19.08.2006 Obsèques des sapeurs pompiers du Var

19 août 2006

Intervention de M. Nicolas SARKOZY, Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire, lors des obsèques à Puget-Ville de trois sapeurs pompiers volontaires décédés accidentellement le 15 août dernier au retour du feu de Ramatuelle.


Mesdames et Messieurs,

Nous voilà, malheureusement de nouveau réunis aujourd'hui à Puget-Ville, dans ce département du Var, déjà si durement touché il y a presque 3 ans, pour rendre un dernier hommage aux trois sapeurs-pompiers volontaires décédés accidentellement le 15 août au retour du feu de Ramatuelle.
Il n'y a pas de mots pour exprimer aux familles, aux sapeurs-pompiers de Puget-Ville, du département du Var et de France, toute la peine que nous ressentons devant ce dramatique accident. Mais je me devais de vous apporter le témoignage officiel de la République, celui qu'elle doit à ses enfants victimes de leur devoir. Je me devais aussi, en tant qu'homme tout simplement de vous dire mon immense chagrin.
Avec le décès tragique de ces trois sauveteurs, dans des circonstances dramatiques, c'est toute la sécurité civile qui est en deuil.
Tant de vies, tant de biens ont été sauvés grâce à ces hommes ! Tant de familles ont retrouvé les leurs, grâce à leur courage ! Soutenir et entourer leurs familles et leurs proches est une obligation morale pour chacun d'entre nous.
Mes pensées se tournent d'abord vers les familles :
Vers vous, Madame GILLET et vos deux enfants, Alice et Martin,
Vers vous, Madame ABAD et vos trois filles, Lisa, Laura et Julia,
Vers vous, Madame VELLA, mère de Jonathan et vous sa grand-mère.
Je m'incline devant la douleur qui est la vôtre aujourd'hui. Je mesure tout le poids de la souffrance lorsqu'on perd un mari, un père, un fils : des hommes qui sont allés au bout de leur engagement jusqu'au sacrifice suprême.

Chacun d'eux avait une passion, celle d'être sapeur-pompier volontaire. Chacun faisait la fierté de sa familles et de ses proches qu'il aimait et qui devront continuer à vivre pour conserver avec fierté l'image de ses hommes de devoir, imprégnés du désir d'aider les autres.
Croyez que face à de tels destins, trop tôt interrompus, mes paroles, comme celles de tous ceux qui vous entourent, ne peuvent être que celles de la sympathie et du réconfort car il n'existe pas de mots pour dire ses sentiments profonds, ceux qui s'expriment tout au fond de notre cœur.
L'adjudant François GILLET était âgé de 47 ans. Ambulancier auprès du SAMU de Côte d'Or, il était depuis 1996 sapeur-pompier volontaire au centre de Talant avant d'en devenir chef de centre. En mars 2002, il est recruté en qualité de sapeur-pompier saisonnier dans le Var et souscrit le 1er avril 2005 un engagement de sapeur-pompier volontaire à Puget-Ville. Formateur de grande qualité et excellent chef d'agrès, c'était le « père » de la caserne.

Le sergent Alain ABAD avait 42 ans. Agent de sécurité, il s'est engagé au centre de secours de Puget-Ville le 1er janvier 1999 ; il était chargé de la gestion du matériel médico-secouriste et de la formation continue. Très impliqué dans la vie associative et apprécié de ses collègues, il avait accepté la charge de président de l'amicale du centre de secours.
Le sapeur de 1ère classe Jonathan VELLA, âgé de 21 ans, célibataire, a été recruté le 1er juin 2003 d'abord en qualité de sapeur-pompier saisonnier, puis comme sapeur-pompier volontaire en octobre de la même année. Il venait de réussir sa formation de caporal et était sur le point de rejoindre le bataillon des marins-pompiers de Marseille à la mi-septembre. Il avait su communiquer sa belle passion à son frère, Grégory, et à son cousin Jérémy, tous deux sapeurs-pompiers volontaires, ici, à Puget-Ville.
Chacun était connu et apprécié, comme en témoigne l'émotion qui a saisi tout le village à l'annonce de cette tragédie et votre présence en nombre à cette douloureuse cérémonie en est la preuve.
Je veux saluer aussi le sapeur Nicolas FERRARINI, également sapeur-pompier volontaire, gravement blessé lors de ce dramatique accident, je lui souhaite de retrouver rapidement et de façon durable toutes ses capacités physiques.
De par ma fonction, toutes ces années passées aux côtés des sapeurs-pompiers, m'ont appris à respecter le courage et le dévouement dont ils font preuve quotidiennement au péril de leur vie.

Nous savons tous la dangerosité de ce métier, mais quel lourd tribut il faut payer parfois ! Nous ne devons jamais oublier que protéger et sauver nos concitoyens ou leurs biens peut aller jusqu'au sacrifice le plus ultime.
Cet accident nous rappelle que, dès lors qu'il est appelé, le sapeur-pompier est exposé à de multiples risques, du départ en intervention, au retour au centre d'incendie et de secours.
Je ne peux cependant me contenter de ce constat. Dès que j'ai appris ce tragique accident, j'ai demandé au directeur de la défense et de la sécurité civiles de prescrire une enquête technique afin d'en examiner les circonstances. Je veux, indépendamment des enquêtes judiciaires, souvent trop longues – et je sais combien souffrent les familles dans l'attente de conclusions qui ne viennent pas -  je veux donc savoir ce qui s'est passé, pouvoir le dire aux proches, en tirer des conclusions pour éviter que de tels drames ne se reproduisent.
Les sapeurs-pompiers volontaires participent à de nombreuses interventions et apportent chaque année une large contribution par leur action à la lutte contre les feux de forêts, notamment ici, dans les départements méditerranéens.

Sans cette forte participation des sapeurs-pompiers volontaires, les dégâts provoqués par les feux de forêts seraient considérables et désastreux. Je voudrais également associer dans cet hommage les sapeurs-pompiers professionnels et les sapeurs-sauveteurs militaires qui constituent toute l'ossature terrestre du dispositif de lutte contre les feux de forêts. Sans oublier les équipages des moyens aériens qui apportent leur précieux concours. Permettez-moi d'avoir une pensée pour les pilotes d'avions et d'hélicoptères de la sécurité civile qui payent eux aussi un tribut trop lourd dans l'accomplissement de leurs missions.
C'est cela, le vrai courage, celui des sapeurs-pompiers civils et militaires, des policiers, des gendarmes et que je salue si souvent, trop souvent à l'occasion de cérémonies comme celle-ci et devant lequel je m'incline aujourd'hui, au nom de tous les Français.
Je tiens à souligner l'engagement sans faille, le professionnalisme et le  courage dont fait preuve l'ensemble des acteurs de la sécurité civile tout au long de cette période de  lutte contre les feux de forêts. Je sais qu'ils le font avec passion.
Cette passion qui animait l'adjudant GILLET, le sergent ABAD et le sapeur de 1ère classe VELLA, lorsqu'ils sont partis ce mardi 15 août pour une mission, comme ils en avaient accompli tant d'autres et pour laquelle ils n'auraient laissé leur place à personne.
Le sacrifice qu'ils ont fait de leur vie, au service des autres, nous touche au plus profond de nous même. Mais ce doit être aussi un sujet de fierté, un exemple pour vous Alice, Martin, Lisa, Laura et Julia. C'est dur, c'est très dur de perdre son papa, et c'est pour ça que nous sommes tous ici, c'est pour ça qu'il nous faut vous soutenir, vous entourer. Votre papa, votre mari, Madame GILLET,  Madame ABAD, votre fils Madame VELLA, nous ne les oublierons pas car nous n'en avons pas le droit.
Je m'incline respectueusement devant votre douleur et celle de tous vos proches et amis et je vous assure des sentiments d'estime et d'affection que je vous porte, comme de la peine que je ressens personnellement.