26.11.2008 - Congrès de l'Association des Maires de France

26 novembre 2008

Intervention de Michèle Alliot-Marie, Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités Territoriales lors du Congrès de l'Association des Maires de France - Porte de Versailles


Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les élus,

Mes premiers mots iront aux maires nouvellement élus cette année. Je les en félicite.

Elus ou réélus, dans les 36 783 communes de France, en métropole comme en outre-mer, vous êtes le premier interlocuteur de nos concitoyens.

Vous êtes le ciment de la vie sociale, du service public et de la solidarité.

Vous incarnez la pérennité des valeurs de  la République et la proximité de l'action publique.

L'Association des Maires de France est le relais des communes et des intercommunalités.

Elle a toujours fait le choix du dialogue constructif, au service des collectivités et dans le respect de l'intérêt général.

Je veux en remercier Jacques PELISSARD, ainsi que tous les membres de votre association.

Etat et collectivités, nous partageons la même ambition : celle de mieux servir nos concitoyens.

Nous partageons la même volonté : celle de travailler ensemble, celle de faire vivre, ensemble, le partenariat entre l'Etat et les élus.

Un partenariat vivant, cela ne se décrète pas. Cela se construit.

Un partenariat vivant, c'est d'abord un partenariat qui ne ferme pas les yeux sur la réalité de l'action des maires.

- Ministre de l'Intérieur, en charge des collectivités territoriales, je suis aussi une élue locale.

Ministre de l'Intérieur, je comprends vos préoccupations, parce qu'élue locale, je les connais.

Je connais la distance entre une décision prise à Paris et son application sur le terrain. Sachez que le ministre de l'Intérieur ne prend jamais une décision sans s'interroger sur sa mise en œuvre par l'élue de Saint-Jean-de-Luz.

Un partenariat vivant, c'est aussi un partenariat entre des maires engagés sur le terrain et un Etat prêt à les aider à exercer leur mission au service des Français.

Un Etat qui ne se borne pas à entendre les préoccupations des maires, mais qui sache aussi les écouter.

Un Etat qui ne se borne pas à connaître leurs difficultés, mais qui sache aussi les comprendre.

Un Etat  qui ne se borne pas à lister leurs problèmes, mais qui s'efforce aussi de les résoudre.

Je ne veux pas d'un Etat qui soit un monstre froid, perclus de routine administrative, indifférent aux élus comme aux citoyens.

Vos préoccupations sont au cœur de mes priorités.

Comment faire vivre notre partenariat ?

Faire vivre notre partenariat, c'est vous donner concrètement les moyens d'assumer votre tâche sur le terrain (I). C'est nous donner les moyens de construire, ensemble, l'avenir des territoires (II).

Faire vivre notre partenariat pour mieux servir les Français.

Oui, l'Etat doit être présent, à vos côtés, sur tous les territoires de la République, pour répondre aux attentes quotidiennes des Français

Les attentes, c'est d'abord plus de proximité.

Pour vos administrés, vous êtes des interlocuteurs de proximité.

Vous avez vous aussi besoin d'interlocuteurs de proximité.

C'est le rôle des services de l'Etat sur les territoires.

C'est vrai des services de police ou de gendarmerie.

C'est vrai du réseau des préfectures et des sous-préfectures.

Alors je l'ai dit, et je le redis : je ne fermerai pas de sous-préfecture là où les populations et les territoires les plus fragiles ont besoin de l'interlocuteur étatique.

La proximité, c'est aussi celles des démarches simplifiées pour les citoyens.

La nouvelle procédure de délivrance des cartes grises, des pré-plaintes en ligne et des titres d'identité s'inscrit dans cette perspective.

Le nouveau passeport et la nouvelle carte d'identité, demain, offriront  et des garanties de sécurité bien supérieures et une délivrance plus rapide.

Les communes sont au cœur de cette réforme qui simplifiera la vie de nos concitoyens.

J'ai tenu à ce qu'elles soient indemnisées. Notre problème commun, c'est d'apprécier le juste niveau de cette indemnisation quand il n'y a pas d'éléments de référence.

Je vous l'ai dit et écrit, M. le Président : un réexamen des conditions de la mise en œuvre et des coûts induits sera effectué, en concertation avec les élus. C'est un engagement.

Ce réexamen est prévu, à votre demande, à partir de l'été 2010. Je suis même prête à l'avancer fin 2009. 

D'ores et déjà, je peux vous assurer que dès la mise en place du système, je compte réévaluer l'indemnité. Je présenterai ce point lors de l'examen du budget au Sénat.

L'attente des Français au quotidien, c'est aussi la sécurité.

Là aussi, notre action commune est la condition de l'efficacité.

La sécurité est une chaîne, qui inclut la police municipale, la police nationale, la gendarmerie nationale, mais aussi la justice, les associations, les élus.

J'attache une importance particulière au développement et à l'utilisation des moyens les plus modernes.

La vidéoprotection se révèle un outil efficace de prévention et d'élucidation.

A Strasbourg, si la délinquance a diminué sur l'ensemble de la ville de 13 %, ce recul, dans les quartiers équipés de vidéo, est en moyenne de 50 %.

A Orléans, où les installations sont très développées, la délinquance a baissé de 60 % entre 2001 et 2007, et encore de 10 % sur les dix premiers mois de cette année.

Je le sais, la mise en place de la vidéoprotection est une charge pour les communes, parfois difficile à intégrer au budget.

J'ai donc prévu, pour le Fonds Interministériel de Prévention de la Délinquance (FIPD), une enveloppe particulière 30 millions d'euros pour 2009 pour vous y aider.

L'attente des Français, c'est la réactivité et la qualité du secours en toutes circonstances.

Les élus locaux sont en première ligne dans la mise en œuvre des premiers secours.

C'est vous qu'on appelle lorsqu'un incendie se déclare ou quand un accident touche un habitant de votre commune, à toute heure du jour ou de la nuit.

Je connais cet engagement physique et personnel.

Je connais aussi votre engagement financier au travers des SDIS. Je connais aussi votre soutien au volontariat.

Le lien entre les communes et les sapeurs pompiers est une réalité. Le maintenir est plus que jamais une nécessité.

C'est pourquoi nous avons décidé de maintenir tels quels les contingents communaux et intercommunaux d'incendie et de secours.

Les participations communales seront maintenues. Elles ne doivent pas pour autant déstabiliser les budgets communaux.

Pour ce faire, l'évolution du financement des SDIS, dans chaque département, ne sera donc pas supérieure à l'inflation. C'était l'une de vos demandes. C'est aujourd'hui un engagement de l'Etat.

Au-delà du quotidien, dans les circonstances exceptionnelles, l'Etat doit être encore plus présent aux côtés des maires.

Lors des catastrophes naturelles, l'Etat assure toutes ses responsabilités au titre de la solidarité nationale. C'est le cas pour des inondations de grande ampleur, comme nous en avons  connu ces derniers mois dans la Drôme, en Ardèche, en Lozère, en Haute-Loire. C'est le cas pour la tornade qui a dévasté plusieurs communes du Nord de la France cet été.

Je veille à accélérer les procédures de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Quand c'est possible, j'essaie d'anticiper en prépositionnant les moyens nationaux de secours.

Vous le savez, j'ai créé l'an dernier le fonds pour les collectivités victimes. Doté de 20 millions d'euros dès 2008, il permet  la réparation des dégâts causés sur les biens non assurables.

Quand on parle de situation exceptionnelle, on doit aussi évoquer la crise financière.

Le Premier Ministre vous en a exposé les enjeux hier.

Je veux simplement redire qu'il n'est pas acceptable que le développement des territoires soit freiné parce que des banques refusent de prêter aux collectivités.

5 milliards d'euros ont été mobilisés pour que les Collectivités Territoriales puissent à nouveau bénéficier de crédits bancaires.

Le plan de soutien à l'économie est actuellement mis en œuvre. J'ai donné instruction aux préfets d'en assurer le suivi sur le terrain en réunissant les acteurs concernés.

Mesdames, Messieurs,

Sur le terrain, face aux défis quotidiens comme aux situations exceptionnelles, l'Etat et les communes savent travailler ensemble, en partenariat.

Un partenariat vivant, c'est un partenariat ancré dans la réalité mais aussi tourné vers l'avenir.

Faire vivre notre partenariat, c'est aussi envisager ensemble le long terme.

Il peut y avoir des divergences d'appréciation. C'est la démocratie.

Mais la base d'un partenariat responsable, c'est la confiance et la clarté.

La confiance implique un langage de vérité.

La vérité, c'est que le Gouvernement s'est fixé l'objectif de maîtriser nos finances publiques.

C'est la condition de notre crédibilité en Europe.

C'est aussi une base saine pour investir, et donc une assurance pour l'avenir.

Avec un engagement financier de 73 milliards d'euros, les collectivités territoriales sont le premier poste du budget de l'Etat.

Elles ne peuvent donc être dissociées de la maîtrise des finances publiques.

Dans ce contexte budgétaire contraint, j'ai fait le choix de soutenir les collectivités au-delà des engagements pris.

Le Président de la République a indiqué en avril dernier que l'Etat appliquerait aux dotations aux collectivités ce qu'il applique à ses propres dépenses : une progression égale à l'inflation.

L'inflation prévisionnelle vient d'être fixée à 1,5 %.

Cependant, le Gouvernement a décidé d'aller au-delà pour les collectivités, et d'augmenter plus encore son effort financier à leur égard.

J'ai fait inscrire dans la loi de finances une augmentation des dotations de 2 %, supérieure aux 1,5% de l'inflation.

L'enveloppe consacrée aux collectivités territoriales augmentera donc de 1,1 milliard d'euros.

C'est 276 millions d'euros de plus que si nous nous en étions tenus à l'inflation.

L'économie réelle dépend largement de vous, de votre investissement, de votre soutien au développement des territoires. Il faut en tirer toutes les conséquences.

Si je tiens à garantir vos recettes, ce n'est pas pour augmenter vos dépenses par le jeu des normes. C'est ça aussi la vérité.

Membre du gouvernement, je participe chaque jour à l'élaboration des normes de notre pays.

Elue locale, je sais que les décisions prises à Paris ont parfois des conséquences directes sur mon budget à Saint-Jean-de-Luz.

Ici même, l'an dernier, j'avais annoncé la création de la Commission Consultative d'Evaluation des Normes pour mieux évaluer l'impact financier des normes sur les collectivités territoriales. Elle travaille depuis le mois d'octobre.

Plus encore, je pense nécessaire que l'Europe se dote elle aussi d'une telle commission pour l'évaluation des normes communautaires. Je l'ai proposé lors d'un récent séminaire, dans le cadre de la Présidence Française de l'Union Européenne.

Au titre des décisions prises sans mesurer l'impact sur le terrain, vous connaissez tous la question de l'article 89.

Imprécises, les règles du financement de la scolarité des enfants inscrits dans les écoles privées ont conduit à des situations ubuesques.

Nous avons travaillé ensemble. Je veux en remercier Jacques PELISSARD.

Un accord a été trouvé et le Gouvernement soutiendra la proposition de loi modifiant l'article 89 de la loi de 2004.

Ainsi, les conditions de financement de la scolarité seront les mêmes que pour les écoles publiques. Le principe de parité sera pleinement respecté.

Un partenariat responsable, c'est aussi celui qui prend en compte la réalité des situations.

La DGF prendra en compte les nouveaux chiffres de la population dès l'an prochain. Les collectivités locales dont la population a augmenté verront donc leur DGF augmentée en conséquence.

Cette progression de 800 millions, 0,5 point de plus que l'inflation, le permettra.

Là encore, je n'y étais pas contrainte, mais j'en ai fait le choix pour soutenir les collectivités.

Prendre en compte la réalité, c'est aussi aider plus les communes qui en ont le plus besoin. C'est le sens de la réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU) voulue par le Président de la République et que je mets en œuvre.

Les 150 villes les plus en difficulté bénéficieront de l'essentiel de la progression de la DSU en 2009, soit 70 millions d'euros.

La clarté, c'est aussi la lisibilité des structures, des compétences, des responsables.

Qui ne s'est jamais demandé, pour un projet de zone d'activité par exemple, s'il devait s'adresser au département ou à la région ?

Si nous-mêmes, élus, nous y perdons, il est évident que nos concitoyens ne s'y retrouvent pas.

Dans vos villes, chacun sait qui est le maire. C'est toute la force de votre lien avec les Français. En est-il toujours de même pour les conseillers généraux ou encore plus les conseillers régionaux ?

Voilà pourquoi le comité pour la réforme des collectivités locales présidé par Edouard BALLADUR est en charge de proposer une architecture plus claire des collectivités.

La nécessaire clarification des compétences entraînera nécessairement une réforme de la fiscalité locale.

L'autonomie des collectivités en dépend. Aujourd'hui, du fait des compensations financières, l'Etat est leur premier contribuable : le risque de dépendance est là.

La fiscalité devra être plus juste et plus efficace.

Les valeurs locatives sont archaïques et complexes. Elles n'ont pas été révisées depuis près de 40 ans. Nous avons à travailler ensemble à une redéfinition plus juste des valeurs locatives, en tenant compte de l'évolution du niveau de vie dans tous les quartiers de nos villes.

Une réforme de la fiscalité locale doit soutenir le dynamisme de nos territoires. La réforme de la taxe professionnelle, voulue par le président de la République, permettra de soutenir le développement de nos entreprises.

Cette réforme se fera avec élus locaux. Vos ressources seront garanties. Je m'y engage.

L'intercommunalité doit davantage être un appui pour les communes.

Elle contribue à la solidarité entre les communes par des projets concrets : construire une piscine, assurer la gestion de l'eau ou des ordures ménagères.

Elle peut aider l'action des maires grâce à une meilleure répartition des coûts.

Pour autant, je n'ignore pas les limites de l'intercommunalité.

Elle est aujourd'hui mal connue des Français.

Elle est trop souvent compliquée à mettre en place ou à réformer quand elle est créée.

Je veux travailler avec vous pour améliorer l'intercommunalité, dans un esprit d'efficacité, dans le respect de la libre administration des collectivités territoriale.

Mesdames, Messieurs,

Vous exercez une mission au service des Français.

Votre mission est exigeante. Elle est passionnante.

Je veux vous le dire avec force :

Pour servir nos concitoyens,
Pour construire l'avenir des territoires,
Pour faire vivre notre pacte républicain,

l'Etat est à vos côtés, et il le restera.

La France est riche de ses collectivités. Elle est forte de ses communes.

Ensemble, nous poursuivrons les chantiers engagés, pour l'avenir de nos villes, pour l'avenir de la France.