Intervention de Mme Michèle Alliot-Marie, Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités Territoriales
Monsieur le Président,
Monsieur le Préfet,
Messieurs les Officiers généraux,
Mesdames et Messieurs,
Ma présence parmi vous, pour inaugurer ce nouveau site d'Elancourt, qui abritera une partie du pôle Sécurité et Défense d'EADS et dont vous venez, Monsieur le Président, de brosser les enjeux, est bien plus que protocolaire.
Je n'aurais pas pu trouver un lieu plus adapté que celui-ci, pour réaffirmer, dans la continuité de mes engagements passés, mes ambitions pour notre pays, sa sécurité et son indépendance.
Désormais en charge du ministère de l'Intérieur, je suis en mesure d'apprécier pleinement combien les deux domaines, celui dont j'avais la charge hier et celui qui m'incombe aujourd'hui, sont étroitement liés.
Dans le monde global qui est le nôtre, il existe une continuité stratégique entre défense extérieure et sécurité intérieure.
La frontière entre activités civiles et militaires est de moins en moins étanche, les zones d'intersection se multiplient.
A nous donc de renforcer la cohésion et développer des synergies entre l'une et l'autre.
D'où l'importance de faire bénéficier le civil des avancées de la recherche militaire.
D'où l'émergence de technologies dites « duales », l'une des raisons d'être de ce site.
D'où l'horizon que je fixe à l'action publique.
Je vous le dis clairement : nous construirons l'Europe de la Sécurité comme nous avons bâtie celle de la Défense.
Française, européenne, gaulliste, je me suis battue, au cours de mes cinq années au ministère de la Défense, pour l'Europe de la Défense : elle est aujourd'hui une réalité même si, certes, des efforts restent à faire.
Nous avons considérablement progressé vers l'objectif, énoncé récemment encore par le Président de la République : une Europe capable d'être un partenaire loyal et égal des Etats-Unis et donc, de se défendre contre les menaces extérieures.
Nous devons en ce sens soutenir particulièrement les entreprises de ce secteur pour qu'elles soient en mesure d'affronter leurs concurrentes américaines.
Aujourd'hui, je voudrais surtout insister sur ma volonté de mobiliser toutes les énergies, toutes les compétences, toutes nos capacités scientifiques, technologiques et industrielles au service d'un objectif : la modernisation de nos systèmes de sécurité.
La priorité que je donne à la modernisation de notre outil de sécurité est inscrite dans le budget 2008, avec
1 milliard d'€ de crédits d'investissement. Elle sera aussi la priorité de la prochaine Loi d'Orientation et de Programmation (LOPSI).
Face à des menaces sécuritaires de plus en plus sophistiquées et diversifiées (terrorisme, criminalité, trafics en tous genres), la police et la gendarmerie doivent en effet disposer d'outils de pointe, intégrant les dernières avancées technologiques.
Seule une technologie harmonisée et maitrisée à tous les échelons du continuum sécuritaire garantit la possibilité, pour tous les acteurs, de travailler ensemble.
C'est vrai au plan national. C'est vrai au plan international.
Nous n'avons pas le droit de décevoir les attentes de la collectivité : car vous le savez bien, la sécurité est le premier des Droits de l'Homme, celui sans lequel tous les autres perdent leur signification.
Pour remplir cette mission avec une efficacité maximale, j'ai assigné trois axes à notre action : la mutualisation, notamment entre la police et la gendarmerie, qui garantit que toutes les compétences sont exploitées, si l'on peut dire, « à plein rendement », la modernisation qui permet, je l'ai déjà évoqué, de répondre à des menaces multiformes et enfin le management.
Le fil rouge qui permet d'harmoniser ces différents niveaux de travail et de leur donner une cohérence politique, c'est le développement technologique.
C'est maintenant de la mise en œuvre de cette ambition que je vais vous entretenir.
Le ministère de l'Intérieur est l'un des principaux utilisateurs des technologies de sécurité et donc l'un des mieux à même d'apprécier les besoins opérationnels dans ce domaine; par conséquent, il est aussi, monsieur le Président, l'un des principaux « clients » d'EADS comme des autres entreprises du secteur.
Aussi a-t-il vocation à être un acteur central de la recherche en sécurité et à participer aux choix effectués dans ce domaine, en liaison, bien sûr, avec le monde scientifique et les entreprises, les programmes publics nationaux et européens.
Il poursuivra les nombreux partenariats existant notamment dans le cadre de l'ANR ou du Programme européen de Recherche en sécurité.
Il en lancera d'autres quand cela apparaîtra comme le cadre adapté.
Mais son rôle doit être surtout d'impulser, de stimuler et d'orienter les efforts afin que l'investissement intellectuel et financier soit le plus efficace possible.
A cette fin, le ministère de l'Intérieur doit jouir de la confiance et de la reconnaissance de tous les opérateurs intervenant dans les programmes de recherche.
Il est appelé à avoir, sur ces sujets, une visibilité accrue, cohérente avec le développement de sa capacité d'expertise.
Pour assumer efficacement son rôle d'impulsion, le ministère doit renforcer sa capacité d'anticipation et de prospective.
Les équipements dont nous disposerons, sur le terrain, dans les dix ou quinze années à venir ont déjà dépassé le stade de la recherche fondamentale.
Cela signifie que nous devons être capables d'anticiper l'évolution des menaces, délinquance, crime organisé ou terrorisme, et de prévoir les moyens d'action adaptés.
J'ai donc décidé de créer une Direction des Affaires stratégiques.
S'appuyant des experts d'origines diverses, elle produira la réflexion prospective dont l'action politique ne saurait se passer.
Gouverner, ce n'est pas seulement gérer le quotidien.
C'est également, avoir une vision à long terme, fixer des caps pour l'avenir. J'entends, dans mon domaine, y contribuer.
Je n'ai nullement besoin, devant vous, de m'étendre longuement sur la nécessité de maintenir et même d'intensifier l'effort de recherche en sécurité.
L'investissement en recherche et développement dans ce secteur a un coefficient multiplicateur très important.
Les retombées pour l'ensemble de l'économie sont considérables.
Et cela m'amène à un point capital, qui suppose, de notre part à tous, un changement de culture et de façon de penser.
Le développement des technologies de sécurité passe par de nouvelles relations entre l'Etat et les entreprises.
Nous avons besoin des entreprises. Et elles ont besoin de nous.
Et, vous ne m'en voudrez pas, Monsieur le Président, de rappeler à quel point, à côté d'un groupe de taille mondiale comme celui que vous dirigez, l'ensemble des PME du secteur joue un rôle important.
Par dizaines, par centaines, les petites structures innovantes, performantes, immergées dans le tissu scientifique et économique local contribuent en effet à rendre effective et vivante une communauté de la sécurité.
C'est dans cet esprit que nous travaillerons avec tous.
Bien sûr, l'Etat, que ce soit par le biais de la recherche publique ou à travers son rôle d'actionnaire, doit mobiliser les ressources nécessaires.
Bien sûr, la puissance publique doit assumer une fonction d'impulsion et d'animation.
N'oublions pas que les performances françaises en ce domaine contribuent à la richesse nationale, en particulier par le biais de l'exportation.
Grâce aux efforts que j'ai rappelés et que nous avons tous à cœur de rationaliser et d'intensifier, la France dispose en ce domaine d'une expertise reconnue.
Elle est potentiellement l'un des acteurs majeurs d'un marché dont l'expansion ne fait aucun doute.
Demande publique et demande privée sont l'une et l'autre appelée à connaître une croissance rapide.
Dans cette configuration, l'Etat est pour vous un partenaire central.
En effet, Monsieur le Président, et souffrez qu'aujourd'hui à travers vous, je m'adresse à l'ensemble des acteurs économiques en matière de technologies de la sécurité, vous ne sauriez avoir de vitrine plus efficace que celle que constituent les services de police et de gendarmerie.
Nous avons besoin de vous. Vous avez besoin de nous.
J'ai le privilège, au ministère de l'Intérieur, d'assumer des responsabilités qui sont au cœur des fonctions régaliennes de l'Etat tout en intervenant dans l'un des secteurs les plus dynamiques de la recherche et de l'industrie.
Je connais la volonté d'excellence des hommes et les femmes qui contribuent à l'élaboration et à la mise en œuvre d'instruments innovants adaptés à la sécurité de demain.
Alors, permettez-moi, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, de conclure en vous disant simplement ma confiance.