Intervention de M. Nicolas SARKOZY, Ministre d'Etat, Ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire - Tannay
Mesdames et Messieurs,
Une fois encore je suis parmi vous et avec vous pour vous témoigner mon immense chagrin dans l’évènement qui nous accable.
Car si, bien entendu, je vous apporte le témoignage officiel de la République, celui qu’elle manifeste publiquement et solennellement quand certains de ses enfants sont allés jusqu’au sacrifice suprême, ma présence parmi vous, vous dit aussi avec tout autant de force mon affliction d’homme.
Mes premiers mots sont pour les familles.
Vous, Madame PIOUX et vos 3 enfants, Hélène, Thomas et Etienne.
Vous, Madame OUDARD et vos 4 enfants, Sandrine, David, Nicolas et Amandine.
Vous, Madame GROPEAUX, la mère de Philippe.
Mes paroles ne peuvent être, comme celles de beaucoup d’autres personnes qui vous entourent, que celles de la sympathie et du réconfort.
Chacun des disparus avait une histoire. Des parents dont ils étaient la fierté. Une femme, des enfants qu’ils aimaient, et qui devront continuer à vivre sans eux. Des amis. Un métier. Chacun se sentait partie prenante d’une collectivité, qu’il voulait aider, secourir. Chacun était connu et apprécié, comme en témoigne l’intense émotion qui a saisi toute la commune à l’annonce de la tragédie.
Chacun avait des projets, un avenir.
Croyez bien que mes sentiments profonds, ceux que l’on ressent face à la mort, ceux que l’on n’exprime que dans son cœur, sont très forts pour vous tous, pour chacun de vous.
Je m’incline respectueusement devant votre douleur.
Les hommes qui sont partis n’étaient pas sans expérience, loin de là :
Et, malgré cette expérience et divers brevets et certificats professionnels obtenus, ils ont soudainement péri.
Nous savons tous la dangerosité de ce métier, mais quel lourd tribut parfois !
Le ministre de l’Intérieur ne peut cependant se contenter de ce constat. J’ai, dès que j’ai connu ce tragique accident, demandé au directeur de la défense et de la sécurité civiles de prescrire une enquête technique. Le bureau spécialisé de l’inspection de la sécurité civile, dont la création est issue de la mission que j’avais immédiatement mandatée après le tragique accident de Loriol, se mettra au travail sans délai et je suivrai personnellement les résultats de cette enquête technique.
Car ce n’est qu’en analysant les faits que, la part de la fatalité étant faite, on peut faire collectivement progresser la sécurité de tous. Des enseignements sont toujours à tirer de ces drames.
Permettez-moi de redire à la foule des sapeurs-pompiers ici réunis mon attachement à votre profession.
Tout particulièrement aux sapeurs-pompiers volontaires, qui représentent plus de 80% des effectifs globaux et des rangs desquels sont issus les 3 hommes que nous pleurons.
Le volontariat, c’est quelque chose d’extraordinaire : c’est faire un métier, et à côté, en dehors de ce métier, en faire un autre, difficile et exigeant.
Vous les volontaires vous exprimez ce sursaut de l’âme qui fait parfois défaut dans nos sociétés. Ce sursaut et cet exemple d’altruisme, on peut dire que vous l’exprimez chaque fois que vous partez en opérations, et que c’est du concret que vous exprimez, pas du vague et de l’imprécis.
C’est du positif, et j’ajoute du positif qui demande une formation et des entraînements.
Car la Nation a besoin des volontaires qui représentent, sur le territoire français, une implantation incomparable.
C’est d’abord une présence symbolique : que seraient nos cérémonies patriotiques sans le drapeau des sapeurs-pompiers ?
C’est aussi et surtout la certitude pour nos concitoyens d’avoir à proximité une capacité de secours au meilleur niveau. Intégrés dans une organisation départementale, formés, aguerris, les volontaires restent le fer de lance de la protection civile à la française.
Vous êtes indispensables à notre sécurité et malgré les risques, je sais qu’il y aura toujours des pompiers volontaires.
Parce qu’il y a parmi nos concitoyens des hommes et des femmes pour qui le devoir ne se conçoit que s’il a une conséquence immédiate : porter secours, assistance et parfois simplement réconfort.
Ce dévouement, je le mesure à sa pleine valeur, surtout quand je vous vois réunis, comme ici, dans un moment de deuil.
Une fois encore, à vous tous, un immense, un chaleureux merci.
Au fil des ans, je ressens pour vous comme une espèce d’attachement familial et je me sens en lien personnel avec chacun d’entre vous, partageant toujours un peu plus vos légitimes préoccupations, vos soucis, vos chagrins, mais aussi vos espoirs.
Et parmi ceux-là, je veux mettre en premier l’engagement des nouvelles générations, des jeunes qui, en pleine conscience, deviennent sapeur-pompier.
Je le dis avec beaucoup d’émotion ici, car pour vos familles endeuillées, ce n’était pas une notion imprécise et désincarnée.
En effet, je veux souligner qu’Etienne, 17 ans, fils d’Emmanuel PIOUX est sapeur-pompier volontaire à Tannay, corps que dirigeait son papa.
Vous dire également que David, 30 ans, et Nicolas, 23 ans, fils de Michel OUDARD sont sapeurs-pompiers volontaires à Tannay, dans le même corps que leur papa.
Et ajouter qu’Etienne et Nicolas étaient effectivement présents lors de cette tragique intervention.
Alors, cela est sûrement très dur pour vous depuis ce drame que vous avez vécu au plus près, mais en vous engageant, vous êtes l’expression et l’illustration de ce que les fils et les filles de France peuvent avoir de meilleur dans leurs actions désintéressées, en faveur et au service de leurs concitoyens.
Cela, je tiens à le dire, pour l’exemplarité, pour le courage, pour ce mouvement qui doit nous porter vers les autres et se traduire par un véritable engagement.
J’associe le souvenir de vos pères, et leur sacrifice, à l’espoir que vous pouvez nous donner.
Madame PIOUX, Madame OUDARD, Madame GROPEAUX, et toute la grande famille des sapeurs-pompiers, sachez que nous n’oublierons pas.