11.10.2006 - Cérémonie des obsèques du major Eric LAMY et du gendarme Maxime VOIX

11 octobre 2006

Intervention de M. Nicolas SARKOZY, Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire lors de la cérémonie des obsèques du major Eric LAMY et du gendarme Maxime VOIX, décédés dimanche 8 octobre 2006, en Vendée.


Mesdames, Messieurs,

Pour la huitième fois depuis le début de cette année, la gendarmerie se trouve endeuillée par la brutale disparition en service le dimanche 8 octobre aux premières heures de la journée  du gendarme Eric Lamy et du Gendarme adjoint volontaire Maxime Voy.

Eric Lamy venait de fêter ses 35 ans le  2 octobre dernier, Maxime Voy n'avait pas encore vingt ans.

Eric Lamy servait dans la gendarmerie depuis 13 ans. Il était marié et père de famille. Maxime Voy était au tout début de sa carrière. Il avait rejoint à son tour, il y a onze mois seulement,  l'Institution dans laquelle servent son père et sa sœur. Il s'apprêtait à rejoindre le 5 décembre prochain l'école d'élèves gendarmes de Montluçon. 
Nous sommes  nombreux aujourd'hui autour de leurs cercueils pour témoigner à leurs proches et à leurs  camarades, notre émotion,  notre solidarité et notre sympathie  dans cette dure épreuve qu'ils traversent.

 Nous  voulons aussi manifester tous ensemble  l'estime et la considération que nous portons à ces deux militaires, qui étaient pénétrés de leur mission,  et qui  disparaissent prématurément dans l'accomplissement du Devoir.

La présence  de Madame Alliot-Marie, Ministre de la Défense, et la mienne à cette cérémonie sont aussi la marque de la reconnaissance du  Gouvernement à deux serviteurs exemplaires de l'Etat.

Les élus, les autorités civiles, judiciaires et militaires du département  ont tenu ainsi que les représentants des Associations de retraités à s'associer à cet hommage .

La disparition de deux membres d'une communauté est aussi une épreuve pour l'ensemble de la communauté. La gendarmerie nationale est aujourd'hui en deuil.

 Nous savons Madame Lamy,  Monsieur et madame Voy, combien la peine qui vous accable est immense et que cette peine est partagée par vos parents, vos enfants et vos amis.

 Nous savons aussi, et malheureusement d'expérience, qu'en pareilles circonstances, les mots sont parfois impuissants à rendre compte des  sentiments qui nous traversent, mais dans le même temps il importe, en rendant un juste  hommage aux disparus, de   donner publiquement acte de ce qu'ils ont été et de ce qu'ils ont fait au service de leur pays.

Eric Lamy  est né le 2 octobre 1971 à Boulogne Billancourt. Après des études de secrétariat,  il est appelé sous les drapeaux le 1ER Août 1991. Il effectue ses classes au centre d'instruction  de Tulle puis rejoint le groupement de gendarmerie d'Eure et Loir au sein du centre opérationnel.

Découvrant l'institution militaire, il décide d'aller au-delà de la période légale et souscrit un volontariat service long. Après 18 mois de service, et ayant passé avec succès le concours de sélection pour devenir gendarme, il intègre, en mars 1993, l'école de sous-officiers de Chaumont. Là, il suit dans de très bonnes  conditions  l'enseignement dispensé. Il est apprécié pour son excellent esprit de camaraderie et son sens de la discipline. Dès cette période, il manifeste son souhait de pouvoir, en temps voulu, servir en unité motorisée.

A l'issue de sa formation initiale, il choisit de servir en gendarmerie mobile , subdivision dans laquelle il va rester neuf ans à l'escadron de Mamers d'abord, à l'escadron de Nantes ensuite. Tout en se perfectionnant au plan professionnel, puisqu'il obtient avec aisance son diplôme d'aptitude technique, il participe à de nombreux déplacements en métropole, en Corse, et en  outre-mer,  notamment en Guyane, en Nouvelle-Calédonie et à la Réunion.

Acquerrant progressivement une solide maturité professionnelle, il est admis dans le corps des sous-officiers de carrière en Janvier 1996. C'est au cours de cette année 96 également qu'il décide de sceller son union avec vous Madame  qui lui avez donné la joie d'être papa de deux petits garçons, Alexandre et Florian. Son sens de la famille et l'affection qu'il porte aux siens vont de  pair avec son sérieux dans son métier.  

Son  professionnalisme est notamment  tout particulièrement distingué lors d'un déplacement au Havre en mai 1995. Alors qu'il est engagé dans un service d'ordre, il obtient des renseignements à l'origine du démantèlement d'un important trafic de véhicules volés en France et en Belgique. Son esprit d'initiative et son action en police de la route sont en outre  soulignés lors du  détachement qu'il effectue à la brigade de Remire-Monjoly, en banlieue de Cayenne.

Toujours soucieux de s'orienter vers les unités motorisées, il suit  avec succès le stage de formation motocycliste à Fontainebleau au printemps de 1999. A l'issue, il rejoint la brigade motorisée de l'escadron de Nantes où pendant trois années il va se partager entre les missions de sécurité routière et celles d'ordre public.

En mars 2002, Eric Lamy obtient sa mutation en gendarmerie départementale, au sein de l'escadron départemental de sécurité routière de la Vendée. En poste au peloton d'autoroute de Boufferé, dont la partie principale est aujourd'hui aux Essarts, où nous sommes actuellement,   il occupe un emploi de gendarme motocycliste. Il a alors réalisé pleinement ses premiers choix professionnels. Il donne toute satisfaction dans sa manière de servir et  se voit confier un rôle de tutorat  auprès des jeunes de son unité. Les appréciations de ses supérieurs sont en tous points élogieuses, ses résultats étant jugés remarquables. La médaille d'or de la défense nationale, agrafe « gendarmerie nationale » qui lui est attribuée le 1er janvier dernier   reconnaît l'ensemble de ses mérites.

Son compagnon dans le malheur, Maxime VOY était lui  aussi, un  jeune homme de très grande qualité. Né le 24 mai 1987 à Chambéry, il connaît dès sa prime enfance la vie en gendarmerie, au gré des affectations de son père, sous-officier puis officier de gendarmerie et très tôt va  s'imprégner des valeurs de l'institution. Après un excellent parcours scolaire, il obtient un bac scientifique et intègre le 24 octobre 2005 l'école de Tulle pour y suivre la formation de gendarme adjoint volontaire. Brillant, il se classe à l'issue de celle  ci  6ème sur 94 et obtient son certificat technique élémentaire avec la mention « très bien ».

 Son rang de sortie  lui donne alors une grande possibilité de choix et il s'oriente vers un emploi résolument opérationnel. Le 26 janvier de cette année, Maxime rejoint avec enthousiasme le peloton des Essarts au sein duquel il va participer à l'ensemble des activités.

S'étant rapidement adapté, ses supérieurs notent qu'il est très motivé, fait preuve d'initiative et cherche à approfondir quotidiennement ses connaissances. Son sérieux et son dynamisme font honneur à son jeune âge.

Ayant réussi  le concours d'entrée en école de sous-officier, il était à l'évidence promis à un bel avenir professionnel. Comme pour Eric le destin tragique en a voulu autrement

Le dimanche 8 octobre à 3 heures du matin Eric LAMY et Maxime VOY participent avec d'autres militaires du département à un dispositif axé plus particulièrement sur la lutte contre l'insécurité routière. A peu près au même moment, à Plessé dans le département voisin de Loire-Atlantique, une jeune fille de 18 ans, qui marchait sur

le bord de la chaussée, est fauchée par un véhicule qui prend la fuite. Elle est tuée sur le coup. Informés de la situation, les gendarmes de l'EDSR de Vendée, tout en poursuivant leur mission, se tiennent prêts le cas échéant à contrôler le chauffard en fuite.

Le service d'Eric Lamy et Maxime Voy se déroule normalement jusque vers 5 heures. A cet instant, un automobiliste se présente  à leur hauteur, se soustrait volontairement à l'injonction de s'arrêter, éteint les feux de son véhicule, fait demi-tour et prend la fuite.

Les deux militaires, tout en  diffusant l'alerte, prennent en chasse le fuyard. Le dispositif de surveillance se réorganise pour permettre l' interception. Le conducteur du véhicule en fuite parvient à se soustraire à un nouveau poste de contrôle.

Le contact étant maintenu, la poursuite continue. C'est dans cette phase de l'opération que le véhicule d'Eric et de Maxime quitte brutalement la route et heurte violemment un arbre. Les deux militaires décèdent des suites de leurs blessures. Le fuyard sera  interpellé peu de temps après. Il conduisait sous l'emprise d'un état alcoolique. Il devra rendre compte à la Justice des infractions commises.

 Quant à l'autre chauffard, celui de Plessé qui a tué la même nuit la jeune Noémie Amosse, il a également été interpellé par les gendarmes et je souhaite que la Justice sanctionne avec la plus grande sévérité ces comportements aussi irresponsables que criminels.  

Depuis 2002, nous avons engagé dans notre pays une véritable lutte contre l'insécurité routière. Le nombre de tués est ainsi passé entre 2002 et 2005 de 7200 à 5000. En quatre ans ce sont plus de 8000 vies qui ont été sauvées et plus de 100 000 blessés qui ont été épargnés. Nous allons poursuivre dans cette voie. Il n'y aura pas de changement de cap.

Ces résultats sont le fruit d'une politique globale, qui s'est notamment traduite par une plus grande fermeté, avec un durcissement de la Loi et de nouveaux moyens pour constater les infractions. Cette politique de rupture s'est accompagnée aussi d'une prise de conscience et d'une modification des comportements chez une  majorité de Français. Je dis bien une majorité car tous n'ont pas encore compris l'impératif d'adopter une conduite apaisée.

 Comme à l'origine du drame qui nous réunit aujourd'hui, on trouve  trop souvent encore l'alcool. Au cours des sept premiers mois  de l'année, ce sont 149 000 infractions pour conduite sous l'emprise de l'alcool qui ont été  constatées par les policiers et gendarmes, contre 133 000 pour la même période de 2005. C'est dire si l'action des forces de l'ordre est déterminée, c'est dire aussi combien la mobilisation doit rester grande.

Compte tenu de la sur-accidentalité observée chez les jeunes conducteurs qui sont aussi les plus vulnérables, j'ai encore récemment insisté sur la nécessité d'intensifier les contrôles les fins de semaine et en fin de nuit, dans les lieux et les créneaux les plus sensibles.

Eric Lamy et Maxime Voy sont morts victimes du devoir. Comme beaucoup d'autres de leurs  camarades ils menaient cette nuit là, de manière anonyme et totalement désintéressée mais avec une conviction intacte, ce combat  contre l'insécurité routière, qui est d'abord un combat pour la vie.

 Leur engagement au service de la collectivité a valeur d'exemple et restera gravé dans les mémoires. Je m'incline devant eux qui ont  payé de leur vie cet engagement.

A vous Madame Lamy  qui venez d'être brutalement séparée de votre époux alors que vous aviez encore tant de choses à vivre ensemble, à vous Alexandre et Florian, qui aimiez et étiez fiers de votre père ;

A vous, mon commandant et Madame Voy, à vous, Aurélie, à vous Aline, qui venez de perdre Maxime, qui avait encore tout à attendre de la vie ;
 
je tiens à vous renouveler notre compassion, à vous assurer de notre très vive sympathie comme de notre total soutien.

Major Eric LAMY, gendarme Maxime VOY, nous nous inclinons respectueusement devant vous. Le Ministre de la défense va maintenant vous remettre deux décorations :
- La médaille militaire qui rappelle votre appartenance à la communauté militaire ainsi que la valeur de vos mérites.
-  La médaille de la gendarmerie, avec une citation à l'ordre de la gendarmerie, qui  honore le  choix que vous avez fait de protéger vos compatriotes dans ce combat quotidien contre l'insécurité routière.

Ces médailles et citations constituent l'ultime salut de vos chefs et de vos pairs qui vous expriment ainsi de manière concrète leur respect et leur reconnaissance.

Major Eric LAMY, Gendarme Maxime VOY, reposez en paix.