26.09.2003 - Réunion des préfets

26 septembre 2003

Intervention de Monsieur Nicolas SARKOZY, Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité Intérieure et des Libertés Locales


Mesdames et Messieurs,

 Je suis heureux de vous retrouver pour cette réunion de rentrée en compagnie d'Alain LAMBERT et de Patrick DEVEDJIAN.
 Beaucoup d'entre vous ont vécu un été chargé d'événements, de catastrophes. J'ai naturellement une pensée toute particulière pour les préfets des régions du Sud de la France qui ont été touchés par une vague d'incendies sans précédent depuis 15 ans. J'y reviendrai. Dans ces périodes troublées, vous avez encore prouvé votre disponibilité et votre efficacité.

 Je commencerai par le principal sujet d'actualité, le projet de budget pour 2004.

Le conseil des ministres a adopté hier ce projet. Comme vous l'a indiqué Alain LAMBERT, la situation budgétaire de l'Etat est particulièrement délicate, puisque le déficit devrait encore atteindre en 2004 environ 20 % des recettes de l'Etat.
Dans ces temps difficiles, le ministère de l'intérieur a été mieux traité que d'autres. A périmètre constant, son budget augmentera de 4 % pour atteindre 20,5 milliards d'euros. Mais le périmètre ne sera justement pas constant. Le budget 2004 prévoit en effet une importante réforme de l'architecture des dotations aux collectivités locales.

Le nouveau cadre constitutionnel et législatif des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, que Patrick DEVEDJIAN vous a rappelé, s'accompagnera d'un nouveau cadre budgétaire. La plus grande partie de la dotation générale de décentralisation et des dotations de compensation de pertes fiscales sera transformée en prélèvements sur recettes, pour plus de 8 milliards d'euros au total.

Cette réforme permettra de mettre ces dotations définitivement à l'abri des tentations de régulation budgétaire qui apparaissent parfois. Elle permettra aussi d'alléger les tâches des préfectures, car les dotations transformées en prélèvements sur recettes seront désormais gérées par la direction générale des impôts.

Au contraire, la dotation de développement rural, qui était un prélèvement sur recettes, sera transformée en dotation budgétaire. Cela vous permettra de distinguer les délégations d'autorisations de programme et de crédits de paiement, et de tenir un compte plus précis des consommations.

La réforme des dotations aux collectivités locales n'est pas seulement une réforme de périmètre : elle concerne aussi l'architecture d'ensemble de ces dotations. Les concours financiers aux collectivités locales étaient devenus illisibles à force de complexité. Nous allons donc les simplifier.
Le PLF 2004 prévoit que la dotation globale de fonctionnement devienne une vraie dotation globale. Plusieurs dotations y seront donc intégrées : la dotation de compensation de la part salaires de la taxe professionnelle, les compensations des droits de mutation à titre onéreux et de la part régionale de la taxe d'habitation, la plus grande part de la dotation générale de décentralisation, le fonds national de péréquation, la compensation des pertes de Dotation de Compensation de la Taxe Professionnelle – je sais, c'est très lourd mais cela s'appelle comme ça. Quant au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle – qui était devenu un assemblage hétéroclite de dotations sans lien entre elles – il sera supprimé et les pertes de bases de taxe professionnelle seront directement compensées par l'État.
Au total, la DGF passera en 2004 de 19 à 36,5 milliards d'euros. Son architecture interne sera également simplifiée. Les régions toucheront enfin une DGF, et à chacun des trois niveaux de collectivités correspondra une part de la nouvelle dotation. Chacune de ces trois parts sera structurée selon le même modèle : une dotation de base et une dotation de péréquation. Quand on veut faire simple, on y parvient.
En revanche, le Gouvernement n'a pas souhaité revenir sur les règles qui régissent les relations financières entre l'État et les collectivités locales depuis 1996. Le contrat de croissance et de solidarité sera donc reconduit en 2004, pour un montant de 43 Mds € et selon les mêmes modalités d'indexation : l'inflation majorée d'un tiers de la croissance.
L'indexation de la DGF reste, elle aussi, inchangée : l'inflation majorée de 50 % de la croissance. Cependant, la dotation de péréquation augmentera plus rapidement que la dotation de base pour répondre à la nouvelle exigence constitutionnelle de péréquation. Enfin, la dotation de compensation de la taxe professionnelle continuera à servir de variable d'ajustement.

Hors collectivités locales, le budget du ministère de l'intérieur augmentera de 6,7 % en 2004 pour atteindre 10,5 milliards d'euros. Si on ne compte pas l'augmentation automatique due aux élections, la progression totale sera de 5 %.

L'évolution des crédits de la police nationale sera de 5,7 %. 2004 sera la deuxième année d'application de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002 (LOPSI). Les budgets 2003 et 2004 permettent d'ores et déjà de garantir un taux d'exécution de 55 % de cette loi qui, comme vous le savez, porte sur les année 2003 à 2007.
Le budget prévoit notamment la création de 1.000 emplois dans la police nationale. Il permettra de financer, entre autres, l'accélération du programme Acropol ; l'acquisition de radars automatisés pour le contrôle des excès de vitesse ; la première tranche du nouvel uniforme ; le renouvellement de l'armement ; et l'accélération de la réparation des véhicules grâce à un recours accru à l'externalisation.
Le budget 2004 marquera aussi une première étape de la réforme des corps et carrières de la police nationale. Sur ce point, je vous adresserai dès la semaine prochaine une information plus complète.

Le budget des préfectures sera marqué avant tout par la généralisation de la globalisation des crédits de fonctionnement et de rémunération. Le nouveau contrat Intérieur/Finances 2004-2005 préserve les principes fondateurs de la globalisation que sont la fongibilité des crédits et la déconcentration de leur décision d'emploi.

La dotation globale de votre préfecture vous est communiquée aujourd'hui. Il vous revient donc dès maintenant de définir votre stratégie budgétaire. Vous devrez utiliser cette souplesse pour prévoir, à plus long terme, comment vous voulez voir évoluer la structure de vos dépenses à l'intérieur d'une enveloppe garantie. Vous bénéficierez pour cela d'une dotation globale, qui évoluera de 0,2 % par an en plus du point fonction publique et des mesures générales.

Un effort financier particulier en faveur des personnels accompagnera la démarche de modernisation des préfectures. 4,5 millions d'euros seront consacrés à la revalorisation des régimes indemnitaires du cadre national des préfectures. A l'issue de cette revalorisation, tous les cadres B et C bénéficieront d'un régime indemnitaire allant, selon les métiers, de 90 % à 100 % de la moyenne interministérielle.
Des mesures spécifiques sont prévues pour les directeurs de préfectures. Une provision de 260.000 € permettra de poursuivre l'attribution de points de nouvelle bonification indiciaire que nous avons commencée cette année. Le grade de directeur de préfecture et l'emploi fonctionnel de chef de service administratif seront fusionnés en un emploi fonctionnel unique de directeur des services.

Naturellement, les améliorations indemnitaires du cadre national des préfectures seront reflétées par des améliorations identiques pour les fonctionnaires des services techniques et du matériel et des services d'information et de communication. 240.000 € seront ouverts pour cela.

 Le budget 2004 prévoit aussi plusieurs mesures destinées à l'amélioration des carrières des agents de catégorie B et C. En particulier, 30 emplois de secrétaire administratif seront classés dans la classe exceptionnelle et 115 emplois d'agents administratifs seront transformés en emplois d'adjoints.

Enfin, des mesures spécifiques sont prévues pour le corps préfectoral. D'une part, 900.000 € permettront de financer un rattrapage indemnitaire que les responsabilités et les contraintes justifient pleinement.
D'autre part, la réforme statutaire de 2002, qui a conduit à organiser le corps des administrateurs civils en deux classes au lieu de trois, sera étendue aux sous-préfets.

Le budget prévoit aussi une augmentation des crédits d'équipement. Dans les préfectures, plus de 50 000 m² devraient être mis en chantier et près de 13 000 m² livrés.
On peut citer les restructurations des préfectures de Lyon, Vannes, Quimper, Poitiers et Avignon ; les sous préfectures de Nogent-sur-Marne et Dunkerque ; la mise en service de la sous-préfecture de Sarcelles ; et bien sûr, l'opération majeure de transfert des services dans le bâtiment Scrive à Lille. Les travaux d'extension et de restructuration de la sous-préfecture de Meaux seront également lancés.

Au cours de l'été, beaucoup d'entre vous se sont inquiétés de la mise en réserve de 20 % des crédits de fonctionnement et de la totalité des reports de crédits 2002. Comme je vous l'avais annoncé lors de notre précédente rencontre, un réexamen de cette situation devait avoir lieu. J'ai obtenu hier du Premier ministre la garantie que 40 millions d'euros, soit 80 % du montant qui avait été mis en réserve, seront libérés aujourd'hui.

Je vous demande, par ailleurs, de tout mettre en œuvre dans la gestion et la consommation des fonds européens, notamment du FEDER, ceci afin d'éviter tout risque de dégagement d'office à la fin de l'année qui nous obligerait à restituer des fonds à la Commission européenne.

Enfin, 2004 sera une année importante pour l'évolution des moyens de la sécurité civile. Ses crédits d'équipement augmenteront de 18 % pour permettre la mise à niveau des crédits de maintenance, la poursuite de l'acquisition des hélicoptères EC 145 et la remise à niveau des stocks de matériels que la saison de feu dévastatrice de cet été a réduits à presque rien. La dotation du fonds d'aide à l'investissement des services d'incendie et de secours sera augmentée de 20 % et passera de 45 M€ à 54 M€.

L'augmentation des moyens de la sécurité civile ne se limitera cependant pas aux moyens inscrits au budget. Le Premier ministre m'a déjà donné son accord pour que le renouvellement de deux avions bombardiers d'eau Fokker, qui ont respectivement 32 et 33 ans, soit traité en loi de finances rectificative. Et surtout, la loi de modernisation de la sécurité civile qui sera bientôt présentée au Parlement comprendra un effort exceptionnel d'équipement. Elle déterminera les moyens nécessaires pour combler progressivement le retard d'équipement qui est apparu de manière criante l'été dernier.

 Mon deuxième point concerne la politique de sécurité intérieure.

 J'ai rencontré ce mois-ci plus de 20 000 policiers et gendarmes dans les 7 zones de défense pour leur transmettre ce que j'attends d'eux, mais aussi pour écouter leurs observations. Vous trouverez sur l'Intranet ces discours.

 Je souhaiterais revenir sur quelques points :
 La délinquance continue à baisser : de 4 % depuis le début de l'année, dont encore 3 % au cours du mois d'août, ce qui fait – 8 % depuis le mois d'août 2001.
 C'est une réussite de chacun des policiers et gendarmes qui se sont remobilisés et aussi de leurs chefs, donc de vous même. Ces résultats, je vous demande de les communiquer chaque mois.
 Je sais que cela n'est pas toujours le cas. Certains considèrent que l'élaboration d'un communiqué de presse ou la diffusion sur l'Intranet suffit. Ils ont tort. Vous devez prendre la parole devant la presse. Vous devez aussi inciter vos Directeurs départementaux de la Sécurité Publique et vos commandants de groupement à prendre la parole aussi souvent que possible. Le silence médiatique est une erreur.

 J'attends de vous le même engagement dans la lutte contre la délinquance routière. J'ai eu l'occasion de rencontrer en juin les responsables des unités spécialisées des départements concernés par les migrations estivales pour faire le point sur leurs priorités. Il faut en retenir deux idées :
 - La première est de définir une stratégie de contrôles permanents et en tout lieu. Je suis opposé aux effets d'annonce tels que "20000 policiers et gendarmes" seront sur les routes à la Toussaint. Je veux que les conducteurs aient le sentiment qu'ils peuvent être contrôlés à tout moment et en tout lieu.
 - la deuxième est de refuser toute politique de quotas de contrôles. Je m'intéresse au nombre de victimes évitées. Le choix des moyens pour y parvenir appartient aux responsables locaux de la lutte contre la délinquance routière.  L'époque est aux contrôles "intelligents", à la chasse aux irresponsables, non à la course aux chiffres.
 Nous allons installer les 100 premiers radars automatisés dans 21 départements à compter de la deuxième quinzaine d'octobre. Les préfets concernés auront les éléments de langage nécessaires. Il vous appartient notamment d'expliquer que ces radars sont situés là où les risques d'accidents sont les plus importants, non là où les possibilités de relever des infractions sont les plus importantes. L'efficacité de ce dispositif repose sur une bonne communication, une bonne pédagogie.

 Je souhaite enfin vous dire quelques mots de la réforme des corps et carrières des policiers.

 J'ai pu constater que la réforme engagée en 1995 par la loi d'orientation pour la sécurité avait été partiellement interrompue. Je le regrette car cette réforme s'imposait. Aussi, ai je décidé de reprendre le travail interrompu pour l'achever.
Le Directeur Général de la Police Nationale, Michel GAUDIN, m'a communiqué ses propositions sur ce sujet. L'idée part bien des missions et responsabilités des trois corps d'actifs pour repenser leur niveau hiérarchique et leur organisation.
C'est ainsi que la réforme doit renforcer la polyvalence. Chaque policier doit être en mesure d'assurer toutes les facettes de son métier. Elle exige également de rehausser les niveaux de recrutement et de s'engager dans la revalorisation des corps. D'autres propositions portent également sur les filières administratives, techniques et scientifiques.
S'agissant des commissaires et des hauts fonctionnaires, je souhaite que leurs soient confiés uniquement les postes comportant de véritables missions de conception et de direction. Quant aux officiers, j'attends dans le même esprit qu'ils exercent des missions d'encadrement et de commandement opérationnels des services. La conduite des petites équipes de gardiens de la paix relève, par contre, des gradés que sont les brigadiers et les brigadiers majors.

J'attends que localement vous soyez extrêmement vigilants au respect de la logique fonctionnelle qui a déterminé cette réforme.

J'ai déjà évoqué devant vous le travail de préparation du nouveau projet de loi sur la sécurité civile. Il sera présenté au Parlement cet automne.

Pour que la sécurité civile soit l'affaire de tous, nous proposons quatre grandes mesures :
· l'apprentissage des gestes qui sauvent à l'école puis au collège.
· la revalorisation du volontariat.
· le renforcement des associations qui œuvrent dans ce domaine et la création d'une réserve de sécurité civile.
· la création de plans communaux de sauvegarde et la modernisation du système d'alerte.
· enfin, la simplification des plans de prévention, en faisant du plan ORSEC le cadre de référence dans lequel viendront s'inscrire tous les autres plans spécialisés.

 S'agissant de l'organisation de la sécurité civile, l'objectif est bien de stabiliser l'institution des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS).
Ils resteront des établissements publics dont la gestion relèvera principalement de la responsabilité du Conseil général. Mais nous ne couperons pas le lien, lien humain et opérationnel, qui s'impose avec la commune. Et à l'inverse, il n'est pas question de modifier les règles actuelles du commandement opérationnel. Celui-ci restera dans les mains du représentant de l'Etat dès lors qu'un sinistre touche plusieurs communes. .
 Il est par contre nécessaire de clarifier le rôle de chacun. Il faut mieux associer les collectivités locales aux décisions qui ont un impact sur leur budget, c'est une évidence. Au niveau national, ils seront donc associés aux décisions prises dans le cadre d'une conférence nationale des services d'incendie et de secours.
Enfin, dès que la situation impose des moyens extérieurs au département sinistré, l'Etat doit prendre en charge la totalité des coûts de renfort et organiser la solidarité nationale. Le principe est simple : "risque quotidien, réponse de proximité ; situation exceptionnelle, solidarité nationale".
Et je vous confirme que les SDIS les plus touchés par les incendies de cet été bénéficieront d'une subvention exceptionnelle.

Enfin, plusieurs dispositions visent à stabiliser le financement de la sécurité civile.
 L'Etat prendra en charge l'engagement de ses propres moyens. Il fera jouer la solidarité nationale dès lors qu'il sera fait appel à des moyens extérieurs au département sinistré. Le SDIS pour sa part prendra en charge le financement des moyens de secours nécessaires aux opérations ordinaires qui dépassent le cadre de la commune.
 L'Etat aidera l'effort d'investissement des SDIS grâce au Fonds d'aide à l'investissement. Le décret a été publié le 17 septembre, et pourra bénéficier aux projets engagés à partir du 1er janvier 2003. Nous avons également réglé plusieurs dossiers financiers, notamment sur les transports sanitaires.

J'aurai l'occasion de détailler ces mesures demain au congrès de la Fédération nationale de sapeurs pompiers de France. Je vous invite à récupérer le discours sur l'Intranet dès lundi prochain.
Quatrième sujet d'actualité : la politique de maîtrise de l'immigration.

Vous le savez, le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France a été en voté en première lecture à l'Assemblée Nationale le 9 juillet dernier. Il sera présenté au Sénat dans quelques jours.

Je ne reviendrai pas sur la présentation de ce texte. Le principe est simple : annoncer que la France doit demeurer une terre d'immigration sans en tirer la conséquence inéluctable que cette immigration doit être maîtrisée est irresponsable. Ceux à qui nous donnons des papiers sont les bienvenus. Ceux qui n'en ont pas seront systématiquement reconduits. 
Il ne peut y avoir de politique d'immigration et d'intégration si nous ne sommes pas capables d'interpeller les personnes en situation irrégulière pour les reconduire dans leurs pays. Et je ne vois pas en quoi ce serait une atteinte aux droits de l'Homme de reconduire un Roumain en Roumanie ou un Sénégalais au Sénégal.
 
Il n'y a pas de fatalité à l'immigration clandestine. Des mesures fermes se traduisent toujours par des résultats. Je pense à Sangatte. Je pense à la zone de rétention de Roissy.

Vous devez sans attendre la nouvelle loi, augmenter les reconduites. Des objectifs chiffrés vous seront fixés, sachant que l'objectif national est de multiplier par deux, à court terme, le nombre de reconduites.
A vous de prendre rapidement l'initiative d'agir. Je vous demande notamment de prendre contact avec le centre national d'animation et des ressources, qui vient d'être créé à la Direction Centrale de la Police aux Frontières (DCPAF), afin de déterminer vos objectifs. Ce centre est là pour vous aider, notamment pour les questions difficiles telles que l'obtention des laissez-passer consulaires. 38 départements vont créer, dans le même esprit, des pôles de compétence locaux.

 Vous devez également prendre contact avec les parquets et les tribunaux administratifs pour développer la politique de reconduite et la qualité juridique des décisions. Dans ce domaine, vous pouvez notamment améliorer la formation des agents de préfectures.
 Dans tous les cas, nous devons exclure que des procédures d'éloignements échouent par carence de l'administration, y compris des préfectures pendant le week-end. Je vous demande de mettre en place dans vos préfectures une permanence du service des étrangers qui soit vraiment opérationnelle. Et naturellement, la personne mobilisée doit être disponible et surtout parfaitement compétente sur les différents sujets.

Une instruction générale vous sera prochainement envoyée pour préciser ces points. Je vous demande d'y attacher la plus grande importance. Là aussi, je souhaite que la politique voulue par le Parlement et par le Gouvernement s'applique effectivement.

 Ceci m'amène indirectement à évoquer la lutte contre la prostitution.

 Je n'admets pas que la France soit une terre de prospérité pour des filières de traite des êtres humains. C'est inadmissible dans une République tant attachée aux Droits de l'Homme. Nous n'avons pas le droit de rester les bras croisés. Ces filles sont des victimes qu'il faut protéger. Notre inaction, notre passivité seraient profondément coupables.

La loi pour la sécurité intérieure permet de les protéger. Celles qui dénoncent leur proxénète bénéficient d'un titre de séjour et d'une aide à la réinsertion avec l'appui d'une association. Celles qui refusent de dénoncer leur proxénète seront reconduites à la frontière lorsqu'elles sont étrangères. C'est aussi une manière de les protéger puisque je vous rappelle que le retour au pays fait partie des objectifs de la convention de Palerme sur la traite des êtres humains.

Il faut donc être décomplexé et agir beaucoup plus vigoureusement. Trois points :

· Je vous demande et en premier lieu aux préfets particulièrement concernés, de créer un comité de suivi, que vous présiderez personnellement, en associant le Parquet, les services de Police qu'ils soient de la sécurité publique ou de la police judiciaire, les services des affaires sanitaires et sociales. Le but de ce comité est de se fixer des objectifs et une stratégie d'action commune.

· J'ai noté par ailleurs que les moyens d'action ouverts par la loi pour la sécurité intérieure du 18 mars 2003 étaient fort souvent méconnus des préfets. Outre la procédure judiciaire, la loi ouvre une procédure administrative qui permet au préfet de retirer aux prostituées étrangères leur carte de séjour temporaire et de les reconduire à la frontière, et cela indépendamment des éventuelles poursuites judiciaires. Cette possibilité est méconnue et donc peu utilisée.

·  Enfin, je vous rappelle que dans tous les cas vous avez des moyens d'action.

 Il faut aider les prostituées qui dénoncent leur proxénète. Et je ne peux admettre que des préfectures moins touchées par la prostitution refusent de délivrer des titres de séjour à ces jeunes femmes qui viennent des grandes villes et tentent d'échapper à leurs esclavagistes.
 Il faut reconduire systématiquement celles qui refusent de dénoncer leurs proxénètes et qui sont en situation irrégulière ou à qui vous avez retiré leur titre de séjour. Si elles formulent une demande d'asile manifestement dilatoire, la loi permet de les garder à vue et de demander à l'OFPRA un examen du dossier en urgence. Je vous rappelle d'ailleurs qu'un préfet a été nommé à l'OFPRA pour assurer la liaison avec les préfectures.

Vous recevrez prochainement une circulaire d'application détaillée sur ces différents points.

Un mot des Raves Parties.

La musique techno est une réalité incontournable que cela nous plaise ou non. On recense plus de 300 000 adeptes des free parties dont beaucoup pourraient être nos propres enfants. Ce n'est pas en interdisant aveuglément et systématiquement que nous trouverons une solution intelligente. Nous ne ferons que radicaliser plus encore ces mouvements, que les inciter à la clandestinité et au rejet de la loi.
 La politique menée depuis un an produit des fruits très positifs. Il n'y a pas eu de drame humain pour les raves autorisées et encadrées. Les citoyens reconnaissent qu'il est préférable d'avoir une free party encadrée plutôt que sauvage. Et les organisateurs se sont considérablement responsabilisés comme l'ont montré les teknivals du  Larzac et de Marigny.
En encadrant les raves, nous poursuivons en outre un objectif d'ordre public et de sécurité publique pour tout le monde. Les ravers ne sont pas des sauvages qui arrivent de nulle part.

Ce que nous faisons au niveau national, vous devez le faire au niveau local. Nous y avons tous intérêt. Les raves parties doivent se banaliser. C'est une fête comme une autre. Ceci vaut pour les fêtes en plein air mais aussi pour les soirées traditionnelles payantes qui certes relèvent des maires mais pour lesquelles il y a encore des difficultés et où la préfecture peut jouer un rôle utile de médiateur.
Et la question des terrains n'est pas toujours un problème insurmontable. En quatre jours sur le Larzac, nous avons trouvé quatre terrains.

J'ai réuni lundi dernier vos directeurs de cabinets et vos médiateurs pour une rencontre avec les élus et les organisateurs de raves parties. L'objectif était de créer un climat de confiance et de dialogue. Je leur ai demandé et je vous demande de partir du principe que les raves doivent être autorisées, et non pas l'inverse. Il faut cesser cette stratégie insupportable qui consiste à repousser le problème dans le département voisin.

Une nouvelle instruction vous arrivera prochainement avec deux indications fortes :
 - la première est de nous transmettre la liste exhaustive de tous les terrains appartenant à l'Etat ou à la sphère para publique avec une appréciation réaliste de la possibilité d'affecter le terrain à une rave partie.
 - La seconde est d'informer systématiquement la DLPAJ de toutes les demandes d'autorisation refusées par la préfecture et des motifs du refus.

En tout état de cause, il ne doit pas y avoir de mauvaise volonté de l'administration. Je ne vous demande pas de participer à l'organisation des raves parties, mais de veiller à ce qu'elles se déroulent dans de bonnes conditions pour les riverains comme pour les ravers. Certains d'entre vous ont déjà montré la bonne voie et de plus petites raves parties se sont fort bien déroulées en septembre, par exemple dans l'Eure, dans la Loire Atlantique ou l'Aisne.

N'ayez pas de crainte des critiques. Elles s'atténuent face à l'efficacité. Et je peux vous assurer que tout le Gouvernement partage cette volonté de trouver une solution intelligente aux raves parties.

 J'en viens enfin aux sujets qui concernent l'organisation même du ministère et de son administration territoriale.

· Je remettrai le 30 septembre au Premier ministre la stratégie de réforme du ministère. Ce document, qui fera l'objet d'un débat au Parlement au cours de l'automne, vous sera communiqué.
Nous avons examiné, une à une, nos missions pour évaluer leur utilité. Le constat est qu'aucune des missions du ministère, missions régaliennes par essence, ne peut ni ne doit être supprimée. Ce qui n'interdit pas d'en exercer certaines différemment. Ainsi, 4 missions majeures ont été identifiées : la sécurité intérieure, la défense et la sécurité civiles, les relations avec les collectivités, l'animation des politiques territoriales de l'Etat. Ces quatre missions correspondent aujourd'hui à 4 directions clairement identifiées.
En revanche, d'autres missions, que l'on pourrait qualifier de missions d'appui sont aujourd'hui dispersées et manquent d'un pilotage unifiée. Pour gagner en cohérence, en capacité de décision stratégique, en force de modernisation, un Secrétariat Général de l'Administration va être créé d'ici à la fin de l'année au ministère.
 Il aura notamment pour mission d'animer l'action territoriale du ministère, à l'exception naturellement de la Police Nationale, mais aussi de mettre en œuvre la réforme de l'administration centrale et de piloter les fonctions supports.
 · Naturellement, la réforme de l'administration centrale s'accompagne de la réforme de l'administration territoriale.
Je vous ai déjà présenté en mai dernier les trois priorités de cette réforme. Je veux aujourd'hui en préciser les modalités.

 Première priorité : renforcer les compétences du niveau régional de l'Etat.

Cette réforme vise à rééquilibrer de façon substantielle les compétences respectives des échelons régionaux et départementaux de l'Etat dans un souci d'efficacité, de cohérence et d'économie de moyens. L'Etat en région s'organise pour devenir l'interlocuteur naturel des administrations centrales, des élus régionaux et des instances européennes, laissant aux services de l'Etat dans le département le soin de la proximité et la tâche essentielle d'assurer la sécurité des populations.
 Le préfet de région devra dorénavant animer et coordonner l'action des préfets de départements. Ceci ne signifie pas que les pouvoirs des préfets de départements sont modifiés mais qu'ils doivent s'inscrire dans une logique régionale dans les domaines de compétence du préfet de région.

 Les 43 services régionaux seront regroupés en 8 pôles correspondant aux compétences régionales de l'administration : l'aménagement du territoire et l'urbanisme, le développement économique, l'environnement et le développement durable, la culture, le développement de l'emploi, la santé publique, l'éducation et la formation, le monde rural.
 Les responsables de ces pôles seront chargés de mettre en œuvre la stratégie régionale de l'Etat, c'est à dire le Projet pluriannuel d'action stratégique de l'Etat (PASE). Cet instrument sera l'outil de pilotage de l'action de l'Etat dans la région, pour lequel vous allez recevoir une circulaire dans les jours qui viennent.

 Deuxième priorité : gérer en commun les moyens.

 Pour la mise en œuvre de politiques de grande ampleur et de nature interministérielle, à l'échelon d'une ou de plusieurs régions, qui nécessitent la mise en commun de moyens budgétaires issus de plusieurs programmes, nous proposerons au Parlement l'adoption d'un Programme des interventions territoriales de l'Etat.
 Pour les autres politiques, la Délégation Inter services (DIS) sera l'instrument privilégié de l'action interministérielle locale. Pour ce faire, elle sera évidemment profondément renouvelée, puisqu'aussi bien nous savons, vous et moi, que l'actuelle DIS ne fonctionne pas.

 Troisième priorité : simplifier et déconcentrer.

 Les règles administratives seront simplifiées. Je pense par exemple aux règles complexes d'intérim et de suppléance des préfets qui seront simplifiées.
 Nous allons également simplifier la plupart des procédures administratives. Parmi les projets importants, je ferai prochainement une communication en Conseil des ministres sur le nouveau Système d'immatriculation des véhicules qui facilitera la vie de nos concitoyens. Les automobilistes n'auront plus l'obligation de faire modifier leurs plaques d'immatriculation à chaque déménagement ou rachat de véhicule d'occasion puisque chaque véhicule aura un "numéro à vie". L'expédition des nouvelles cartes grises sera centralisée, ce qui déchargera d'autant les préfectures et sous-préfectures. Naturellement, ce système sera mis en place progressivement, sur 5 ans.

La simplification des tâches administratives doit porter aussi sur les demandes adressées aux services de police et de gendarmerie qui doivent concentrer leurs efforts sur la lutte contre la criminalité et la délinquance. De même que je souhaite un allégement des charges induites par des procédures judiciaires souvent classées, je veux que chaque document demandé aux services de police ou de gendarmerie par vos bureaux fasse l'objet d'une analyse critique: le document est-il nécessaire ? peut-on en simplifier la forme tout en conservant leur valeur juridique ? Il y a incontestablement des gisements qui se traduisent en "heures-fonctionnaires" ou en "heures-gendarmes". Il ne faut pas dans ce domaine tout attendre des textes de portée nationale - je pense au vote par procuration. Il faut aussi chacun à son niveau faire la chasse aux tâches inutiles.

 Enfin, plusieurs compétences seront déconcentrées. Je pense notamment à la modification des limites des arrondissements qui pourra être effectuée par les préfets de région. Dans le même esprit, vous êtes depuis le 1er septembre compétents pour assurer la défense de l'Etat en appel pour certains contentieux tels que l'entrée et le séjour des étrangers.
 Une circulaire du Premier ministre sur la réforme de l'administration territoriale vous parviendra avant la fin de l'année. La réforme sera engagée dans le cadre du projet de loi de décentralisation. Mais, sans attendre, la refonte des décrets de 1982 interviendra très prochainement.

 Mesdames et Messieurs les Préfets, une nouvelle fois vous repartez avec un emploi du temps chargé.
 C'est le juste retour de votre efficacité. Les Assises des Libertés locales ont souligné l'attachement des Français aux préfets. Les projets de réforme de l'administration territoriale ne font que confirmer dans les faits cette reconnaissance. Naturellement, nous serons tous plus exigeants à votre égard, notamment sur votre première raison d'être la sécurité. Mais cela est aussi un juste retour des choses.