La décentralisation du stationnement payant sera mise en place le 1er janvier prochain. Celle-ci prévoit notamment la création d’une commission du contentieux du stationnement payant (CCSP) à Limoges dont le greffe, sera composé d’agents du ministère de l’Intérieur.
Le préfet Stéphane Rouvé évoque les enjeux de cette réforme.
Civique : Pouvez-vous nous présenter la réforme du stationnement payant ?
Stéphane Rouvé : Le système actuel d’organisation et du fonctionnement du stationnement payant a montré ses limites. Une réforme - qui touche potentiellement 40 millions d’automobilistes - a été adoptée dans le cadre de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles en 2014. Son entrée en vigueur est programmée le 1er janvier 2018. Elle repose sur la décentralisation et la dépénalisation du stationnement payant qui devient une question domaniale.
L’amende actuelle de 17 euros disparaît. Le maire demeure compétent pour déterminer les jours et heures, les lieux où l’arrêt et le stationnement des véhicules sont réglementés. Les communes disposent de l’entière responsabilité de percevoir les recettes de cette redevance, acquittée immédiatement par l’automobiliste dès le stationnement ou forfaitairement après le stationnement, dans les trois mois suivant la date de notification de l’avis de paiement. Dans ce second cas, l’usager s’acquitte d’un forfait de post- stationnement (FPS) dont le montant variera d’une commune à l’autre.
Civique : Les communes se sont-elles engagées dans cette réforme ?
Stéphane Rouvé : Cette réforme concerne près de 800 collectivités. Elles disposeront d’une maîtrise complète du service public de stationnement. Ainsi, le renforcement de la surveillance et l’indexation du montant des forfaits, fixés par les collectivités selon le local, auront pour objectif d’inciter à un paiement immédiat plus fréquent par les automobilistes. Les grandes collectivités (Paris, Bordeaux, Lyon...) travaillent activement à la mise en œuvre de cette réforme. La situation est beaucoup plus variable pour les petites et moyennes collectivités. Enfin, certaines ont fait le choix de ne pas appliquer la réforme (Tourcoing,...). Concernant le montant des qui seront dus en cas de non paiement immédiat du stationnement, la situation est très variable : ainsi Honfleur a fixé un forfait à 30 euros, Metz à 35 euros, Nice à 16 euros.
Civique : Qui assurera la surveillance du stationnement ?
Stéphane Rouvé : La surveillance du stationnement est l’une des conditions de la réussite de la réforme. Elle sera confiée à des agents assermentés, qui seront soit des agents publics de la collectivité (policiers municipaux, ASVP), soit des personnels privés relevant d’un prestataire extérieur. Actuellement, la part des usagers ne payant pas ou insuffisamment leur stationnement est estimée en moyenne entre 60 et 70 % selon les villes. L’objet de la réforme est de mieux partager l’espace public grâce à une meilleure incitation au paiement du stationnement qui améliorera la rotation des véhicules.
La mise en œuvre de la réforme se traduit notamment par la création de la commission du contentieux du stationnement payant (CCSP), une juridiction administrative spécialisée qui gérera les recours contentieux contre les décisions individuelles relatives aux forfaits de post-stationnement. Elle s’installera à Limoges, dans l’ancienne caserne militaire Beaublanc, qui fait actuellement l’objet de travaux intérieurs de rénovation. Son greffe prendra la forme d’un service à compétence nationale du ministère de l’Intérieur, rattaché au secrétariat général, et chargé d’assister les magistrats appelés à régler les litiges.
Une mission de préfiguration de la CCSP composée de l’administratrice civile Murièle Boireau, d’un ingénieur des systèmes d’information et de la communication, d’un secrétaire administratif et de trois adjoints administratifs, s’est installée à Limoges le 1er septembre dernier. Christophe Hervouet, futur président de la juridiction, actuellement vice-président du tribunal administratif de Nantes, la rejoindra en fin d’année. Cette mission est chargée de préparer l’entrée en service de la juridiction.
Outre les volets ressources humaines (installation des personnels, formation...) et immobilier, la construction du système d’information de la juridiction permettra la dématérialisation de l’instruction des recours et offrira la possibilité de les déposer, via un formulaire de requête, sur un portail. Le site fonctionnera en synergie avec le centre national de production des titres de Limoges (service de la DSIC) qui s’occupera de la numérisation des requêtes et de l’éditique. « Ainsi, la dématérialisation des processus d’instruction des requêtes sera engagée depuis le dépôt en ligne des recours jusqu’à la signature électronique des magistrats », se félicite Murièle Boireau, la future cheffe du greffe du CCSP.
Reste à mesurer le nombre de recours auprès de cette commission... estimés à 100 000 par an !
Réforme | Avant la réforme | Après la réforme |
---|---|---|
Conséquences de l'absence de paiement immédiat du stationnement |
|
|
Délais de paiement et de contestation du PV et du FPS |
|
|
Le recrutement des agents du greffe sera organisé, avec l’appui de la direction des ressources humaines, en plusieurs phases pour accompagner la montée en charge de l’activité de la juridiction. 80 postes sont ouverts dès cet automne pour une affectation en deux temps : 30 agents en janvier 2018 puis 50 au printemps. À terme, l’effectif prévisionnel de la CCSP sera d’une centaine d’agents, dont 80 % en catégorie C, répartis entre un service central (réception, enregistrement et recevabilité des requêtes), deux chambres d’instruction (actes de procédure, mise en état et greffe des audiences), un service d’aide à la décision (analyse juridique, recherche documentaire et rédaction des projets d’ordonnances et de décision en lien avec les magistrats) et un service des affaires générales.
Catégorie A : greffier de chambre, chargé de gérer l’instruction des dossiers et la tenue des audiences, et d’encadrer, avec le soutien d’un adjoint, l’un des services du greffe.
Catégorie B : adjoint de greffier de chambre, assistant du contentieux ou technicien du système d’information et communication.
Catégorie C : chargé d’assurer l’exécution des différents actes de procédure à savoir l’enregistrement d’une requête, la communication des mémoires et pièces aux parties, les régularisations... jusqu’à l’archivage des dossiers. Les agents disposeront des formations « métier du greffe » et « systèmes d’information » dès leur prise de poste.
Joël Beck