETP au titre du PLF 2017, afin de vous permettre de renforcer les guichets uniques de demandeurs d’asile (GUDA). Ces 15 ETP viennent ainsi s’ajouter aux 31 renforts de 2016.

Au plan opérationnel, les dispositifs de contrôle aux frontières, en premier lieu dans les Alpes-Maritimes – où je souhaite d’ailleurs me rendre très bientôt –, ont démontré leur efficacité. 54 000 mesures de non-admission ont ainsi été prises. Nous devons continuer à faire preuve de la plus grande fermeté. Par ailleurs, je vous demande de maintenir une présence des forces dans la profondeur du territoire, sur des missions de contrôles dans les gares et sur les principaux axes routiers. C’est là un effort indispensable qu’il nous faut réaliser afin de lutter contre l’immigration irrégulière et ses filières.

S’agissant de la mise à l’abri des migrants en besoin de protection, votre mobilisation a été décisive pour aboutir à la création de 450 centres d’accueil et d’orientation (CAO). Ces centres ont contribué à faire baisser la pression migratoire à Calais et en Ile-de-France. C’est grâce à leur création que nous avons pu conduire l’opération de démantèlement de la Lande. Mais il y a encore des difficultés : je pense aux manifestations anti-migrants, aux dégradations volontaires de locaux, à l’opposition de certains élus locaux. Je sais que la gestion quotidienne des CAO n’est pas toujours simple et constitue pour vous un point d’attention permanent. Mais je sais aussi que, pour la majorité des centres, cela se passe bien grâce à votre action, et je veux vous en remercier.

Concernant les CAOMI, qui ont permis d’accueillir 1 941 mineurs, dont une partie importante a déjà pu gagner le Royaume-Uni (815 mineurs), j’insiste sur le fait que le processus n’est pas terminé, contrairement à ce qui a pu être avancé dans les médias. La position du Royaume-Uni est claire sur ce point. Vous en avez été vous-mêmes avertis au cours de ces derniers jours. Je vous renvoie à cet égard à l’instruction qui vous a été transmise ce week-end. Nous ouvrons cette semaine la phase de transition avec l’annonce faire aux mineurs du rejet de leur demande de passer outre-Manche. Chaque mineur aura connaissance des raisons du rejet de sa demande et aura ainsi la possibilité de contester cette décision de refus. Il le fera d’autant plus facilement s’il reste en CAOMI, avec l’aide qui lui sera apportée en ce sens. Je vous demande de porter une attention toute particulière à ce public spécifique qui est celui des mineurs isolés. Nous continuons donc de travailler avec Londres, et nous le faisons avec fermeté. J’ajoute que nous travaillons également avec l’Irlande, laquelle s’est engagée à accueillir 200 mineurs.

Quelques mots, enfin, au sujet de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France. Ses principales dispositions sont entrées en vigueur le 1er novembre dernier. Elles rénovent les outils de lutte contre l’immigration irrégulière. Elles doivent permettre à vos services de retrouver une dynamique forte concernant le nombre d’éloignements contraints, notamment les plus difficiles à réaliser, c’est-à-dire ceux qui ont lieu vers des pays tiers de l’UE. Ces dispositions renforcent aussi la qualité de l’accueil des étrangers en situation régulière, en introduisant des mesures de nature à leur simplifier la vie. Parmi celles-ci, la généralisation des titres de séjour pluriannuel devrait permettre de réduire considérablement le nombre de passages des ressortissants étrangers en préfecture. Dès lors, vos services pourront se recentrer sur leur cœur de métier, ce qui vous permettra de consacrer les moyens ainsi dégagés à, d’une part, améliorer l’accueil des usagers et, d’autre part, mener les  nécessaires opérations de contrôle pour renforcer la lutte contre la fraude.

A ce titre, l’entrée en vigueur de cette disposition est en parfaite cohérence avec la démarche du Plan préfectures nouvelle génération (PPNG), au service de nos concitoyens comme des ressortissants étrangers en situation régulière à qui la France entend réserver le meilleur des accueils. J’attire enfin votre attention sur l’entrée en vigueur, le 1er janvier prochain, de la réforme de la procédure d’instruction des demandes de titres de séjour pour soins qui transfère la compétence des avis médicaux aux médecins de l’OFII. C’est là une réforme qui, je le sais, est attendu sur le terrain.

En 2016, vous vous êtes également pleinement engagés dans la réforme de l’administration territoriale. Celle de l’État, mais aussi celle des collectivités locales, donc celle de l’administration territoriale de la République, au sens de la loi fondatrice de 1992.

Je veux vous le dire d’emblée et avec clarté : j’ai pleinement conscience de ma responsabilité de ministre de l’Intérieur en ce domaine, à la fois comme ministre de l’administration territoriale de l’État et comme ministre des collectivités locales, compétence exercée conjointement avec Jean-Michel BAYLET. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de présenter, lors de mon premier Conseil des ministres, quelques heures seulement après ma nomination, le décret qui vient d’être publié au Journal officiel et qui définit la composition, le nom et le chef-lieu définitifs des régions, abrogeant de ce fait le décret de 1960 relatif aux circonscriptions administratives régionales de l’État.

La création des grandes régions, le 1er janvier dernier, s’est très bien passée, et ce grâce à votre action. Désormais, nous devons veiller à mieux articuler l’échelon régional et l’échelon départemental. En la matière, mon mot d’ordre est clair : nous devons continuer de conforter l’échelon départemental, a fortiori avec de grandes régions, car la force de l’État, c’est son ancrage territorial.

C’est d’ailleurs la grande force de notre ministère, qui est et demeurera toujours le ministère de l’État et des territoires.

Aujourd’hui, la réforme de l’administration territoriale se poursuit. Après l’adoption de la Charte de déconcentration, engagée par Bernard CAZENEUVE il y a deux ans, et dont je souhaite dynamiser la mise en œuvre, nous confortons aujourd’hui notre réseau départemental grâce au Plan Préfectures nouvelle génération (PPNG). Celui-ci permet de consolider les missions prioritaires assurées par notre réseau, dans un contexte de réductions des effectifs. Par là même, il renforce l’État de proximité, il renforce notre ancrage territorial.

Je veux y insister : le Préfet est au cœur de l’administration territoriale de l’État. Comme je l’ai dit, il joue un rôle majeur d’animateur et de coordonnateur des politiques publiques dans les territoires. Il se trouve ainsi au cœur même de l’interministériel, y compris dans la modernisation des moyens de fonctionnement de l’État qu’il faut améliorer.

A l’échelon infra-départemental, auquel je suis particulièrement attaché en tant qu’élu local, vous avez également réduit de près de 40% le nombre d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Je tiens à vous en féliciter, car c’est là une réforme historique, menée à bas bruit, et qui se met en place demain. Alors que vous êtes actuellement en train de prendre les arrêtés composant les conseils communautaires, dont les règles ont dernièrement beaucoup évolué, je vous remercie de votre implication personnelle dans cette ultime étape, qui doit permettre de consolider le travail accompli. Je souhaite que vous continuiez de mobiliser, début 2017, l’ensemble des services sous votre responsabilité, dont les Directions départementales des finances publiques, pour que les élus ne se sentent pas abandonnés à la date couperet du 1er janvier, mais au contraire pleinement conseillés et accompagnés tout au long de l’année 2017, année de bascule. Bien conçue, la réforme doit désormais être bien exécutée. Comme vous le savez, des accords locaux injustes, voire illégaux, sur la répartition des sièges au sein des nouveaux conseils communautaires, peuvent engendrer des frustrations et des rancœurs et entraver durablement la construction des projets intercommunaux. Au plan national, c’est le bilan de la réforme qui est en jeu. Je vous demande donc de mobiliser vos sous-préfets, mais aussi de vous mobiliser personnellement.

De notre côté, nous restons vigilants pour conforter votre action locale, de même que nous suivons attentivement, avec le Directeur général des collectivités locales, le contentieux qui naîtrait de ces schémas. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous pourvoir systématiquement en appel ou en cassation dès lors que des décisions de première instance nous paraissent inadaptées, comme celles qui feraient du seuil de 5 000 habitants fixé par la loi NOTRe une simple orientation et non un impératif, décisions que Catherine FERRIER, dans le Lot, et Jean-Michel MOUGARD, dans le Tarn, connaissent bien.

S’agissant de l’organisation de l’État, nous avons profité de cette réforme pour adapter les arrondissements, dont les ¾ ont été alignés sur ces intercommunalités rationalisées et redessinées, en même temps que nous procédons à 6 jumelages et à 2 fusions d’arrondissements. Vous avez su mener un dialogue social exemplaire, qui a rassuré nos agents et convaincu les collectivités locales, et je veux vous en remercier. Je souhaite, comme le Premier ministre, que cette réforme se poursuive. Les échéances électorales ne facilitent pas les réformes. Mais je vous demande de maintenir ce chantier ouvert dans les départements où des évolutions ont été esquissées ou bien vous apparaîtraient possibles. Ce chantier ne doit pas comporter de dates couperet, mais doit être ouvert en permanence. Je vous demander de vous y impliquer là aussi personnellement. Là aussi, vous devez faire de la pédagogie, vous devez convaincre qu’il est absolument nécessaire d’adapter notre réseau pour le préserver.

Je souhaite revenir à présent quelques instants sur le  Plan Préfectures nouvelle génération, indissociable de la réforme de l’échelon infra-départemental. Il constitue l’une des réformes structurelles du quinquennat. Je veux la concrétiser, la mener à son terme complètement. C’est la raison pour laquelle je me rendrai, dès la fin de la semaine, dans le Cher pour échanger avec les agents, les représentants des personnels nationaux et locaux, que connaît bien la préfète Nathalie COLIN.

Nous sommes désormais entrés pleinement dans la phase opérationnelle de la réforme, qui doit aboutir, courant 2017, à la création de 58 centres d’expertise et de ressources titres (CERT). Grâce au travail mené par le Secrétariat général en lien étroit avec vous, la réalisation du schéma d’emploi pour 2017, dont mon prédécesseur a obtenu qu’il se limite à seulement - 500 ETP, doit permettre de mettre en œuvre la réforme PPNG l’année prochaine comme prévu. Les effectifs libérés viendront renforcer les quatre missions prioritaires que nous avons identifiées : la gestion locale des crises, l’ingénierie territoriale, la lutte contre la fraude documentaire, et le conseil juridique et le contrôle de légalité.

Pour réussir la mise en œuvre du PPNG, vous êtes pleinement mobilisés pour accompagner les personnels, motiver vos équipes à s’investir sur ces nouvelles missions et donner du sens à leur action. Je souhaite qu’en 2017, vous mettiez autant d’ardeur à convaincre les Français de l’intérêt de cette réforme, laquelle constitue un véritable progrès pour les usagers. Je pense aux potentialités offertes par l’outil numérique et la dématérialisation pour simplifier les démarches et la vie quotidienne de nos concitoyens. Loin d’éloigner l’État des territoires, cette réforme, au contraire, doit l’en rapprocher et y renforcer sa présence.

S’agissant des polémiques qui entouré la publication du décret TES, je sais que les retentissements ont été bien moins importants sur le terrain que dans les cénacles parisiens. Cependant, je souhaite que vous puissiez rappeler à nos concitoyens que ces nouvelles modalités de délivrance des cartes nationales d’identité ne doivent pas susciter d’inquiétudes sur le plan des libertés publiques. Des éléments de langage précis vous ont déjà été adressés il y a plus d’un mois. Dans le doute, n’hésitez pas à nous solliciter. Sans être exhaustif, je voudrais insister sur trois points essentiels que vous devez parfaitement maîtriser : les finalités du fichier, l’enjeu de son architecture, et la question de la sécurité des données.

S’agissant des finalités, il est primordial d’être extrêmement clair sur le fait que ce fichier ne peut être utilisé qu’aux seules fins d’authentifier des titres, et  non d’identifier des personnes, et ce dans un objectif de lutte contre la fraude documentaire et contre les usurpations d’identité. En aucun cas les données qu’il contient ne peuvent être employées pour identifier les personnes. L’architecture du fichier est tout entière construite pour cantonner celui-ci dans ces finalités. Un lien unidirectionnel lie les données alphanumériques aux données biométriques : on ne peut accéder aux données biométriques qu’en passant par les données  alphanumériques. L’inverse est techniquement impossible. Je souhaite que vous insistiez sur ce point qui n’est pas seulement un point technique, mais également une garantie politique.

S’agissant de la sécurité de l’hébergement des données, les garanties les plus fortes ont été prises et elles seront renforcées si cela s’avère nécessaire. L’ANSSI et la DINSIC doivent me remettre un rapport le 15 janvier à cet effet. Toutes les recommandations utiles seront suivies, à condition qu’elles ne remettent pas en cause la réforme et son calendrier.

Enfin, une procédure de consentement préalable, non pas au recueil des empreintes digitales, qui demeure obligatoire, mais bien à leur versement dans TES, a été actée. Elle suppose une évolution réglementaire. En attendant, le décret du 28 octobre s’applique sur l’ensemble du territoire. Cela signifie, dans les Yvelines et en Bretagne, qui constituent des territoires pilotes, que, si certains de nos concitoyens refusent l’archivage numérique de leurs empreintes digitales, ils doivent dès lors être invités à différer leur demande de CNI, car leurs empreintes, une fois versées dans TES, le seront irréversiblement. Je rappelle que ces empreintes, a minima papier, sont indispensables, non pas aux préfets, mais aux juges dans le cadre de réquisitions judiciaires, et uniquement dans ce cadre-là. Surtout, à tous, je demande, comme le fait le Secrétaire général au niveau national avec les responsables de l’AMF et de l’AMRF avec lesquels les discussions sont aujourd’hui stabilisées, de poursuivre le travail de dialogue avec les élus sur l’évolution des modalités de délivrance de la CNI. Nombreux sont les maires inquiets ; ils se sentent dépossédés d’une mission symboliquement forte, qui les lie à leurs administrés. Même si, je le rappelle, la carte d’identité, valable désormais 15 ans, est loin de donner lieu à une démarche quotidienne. Là encore, vous devez faire œuvre de pédagogie et veiller à bien diffuser les messages adéquats. Toutes les mairies pourront, si elles le souhaitent, continuer à accueillir nos concitoyens pour les accompagner dans leurs démarches de demande de titre. Je ferai en sorte, au niveau national, d’éviter de rouvrir la polémique au 15 janvier sur le plan technique et numérique ; aussi je souhaite que vous fassiez en sorte d’éviter qu’une autre s’ouvre en début d’année du côté des élus locaux. Sinon, c’est l’ensemble de la réforme qui en sera fragilisée. Nous devons donc tout faire pour garantir le succès de PPNG qui conditionne la stabilité et la force de notre réseau préfectoral dans les 10 prochaines années.

Nous construisons aussi l’avenir en confortant la laïcité et en bâtissant une relation apaisée avec l’islam de France.

Un certain nombre d’échéances importantes étaient attendues pour la fin de l’année. Au lendemain de la troisième instance de dialogue avec l’islam de France, ces chantiers sont bien avancés, voire, pour certains, achevés. Deux décrets ont été publiés le 6 décembre, le premier ôtant à la Fondation des Œuvres de l’Islam de France la reconnaissance d’utilité publique, entraînant de fait sa dissolution, le second conférant à la Fondation de l’Islam de France cette reconnaissance. J’ai rencontré les représentants des membres fondateurs, jeudi dernier, pour les remercier de leur engagement. Le premier Conseil d’administration de la Fondation a eu lieu le jour même.

Comme vous le savez, la Fondation a un objet exclusivement culturel. Elle ne peut intervenir dans le financement des lieux de culte, ni dans la formation théologique des imams. Elle peut notamment soutenir le développement de la formation profane des imams, mais aussi contribuer à relancer la recherche en islamologie, trop longtemps négligée dans les universités françaises.

Ces projets culturels favoriseront la meilleure connaissance par le grand public de la culture – ou plutôt devrais-je dire des cultures musulmanes. La méconnaissance est un vecteur de peur. En contribuant au dialogue des cultures, la Fondation permettra, je n’en doute pas, de désamorcer des préjugés et d’apaiser des tensions.

L’organisation de la future association cultuelle nationale en charge du financement du culte musulman suit, quant à elle, son cours. Bien évidemment, l’État ne saurait être partie prenante dans la création d’une association cultuelle. Ce n’est d’ailleurs pas l’intérêt des fidèles, qui doivent garder, ainsi que le garantissent les règles de la laïcité, une totale autonomie dans l’organisation de leur culte. C’est donc cette association qui remplira la double mission de financer la construction des lieux de culte et la formation proprement religieuse des imams. L’État apporte en revanche son expertise juridique, de manière à ce que le cadre de gouvernance de l’association soit adapté au regard de ses missions. Il invite par ailleurs l’ensemble des acteurs musulmans à se saisir de ce dossier essentiel, de manière à ce qu’ils identifient ensemble des sources de financement pérennes et transparentes.

Parallèlement à ces chantiers, la troisième instance de dialogue avec l’islam a eu lieu hier au ministère. Vous avez vous-mêmes participé à sa préparation, en réunissant, au sein des préfectures, des personnalités musulmanes représentatives, et je vous en remercie. Les participants à cette dernière session ont pu échanger sur le lancement de la Fondation, sur la formation des imams, et sur le financement du culte. Je leur ai rappelé les principes fondamentaux qui guident notre action : la pleine inscription dans le cadre républicain, mais aussi l’invitation que nous leur faisons à s’emparer de ces sujets et à animer cet islam de France qui est le leur.

Pour terminer, je souhaite évoquer quelques chantiers en cours en matière de sécurité civile.

Alors que vous êtes sollicités pour participer aux traditionnelles fêtes de la Sainte-Barbe, je souhaite prendre quelques instants pour parler du climat social dans les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) et dire quelques mots de la proposition de loi BACQUET, dont je suis le premier signataire d’ailleurs.

Dans un contexte traditionnellement défavorable d’échéances électorales, le climat social dans les SDIS se tend : les tracts et les manifestations locales et nationales se multiplient, comme ce fut le cas le 24 novembre dernier à Paris. Par ailleurs, certains sapeurs-pompiers se sont associés aux mouvements des policiers en colère. Les revendications, souvent liées à des enjeux très locaux, sont récurrentes. Elles concernent d’une part la baisse des budgets de certains SDIS, et d’autre part les difficultés rencontrées dans le quotidien opérationnel. Je pense notamment aux incivilités et aux agressions intolérables, mais aussi à des pratiques managériales autoritaires de l’encadrement, ainsi qu’à l’insuffisance des réformes statutaires.

Plusieurs chantiers sont engagés sous l’égide de la Délégation générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises pour répondre à ces préoccupations. Les syndicats y sont associés et le dialogue social se poursuit dans de bonnes conditions.

S’agissant de l’actualité législative, la proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, portée par le député Jean-Paul BACQUET, a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 29 novembre dernier. Ce texte sera présenté en séance au Sénat le 20 décembre, dans la perspective d’un vote conforme. Cette proposition de loi introduit deux réformes majeures pour les sapeurs-pompiers volontaires et professionnels. La première concerne l’évolution du régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) pour les sapeurs-pompiers volontaires après 20 années de service et la création d’une filière A + pour les professionnels. La seconde réforme vous concerne davantage, en ce qu’elle propose la création d’une nouvelle dotation d’investissement pour les projets structurants en matière de sécurité civile, qui, pour 2015, sera abondée à hauteur de 25 millions d’euros. L’enjeu pour l’État est d’accompagner les SDIS dans des investissements d’envergure nationale, comme, par exemple, la création d’un nouveau système national de gestion opérationnelle.

Je conclurai mon propos par quelques mots sur la sécurité routière. Les actions que vous avez engagées au mois de novembre ont permis d’épargner 39 vies par rapport à novembre 2015 et d’enregistrer à ce stade une tendance favorable pour les 11 premiers mois de l’année (baisse du nombre de tués sur la route de -0,5 %). Pour autant, ces résultats restent fragiles. Nous devons donc rester vigilants. Dans le prolongement des instructions qui vous ont été adressées le 19 octobre et le 2 décembre, je vous demande de mobiliser résolument l’ensemble des moyens à votre disposition et plus particulièrement pendant les vacances de fin d’année, afin d’accroître la visibilité de vos dispositifs opérationnels, de cibler spécifiquement la répression des conduites à risques, de médiatiser vos actions en diffusant un message à la fois ferme et pédagogique, et enfin de rehausser de manière substantielle le taux d’emploi des radars embarqués, qui reste encore très faible, trop faible. A cet égard, l’externalisation de ces radars se fera dès janvier prochain, et je souhaite que le dispositif se mette en place de la façon la plus vigoureuse et efficace qui soit. Je compte là aussi sur votre engagement.

Mesdames et Messieurs, je veux à nouveau vous remercier très chaleureusement pour le très grand engagement avec lequel vous accomplissez vos missions quotidiennes. Comme je l’ai dit, c’est un honneur pour moi de diriger une institution qui abrite de grands serviteurs de l’État tels que vous.

Je vous remercie.