Discours de M. Bruno Le Roux, ministre de l’Intérieur, prononcé lors de la cérémonie de remise de titres de séjour « Passeports Talents » à la Préfecture de la Seine-Saint-Denis, Bobigny, le 16 mars 2017.
- Seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Directeur de l’Immigration,
Monsieur le Président de la Chambre des métiers et de l’artisanat,
Madame la Directrice de l’Unité départementale de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi,
Chers Margarita BENÍTEZ MARTÍNEZ, Sergio DARÁN MARTÍNEZ, Luis Gustavo HERNANDEZ CARDENAS, David MADRA et Wilson KAI LUN,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un très grand plaisir que je suis aujourd’hui parmi vous, à la préfecture de la Seine-Saint-Denis.
Bien sûr parce que c’est un territoire qui, comme chacun le sait, m’est particulièrement cher, mais aussi – et surtout – parce que la cérémonie qui nous réunit revêt une forte dimension symbolique. C’est la raison pour laquelle je tenais absolument à être présent ce matin à vos côtés.
C’est en effet avec beaucoup de fierté que je vais dans quelques instants remettre un titre de séjour « Passeport Talent » à cinq jeunes gens venus de différents horizons – du Mexique, d’Ouganda et de Chine –, cinq talents particulièrement brillants et prometteurs.
Chacun d’entre eux s’est illustré par son parcours et son projet professionnel de start-up, engagé, innovant et imaginatif. Et surtout chacun d’entre eux a émis le souhait de venir poursuivre ce parcours et concrétiser ce projet en France, dans notre pays, et tout particulièrement dans le département de la Seine-Saint-Denis, où nombre d’initiatives innovantes voient le jour.
S’ils ont choisi la France, c’est parce qu’ils savent la réputation de ses chercheurs et de ses ingénieurs, sa tradition d’innovation technologique et le dynamisme de son économie.
Ils ont fait le pari qu’ils trouveraient chez nous les opportunités qu’ils recherchaient en termes de développement, d’infrastructures, et d’accompagnement, de rencontres et d’échanges, d’approfondissements et de découvertes.
Oui, s’installer, ne serait-ce que pour quelques années, dans un autre pays que son pays d’origine, c’est toujours un pari, et c’est aussi un défi.
Et ce pari, ce défi, ils ont eu raison de le relever. C’est là un acte de confiance qu’ils accomplissent à l’égard de la France.
C’est pourquoi nous nous devons de les accueillir, dans les meilleures conditions qui soient. Et c’est ce que nous faisons, aujourd’hui, à bras ouverts. Car nous sommes heureux qu’ils aient fait le choix de notre pays pour continuer leur parcours professionnel.
Aussi – et je me tourne vers vous, Margarita BENÍTEZ MARTÍNEZ, Sergio DARÁN MARTÍNEZ et Luis Gustavo HERNANDEZ CARDENAS, David MADRA et Wilson KAI LUN – je veux vous le dire très simplement : nous vous souhaitons la bienvenue en France.
C’est une chance pour vous, car vous allez bénéficier de notre expérience et de notre savoir-faire. Mais c’est aussi une chance pour nous, car nous allons nous-mêmes bénéficier de votre savoir et de votre capacité d’innovation.
C’est ainsi un cercle vertueux que nous initions et que nous entretenons, celui de la connaissance et de la création.
C’est dans l’échange et le partage, dans la confiance mutuelle et la confrontation complice des points de vue que l’on peut imaginer les solutions novatrices qui, demain, bouleverseront nos économies et nos modes de vie.
Après ce séjour au titre du « Passeport Talent », peut-être retournerez-vous dans votre pays ; ou bien, au contraire, peut-être déciderez-vous de rester plus longtemps ici, si vous en avez la possibilité, jusqu’à, qui sait, vous y installer durablement.
Quoi qu’il en soit, vous serez désormais les ambassadeurs à la fois de votre pays d’origine auprès des Français, et de la France auprès de vos compatriotes. Et c’est là quelque chose qui vous restera pour votre vie et pour vos évolutions futures.
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Le « Passeport Talent », Mesdames et Messieurs, c’est l’une des grandes innovations qu’a introduites dans notre législation la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers. Une loi de progrès et d’ouverture dont nous avons lieu d’être fiers, dans la mesure où elle vise à mieux accueillir et à mieux intégrer les étrangers qui viennent séjourner légalement sur notre sol.
L’un des objectifs que nous poursuivions avec cette loi consistait précisément à rendre la France plus attractive pour les talents et pour les étudiants étrangers.
La mondialisation entraîne en effet une rude concurrence entre les Etats pour attirer les cerveaux les plus brillants, les créateurs et les artistes les plus prometteurs, les meilleurs étudiants.
Ne pas favoriser leur accueil serait contraire à la fois aux intérêts et à la vocation de notre pays, à notre compétitivité et à notre rayonnement. Se priver de ces talents à cause d’une réglementation par trop tatillonne reviendrait tout simplement à se condamner à un irrémédiable déclin.
Au contraire, notre objectif, c’est que la France assume sa place, son rôle, son rang dans la mondialisation, avec confiance et optimisme.
C’est la raison pour laquelle, dès 2012, nous avons rompu avec la logique du soupçon et celle de l’entrave que prônaient nos prédécesseurs.
Le symbole de cette politique, c’était la fameuse circulaire GUÉANT que nous avons abrogée dès notre arrivée au pouvoir, parce qu’elle était d’une absurdité totale et qu’elle témoignait, il faut bien le dire, d’une rare méconnaissance des réalités du monde contemporain.
A cause d’elle, le nombre d’étudiants étrangers accueillis légalement sur notre sol avait en effet considérablement chuté. La circulaire GUÉANT, c’était 6.000 étudiants en moins en 2012.
Je constate d’ailleurs que, malheureusement, certains candidats à l’élection présidentielle, à droite et à l’extrême droite, entendent renouer, s’ils parviennent au pouvoir, avec la logique du soupçon. Cela représenterait évidemment une véritable régression, et nous devons tout faire pour éviter qu’elle ait lieu.
Le « Passeport Talent », en vigueur depuis le 1er novembre dernier, c’est l’antithèse de cette conception réactionnaire. Grâce à lui notamment, nous avons amélioré, simplifié et modernisé les procédures d’accueil des talents étrangers dans notre pays.
La durée du séjour peut désormais aller jusqu’à quatre ans, et non plus trois. En outre, cette carte de séjour est renouvelable. Elle est délivrée à la personne concernée, mais elle peut aussi l’être aux membres de sa famille, qui ont par ailleurs le droit d’exercer une activité professionnelle. De cette façon, nous avons sécurisé le droit au séjour des talents étrangers.
Le « Passeport Talent » a également élargi les critères de délivrance pour mieux correspondre aux réalités de notre époque. Il peut aussi bien être accordé à de jeunes artistes qu’à des créateurs reconnus, à des intellectuels et à des chercheurs comme à des entrepreneurs, à des porteurs de projets innovants comme à des salariés hautement qualifiés, des sportifs, des interprètes, des mandataires sociaux, etc. En tout, nous avons défini 10 catégories possibles, quand il y en avait seulement 4 en vigueur dans la législation précédente.
Désormais, les titres de séjour destinés aux talents sont plus lisibles, plus adaptés, plus clairs, et ils tiennent davantage compte de la diversité des mobilités internationales liées à la connaissance, au savoir et à la culture.
Enfin, avec la valorisation du « Passeport Talent » et la mise en place de guichets spécifiques, nous avons simplifié et accéléré les procédures d’instruction des dossiers, dans nos ambassades et nos consulats comme dans nos préfectures. Nous devons continuer en ce sens, car c’est là une dimension essentielle de la réforme.
La souplesse des démarches administratives, la qualité de l’accueil et du service rendu, la rapidité dans le traitement de la demande et l’obtention du titre de séjour constituent autant de critères qui poussent des étrangers à choisir tel pays plutôt qu’un autre pour s’y installer.
A cet égard, je veux souligner l’excellent travail réalisé de façon conjointe par les services du ministère de l’Intérieur et du ministère des Affaires étrangères et du Développement international.
Et je veux profiter de l’occasion qui nous réunit ce matin pour rendre hommage à l’ensemble des personnels mobilisés, à quelque niveau que ce soit, par la mise en œuvre de la loi du 7 mars 2016 et notamment du « Passeport Talent ». Je salue ainsi le dynamisme des services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, à la pointe sur ce sujet.
Cette mobilisation est d’autant plus importante que notre objectif est de délivrer chaque année 10 000 « Passeports Talents », à l’image de ceux que j’ai le privilège de remettre aujourd’hui.
J’ajoute d’ailleurs, pour être complet, que leurs 5 bénéficiaires sont venus en France dans le cadre du projet French Tech Ticket, lancé il y a maintenant deux ans, dans la continuité des Assises de l’Entrepreneuriat, par le ministère de l’Economie, le secrétariat d’Etat au Numérique et la « Mission French Tech » de Bercy, en lien avec les préfectures, la Direction de l’Immigration et les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi.
C’est là un projet qui vise à attirer dans notre pays des talents étrangers qui souhaitent spécifiquement développer un projet innovant de start-up. Les personnes sélectionnées reçoivent une aide financière, le soutien d’un incubateur, ainsi que, pour les ressortissants des pays tiers à l’Union européenne, un titre de séjour. Ce titre de séjour, vous l’aurez compris, c’est désormais le « Passeport Talent ».
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Mesdames et Messieurs, si la France tient aujourd’hui son rang sur la scène internationale, c’est notamment parce qu’elle n’a jamais cessé d’être une terre d’immigration. Tout au long de notre histoire moderne, l’immigration maîtrisée n’a jamais cessé d’être à la fois une chance et une nécessité pour notre pays.
En retour, les étrangers qui sont venus s’installer chez nous ont bénéficié des lois de la République. C’est à ce titre que leurs histoires, peu importe la suite qu’ils leur ont donnée, se sont fondues dans une histoire commune : notre histoire.
Les pays repliés sur eux-mêmes sont condamnés au silence. Aucun patriote – je dis bien : aucun patriote – ne pourrait se satisfaire d’une petite France qui n’aurait plus rien à dire au monde. Notre pays n’est jamais plus grand que lorsqu’il est ouvert sur les lointains, d’autant plus curieux des autres qu’il est plus sûr de lui-même.
Accueillir les talents venus d’ailleurs, de même qu’intégrer les étrangers qui ont droit au séjour, c’est donc montrer que nous croyons en la France.
C’est aussi témoigner de notre sens de l’universel et de notre foi inébranlable dans les ressources de l’individu, quelles que soient ses origines. C’est cela, et rien que cela, notre identité. Et cela, Mesdames et Messieurs, c’est la France.
Margarita BENÍTEZ MARTÍNEZ, Sergio DARÁN MARTÍNEZ, Luis Gustavo HERNANDEZ CARDENAS, David MADRA et Wilson KAI LUN : bienvenue en France !