19.01.2009 - Présentation des chiffres de la délinquance

19 janvier 2009

Intervention de Michèle ALLIOT-MARIE, Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités Territoriales, lors de la présentation des chiffres de la délinquance


Monsieur le président de l'Observatoire National de la Délinquance, cher Alain Bauer,
Monsieur le directeur général de la police nationale,
Monsieur le directeur général de la gendarmerie nationale,
Monsieur le Préfet de police,
Madame la Secrétaire générale,
Mesdames et Messieurs,
Merci à tous de votre présence aujourd'hui.
Le ministère de l'Intérieur est chargé de la protection des Français, de leurs libertés, de leur sécurité face aux menaces multiples qui pèsent sur leur sécurité.
La présentation du bilan de la délinquance n'est donc pas une simple affaire de statistiques. En répondant aux attentes légitimes de sécurité de nos concitoyens, l'Etat crée les conditions d'une société de confiance. Les résultats obtenus en 2008 sont bons, grâce au travail de chacun. Un nouvel élan doit nous permettre de faire mieux encore en 2009.
En 2008, la délinquance recule. Il faut remonter à 1997 pour trouver un chiffre de délinquance aussi bas.
Je ne reviendrai pas sur tout ce qu'expose clairement Alain BAUER.
Je note que le total des faits constatés n'a jamais été si faible depuis 11 ans. Encore faut-il rappeler que la délinquance a explosé de 1997 à 2002, avec une hausse des crimes et délits de plus de 17%, soit plus de 620 000 faits. C'est d'autant plus remarquable que, par rapport à l'an dernier, 30 000 faits supplémentaires ont été constatés grâce à l'activité des services, notamment dans la lutte contre les stupéfiants.
En 2008, la délinquance de proximité, celle qui touche le plus nos concitoyens, a nettement reculé. Par rapport à 2007, ce sont 103 000 victimes qui ont été épargnées.
Les violences crapuleuses, c'est-à-dire majoritairement les vols avec violences, ont connu une baisse de 6 000 faits par rapport à l'année précédente.
Si les violences aux personnes ont augmenté en 2008, malgré la baisse des violences crapuleuses, c'est majoritairement le fait de la hausse des violences intrafamiliales, ou tout au moins de la hausse de leur déclaration aux services de police et de gendarmerie.
Dans ce domaine, l'action est compliquée par le fait qu'on ne peut que constater des faits avérés. Or, c'est bien de prévention dont nous avons besoin pour faire reculer les violences intrafamiliales. J'ai donc décidé de confier une mission sur les violences intrafamiliales au préfet DE LAGUNE, secrétaire général du Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance. Je souhaite que ses propositions nous permettent de mieux connaître, de mieux appréhender et de mieux combattre ce phénomène.
Le bilan de l'insécurité routière avec 73 390 accidents corporels, 4 274 tués et 91 669 blessés, représente une baisse de 9,7% d'accidents, de 7,5% de tués et de 11,2% de blessés par rapport à 2007.
Ainsi, les objectifs fixés par le Président de la République sont atteints ou en voie de l'être. Pour la délinquance de proximité, le cap des 10 % en moins a été dépassé. Nous atteignons le chiffre de 11,2 %. La délinquance générale est en baisse de 3,5 %, conforme avec l'objectif de 5 %.
Ces résultats intègrent pourtant une augmentation de l'activité des services de police et de gendarmerie.
Les infractions relevées par l'action d'initiative des services, et non par une plainte des victimes, sont en hausse de 8,6 %. C'est le plus haut niveau jamais atteint.
Ce travail se traduit aussi par une hausse du  taux d'élucidation : 37,6% en 2008, soit 1,5 point de plus qu'en 2007. Il était de 25 % en 2001.
Ces résultats ne doivent rien au hasard. Ils reposent sur l'action des forces de police et de gendarmerie.
Policiers et gendarmes en paient parfois le prix. Permettez-moi d'avoir une pensée pour les 12 hommes et femmes qui ont perdu la vie, en service. Mes pensées vont aussi aux blessés, à qui j'adresse des vœux de complet et prompt rétablissement.
A tous, je veux adresser mes félicitations.
Ces résultats correspondent aux priorités fixées pour l'année 2008.
Ma première priorité était l'action contre le terrorisme.
La DCRI que j'ai mise en place le 1er juillet est un maillon essentiel de veille et de détection des filières. Sa création nous a permis de progresser contre toutes les formes de terrorisme.
Le terrorisme islamiste demeure une menace constante et élevée. En 2008, 80 activistes islamistes ont été interpellés et leurs filières de recrutement ou d'entraînement pour le jihad démantelées.
Le terrorisme basque. 4 des 6 etarras les plus recherchés ont été arrêtés sur notre sol, dont ses deux plus hauts dirigeants, Txeroki et Gurbitz. Au total, c'est une quarantaine d'individus qui ont été interpellés, des armes saisies.
La Corse a connu en 2008 89 attentats. Ce chiffre est inférieur de moitié à celui de 2007. Il faut remonter à 1973, avant les événements de d'Aléria et la création du FLNC, pour trouver un chiffre aussi bas.
Bien sûr, c'est encore trop. Nous ne saurions nous en satisfaire. Mais reconnaissons-le : la tendance est la bonne.
Deuxième objectif prioritaire : la lutte contre le trafic de stupéfiants.
J'en ai fait dès janvier 2008 une priorité en relançant l'action
des GIR,  en recentrant leur action sur l'économie souterraine, en créant de nouveaux groupements notamment en Corse et outre-mer. Depuis septembre, une coordination nationale unique renforce leur pilotage.
Résultat : le nombre d'infractions à la législation sur les stupéfiants constatées à l'initiative des services est en hausse de 11%, celui des mis en cause pour trafics de 5 %, celui des mis en cause pour usage et revente de 6 %.
67 tonnes de cannabis ont été saisies en 2008, presque deux fois plus qu'en 2007. 7,6 tonnes de cocaïne ont été saisies, contre 6,5 en 2007. Le mouvement enclenché en 2008 ne s'arrêtera pas en 2009, au contraire.
Les priorités pour 2008 portaient aussi sur les moyens. La police technique et scientifique d'abord.
Le Fichier Automatisé des Empreintes Digitales (FAED) a permis de résoudre 8 607 affaires en un an.
1 million de profils génétiques sont désormais intégrés au fichier national des automatisé des empreintes génétiques (FNAEG).
Depuis sa création, le FNAEG a permis de réaliser 45 928 rapprochements de profils génétiques. Pour la seule année 2008, il a traité 380 000 profils génétiques.
L'extension de la police technique et scientifique à toutes les formes de délinquance est l'une de mes priorités.
L'adaptation à la diversité des territoires.
La création des unités territoriales de quartiers et des compagnies de sécurisation pour les quartiers sensibles a démarré au printemps dernier.
8 UTeQ ont été créées, dans la région parisienne, à Toulouse et à Marseille. D'ores et déjà, en Seine-Saint-Denis, on constate un net recul de la délinquance de proximité dans leur périmètre d'exercice : - 15 % aux Franc Moisin/Bel Air (à St-Denis), - 10 % aux 4000/Jean Vilar (à La Courneuve), - 20 % aux Bosquets (à Clichy/Montfermeil).
La 1ère des compagnies de sécurisation est en place depuis le 1er octobre en Seine-Saint-Denis. Deux autres seront installées début 2009 en Haute-Garonne et dans les Bouches-du-Rhône.
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Mesdames, Messieurs,
L'année 2009 nous permettra de poursuivre la construction d'un grand ministère moderne de la sécurité, au service de la protection des Français.
2009 marque l'entrée de la gendarmerie nationale au ministère de l'Intérieur. 100 000 gendarmes poursuivront leur action pour la sécurité intérieure, dans le respect de leur identité militaire, aux côtés des 150 000 fonctionnaires de la police nationale. Mon action visera trois objectifs.
D'abord la modernisation des moyens.
La future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI), dont le projet a été établi dès la mi-octobre 2007, apportera des novations juridiques et financières au service de nos ambitions.
Vous le savez, je souhaite que ce texte soit examiné au plus vite, et je suis heureuse du soutien que m'a apporté le Président de la République en rappelant cette urgence la semaine dernière.
Plus d'un milliard d'euros seront consacrés sur 5 ans à la modernisation.
Contre l'insécurité quotidienne, nous faisons le choix des nouvelles technologies face aux évolutions de la délinquance.
555 millions d'euros y seront consacrées : lecture automatisée des plaques d'immatriculation, modernisation des moteurs du FNAEG et du FAED, enregistrement des gardes à vue, visioconférence et vidéoprotection.
140 millions d'euros, dans le domaine de la logistique, permettront de moderniser le parc automobile, l'armement et la protection des agents.
250 millions d'euros seront consacrées à l'immobilier de la police et de la gendarmerie.
La LOPPSI ne se bornera pas à répondre aux seules questions financières. La modernisation, c'est aussi le perfectionnement du droit.
Des assouplissements juridiques notamment sont prévus pour la mise en œuvre de certaines technologies. C'est le cas pour la vidéoprotection. C'est le cas  des procédures d'alimentation du FNAEG. C'est le cas pour le fichier des auteurs d'infractions sexuelles.
C'est le renforcement de certaines sanctions. Contre la violence dans les stades, l'interdiction administrative sera portée de 3 à 6 mois, un an en cas de récidive, dès le premier fait grave constaté.
Le renforcement des mesures de terrain continuera avec le développement des UteQ et des compagnies de sécurisation seront développées. D'ici fin 2011, 100 UteQ et 23 compagnies de sécurisation seront mises en place. Un tiers des UTeQ et la moitié des compagnies de sécurisation seront créées à la fin de 2009. J'en annoncerai prochainement la liste.
En matière de sécurité routière, les unités spécialisées de la gendarmerie seront redéployées sur le réseau routier secondaire. C'est là, et non sur les autoroutes, que se produisent la plus grande partie des accidents.
Face à l'insécurité routière, la LOPPSI renforcera les sanctions contre les auteurs des délits les plus graves.
Si les résultats sont bons, il faut en effet aller plus loin. Mon objectif est de passer dès 2009 sous la barre des 4000 morts.
Le trafic de points du permis de conduire sera réprimé.
Contre l'alcool au volant, qui constitue désormais la première cause de mortalité sur les routes, une peine complémentaire sera créée en obligeant les auteurs de tels délits à ne conduire que des véhicules équipés d'un dispositif antidémarrage. Contre la conduite sous l'influence de stupéfiants, les contrôles sur les routes seront multipliés grâce aux tests salivaires.
La confiscation obligatoire des véhicules est prévue dans la LOPPSI, en cas de récidive, pour les auteurs d'un délit de grand excès de vitesse, de conduite sous l'emprise d'un état alcoolique ou sous l'influence de stupéfiants. Elle vise aussi les conducteurs sans permis.
Dans l'état actuel du droit, les familles des victimes ne comprennent pas que les auteurs d'homicides sur la route puissent continuer à conduire comme s'il ne s'était rien passé, malgré le danger qu'ils représentent. Il faut changer les règles.
Lutter contre la criminalité organisée enfin.
Contre la cybercriminalité, la création du délit d'usurpation d'identité sur Internet, la possibilité donnée aux enquêteurs de capter des données renforceront notre efficacité.
Les investigations seront facilitées par la plateforme de signalement des contenus et sites Internet illicites sur Internet, que j'ai mise en place ce mois-ci.
Dans le domaine de l'intelligence économique, les activités de recherches d'informations seront mieux encadrées. Les nouvelles dispositions de la LOPPSI nous permettront de passer d'une stratégie défensive à une stratégie active dans ce domaine.
Plus efficaces contre la délinquance, les forces de l'ordre doivent être aussi plus proches de ceux qu'elles défendent. Mon deuxième objectif est de consolider le lien entre la police et la population.
C'est bien sûr la question de l'accueil des victimes.
Dans les commissariats et les brigades, les victimes doivent pouvoir trouver un interlocuteur les comprenant. Je veux donc doubler en deux ans le nombre de psychologues dans les commissariats et les brigades.
Au printemps 2009, nous tirerons le bilan de l'expérimentation des pré-plaintes en ligne, si elle est concluante, le dispositif sera généralisé.
Rapprocher la police et la population, c'est aussi démontrer que la police et la gendarmerie sont à l'écoute de notre société, capables d'aider ceux qui en ont le plus besoin.
Les Journées de la sécurité Intérieure, qui ont réuni cette année 500.000 personnes, seront renouvelées et se tiendront à nouveau cet automne.
Je veux, comme je l'ai fait en Seine-Saint-Denis, faire en sorte que la police et la population se parlent et se rapprochent. Les conférences de cohésion que j'ai tenues en Seine-Saint-Denis, et que j'ai chargé les préfets de mener dans les départements les plus sensibles, renforcent ce lien de confiance entre les Français et les responsables de leur sécurité. C'est un gage d'efficacité et de bon fonctionnement de la chaîne de la sécurité. Il participe aussi de la cohésion nationale.
Nous ne devons jamais hésiter à aller à la rencontre des citoyens.
En 2008, 18 réservistes de la police nationale ont été nommés délégués à la cohésion police/population pour exercer une mission de médiation et de contact avec la population. Je veux étendre ce dispositif à l'ensemble des quartiers qui seront dotées d'UTeQ.
Au cours des tout prochains mois des réunions cantonales seront organisées partout en France. Policiers et gendarmes pourront y débattre avec les Français, expliquer leurs méthodes et leurs actions, répondre aux interrogations, lever les incompréhensions, échanger sur les besoins ressentis par la population. Ecouter les propositions aussi, car je n'oublie pas que c'est aussi des expériences de chacun des acteurs de la chaîne de la sécurité que j'ai pu tirer profit pour élaborer le plan de cohésion pour la Seine-Saint-Denis.
Je tirerai ensuite le bilan de l'ensemble de ces réunions lors d'assises nationales.
Le lien de confiance passe aussi par un comportement exemplaire des policiers et des gendarmes, en toutes circonstances et en tout lieu. J'ai fait de la déontologie l'une des priorités de la formation des policiers et des gendarmes.
Cela passe aussi par l'action de la police en faveur de l'emploi des jeunes. Outre le programme des cadets de la république, j'ai ouvert, à titre expérimental, le recrutement des adjoints de la sécurité à des jeunes issus de centres "Défense 2ème chance" de la région parisienne. Avec le Réseau National des Entreprises, j'ai engagé une action résolue pour l'employabilité des jeunes.
Les forces de police et de gendarmerie doivent enfin intégrer la dimension internationale de leur mission.
Les menaces sont de plus en plus internationales. La formation et le déroulement de carrière doivent le prendre en compte. Dès cette année, plus de formation aux langues étrangères et une valorisation du temps passé à l'étranger le permettront.
L'européanisation des commissariats accompagnera plus systématiquement les lieux touristiques.
La multiplication des accueils de stagiaires étrangers en formation et l'organisation de stages à l'étranger confortera l'image et l'influence de la police et de la gendarmerie.
Mesdames, Messieurs,
L'année 2009 sera marquée par la crise économique et financière internationale, qui touche notre pays comme l'ensemble de nos partenaires. Les attentes sont lourdes. Les exigences sont fortes.
Je vous le dis avec fermeté : le ministère de l'Intérieur assumera pleinement son rôle de protection des Français.
Protection des personnes. Protections des biens. Protection des institutions. Protection des territoires.
La crise ne marque pas de pause dans notre action. Elle  crée pour nous un devoir d'engagement et de résultats. Vous pouvez compter sur ma détermination et sur celle des hommes et des femmes du ministère de l'Intérieur.
A travers ce ministère, l'autorité de l'Etat sera présente avec sérénité et avec fermeté.
Je vous remercie.