Deux victimes sur trois connaissent bien leur agresseur
Grâce à l’enquête de victimation « Cadre de vie et sécurité », on évalue en France métropolitaine à environ 220 000 le nombre annuel de victimes de viols, de tentatives de viol et d’attouchements sexuels parmi les personnes âgées de 18 à 75 ans. Parmi elles : environ 185 000 femmes (83 %) et 80 000 jeunes majeurs âgés de 18 à 29 ans (35 %). Les viols représentent 40 % de ces agressions sexuelles.
Deux victimes sur trois connaissaient personnellement leur agresseur ; bien souvent il s’agit du conjoint ou d’un ancien conjoint ou concubin (30 % des victimes). Environ une victime sur cinq est agressée par un inconnu, et une sur sept par une personne connue de vue seulement.Du fait des liens qui existent souvent entre la victime et son agresseur, les violences sexuelles se déroulent fréquemment au domicile de la victime, et seule une agression sur dix a lieu dans la rue ou les transports en commun. Pour les mêmes raisons, les agressions sexuelles sont souvent des violences répétées.
Quatre victimes sur dix sont brutalisées pendant l’agression et une sur dix porte des blessures physiques visibles après les faits. Près de 60 % des victimes font état de séquelles psychologiques importantes. Seule une minorité de victimes se tournent vers les professionnels de santé, les services sociaux ou les associations d’aide aux victimes. À peine une victime sur douze (8%) porte plainte auprès des forces de sécurité.
La fréquence des agressions sexuelles commises par une personne connue de la victime varie peu d’un territoire à l’autre. En revanche, les agressions commises par un inconnu ou une personne connue de vue seulement sont plus fréquentes dans les grandes agglomérations. Que l’auteur soit connu ou non, les jeunes, les femmes et les personnes modestes sont les plus victimes de violences sexuelles.
Selon le code pénal « constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise » (art. 222.22 CP). Est qualifié de viol « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise » (art. 222.23 CP). Viol et tentative de viol constituent des crimes sanctionnés des mêmes peines devant la Cour d’assises. Les agressions sexuelles autres que le viol sont des délits jugés au tribunal correctionnel.
Malgré la mobilisation des associations et des pouvoirs publics ces dernières années pour libérer la parole des victimes, les agressions sexuelles, notamment celles subies au sein de la cellule familiale, restent des violences encore taboues aujourd’hui, ce qui rend la mesure du phénomène particulièrement délicate. Ces faits n’étant que faiblement dénoncés auprès des forces de sécurité (police et gendarmerie), les plaintes – et plus largement les procédures – pour agressions sexuelles enregistrées par les services de police et de gendarmerie constituent une source trop parcellaire. Avec plus de 10 années d’existence et un questionnaire spécifiquement dédié au recueil des agressions sexuelles, l’enquête « Cadre de vie et sécurité » (cf. encadré méthodologique) permet de constituer un échantillon de victimes suffisamment conséquent pour dresser des constats structurels fiables sur les victimes de viols, tentatives de viol et attouchements sexuels sur la période 2009-2017.
184 000 femmes et 38 000 hommes âgés de 18 à 75 ans
victimes d’agressions sexuelles chaque année en France métropolitaine
En moyenne, chaque année entre 2008 et 2016, un peu plus de 220 000 personnes âgées de 18 à 75 ans résidant en France métropolitaine – soit environ 0,5 % – ont déclaré avoir été victimes de violences sexuelles (Fig.1). Plus de 80 % d’entre elles sont des femmes (184 000 victimes par an en moyenne) et 35 % ont entre 18 et 29 ans (78 000 victimes par an en moyenne). Environ 120 000 victimes (53 %) déclarent avoir subi un viol ou une tentative de viol. Enfin, plus de trois victimes sur dix vivent sous le même toit que leur agresseur au moment de l’enquête.
Dans deux cas sur trois, la victime connaissait personnellement son agresseur
Dans la grande majorité des cas (66 %), les victimes de violences sexuelles connaissaient personnellement leur agresseur (Fig.2). Les violences sexuelles par conjoint ou ex-conjoint (au sens large, pas nécessairement un époux) concernent à elles seules 30 % de l’ensemble des victimes de violences sexuelles recensées sur une année : 18 % des victimes vivent avec le conjoint agresseur au moment de l’enquête, 5 % vivaient avec lui au moment des faits mais ne vivent plus avec lui au moment de l’enquête et 8 % sont agressées par un ex-conjoint avec qui elles ne vivaient déjà plus au moment des faits. Dans 9 % des cas, les victimes désignent comme auteur une personne du cercle familial (parent, beau-parent, grand-parent, oncle,…). Dans 11 % des cas les victimes ont été sexuellement agressées par un ami ou un proche avec qui elles ne vivent pas au moment de l’enquête et 5 % par une personne qui vit avec elle autre qu’un membre de la famille. Plus rarement l’auteur est une relation de travail ou d’études de la victime (3 %). Enfin, 7 % des victimes de violences sexuelles déclarent qu’elles connaissaient personnellement leur agresseur mais qu’il n’appartient à aucune des catégories précédemment citées.
Les agressions sexuelles commises par un inconnu concernent chaque année un peu moins d’une victime sur cinq (18 %). Enfin 14 % des victimes rapportent avoir été agressées par une personne qu’elles connaissaient seulement de vue (dans le voisinage ou dans le cadre du travail ou des études notamment).
Près de six victimes sur dix sont agressées à leur domicile
Le lieu des agressions est très fortement lié au fait que l’auteur soit connu ou non de la victime. Quand l’auteur est personnellement connu, sept fois sur dix, l’agression s’est produite au domicile-même de la victime et une fois sur sept au domicile de quelqu’un d’autre - possiblement celui de l’auteur - ; les autres lieux sont en revanche beaucoup moins fréquemment cités (Fig.3). Quand l’auteur n’est pas connu ou connu seulement de vue, les lieux sont plus « variés ». Le domicile de la victime reste le lieu le plus fréquemment cité mais dans une proportion considérablement moins élevée (27 %). Les agressions dans la rue ou les transports en commun sont plus fréquentes : à elles deux, elles concernent 24 % des victimes de violences sexuelles agressées par un auteur inconnu ou connu de vue seulement contre 2 % quand l’auteur est connu personnellement. La moitié (49 %) des victimes agressées par un auteur inconnu ou connu de vue ont subi les faits en dehors de leur quartier ou de leur village.
Que l’auteur soit connu personnellement ou non, les violences sexuelles sont relativement rarement subies sur le lieu de travail ou d’études (respectivement 5 % et 7 %). Enfin, 24 % des victimes de violences sexuelles par auteur inconnu ou connu seulement de vue déclarent que l’agression s’est déroulée dans un autre lieu que ceux listés dans l’enquête, vraisemblablement des bars, discothèques, commerces, hôtels, etc.
Des agressions souvent plus graves quand l’auteur est connu
Dans plus d’un cas sur deux (53 %), les victimes de violences sexuelles ont subi un viol (40 %) ou une tentative de viol (13 %), crime passible de 15 ans de réclusion dans le droit français (Fig. 4). Dans l’autre moitié des cas (47 %), les victimes ont subi des attouchements du sexe ou d’autres formes d’agressions sexuelles (passibles de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende) que l’enquête ne permet pas de décrire précisément mais qui exclut toutefois les gestes « déplacés » tels que les « frottages », les baisers forcés, etc. qui font l’objet d’une question distincte (cf. encadré « Gestes déplacés et exhibitionnisme »).
Les viols sont significativement plus fréquents parmi les victimes agressées par un auteur qu’elles connaissaient personnellement (47 %) que par un auteur inconnu ou connu de vue seulement (24 %).
Plus d’un tiers des victimes ont subi trois agressions sexuelles ou plus
au cours des 2 années précédant l’enquête
Chaque année, plus de la moitié (53 %) des victimes déclarent avoir subi plus d’un fait de violences sexuelles au cours des 2 années précédant l’enquête : 36 % rapportent trois agressions sexuelles ou plus et 17 % deux agressions exactement (Fig. 5). Compte tenu du poids important des conjoints et autres personnes cohabitantes parmi les auteurs connus – et donc des violences sous emprise - il n’est pas étonnant que les cas de violences sexuelles répétées soient plus fréquents lorsque l’auteur de l’incident le plus récent est connu personnellement. Ainsi la moitié (49 %) des victimes agressées lors du dernier incident par un auteur connu personnellement ont subi au moins trois faits de violences sexuelles au cours des 2 années précédant l’enquête contre 10 % des victimes agressées lors du dernier incident par une personne inconnue ou connue seulement de vue. Il n’est pas possible de déterminer pour l’ensemble des victimes de violences répétées s’il s’agit d’un seul et même auteur ou bien si les faits ont été commis par des auteurs différents [1] .
Deux victimes sur cinq sont brutalisées au cours de l’agression
Les circonstances de l’agression sexuelle, en plus de l’acte lui-même, sont fréquemment violentes : 43 % des victimes déclarent avoir subi des violences physiques telles que des coups, des gifles, des bousculades etc., au cours de l’agression (Fig. 6). L’usage de la violence physique est un peu plus souvent mentionné par les victimes qui connaissaient personnellement leur auteur que lorsque l’auteur est inconnu ou connu de vue seulement (45 % versus 39 % respectivement). Quel que soit le lien entre l’auteur et la victime, à la suite des faits, environ une victime sur dix porte des blessures physiques visibles infligées par l’auteur de l’agression sexuelle.
Des séquelles psychologiques importantes pour six victimes sur dix
Sur le plan psychologique, 58 % des victimes agressées sexuellement estiment que les dommages causés par les faits sont importants : « très importants » pour 30 % des victimes et « plutôt » importants pour 28 % (Fig. 7). Les victimes agressées par des auteurs connus personnellement se déclarent plus souvent affectées psychologiquement : 63 % jugent en effet que l’agression a causé des dommages psychologiques « plutôt » voire « très importants » contre 47 % des victimes agressées par un auteur inconnu ou connu seulement de vue. Ces écarts plutôt élevés sont possiblement liés à la nature plus grave des violences subies (viols plus fréquents) et à la répétition plus fréquente de ces actes quand l’auteur est connu personnellement de la victime.
Peu de victimes se tournent vers les services sociaux
ou les associations d’aide aux victimes
Après les faits, une minorité de victimes se tournent vers des professionnels de santé, vers les autorités ou vers des associations d’aide aux victimes. Ainsi une victime sur cinq déclare avoir consulté au moins une fois un psychiatre ou un psychologue à la suite de l’agression, 16 % ont consulté un médecin, 14 % se sont rendues au commissariat ou à la gendarmerie pour faire un signalement, 12 % ont parlé de leur situation avec les services sociaux, 7 % ont appelé un service téléphonique gratuit (« numéro vert ») d’aide aux victimes et enfin 6 % ont rencontré les membres d’une association d’aide aux victimes (Fig. 8). Dans l’ensemble, près de 40 % des victimes de violences sexuelles ont effectué au moins une des 6 démarches qui viennent d’être citées. Cette proportion est plus élevée parmi les victimes agressées par une personne connue personnellement (42 %) que parmi les victimes agressées par un inconnu ou une personne connue de vue (32 %). Cet écart n’est pas facilement interprétable car il est lié en partie à la répétition des faits, qui est plus fréquente parmi les victimes agressées par un auteur connu. Pour les victimes de faits répétés, la question ne porte pas sur les démarches effectuées après le dernier incident mais sur les démarches effectuées au moins une fois après au moins un des incidents.
Au-delà des démarches formelles, la majorité des victimes (60 %) ont parlé à des amis ou à des proches de l’agression sexuelle qu’elles ont subie. Chaque année, toutefois, une victime sur quatre déclare se confier pour la première fois au cours de l’enquête. Même dans le cadre de ce dispositif anonyme et sans conséquences directes, des victimes se refusent encore probablement à évoquer les agressions qu’elles ont subies, du fait de la « loi du silence » qui continue d’entourer ces crimes.
Seule une victime sur douze porte plainte
L’écrasante majorité des victimes de violences sexuelles (86 %) ne font pas le déplacement au commissariat ou à la gendarmerie pour signaler les faits qu’elles ont subis. Celles qui font le déplacement renoncent 4 fois sur 10 à déposer plainte. Au final, seule une victime sur douze (8 %) dépose formellement plainte auprès des forces de sécurité (Fig. 9). Une plaignante sur cinq retire sa plainte. Toutefois, les services de police et de gendarmerie peuvent désormais mener une enquête et la Justice poursuivre les auteurs de violences sexuelles même si la victime retire sa plainte ou ne dépose pas plainte.
La gravité des faits subis semblent influencer le comportement de plainte des victimes : les victimes de viol ou tentative de viol portent davantage plainte que les victimes d’autres agressions sexuelles. Bien que les cas de viols soient plus fréquents pour elles, les victimes agressées par des personnes connues affichent un taux de plainte inférieur à celui des victimes agressées par un auteur inconnu ou connu de vue seulement (7 % versus 11 %). Toutefois, la taille de l’échantillon ne permet pas d’affirmer que cet écart soit significatif et de conclure que le fait de connaître l’agresseur découragerait la victime à déposer plainte.
Les agressions sexuelles par des inconnus : un phénomène plutôt urbain
Chaque année, 0,5 % des personnes âgées de 18 à 75 ans (220 000 victimes) déclarent avoir subi au moins une agression sexuelle : 0,3 % par un auteur connu personnellement et 0,2 % par un auteur inconnu ou connu de vue seulement. Certains territoires et certaines catégories de population sont plus particulièrement concernés.
La proportion de victimes de violences sexuelles par auteur connu personnellement présente peu de variabilité sur le territoire national (Fig. 10). Ce type de victimation est notamment du même ordre à la campagne et à la ville.A contrario, la proportion de victimes de violences sexuelles agressées par un auteur inconnu ou connu de vue seulement augmente nettement avec la taille des agglomérations dans laquelle elle est mesurée. Le risque d’agressions sexuelles par une personne inconnue apparaît donc comme un phénomène plus urbain que rural.
Les femmes, les jeunes et les personnes modestes sont particulièrement exposées aux agressions sexuelles quel que soit le lien avec l’auteur
La proportion de victimes de violences sexuelles est 4 fois plus élevée parmi les femmes que parmi les hommes (0,8 % contre 0,2 %,Fig. 11). C’est en particulier le risque d’être agressé sexuellement par une personne connue personnellement qui diffère singulièrement entre les hommes et les femmes (respectivement 0,1 % et 0,6 %).
La proportion de victimes de violences sexuelles décroît également avec l’âge : chaque année 0,8 % des 18-29 ans déclarent avoir été agressés sexuellement contre 0,5% des personnes de 40 à 50 ans et 0,2 % des 60-75 ans. Les jeunes majeurs sont très exposés à la fois aux violences sexuelles par personne connue personnellement (0,5 % des 18-29 sont victimes chaque année) et par personne inconnue ou connue de vue seulement (0,3 %). Entre 30 et 75 ans, la proportion de victimes d’agressions sexuelles par auteur inconnu ou connu de vue seulement est très stable, autour de 0,1 %. Les violences sexuelles par auteur connu restent cependant non négligeables entre 30 et 50 ans, puisqu’elles concernent 0,4 % de la population.
La surexposition des jeunes et des femmes impacte fortement les taux de victimation des différentes catégories sociales : les étudiants et autres inactifs hors retraités ainsi que les employés (catégorie sociale très féminisée) affichent les taux de victimation les plus élevés (respectivement 1,1 % et 0,7 %).
Enfin, le risque d’être victime de violences sexuelles diminue fortement avec le niveau de vie, que l’auteur soit connu ou non de la victime : chaque année en moyenne, 0,8 % des personnes appartenant aux ménages les plus modestes déclarent avoir subi des violences sexuelles contre 0,3 % des personnes appartenant aux ménages les plus aisés.
Encadré
Gestes « déplacés » (baiser forcé, pelotage, « frottage », caresse non désirée,…)
et exhibitionnisme
L’enquête Cadre de vie et sécurité permet de recenser les victimes d’actes d’exhibitionnisme ainsi que les victimes de gestes déplacés subis contre leur gré (baiser forcé, caresse non désirée, « frottage »…) commis par toute personne qui n’habite pas avec la victime. Parmi les personnes âgées de 18 à 75 ans, on recense chaque année autour de 700 000 victimes de gestes déplacés (1,5 % des personnes de 18 à 75 ans) et 450 000 victimes d’actes d’exhibitionnisme (1,0 %). Ces niveaux sont très stables sur toute la période 2007-2017. Les femmes sont les premières victimes de ces atteintes à caractère sexuel : elles représentent en effet 82 % des victimes de gestes déplacés et 65 % des victimes d’exhibitionnisme.
Exhibitionnisme et gestes déplacés se rencontrent plus fréquemment que les agressions sexuelles plus graves (viols, tentatives de viol ou attouchements sexuels) dans les espaces publics En moyenne entre 2014 et 2016, qu’il s’agisse d’exhibitionnisme ou de gestes déplacés, environ une victime sur six a subi les faits dans un transport en commun. L’exhibitionnisme est très fréquent dans la rue (33 % des victimes), de même que les gestes déplacés mais dans une proportion moins élevée (15 %). Le lieu de travail ou d’études est rapporté par 11 % des victimes de gestes déplacés et 7% des victimes d’exhibitionnisme. Le domicile ou l’immeuble de la victime ou d’une autre personne restent fréquemment cités mais dans une moindre mesure que pour les violences sexuelles (entre 9 % et 14 %des victimes selon les atteintes). Restent les « autres lieux » qui sont cités par de nombreuses victimes et que l’enquête ne permet pas de préciser (27 % des victimes de gestes déplacés et 16 % des victimes d’exhibitionnisme).
Encadré méthodologique : l’enquête Cadre de vie et sécurité
Présentation générale
Réalisée par l'Insee en partenariat avec l’ONDRP et le SSMSI, l'enquête « Cadre de vie et sécurité » (CVS) est une enquête de victimation qui vise à recenser et décrire les faits de délinquance dont les ménages et leurs membres ont pu être victimes dans les deux années précédant l’enquête. L'enquête est menée au premier trimestre de chaque année auprès de 25 500 ménages résidant en France métropolitaine. Environ 16 000 ménages répondent effectivement à l’enquête. Au sein de chaque ménage, une personne de plus de 15 ans choisie aléatoirement répond aux questions portant sur les victimations individuelles (vols personnels, violences).
Les atteintes à caractère sexuel dans l’enquête
L’enquête CVS permet de recueillir des informations auprès des personnes parlant le français âgées de 18 à 75 ans sur les atteintes à caractère sexuel dont elles ont pu être victimes. Quatre questions permettent de recueillir trois catégories d’atteintes :
- les actes d’exhibitionnisme (Question 1 : « en dehors des personnes qui vivent actuellement avec vous, est-il arrivé qu’une personne se livre à une exhibition sexuelle, comme par exemple se déshabiller devant vous contre votre volonté ? ») ;
- les « gestes déplacés » (Question 2 :« en dehors des personnes qui vivent actuellement avec vous, est-il arrivé qu’une personne cherche à vous embrasser contre votre volonté, à vous caresser, ou faire d’autres gestes déplacés ? »)
- les agressions ou violences sexuelles, à savoir viols, tentatives de viol et attouchements sexuels (Question 3 :« en dehors des personnes qui vivent actuellement avec vous,est-il arrivé qu’une personne vous oblige à subir des attouchements sexuels ou avoir un rapport sexuel contre votre volonté, ou qu’elle tente de le faire ? »et Question 4 :« est-il arrivé qu’une personne qui vit actuellement avec vous, vous impose des attouchements ou un rapport sexuel non désiré, en utilisant la violence, les menaces, la contrainte ou la surprise ? »).
Pour les actes d’exhibitionnismes et les gestes déplacés, l’enquête permet principalement de recenser le nombre de victimes et de préciser le lieu où se sont déroulés les faits (cf. encadré « Exhibitionnisme et gestes déplacés »). Pour les violences sexuelles, le questionnaire est plus détaillé et permet, comme pour les autres atteintes personnelles, de décrire les caractéristiques de l’agression et de l’agresseur et de dresser le portrait des victimes. Pour assurer les conditions nécessaires de confidentialité et tenir compte de la spécificité des violences domestiques, le recueil des informations relatives aux violences sexuelles est distinct selon que l’auteur des violences vit ou non sous le même toit que l’enquêté au moment de l’enquête. C’est cette distinction qui est à l’origine des statistiques de violences (physiques et/ou sexuelles) dites « hors ménage » ou « au sein du ménage ».
L’échantillon de victimes dans cette étude et les hypothèses de travail
L’objectif de la présente étude est de décrire les victimes de violences sexuelles en s’affranchissant de la distinction « au sein du ménage » et « hors ménage ». Afin de constituer un échantillon de taille satisfaisante, toutes les personnes ayant déclaré au cours des enquêtes 2009 à 2017 avoir été victimes de violences sexuelles subies dans l’année précédant l’enquête et commises par une personne vivant ou non avec la victime ont été rassemblées. L’échantillon ainsi constitué regroupe 591 victimes. Parmi elles, 26 ont subi au cours d’incidents distincts des violences sexuelles à la fois au sein du ménage et hors de leur ménage. Les auteurs étant forcément des personnes différentes, il a été décidé de compter ces victimes deux fois pour ne pas avoir à les rattacher à un fait plutôt qu’un autre. Elles représentent un peu moins de 10 000 victimes par an. Le nombre annuel de victimes de violences sexuelles correspond ainsi exactement à la somme des victimes de violences sexuelles « au sein du ménage » (70 000) et des victimes de violences sexuelles « hors ménage » (152 000). En mobilisant 9 années d’enquête, la précision est de +/- 15 000 victimes par an
Les hypothèses ou conventions de cette étude :
- le lieu « domicile de la victime » inclut l'immeuble de la victime. Cette fréquence est faible (moins de 2 % de l'ensemble des victimes).
- les victimes agressées par une personne cohabitante ne sont pas interrogées sur le lieu de l'agression. Par convention on considère que l’agression a eu lieu au domicile de la victime et par conséquent dans le quartier.
- Dans plus de 80 % des cas, l’auteur a agi seul, par commodité, l’article évoque donc toujours au singulier l’auteur de l’agression au singulier. Les victimes agressées par un groupe d’auteurs dans lequel au moins un auteur est connu personnellement sont comptées avec les victimes dont l’auteur est connu personnellement, si aucun auteur n’est connu personnellement alors elles sont comptées avec les victimes dont l’auteur est inconnu ou connu de vue seulement.
Mise en garde
La formulation des questions 3 et 4 a légèrement changé en 2017 (Question 3 : « en dehors des personnes qui vivent actuellement avec vous, est-il arrivé qu’une personne vous impose des attouchements sexuels ou un rapport sexuel non désiré, ou qu’elle tente de le faire en utilisant la violence, les menaces, la contrainte ou la surprise ? » et Question 4 : « est-il arrivé qu’une personne qui vit actuellement avec vous, vous impose des attouchements sexuels ou un rapport sexuel non désiré ou qu’elle tente de le faire, en utilisant la violence, les menaces, la contrainte ou la surprise ? »). En 2017, le nombre de victimes de violences sexuelles hors ménage enregistre une hausse, a contrario le nombre de victimes de violences sexuelles au sein du ménage enregistre une baisse. Plusieurs années d’enquête sont nécessaires pour s’assurer d’un effet de la reformulation ou d’un effet de conjoncture. Cette reformulation n’impacte pas significativement les estimations annuelles moyennées sur 9 ans présentées dans cette étude.
Pour en savoir plus
Rapport d’enquête « Cadre de vie et sécurité 2017 », SSMSI, décembre 2017.
Rapport annuel de l’ONDRP, décembre 2017.
Éléments de mesure des violences au sein du couple, la note de l’ONDRP n°22, novembre 2017.
Les femmes, premières victimes déclarées de violences physiques ou sexuelles, la note de l’ONDRP n°12, mars 2017.
Les interlocuteurs des victimes de viol – d’après les enquêtes CVS,la note de l’ONDRP n°11, février 2017.
Insécurité et délinquance, premier bilan statistique, SSMSI, janvier 2017.
Enquête Virage et premiers résultats sur les violences sexuelles,Ined, Document de travail n°229, janvier 2017.
Viols et agressions sexuelles en France : premiers résultats de l’enquête Virage, Ined, Population&Sociétés n°538, novembre 2016.
Femmes et hommes face à la violence, Insee Première n°1473, novembre 2013.
[1] le lien auteur-victime correspond au lien identifié lors de l'incident le plus récent décrit par la victime. Pour les victimes qui déclarent avoir subi plusieurs actes de violences sexuelles au cours des 24 derniers mois, il n'est pas possible de déterminer pour l’ensemble des victimes si la répétition des violences sexuelles est le fait d'un seul et même auteur ou bien d'auteurs différents. Cela n’est possible que pour les victimes qui déclarent subir des violences « au sein du ménage », c’est-à-dire exercées par une personne cohabitante au moment de l’enquête.