Inauguration des nouveaux locaux du Centre interdépartemental de déminage de Versailles

Inauguration des nouveaux locaux du Centre interdépartemental de déminage de Versailles
9 juin 2016

Discours de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur

Inauguration des nouveaux locaux du Centre interdépartemental de déminage de Versailles

Marly-le-Roi – 9 juin 2016


-Seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet,

Monsieur le Député-Maire de Versailles,

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,

Monsieur le Maire de Marly-le-Roi,

Mesdames et Messieurs les élus,

Monsieur le Directeur général de la Sécurité civile et de la Gestion des crises,

Mesdames et Messieurs,

Plus de 70 ans après sa création, le Service du déminage joue toujours un rôle de premier plan pour protéger les Français face aux menaces terroristes qui sont susceptibles de frapper notre territoire, mais aussi face à l’ensemble des risques liés aux explosifs.

Chaque année, en effet, les 310 agents du Service du déminage, répartis dans 23 centres sur l’ensemble du territoire national, en métropole comme outre-mer, effectuent plus de 12 000 interventions et neutralisent plusieurs centaines de tonnes de bombes et de munitions – encore plus de 500 tonnes d’explosifs au cours de l’année passée. Je pense bien sûr notamment aux milliers d’obus et de munitions que les deux guerres mondiales ont laissés dans notre sol. Encore aujourd’hui, ils représentent un risque potentiel dans les régions de France marquées par les combats de l’époque.

Depuis 1945 et au fil des années, tandis que les menaces auxquelles nous devons faire face ne cessaient d’évoluer, le Service de déminage s’est vu confier des missions nouvelles, qui impliquent une formation de très haut niveau et des moyens techniques de plus en plus sophistiqués. Les femmes et les hommes qui composent ce service d’élite participent en effet, chaque année, à la sécurisation de près de 300 voyages officiels et des déplacements des plus hautes autorités de l’Etat, ainsi qu’à la détection, l’enlèvement, la neutralisation et la destruction de tout objet suspect, et notamment d’engins explosifs de type artisanal. Ils partagent également leur très grande expertise et leurs compétences rares dans le domaine des explosifs avec les autres services spécialisés du ministère de l’Intérieur – je pense bien sûr aux forces d’intervention –, au cours de la centaine de missions d’appui qu’ils accomplissent chaque année. Je n’oublie pas non plus les interventions et le travail d’expertise qu’ils conduisent dans de nombreux pays étrangers, car leur savoir-faire –  celui de la France – est, dans ce domaine aussi, pleinement reconnu au niveau international.

Chacun en a conscience : si les conditions d’intervention n’ont bien sûr cessé de s’améliorer, les opérations de déminage n’en demeurent pas moins délicates, aujourd’hui comme hier, et la moindre erreur peut être fatale. « Réussir ou périr » : telle est la devise du Service. Elle dit bien le caractère périlleux de la tâche qu’accomplissent ses agents. Elle rappelle aussi leur engagement total au service de la sécurité des Français.

En étant présent aujourd’hui parmi vous, à Marly-le-Roi, pour l’inauguration des locaux du nouveau Centre interdépartemental de déminage de Versailles, je souhaite rendre hommage à l’ensemble des démineurs, à ces femmes et à ces hommes au courage et au sang-froid exceptionnels, qui risquent leur vie pour protéger celle de leurs concitoyens.

Des moyens humains supplémentaires

Et parce qu’ils s’acquittent de missions extrêmement dangereuses mais néanmoins indispensables, le Gouvernement se doit de leur donner les moyens de travailler dans les meilleures conditions possibles d’efficacité et de sécurité.
C’est la raison pour laquelle nous avons lancé, dès le mois de février dernier, la rénovation du Centre interdépartemental de déminage de Versailles, qui est l’un des plus anciens de France, puisqu’il a été créé en 1947.

Il assure aujourd’hui la couverture opérationnelle de pas moins de onze départements de la région parisienne et de la région Centre-Val-de-Loire, mais aussi, en Bourgogne-France-Comté, jusqu’aux confins des départements de l’Yonne et de la Nièvre. Il contribue par là même à la sécurisation de plusieurs sites particulièrement sensibles, notamment les aéroports de Roissy, Orly et du Bourget, auxquels viendra s’ajouter celui de Beauvais à partir de l’année prochaine.

Actuellement, le Centre interdépartemental de Versailles rassemble 46 agents répartis sur les sites de Marly-le-Roi, Roissy et Orly. Tous sont des professionnels de très haut niveau, que nous allons renforcer dans les mois qui viennent.

Je vous annonce ainsi que, d’ici l’année prochaine, cinq démineurs supplémentaires vont rejoindre le Centre interdépartemental de déminage de Versailles, dans le cadre du Pacte de Sécurité annoncé par le Président de la République, le 16 novembre dernier, à Versailles, devant le Parlement réuni en Congrès.

Grâce à ces renforts, ce sont donc 51 démineurs en tout qui travailleront à garantir la sécurité des habitants de la grande région parisienne contre les menaces terroristes et tous les risques liés aux explosifs.

Parallèlement, nous avons d’ores et déjà programmé pour l’année prochaine la deuxième étape des travaux afin de parachever l’extension et la modernisation du Centre.

Au total, l’Etat aura investi 500 000 euros dans cette opération importante, notamment pour tenir compte de l’arrivée des renforts que je viens d’évoquer.

Un service pleinement investi dans la lutte contre le terrorisme

Aujourd’hui, nous devons affronter de nouveaux défis. Le premier d’entre eux – le plus grave – est celui de la lutte contre le terrorisme. A cet égard, les attentats de janvier et de novembre 2015 nous l’ont démontré de façon tragique : nous avons changé d’époque.

Chacun le sait, le terrorisme djihadiste constitue la principale menace. Comme nous l’avons constaté lors des attentats de Paris et de Bruxelles, les modes opératoires auxquels recourent nos ennemis ont évolué.

Ainsi, le 13 novembre dernier, pour la toute première fois sur notre sol, des attentats ont été perpétrés au moyen de ceintures d'explosifs. Le 22 mars, les terroristes de Bruxelles ont également renoué avec la technique de l’attentat à la bombe dans les transports en commun. Alors que voici peu ils étaient encore inédits en Europe et sur notre propre territoire, les attentats-suicides et les attentats multi-sites constituent désormais des types d’attaques terroristes auxquelles il nous faut faire face.

Par conséquent, en plus d’assurer leurs traditionnelles missions de collecte et de destruction des munitions de guerre et des explosifs artisanaux, et de participer aux grands chantiers de dépollution chimique, les démineurs sont aujourd’hui en première ligne de la lutte antiterroriste.

Plus que jamais, face à une telle menace, il est essentiel de disposer d’un service de déminage d’une extrême réactivité, susceptible de répondre à tout instant à une attaque multi-sites dès lors que celle-ci survient. Il nous faut ainsi sans cesse anticiper l’évolution des menaces, les formes nouvelles d’attaques auxquelles nous pouvons être amenés à répondre et les cibles inédites que nos ennemis peuvent chercher à frapper.

Parce que le risque zéro n’existe pas face à la menace terroriste, les pouvoirs publics ont toujours l’obligation de se préparer au pire et de prévoir en amont les moyens de réagir à une séquence d’attentats de haute intensité. C’est dans cet esprit d’anticipation que les services du ministère de l’Intérieur ont travaillé au cours de ces derniers mois et plus largement depuis 2012.

A cet égard, vous serez bien sûr tout particulièrement sollicités dans le cadre de l’Euro 2016, puisque vous aurez la responsabilité de sécuriser l’ensemble des stades et des « fan zones », mais aussi des camps de base, des hôtels de transfert et des moyens de transport utilisés par les équipes qui participeront à cet événement sportif d’ampleur internationale.

Cet effort mobilisera l’ensemble des centres de déminage métropolitains durant toute la durée de la compétition. Je sais qu’il s’agit là d’un engagement important, qui vient s’ajouter aux missions habituelles assurées par l’ensemble des démineurs, mais cet engagement est absolument indispensable : il est en effet l’une des conditions et des garanties du bon déroulement de l’Euro 2016. J’ajoute que, durant toute la durée de la compétition, des démineurs issus de pays participants, notamment l’Italie et l’Espagne, viendront également nous prêter leur concours et renforcer nos équipes. Je tiens à les en remercier chaleureusement.

Parce que son action est décisive pour la sécurité du pays, j’ai tenu à ce que le Service de déminage dispose des moyens nécessaires pour assumer pleinement ses missions, dans le contexte nouveau que je viens de rappeler.

Dans le cadre du Pacte de Sécurité décidé par le Président de la République, je vous annonce que 36 emplois vont ainsi être créés, d’ici 2017, au sein du Service du déminage, parmi lesquels 30 postes de démineurs et 6 postes d’agents administratifs. Ces derniers prendront en charge une partie des tâches administratives, vous permettant ainsi de vous concentrer sur votre cœur de métier. La campagne de recrutement ouverte depuis début janvier a d’ores et déjà permis d’intégrer les premiers effectifs qui sont actuellement en formation. Ces derniers  seront très rapidement opérationnels, puisqu’ils rejoindront leurs affectations dès le mois de juillet.

Des moyens matériels renforcés et modernisés

J’ai également veillé à vous donner les moyens matériels dont vous avez besoin.

D’ores et déjà, 720 000 euros ont été consacrés à la modernisation de vos équipements. Dans le cadre du Plan de lutte anti-terroriste (PLAT) décidé par le Premier ministre en janvier 2015,  le Service de déminage a acquis 25 nouvelles tenues lourdes et 30 nouvelles tenues légères d’intervention, offrant aux agents une meilleure protection contre les effets d’une explosion. Bientôt, vous serez également dotés de nouveaux « canons disrupteurs », lesquels pourront être utilisés sur un robot pour démanteler les éléments d’une bombe présente dans un colis suspect. En outre, vous disposerez de systèmes de brouillage visant à empêcher le déclenchement à distance des explosifs. Dans le même temps, nous allons renforcer et moderniser votre flotte de véhicules d’intervention, grâce au renouvellement de 15 engins et à l’achat de 4 véhicules supplémentaires pour les missions relatives aux engins explosifs artisanaux.

J’ai également pris la décision de vous autoriser à porter une arme dans le cadre de vos missions. Comme vos collègues policiers, vous intervenez en effet souvent sur des situations complexes, dans des circonstances difficiles, voire hostiles, et, tout comme eux, vous pouvez être la cible de la haine et de la violence au simple motif que vous portez l’uniforme et que par là même vous incarnez la force publique et l’Etat de droit.

Protéger celles et ceux qui protègent les Français : tel est mon devoir de ministre de l’Intérieur. Telle est ma responsabilité à l’égard des femmes et des hommes qui, au péril de leur propre vie et dans la solitude d’un périmètre de sécurité, sont les seuls à savoir désamorcer des engins explosifs susceptibles de provoquer des dégâts considérables et d’entraîner la mort de plusieurs de nos concitoyens.

Ces moyens supplémentaires et adaptés à la difficulté de vos missions, nous vous les devons, nous les devons aux Français, nous les devons à la République.

De meilleures conditions de travail

Enfin, j’ai également considéré qu’il était nécessaire que vous bénéficiiez de meilleures conditions de travail.

Sur le plan opérationnel, 300 000 euros de crédits supplémentaires permettront ainsi de moderniser le système d’information des centres de déminage.

Par ailleurs, 1 600 000 euros seront consacrés, d’ici 2017, à la sécurisation des centres de déminage. A cet égard, les travaux que nous nous accordons tous à juger nécessaires, ces mêmes travaux qui ont été trop longtemps reportés, pourront enfin être réalisés.

Ces investissements exceptionnels s’ajoutent aux opérations immobilières de droit commun, telles que la modernisation du Centre interdépartemental de déminage de Versailles. 

Ces mesures d’application immédiate vont venir conforter un projet de service ambitieux, le projet « Déminage 2020 », dont j’ai confié le pilotage au Directeur général de la Sécurité civile et de la Gestion des crises.

Le plan déminage 2020 : pour une meilleure couverture opérationnelle du territoire

Envisagé dès 2012 et finalisé l’été dernier, ce projet, après les attentats de novembre 2015, est plus que jamais pertinent.

Il part du constat évident que, dans les années qui viennent, une partie toujours plus importante de l’activité du Service du déminage sera consacrée à l’antiterrorisme.

C’est la raison pour laquelle il nous faut dès aujourd’hui renforcer la couverture opérationnelle du territoire en rapprochant les centres de déminage des lieux les plus exposés à la menace, notamment les grandes agglomérations, les aéroports et les gares, car, en cas d’attaque, la réactivité des démineurs est essentielle.

Face à des ennemis déterminés à nous frapper en provoquant le plus de dommages possibles, sans volonté de négocier et dont la propre mort fait partie de la stratégie,  nous avons besoin de forces efficaces, performantes, capables d’intervenir rapidement en tout point du territoire national.

Cela passe par le renforcement des centres de déminage situés dans les zones représentant des cibles potentielles : non seulement Paris et son agglomération, mais aussi les principales villes du pays. Les centres de Lyon, Marseille, Bordeaux, Montpellier, Strasbourg et Arras verront ainsi leurs effectifs augmenter de façon significative, comme c’est le cas ici même, à Versailles. En outre, la mutualisation des effectifs permettra d’améliorer leur disponibilité opérationnelle, grâce à des horaires d’ouverture des centres plus larges et par là même susceptibles de mieux répondre à la réalité des missions que vous assurez.

Pour mener à bien ce projet, il a fallu prendre la décision de fermer les centres les moins pertinents au regard du maillage territorial.

Le centre de déminage de Toulon cessera donc son activité à partir du 1er septembre prochain, tandis que celui d’Amiens fermera ses portes le 1er février 2017. Le centre de La Rochelle sera, quant à lui, transformé en antenne du centre de Nantes. La fermeture d’un centre constitue toujours une décision difficile à prendre. J’ai pleinement conscience des conséquences que cela implique pour la ville accueillant un tel centre, mais aussi pour l’organisation du service et bien sûr pour les personnels qui y sont affectés.

C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à la Direction générale de la Sécurité civile et de la Gestion des crises de veiller à ce que cette réforme importante comprenne des mesures d’accompagnement personnalisées en matière de gestion des ressources humaines. Dans la mesure du possible, je souhaite en effet que nous donnions pleine satisfaction aux demandes de mutation des agents qui souhaitent, dès septembre, être affectés dans d’autres centres.

De manière générale, je sais que le Directeur général a veillé à entretenir un dialogue social intense et constructif avec les organisations syndicales sur ce sujet, et je l’en remercie chaleureusement. J’y insiste : la menace terroriste va modifier en profondeur l’action du Service du déminage. Vous avez déjà anticipé cette évolution – et c’est une excellente chose – en développant de nouvelles capacités d’expertise, notamment au profit des forces d’intervention : vos travaux sur les gilets explosifs sont particulièrement utiles pour adapter les modes d’intervention, tout comme les formations que vous assurez au profit du RAID et de la BRI, ainsi que les fiches-réflexes que vous avez élaborées à l’attention des primo-intervenants.

Contre le terrorisme djihadiste, ce sont toutes les forces du ministère de l’Intérieur qui se mobilisent ensemble, en parfaite coopération les unes avec les autres.

L’heure est à l’unité, à la mutualisation et à la collaboration, mobilisées pour l’intérêt général. Les compétences de chacun doivent servir à tous. De nous, les Français attendent, lorsque la crise survient, une collaboration sans failles et de chaque instant. Car c’est ainsi que nous pourrons garantir au mieux leur protection et leur sécurité.

L’essentiel, c’est l’intérêt général. L’essentiel, c’est la République. L’essentiel, c’est le travail que nous réalisons – que vous réalisez – chaque jour au service des Français et de leur sécurité. Telle est notre responsabilité partagée. Telle est notre mission – qui exige rigueur, courage, sang-froid et persévérance. De ces qualités éminentes, vous n’êtes pas dépourvus, bien au contraire. Et pour ma part, je fais tout – et je continuerai à tout faire – pour que vous puissiez accomplir votre tâche dans les meilleures conditions qui soient, à la hauteur de votre engagement pour la France et pour les Français.

Je vous remercie.