« Abréger l’attente insoutenable des familles »
« Le soir du 13 novembre, je regarde le match en famille près d’Orléans. Quand les bruits d’explosions retentissent à l’extérieur du stade, je comprends tout de suite qu’il se passe quelque chose d’anormal. J’appelle la direction centrale de la police judiciaire qui me confirme qu’il s’agit bien d’attentats. Je prends alors la direction de Paris, pendant que mon adjoint, présent dans la capitale, s’active pour envoyer les premières équipes sur Paris et mettre en place le PC SDPTS.
À 22 heures les effectifs sont mis en alerte, et une équipe du service central d’identité judiciaire (SCIJ) quitte Ecully, siège de la SDPTS, une heures plus tard pour rejoindre Paris : elle est composée d’une unité nationale d’intervention chargée des constatations sur les scènes de crime et de l’unité police d’identification des victimes de catastrophe (UPIVC).
Il faut préciser que l’équipe de l’unité nationale d’intervention présente tout au long de la crise sera renforcée de 20 spécialistes des services régionaux d’identité judiciaire de Versailles, Rouen, Orléans et Lille, et que le service régionale d’identité judiciaire de la préfecture de police effectuera un travail essentiel en matière de constatations sur les scènes de crime.
Quant à l’unité d’identification des victimes, 53 personnels sont mobilisés au plus fort de la crise. La moitié appartient à la SDPTS et l’autre moitié est issue d’autres services de province et de la préfecture de police. Ils se mettent rapidement en ordre de bataille pour accomplir cette mission particulièrement délicate. Le travail de l’équipe ante-mortem chargée du recueil auprès des familles des éléments permettant d’identifier les victimes est d’autant plus difficile que les lieux de recueil des informations sont multiples.
L’équipe post-mortem prend ses quartiers à l’institut médico-légal pour suivre les examens des corps et les autopsies, recueillir tous les éléments permettant d’identifier une victime comme un tatouage ou une cicatrice, et les rapprocher de ceux recueillis par l’unité ante-mortem. Notre souci est de procéder à cette identification le plus rapidement possible afin d’abréger l’attente insoutenable des familles. Le dernier corps sera identifié le 18 novembre au matin.
Parallèlement, à Ecully, nous mettons en place dès le 14 novembre un PC SDPTS chargé de la coordination des missions de la sous-direction et de la préparation des laboratoires qui recevront le jour même les premiers scellés. Les personnels techniques et scientifiques de la sous-direction procèdent immédiatement aux analyses balistiques, des traces papillaires et des documents. L’INPS est chargée de son côté de procéder aux analyses génétiques.
Ce travail permettra de faire avancer l’enquête rapidement. Ainsi, les trois kalachnikovs retrouvées au Bataclan arrivent au service balistique le samedi 14 à 17h. C’est sur l’une d’elles que nous retrouvons des traces papillaires qui nous permettent d’identifier le premier terroriste, Mostefaï.
Une équipe du service central de l’informatique et des traces technologiques est également projetée à Paris afi d’exploiter et analyser les supports numériques –téléphones portables et ordinateurs recueillis sur les scènes de crime. Une autre équipe restée à Écully sera chargée de procéder à des analyses plus complexes permet, entre autres, de livrer aux enquêteurs l’itinéraire précis des terroristes.
Le service central de documentation criminelle fournit également une aide précieuse pour l’enquête, en répondant notamment à l’ensemble des demandes des enquêteurs pour la consultation des fichiers.
Ils alimentent également le fichier des personnes recherchées, à la demande du Parquet, des fiches d’identité des migrants passés par la Turquie et la Grèce, quand la présence de deux d’entre eux parmi les terroristes est confirmée.
Gestionnaire du fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), la sous-direction envoie également de façon systématique toutes les traces non identifiées recueillies sur les différents lieux aux partenaires européens signataires du traité de Prüm pour vérification dans leurs fichiers. Fin décembre, 66 transactions Prüm FAED et 138 transactions Prüm FAEG ont été expédiées. Nous avons également transmis via le bureau central national France-Interpol les traces et les profils des terroristes identifiés pour vérification dans les bases de données des partenaires non signataires de Prüm.
Le 18 novembre, après l’assaut du RAID, le service central d’identité judiciaire est appelé pour les constatations dans l’appartement de Saint Denis. Ce travail va durer cinq jours en raison de l’état cataclysmique dans lequel se trouve l’endroit. Le service intervient également tout au long de cette crise sur les véhicules suspects découverts au fil de l’enquête.
Au total, 235 spécialistes de la PTS ont été mobilisé. Plus de 3000 scellés ont été envoyés aux différents laboratoires : à la PTS d’Écully, à l’INPS et à celui de la préfecture de police. Leur analyse se poursuit. »