Cérémonie d’installation de Mme Pascale REGNAULT-DUBOIS, Directrice centrale des compagnies républicaines de sécurité

Cérémonie d’installation de Mme Pascale REGNAULT-DUBOIS, Directrice centrale des compagnies républicaines de sécurité
11 septembre 2020

Discours prononcé le 11 septembre 2020 par M. Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, lors de la Cérémonie d'installation de Mme Pascale RÉGNAULT-DUBOIS, Directrice centrale des compagnies républicaines de sécurité.


Seul le prononcé fait foi

Vendredi 11 septembre 2020 à Vélizy-Villacoublay

Madame la Ministre, chère Marlène,
Monsieur le préfet,

Monsieur le député,

Monsieur le sénateur,
Monsieur le maire,
Mesdames et messieurs les conseillers régionaux,
Mesdames et messieurs les conseillers départementaux,
Monsieur le directeur général de la Police nationale,
Monsieur le directeur général de la Gendarmerie nationale,
Mesdames et messieurs les directeurs d’administration centrale,
Madame et messieurs les directeurs zonaux des compagnies républicaines de sécurité,
Mesdames et messieurs les commissaires, officiers, gradés, gardiens de la paix, adjoints de sécurité, personnels administratifs et techniques,
Mesdames, messieurs,

Cet après-midi nous installons Madame Pascale RÉGNAULT-DUBOIS, directrice des services actifs de la Police nationale, à la tête de la direction centrale des compagnies républicaines de sécurité. Il nous faut mesurer toute l’importance que revêt pour chaque agent des compagnies républicaines de sécurité la présentation de son nouveau chef : c’est un moment fort de solennité, d’esprit de corps, de discipline et de rigueur professionnelle, celle des CRS au service de l’État.

Les fonctionnaires des compagnies républicaines de sécurité, vous, œuvrez chaque jour, au péril de votre vie, pour la sécurité de nos concitoyens avec honneur et fidélité. Je constate, avec la Ministre, tous les jours, sur le terrain, votre mobilisation et votre engagement sans faille.

Aujourd’hui est un jour qui mérite d’être souligné car il voit, pour la première fois depuis sa création en 1944, une femme à la tête des compagnies républicaines de sécurité.
Pascale RÉGNAULT-DUBOIS, cette nomination est le résultat d’une brillante carrière au cours de laquelle vous avez, à chaque étape, démontré vos compétences, votre engagement, votre professionnalisme.

Un engagement au sein de la Police nationale tout d’abord : à l’issue de votre scolarité de commissaire de police, en 1995, vous occupez plusieurs postes en sécurité publique, comme commissaire centrale adjointe à Saint-Denis, puis en tant que chef de la circonscription de sécurité publique de Stains, puis de Conflans-Sainte-Honorine, avant d’être chef de district et commissaire centrale de Saint-Denis, et de vous tourner enfin vers l’administration centrale. Vous avez occupé alors les fonctions d’adjointe de sous-directeur.
Parce que vous êtes une femme de terrain, vous décidez en 2012 de repartir au contact des réalités locales et de la population. Vous êtes alors nommée directrice départementale adjointe, puis directrice départementale de la sécurité publique du Val d’Oise.

Vous faîtes ensuite le choix de la belle maison « CRS » : en devenant en mai 2017 directrice centrale adjointe des compagnies républicaines de sécurité.
J’ai décidé de proposer votre nom au Président de la République pour devenir directrice centrale des compagnies républicaines de sécurité parce que je sais que vous aimez cette maison et que vous saurez encore la faire évoluer. Elle s’inscrira pleinement, fidèle à sa devise « SERVIR » et à son sens du devoir, au cœur du dispositif de sécurité intérieure, en coopération intelligente et fructueuse avec les autres directions de la police nationale et des militaires de la gendarmerie nationale.

Depuis toujours, le cœur de métier de la direction centrale des CRS, c’est l’excellence reconnue dans le concours apporté aux opérations de maintien de l’ordre sous l’autorité des préfets.

Le très haut niveau de compétences et les qualités opérationnelles et tactiques des compagnies républicaines de sécurité devront être maintenus et développés dans le cadre du schéma national du maintien de l’ordre qui va constituer désormais le document de référence pour faire face aux troubles à l’ordre public. C’est un chantier auquel le gouvernement est particulièrement attaché et pour lequel la direction centrale des CRS a apporté une forte contribution. C’est un chantier qui doit redonner la confiance. Nous ne devons jamais oublier que la Police française, que la Police de la République est une Police du peuple, issue de ses rangs, et que la première de ses missions est de le protéger, et lui permettre l'expression des libertés publiques, l’expression de notre Etat de droit et de la bonne vitalité de notre démocratie.

Madame la Directrice centrale, vous continuerez également à apporter votre concours aux opérations de police qui assurent la sécurité au quotidien de nos concitoyens. Un des axes majeurs de votre action doit être la lutte contre les trafics de stupéfiants. Derrière ces réseaux, il y a d’autres trafics, trop nombreux, et toute la criminalité organisée qui gangrènent nos quartiers. Les règlements de compte, les trafics d’armes, le blanchiment de l’argent, parfois le financement du terrorisme. C’est un fléau qui touche notre pays. , La vie des honnêtes gens est gâchée par l’occupation des halls d’immeubles, par les dégradations des cages d’escaliers, par la violence des règlements de comptes qui peuvent surgir à tout moment, par cette peur au quotidien qui alimente chez certains de nos concitoyens un sentiment d’abandon.

Vous devrez poursuivre aussi d’autres objectifs opérationnels : les risques et les menaces terroristes restent très élevés. La Police nationale est dotée des bons outils pour y faire face. Dans le domaine de l’anti-terrorisme, je pense notamment à l’effort d’équipement en matière d’armement. L’implication et la formation des CRS devront être maintenues à leur meilleur niveau. Vous continuerez à participer à des exercices de grande ampleur, y compris concernant les risques d’attaques potentielles nucléaires, bactériologiques, radiologiques ou chimiques.

La direction centrale des CRS devra également continuer à apporter un concours particulier à notre lutte contre l’immigration irrégulière, et sa contribution à la sécurité routière, en ciblant notamment les comportements les plus risqués. Les accidents de la route restent en effet la première cause de mort violente dans notre pays. Et au moment où je vous parle, j’aimerais avoir une pensée toute particulière pour votre collègue du Nord décédé récemment.

Pascale RÉGNAULT-DUBOIS, je sais pouvoir compter sur votre totale détermination pour poursuivre ces objectifs fixés par le gouvernement et adapter le travail des CRS, pour maintenir son haut niveau de technicité afin de protéger nos concitoyens et les valeurs de la République. Dans le contexte complexe et sensible dans lequel les femmes et les hommes qui vous sont confiés auront à évoluer et principalement lors des manifestations, votre professionnalisme sera un atout.

***
Mesdames et Messieurs, depuis une vingtaine d’années sont apparus des groupes ultra violents, bien souvent sans rapport avec les manifestations. Ils s’infiltrent dans les cortèges pour semer le désordre et casser du flic. Nous l’avions notamment vu lors des grands sommets internationaux. D’abord à l’étranger : à Seattle en 1999 et à Strasbourg, sur le sol national, en 2009 où un quartier entier de la ville avait été saccagé. Peu à peu, ces derniers mois, nous avons retrouvé ces violences lors des manifestations dites des « gilets jaunes ». A côté des manifestants pacifiques se trouvaient des individus, organisés, dont le seul but était de détruire et d’agresser.

Les Français ont vu, avec effroi et dégoût, les attaques contre les symboles les plus sacrés de notre Histoire, contre ce qui fait la France, comme le saccage tout près de la tombe du soldat inconnu au pied de l’Arc de Triomphe. Les Français ont aussi vu les policiers et les gendarmes en première ligne pour protéger ces symboles, pour protéger les manifestants, et qui ont tenu, avec sang-froid, avec professionnalisme, et malgré un degré de violence inégalé. Ils n’ont pas vacillé. Ils ont servi, avec honneur et avec courage.

C’est pourquoi le Gouvernement veut ici vous remercier, vous, l’ensemble des forces de l’ordre qui ont été mobilisées chaque week-end, pendant des mois, lors des très nombreuses manifestations de gilets jaunes, pour préserver l’ordre républicain à Paris, et, en province. Les CRS, les équipes de gendarmerie mobiles, les unités de la Préfecture de Police de Paris mais aussi les unités territoriales de police et de gendarmerie.

Nous voulons aussi avoir, avec Marlène Schiappa, une pensée toute particulière et exprimer notre profonde sympathie pour les 2000 policiers et gendarmes blessés lors de ces manifestations. Réaffirmons que toute violence contre les forces de l’ordre est inacceptable. Car attaquer un policier, attaquer un gendarme, c’est attaquer la République. Vous pourrez toujours compter sur notre soutien dans l’exercice difficile de vos missions, un exercice exigeant et dangereux mais indispensable.

Et je sais pouvoir compter sur votre engagement pour la nouvelle journée de mobilisation des « Gilets jaunes » de demain. Qu’on les appelle Black Blocs, ultra-jaune, ultra-gauche, ultra- droite, la République ne peut pas reculer devant le mal extrémiste. Les soldats de la loi et de la volonté générale doivent et vont s’imposer. Répétons haut et fort, chaque jour, une évidence démocratique : le monopole de l’usage de la force appartient aux représentants de l’Etat, aux policiers et aux gendarmes qui maintiennent l’ordre républicain en toutes circonstances. Cet ordre est la condition de la Liberté. Car dans notre démocratie, chacun peut exprimer ses opinions, se réunir librement, manifester sur la voie publique, en exerçant ses droits politiques dès lors qu’il ne trouble pas l’ordre public. La violence ne sera jamais un moyen d’action. L’Etat n’acceptera pas, sous peine de s’effondrer, que les opinions s’expriment à travers des actes violents et inacceptables.

« L'ordre, et l'ordre seul, fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude. » écrivait déjà le grand Péguy. C’est l’ordre républicain qui rend possible la liberté d’expression, de réunion, de manifestation. C’est vous, CRS, qui permettez à nos valeurs de ne pas se cantonner à un concept dans des livres ou des expressions, mais bien de se traduire concrètement dans la vie des Français. Et ce sont ces libertés fondamentales que le schéma de maintien de l’ordre entend préserver.

Manifester est un droit garanti constitutionnellement. C’est une richesse pour chacun des citoyens Chaque français, chaque citoyen de notre pays peut défiler, déclamer son engagement, crier son opposition ou ses propositions. Même, et surtout lorsque cela déplait au pouvoir et à la majorité, l’honneur de la République est de laisser ceux qui ne sont pas d’accord le dire et sa fierté est de les protéger.

C’est pour ce stade avancé de notre civilisation que nos aînés ont fait la Révolution, que les soldats de l’An II ont combattu les ennemis de la République, que les Résistants ont mis fin à la domination des idéologies mortifères. Liberté, liberté chérie, les plus beaux mots de notre Marseillaise, c’est vous qui les protégez.
Mais pour exercer sa liberté, il faut l’encadrer pour que l’Etat de droit existe, il faut parfois l’imposer.

Le document que je vous présente aujourd’hui est le fruit d’un long travail de réflexion engagé par le Gouvernement et singulièrement par mon prédécesseur depuis juin 2019 : des parlementaires ont été consultés, ainsi que des experts, des policiers et des gendarmes, des syndicalistes et des journalistes, pour qu’ils puissent donner leur vision du maintien de l’ordre du XXIème siècle. Les rédacteurs ont pu auditionner toutes les associations qui le souhaitaient.

J’ai eu, depuis deux mois et demi désormais un échange profond avec l’ensemble des acteurs du maintien de l’ordre. Avec également Jacques TOUBON et Claire HEDON, la nouvelle Défenseur des Droits, nous avons évoqué ces questions et nous avons entendu leurs attentes, notamment sur les questions de déontologie des forces.
J’ai également souhaité que les forces de sécurité intérieure, la DGPN, la DGGN et la PP, me fassent des propositions concrètes.

J’ai enfin et surtout, depuis deux mois, été à la rencontre des policiers et des gendarmes sur le terrain, pour partager leur expérience, leur vécu qui a été particulièrement éclairant pour moi.

Ce sera la première fois dans un document, accessible au public et commun à toutes les forces qui font le maintien de l’ordre, que nous fixerons les principes modernisés du maintien de l’ordre dans notre pays.

C’est la réponse du Gouvernement et de la République, la réponse à cette irruption de violence dans les manifestations, à cette infiltration de groupes séditieux et de délinquants qui veulent casser, tuer. Notre modèle historique de préservation des dommages humains a fait ses preuves certes, et nous devons tirer les conclusions opérationnelles de l’expérience acquise des dernières années. Ce discours vise à affirmer et rechercher la confiance de tous : les forces de l’ordre que nous chérissons, les manifestants que nous devons protéger, l’ensemble des Français qui nous regardent.

Je veux ici dévoiler les grandes lignes du document que le Ministère de l’Intérieur va rendre public la semaine prochaine :

D’abord, il nous faut prévenir les troubles en renforçant considérablement le renseignement en amont. Ce renseignement qui permet aux préfets de prendre les bonnes décisions avant les manifestations, et en généralisant en aval la communication avec les manifestants grâce à la mise en place de dispositifs modernes de médiation et d’information. Il s’agit, le plus possible, d’apaiser les tensions, de lever les sous-entendus et les malentendus pour ceux qui sont honnêtes dans leur rapport avec les forces de l’ordre et les préfets. Permettre le déroulement serein, en sécurité, des manifestations publiques, par la clarté des sommations qui seront rendues plus explicites et totalement modernisées. La tactique de l'encadrement pourra être utilisée mais sera strictement encadrée : il devra toujours être pris en adéquation pour les manifestations pacifiques et, en tout état de cause, elle sera circonscrite dans le temps.

Ensuite, il faut garantir à nos concitoyens la liberté de manifester sans crainte, et pour cela, privilégier une intervention rapide et surtout beaucoup plus mobile des forces pour neutraliser les auteurs de violence. Se rapprocher et interpeller rapidement, pour éviter les affrontements violents. Il n’est en effet plus acceptable que des casseurs puissent agir librement et venir voler aux manifestants le droit de s’exprimer sur la voie publique. Force doit rester à l’ordre républicain. Il faut se donner tous les moyens pour identifier les auteurs de violence, et les faire comparaitre devant la justice. Les CRS, les Gendarmes, les agents de la Préfecture de Police de Paris doivent tirer parti des possibilités offertes par les nouvelles technologies dont l’utilisation des drones équipés de caméras, qui sera généralisée. Je proposerai très prochainement au Parlement un cadre juridique adapté à l’occasion de la Proposition de Loi de Monsieur Fauvergue.

Il nous aussi faut diminuer le nombre de violences et de blessés lors des manifestations, qu’il s’agisse des agents des forces de l’ordre ou des citoyens. Cette attente est forte. C’est pourquoi, sans mettre en danger en aucune manière les forces de l’ordre, sans les priver des moyens nécessaires à l’exercice de leurs missions difficiles et de leur protection légitime, la doctrine ou les conditions d’emploi de certains matériels vont évoluer. Je pense notamment à l’usage du LBD, qui sera désormais dès demain encadré et assorti d’un superviseur pour mieux évaluer la situation d’ensemble et désigner l’objectif. Je pense également à l’utilisation de la grenade « GMD », qui sera retirée du service suivant les recommandations du DGPN et du DGGN, afin d’être remplacée par un nouveau modèle offrant moins de projections en hauteur, dès ce samedi.

C’est enfin préciser certains éléments et impératifs de déontologie. Toute unité constituée de maintien de l’ordre, hors renseignement, judiciaire ou d’interpellation, doit porter l’uniforme et le port de la cagoule continuera d’être proscrit. Ce que les Français et la République attendent d’une institution qui leur est si essentielle, celle de la police et de la gendarmerie, c'est le sang-froid et la force tranquille. Je protègerai les policiers et les gendarme en proposant au Parlement l’interdiction de la diffusion de leur visage. Cette mesure doit les protéger ainsi que leurs proches. Trop d’agressions, je sais, existent en dehors du service. Ma politique est claire et conforme au bon sens populaire des Français. Ceux qui doivent être soutenus contre les insultes, les agressions, les attaques seront soutenus. Ceux qui doivent être sanctionnés seront sanctionnés.

Le nouveau schéma de maintien de l’ordre s’accompagnera bien-sûr, et c’est demandé depuis longtemps, d’un renforcement important des moyens, avec des effectifs qui viendront renforcer les unités spécialisées du maintien de l’ordre. Je remercie le Premier ministre d’avoir entendu les demandes du ministère de l’Intérieur. Nous allons créer 300 postes de gendarmes d’escadrons de gendarmerie mobile, 215 hommes des compagnies républicaines de sécurité et hommes des compagnies d’intervention de la PP. Cela passe aussi par du matériel renouvelé, notamment en termes de véhicules, ainsi que des nouveaux équipements. Cent millions supplémentaires d'ici deux ans, 300 véhicules neufs de maintien de l'ordre, 7 engins lanceurs d'eau, 270 véhicules de reconnaissance, 100 camions, 130 véhicules de commandement et de transmission, 10 porte drones.

***
Mesdames et Messieurs,

Tels sont les objectifs du maintien de l’ordre modernisé qui doit guider l’action de l’ensemble des forces dès les manifestations attendues ce week-end, et notamment celle des CRS sous le commandement de Pascale RÉGNAULT-DUBOIS.

Madame la Directrice,

Je sais que vous serez à la hauteur de votre mission, parce que vous êtes, plus que jamais, à l’écoute de vos troupes, parce que vous mesurez les besoins opérationnels, ainsi que les attentes de nos concitoyens en matière d’ordre public.

Mesdames et messieurs les Forces de l’Ordre, merci pour ce que vous faites pour la République. Nous vous donnons les moyens de réussir votre mission, les moyens d’actions pour protéger nos concitoyens, nous vous devons honneur et respect, nous comptons sur vous.

Vive la République, vivent les CRS, et vive la France ! Je vous remercie