23.01.2006 - Réunion des préfets

23 janvier 2006

Intervention de M. Nicolas SARKOZY, Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire - Réunion des Préfets - Hôtel de Beauvau


Mesdames et Messieurs les Préfets,

Permettez-moi d’abord d’adresser à chacun et chacune d’entre vous, ainsi qu’à vos collaborateurs et à vos familles dont je sais à quel point elles sont sollicitées, des vœux de réussite pour 2006, et des souhaits aussi de beaucoup de bonheur.

Je voudrais vous préciser les objectifs qui seront les vôtres durant les douze mois qui viennent et vous informer de plusieurs réformes en cours, qui auront un impact sur vos missions et vos moyens.

En matière de sécurité d’abord, vous recevrez, à l’issue de cette réunion, la circulaire relative au bilan de l’année 2005 et aux priorités que je vous fixe en 2006.

En termes de bilan, le nombre de faits constatés a baissé de 1,3 %, ce qui porte le recul de la délinquance à 8,2 % depuis 2002 (soit plus de 765 000 victimes évitées en quatre ans). La délinquance de voie publique a diminué pour sa part de 4,75 % sur l’année et de plus de 20 % depuis 2002.

En revanche, la violence contre les personnes qui représente 10,9 % du total des faits et augmente de nouveau, après s’être stabilisée en 2004, malgré un taux d’élucidation de 57 %.

Sur le plan géographique, la baisse de la délinquance touche la plupart des régions. 7 d’entre elles subissent une légère augmentation, mais une seule dépasse 1% de hausse. Parallèlement, le taux de criminalité continue de diminuer : il est cette année de 62,35 ‰ (contre 63,86 ‰ en 2004).

Ces résultats témoignent d’une efficacité accrue des services, comme le montre aussi le taux d’élucidation de 33,2 %, en progression de près de 7 points depuis 2002. Je souligne dans ces résultats l’impact des groupes d’intervention régionaux, qui ont participé en 2005 à 729 opérations et ont permis l’interpellation de 5 496 individus.

Pour 2006, je vous fixe un objectif de baisse de la délinquance de 3%, avec comme priorité la lutte contre toutes les formes de violences. Je veux donner un nouvel élan à la sécurité des Français en accordant une attention particulière aux plus faibles, qui sont aussi les plus exposés aux actes délictueux.

Il faut pour cela continuer à développer une approche quantitative, mais aussi améliorer la qualité de notre action. Nous devons axer nos efforts sur la rupture claire et définitive avec le sentiment d'irresponsabilité et d’impunité qu'éprouvent encore trop de délinquants. Il faudra pour cela adapter la stratégie, les méthodes et parfois les structures, autour de 7 priorités.

1/ D'abord la sécurité des usagers des transports en commun.

Les trains, bus, métros sont utilisés chaque jour par des millions de personnes. Des dispositifs locaux ont déjà été mis en place. J'ai créé en 2002 le Service régional de la Police des Transports en Ile de France et, en 2005 des Services Interdépartementaux de Sécurisation des Transports en Commun ont vu le jour à Lille, Lyon et Marseille. Localement des unités de sécurisation des transports ont été mises en place dans plusieurs circonscriptions.

Le nombre de faits constatés a baissé. Dans les trains, les faits constatés sont passés de plus de 10 000 en 2002 à moins de 6 700 en 2005. Il reste que la violence est toujours présente, que des voyageurs ont peur sur certaines lignes à certaines heures.

Ici comme ailleurs, on ne peut se contenter d'une vision statistique. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de créer une police ferroviaire. Elle sera forte de plus de 2 500 agents. Son action sera coordonnée par la police aux frontières. 400 policiers supplémentaires et 300 gendarmes seront affectés à cette mission.

Je vous demande d'effectuer, en liaison avec les responsables locaux de la SNCF, un diagnostic très fin de la délinquance dans votre département afin de recenser précisément les besoins. Cette démarche doit être étendue à l'ensemble des transports en commun. Vous devez veiller à chaque fois que cela est nécessaire à la mise en place de dispositifs adaptés à la sécurisation des bus, trams ou métros.

2/ Il faut aussi renforcer la sécurité à l'école. Je vous demande d'organiser le partenariat avec l'Education nationale de façon à ce que, chaque fois que la communauté éducative en fera la demande, les services de police et de gendarmerie puissent intervenir, y compris à l’intérieur des établissements. Il ne s'agit pas de systématiser ce dispositif mais bien de répondre aux sollicitations du milieu enseignant et des familles, qui doivent savoir que l'Etat se mobilise à leurs côtés pour éradiquer la violence à l'école. En bref : nous sommes à la disposition de l'Education Nationale.

3/ Nous devons ensuite mener une action plus vigoureuse contre la violence quotidienne qu'exercent les bandes dans certains quartiers. Les effectifs ont été renforcés par des unités mobiles dans les sites les plus sensibles. Je vous demande de vous appuyer sur les GIR pour intensifier l'approche patrimoniale des dossiers. Je vous demande aussi de développer au niveau local la méthodologie qui guide les GIR, celle du travail inter-services. Cela suppose que vous preniez en charge personnellement la coordination de la préparation des enquêtes et interventions. Personnellement, car vous seul avez personnellement autorité sur tous les services

J’ai demandé par ailleurs la création d’une réserve citoyenne de la police nationale, qui sera chargée de missions de médiation, de relation avec la population, de sensibilisation à la loi et à la bonne conduite. Sa composition et les modalités de son action vous seront communiquées prochainement.

4/ D'une façon plus générale, la lutte contre les violences aux personnes doit être au centre de notre action. Je pense particulièrement aux violences intra familiales.

Je vous adresserai prochainement, comme le Garde des sceaux le fera en direction des procureurs, une circulaire afin que ce soit l'auteur des violences qui puisse être éloigné du domicile conjugal et non la victime, comme aujourd’hui. Là aussi, les choses doivent être claires et chacun doit comprendre que notre priorité est de protéger les victimes. Ce principe s'applique partout et chacun doit être placé devant ses responsabilités.

Le nombre de travailleurs sociaux dans les commissariats et les grosses brigades sera à 100 d'ici la fin de l'année, en partenariat avec les collectivités locales. J'ai également demandé qu'on engage une expérimentation en employant des psychologues dans trois départements. Ces psychologues auront pour mission d'assister la police dans le dénouement des tensions et des conflits qu'elle a à traiter.

5/ Pour mettre un terme à la violence dans les stades, spécialement pendant les rencontres de football, j’ai nommé un coordonnateur national en la personne du commissaire divisionnaire LEPOIX. La loi permet désormais aux Préfets de décider d'une interdiction administrative de stade. Le décret d'application sera pris très rapidement.

6/ En matière de lutte contre l'insécurité routière, des avancées considérables ont été obtenues depuis trois ans, mais un effort doit être fait en direction des délinquants de la route. Notre objectif, ambitieux mais rien n'empêche d'être ambitieux si la cause est juste, est de passer sous la barre des 4 000 tués.

Votre action doit privilégier les jeunes et les conducteurs de deux roues motorisées. En liaison avec le ministère de l’Equipement, des diagnostics de sécurité seront rapidement effectués dans les départements où la situation est la plus sensible. En ce qui concerne les contrôles, 1000 radars automatiques étaient en service fin 2005. 500 radars supplémentaires seront installés en 2006.

7/ Je n'oublie pas - et personne ne peut l'ignorer- la violence terroriste qui demeure une menace et un défi pour notre pays. Notre action vise à détecter, interpeller et mettre hors d’état de nuire les terroristes et les réseaux qui les soutiennent. Pour cela, l’implication de tous, l’échange et la remontée des informations sont des priorités.

Plusieurs mesures de la loi anti-terroriste qui a été approuvée le 19 janvier par le Conseil Constitutionnel sont applicables immédiatement, notamment en matière de vidéo-surveillance, il est ainsi possible d’installer des caméras pour la prévention d’actes de terrorisme. Les personnes morales privées ont la liberté de filmer dans ce but les abords de leurs bâtiments. Je pense tout particulièrement aux lieux de culte. L'instruction des demandes se fera selon la procédure actuelle, mais les autorisations seront réexaminées au bout de 5 ans.

Par ailleurs, en cas de risque terroriste, la loi vous permet d’autoriser sous l'urgence, c'est-à-dire sans l'avis préalable de la commission, l'installation d'un système de vidéosurveillance, la commission devant être consultée dès que possible. Il vous est enfin possible de prescrire l'installation de systèmes vidéo dans certains sites particulièrement exposés. D’autres mesures, notamment en matière d’information du public et de renforcement du rôle de la commission départementale exigent la prise de textes d’application. Elles vous seront précisées au fur et à mesure.

En termes de méthode, je vous demande de mettre l’accent sur la prévention, qui doit être enfin considérée comme une politique à part entière. Cela repose sur votre capacité à coordonner les moyens et les services. Les grandes lignes du plan national de prévention de la délinquance, dont les principes vous sont déjà connus, ont été approuvées vendredi dernier par le Comité Interministériel de prévention de la délinquance. Ce plan nécessite des dispositions législatives et réglementaires. Ceci dit nombre de mesures peuvent être mises en œuvre immédiatement, y compris par anticipation de la loi dans le cadre, d'une bonne entente entre les Elus et les administrations de l'Etat. Vous recevrez donc dans peu de jours une circulaire vous donnant des instructions précises pour qu'une politique de prévention de la délinquance voie enfin, et sans tarder, le jour dans notre pays.

Sur ces bases, vous réunirez la conférence départementale de sécurité et me ferez connaître avant le 28 février les objectifs chiffrés et qualitatifs que vous aurez fixés pour 2006.

S’agissant de l’immigration, la France est restée en 2004 et 2005 la première destination mondiale des demandeurs d'asile. Cette situation est anormale car elle ne tient pas seulement à la tradition d'accueil de notre pays. Elle s’explique aussi par le caractère incitatif de certaines de nos procédures.

Ces deux dernières années ont permis d'enregistrer une diminution significative des délais d'instruction, tant par l'OFPRA (délai moyen réduit à 2 mois) que par la commission des recours des réfugiés (délai moyen de l'ordre de 5 à 6 mois.) L'effort doit désormais être conduit dans trois directions :

1/ Un décret en cours de préparation va réduire à 15 jours, au lieu d'un mois, le délai de recours devant la commission de recours des réfugiés.

2/ La loi de finances pour 2006 substitue à l'allocation d'insertion – bien mal dénommée puisque la plupart des étrangers déboutés de leur demande d'asile, n'a pas vocation à s'insérer mais au contraire à quitter notre territoire - une allocation temporaire d'attente dont le bénéfice sera refusé à ceux qui n'auront pas accepté d'être hébergés dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile. Il vous appartient donc de proposer systématiquement un hébergement en CADA à chaque demandeur d’asile. Le versement de la nouvelle allocation résultera de l’acceptation de cette proposition.

3/ Les délais d'instruction des demandes d'admission au séjour formulées par les demandeurs d'asile sont encore trop longs. Je vous demande de réduire à 15 jours, à compter de la première présentation du demandeur en préfecture, le délai au terme duquel intervient votre décision d'admission ou de refus de séjour.

En parallèle, je souhaite qu'à la fin de l'année 2006, les CADA, dont le statut va être modifié, n'accueillent plus que des demandeurs d'asile et non, comme c'est souvent le cas aujourd'hui, des déboutés ou des réfugiés.

Le maintien sur notre territoire de demandeurs d'asile déboutés est une composante majeure de l'immigration clandestine. J'attache donc une grande importance à ce que vous appliquiez avec énergie ces mesures. J'ai demandé qu'un indicateur de résultats soit créé pour vous permettre d'évaluer votre action dans ce domaine, par rapport à celles conduites dans les autres départements.

En termes de reconduites, ce sont près de 20 000 étrangers en situation irrégulière qui ont été éloignés en 2005, soit une progression de plus de 26 % par rapport à 2004.

44 préfectures sur 96 ont atteint ou dépassé l’objectif qui leur avait été fixé. 15 préfectures affichent un taux de réalisation compris entre 90 % et 100 % de l’objectif. 18 ont en revanche un taux de réalisation inférieur à 70 %.

De nombreux obstacles demeurent pourtant, comme le nombre de places en centre de rétention, la faiblesse des taux de délivrance de laissez-passer et le développement du contentieux devant les juridictions.

En réponse, le programme immobilier que j’ai impulsé permettra d’atteindre une capacité de 1700 places de rétention dès le mois de juin. En outre, les actions menées avec le ministère des affaires étrangères vers les pays les plus rétifs à la délivrance de laissez-passer doivent assurer la levée progressive de ce frein. S’agissant, enfin, du contentieux nous préparons avec la Chancellerie une circulaire conjointe aux préfets et aux parquets pour mettre fin aux dysfonctionnements que vous avez relevés.

Compte tenu de ces évolutions, il est possible de consolider la politique menée. C’est pourquoi j’ai fixé un objectif de 25 000 mesures d’éloignement exécutées fin 2006. Une déclinaison par département vous sera adressée d’ici la fin du mois.

Le projet de loi sur l’immigration et l’intégration, que je présenterai prochainement permettra d’enclencher une nouvelle étape, en favorisant une immigration choisie.

Il prévoira des objectifs chiffrés en matière de flux migratoires, ainsi que des mesures en faveur de l’immigration d’étudiants, de chercheurs et des travailleurs qualifiés dont notre pays a besoin. Il ne s’agit pas de piller les pays en développement de leurs élites, mais au contraire de permettre à celles-ci de restituer à leur pays d’origine l’expérience qu’elles auront acquise en France.

Le texte comportera en outre un volet relatif à l’immigration familiale, afin d’éviter les détournements de procédure et de garantir au mieux l’intégration. S’agissant de la régularisation automatique après dix ans de présence, qui constitue clairement un encouragement à la clandestinité, elle sera supprimée, mais des régularisations au cas par cas resteront possibles.

En matière de sécurité civile, je ne reviendrai pas sur la grippe aviaire et le plan gouvernemental, dont le Premier ministre vous entretiendra cet après-midi.

Un mot, en revanche sur l’indemnisation des victimes de la sécheresse de 2003. La loi de finances a instauré un régime d’aide exceptionnelle en faveur des sinistrés résidant dans des communes qui n’ont pas été reconnues en état de catastrophe naturelle. L’arrêté portant composition du dossier sera publié dans les prochains jours. Sans attendre, je vous demande de porter ce dispositif à la connaissance des élus, des associations et des particuliers. J'ai pu noter que les Elus sont très mal informés du dispositif qui a été décidé par le Gouvernement et le Parlement. Je vous demande expressément de prendre l'initiative d'une information à ce sujet.

En matière d'aménagement et de développement du territoire, 2005 a été marquée par le lancement de la démarche d'adaptation des services au public dans les zones rurales.

J'ai voulu avec Christian ESTROSI promouvoir une nouvelle approche. La concertation que vous avez conduite a été de grande qualité, surtout parce qu’elle a directement associé la population. Il en ressort des besoins considérables dans le secteur médical et médico-social, et l’attachement de tous à des services publics comme l’école et la poste. Vous disposez aujourd’hui d’une bonne connaissance des attentes. Il s’agit de bâtir à présent un projet.

Je vous demande de me le transmettre pour le 31 mai prochain.

Vous pourrez vous appuyer sur des outils nouveaux. Deux décrets parus le 30 décembre permettent aux collectivités territoriales d’aider à l’implantation de médecins dans les zones rurales. Des fonds d’Etat ont aussi été débloqués pour financer des projets, dès lors qu’ils seront innovants et s’inscriront dans une démarche de polyvalence et d’approche globale de l’offre de services. Dans ce but, chacun d’entre vous se verra notifier, au sein de la dotation de développement rural, une enveloppe attribuée à ces projets. De plus, 20 M€ seront consacrés, à travers le FNADT, aux projets de pôles d’excellence ruraux et attribués à l’échelon national dans le cadre des appels à projets. Le premier d’entre eux se clôt le 1er mars et ses résultats seront annoncés en juin.

Pour les services de guichet, vous pourrez recourir aux relais services publics. Il s’agit de guichets de proximité polyvalents reposant sur un ou deux agents, qui assureront les fonctions administratives pour le compte de l’ensemble des partenaires de la sphère publique, Etat, collectivités, sécurité sociale, voire Poste ou EdF.

Ils seront cofinancés par ces organismes. Le dispositif reposera sur un engagement qualité de chaque administration bénéficiaire. Cet engagement sera garanti par une enseigne et une politique de qualité nationale. Les relais eux-mêmes pourront être tenus par n’importe quel partenaire, mairie ou Poste en particulier. Les modalités précises du dispositif vous seront précisées en mars.

Enfin, la DIACT, qui succède à la DATAR, vous communiquera prochainement le recueil des expériences innovantes les plus réussies, ainsi qu’une analyse de vos contributions sur les besoins. Des outils juridiques, comme la simplification de la constitution des groupements d’intérêt public pour gérer des services polyvalents et l’assouplissement des règles de cumul d’activité pour les fonctionnaires, seront mis en place d’ici l’été.

J'ajoute que l'aménagement du territoire doit aussi s'adapter à la nouvelle géographie des inégalités. Les fractures qui passent au cœur des zones urbaines se sont massivement élargies depuis plus de 20 ans. Elles isolent des quartiers où se concentrent les problèmes d'emploi, d'intégration, de logement et d'échec scolaire. Intégrer les personnes, c'est donc aussi intégrer des territoires urbains. L'Etat doit agir par l'expertise, l'impulsion et l'incitation. Ce sont les bases d'une nouvelle politique que je demande aujourd'hui à la DIACT d'inventer, car je veux en faire une priorité dans la perspective des prochains contrats de plans.

S’agissant des collectivités locales, je veux insister sur trois priorités que sont l'intercommunalité, le contrôle de légalité et les transferts de personnels.

1/ Avec Brice HORTEFEUX, nous voulons franchir une nouvelle étape dans le développement de l'intercommunalité. C'est l'objet de la circulaire que nous vous avons adressée le 23 novembre. L'intercommunalité doit reposer sur des périmètres plus cohérents. Vous devez pour cela lancer l'élaboration du schéma d'orientation, qui devra nous être transmis le 30 juin au plus tard. Son élaboration devra s'effectuer dans la concertation, mais les propositions devront être exigeantes. S'agissant de l'intérêt communautaire, sa définition devra être achevée le 18 août prochain. Je redis ici qu'il n'y aura pas de nouveau report.

J'attends aussi que vous fassiez état de vos éventuelles propositions de modifications réglementaires ou législatives, par exemple pour ce qui concerne vos pouvoirs d'appréciation en matière de périmètres et de contrôle des compétences communautaires, ou de contenu même des compétences intercommunales. 

2/ Il est aussi urgent de redéfinir le contrôle de légalité. Une circulaire sur ce point est en cours de diffusion, qui détermine des champs prioritaires de contrôle : la commande publique, l'intercommunalité et les actes touchant à l'urbanisme et à l'environnement. Elle s’accompagnera de la généralisation, d’ici la fin de l’année, de la transmission dématérialisée des actes et de l'élargissement de la compétence du pôle interministériel de Lyon.

Vous devez accompagner ces démarches en adaptant l'organisation des services placés sous votre autorité, afin de tirer le meilleur parti des capacités d'expertise disponibles au plan local. Vous procéderez aux redéploiements d'effectifs et aux requalifications nécessaires pour réunir auprès de vous toutes les compétences nécessaires à cette mission.

Vous me rendrez compte, d'ici trois mois, des dispositions que vous aurez prises sur ces différents points.

3/ Enfin, l'acte II de la décentralisation rentre à présent dans sa phase la plus concrète, avec les transferts de personnels. En ce qui concerne les TOS, le décret relatif aux modalités de transfert a été publié le 26 décembre, date à partir de laquelle est ouvert l'exercice du droit d'option. Les arrêtés seront déclinés par département et par région d'ici la fin du mois. S'agissant des commissions tripartites locales, près d'un tiers d'entre elles n'avaient pas encore été installées le 20 janvier, ce qui nous expose à des risques contentieux. Vous devez maintenant procéder à ces installations de manière urgente.

Pour ce qui est des agents des DDE, le décret fixant les modalités de transfert définitif est intervenu fin décembre et la compétence « routes nationales » est transférée depuis le 1er janvier, ce qui ouvre le délai de 3 mois pendant lequel doivent être négociées et conclues les conventions de mise à disposition. Je vous invite à me communiquer dans ce délai les projets de convention, afin que les projets d'arrêtés interministériels puissent être soumis à une commission nationale de conciliation qui sera convoquée à la mi-avril.

Quelques mots enfin sur l’organisation et le fonctionnement des services de l’Etat sur le territoire.

Vous avez été particulièrement sollicités en 2005 par la préparation de la mise en œuvre de la LOLF. Vous allez désormais devoir l’appliquer. L’Etat est passé depuis le 1er janvier à une nouvelle approche des politiques publiques, tournée vers la performance.

C’est à vous qu’il appartient de porter les exigences de cette nouvelle culture au plan interministériel, en étant à la fois exemplaires dans la mise en œuvre des nouvelles méthodes de gestion, mais aussi comme ordonnateur secondaire pour les services déconcentrés. Il vous revient de faire prévaloir ainsi la cohérence des priorités de l’Etat sur le territoire. J’attends de vous que la cohésion et la lisibilité de l’intervention publique au niveau local en sortent renforcées.

2006 permettra aussi d’expérimenter une nouvelle organisation de l’Etat dans le département. La circulaire du 2 janvier dernier lance ainsi plusieurs innovations, fondées sur vos propositions.

La fusion des directions de l’Equipement et de l’Agriculture sera mise en œuvre dans huit départements. Elle sera naturellement pilotée par les ministères concernés, mais le secrétariat général, y prendra toute sa part et veillera à ce que la compétence des préfets soit respectée. Par ailleurs le rapprochement des inspections du travail sera conduit dans deux autres départements.
 
Le département du Lot ira plus loin en expérimentant le regroupement des services de l’Etat en trois directions opérationnelles, respectivement chargées de la population, des territoires et de la sécurité, soutenues par une direction en charge des ressources humaines et de la logistique.
 
Vous pourrez en outre créer, à votre initiative, des délégations inter-services dotées d’un pouvoir d’ordonnancement dans des domaines stratégiques, comme la cohésion sociale, la prévention des risques ou la communication de l’Etat.
 
En matière de ressources humaines, enfin, un marché de l’emploi des administrations territoriales de l’Etat sera mis en œuvre en Lorraine et en Champagne-Ardenne, pour favoriser la mobilité entre les services.
 
Ces mesures expérimentales poursuivent trois objectifs : améliorer la coordination interministérielle, faciliter l’accès aux services de l’Etat et encourager le partage des tâches pour dégager des économies d’échelle. J’attache du prix à ce dès lors qu’elles auront fait l’objet d’une évaluation positive, elles puissent être généralisées voire approfondies car je crois au fond de moi-même qu'il nous faut aller plus loin encore dans la réorganisation des services déconcentrés de l'Etat.

C’est dans ce même esprit de modernisation que doit se préparer la fusion des corps administratifs, qui entrera en vigueur début 2007. Elle permettra de rationaliser notre gestion et d’accroître les perspectives de carrière et de mobilité des agents. La fusion s’accompagne d’un ambitieux plan de requalification qui porte sur 4 700 postes en cinq ans.

Cette modernisation ne doit pas être subie par les préfectures, mais volontairement assumée et relayée dans le cadre d’un dialogue social constructif. Je demande à chacun d’entre vous d’être le porte-parole de ces réformes auprès des agents et des organisations représentatives.

Je vous demande aussi de transmettre à tous vos collaborateurs la considération et l’estime que je leur porte. Les préfectures et leurs agents sont aux avant-postes de la modernisation de l’Etat. Comme ils l’on fait en préfigurant l’application de la LOLF, il leur revient de montrer la voie à suivre.

Les hauts fonctionnaires que vous êtes ne sauraient rester en marge de ces évolutions.

Je pense d’abord à la prise en compte du mérite, non seulement dans le choix des promotions, comme je l’ai dit devant l’assemblée générale de votre association, mais aussi en matière de rémunération. Dans mon esprit, cela va de pair avec l’effort de revalorisation mené depuis 2002.

En 2006, pour la première fois, la modulation de la rémunération en fonction des objectifs atteints s’appliquera à l'ensemble des directeurs d’administration centrale et portera sur 12 % de la rémunération totale. Sur la proposition du secrétaire général, j’ai également décidé d’instaurer une réserve de performance, qui permettra de gratifier les meilleurs éléments parmi les administrateurs civils.

S’agissant des sous-préfets territoriaux, il vous appartient depuis l’an dernier de moduler l’indemnité de responsabilité qui leur est versée dans la limite de + ou - 15 % autour d’un taux pivot, en fonction de leur manière de servir. J’ai décidé de reconduire ce dispositif en 2006 tout en demandant à Daniel CANEPA d’expertiser les conditions dans lesquelles il est mis en œuvre.

Gratifier les meilleurs, c’est pour eux une juste récompense et pour nous l’assurance de les garder, parce qu’ils auront le sentiment que leurs talents sont reconnus comme il se doit.

Il faut, dans le même temps, diversifier les recrutements.

En 2005, 51 postes (10 d'administrateurs civils et 41 de sous-préfets) ont été offerts à des cadres extérieurs au ministère, soit deux fois plus que les années antérieures. Les objectifs sont clairs : il s’agit de diversifier les savoir-faire et d’intégrer ceux qui auront confirmé leur motivation en se confrontant au terrain. Cette ouverture est une condition de respiration et de performance du corps. Elle sera poursuivie et si possible accentuée en 2006.

De même, la mixité doit s'accroître dans le corps préfectoral. Il ne s’agit pas de mettre en place des quotas, mais bien de favoriser, à mérite égal, l’accès d’un plus grand nombre de femmes à des postes de décision. Deux femmes viennent d'être promues parmi les préfets délégués pour l'égalité des chances. En outre, 18 sous-préfètes de plus auront été accueillies en 2005. Au total, le nombre de femmes aura progressé de 37 % depuis 2003, mais cela ne représente en valeur absolue que 73 postes. La marge de progression est donc encore forte.

Je veux enfin élargir le recrutement des sous-préfets aux meilleurs agents du cadre national des préfectures, comme aux fonctionnaires d’encadrement des services déconcentrés de l’Etat, dont les compétences et la motivation doivent être mieux utilisées.

Cette ouverture doit naturellement jouer dans les deux sens. En 2005, 12 préfets, 18 sous-préfets et 41 administrateurs civils ont ainsi été affectés hors du ministère, soit deux fois plus que les années antérieures. J’ai confié à votre collègue, Catherine DELMAS-COMOLLI, la mission de développer et surtout de diversifier ces débouchés, qui restent parfois trop cantonnés aux cabinets ministériels.

Comme vous pouviez vous en douter, notre feuille de route pour 2006 est particulièrement dense. Elle n’est pourtant qu’à la mesure des attentes des Français et de l’urgence à y répondre. Je sais pouvoir à nouveau compter sur votre implication et votre engagement pour y faire face, en mobilisant les services de l’Etat et y associant l’ensemble de nos partenaires.