16.10.2007 - 19ème session nationale d'études de l'INHES

16 octobre 2007

Intervention de Michèle Alliot-Marie lors de l'ouverture de la 19ème session nationale d'études de l'INHES


Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Président et Mesdames et Messieurs les administrateurs,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs les auditeurs de la 19ème session,

Au sein de votre institution, ce sont près de 2 000 auditeurs, venant de l'ensemble des métiers de la sécurité, publique ou privée, qui ont appris depuis 1989 à mieux se connaître, à s'enrichir mutuellement des expériences de chacun, à travailler ensemble sur la réalité d'aujourd'hui et les risques de demain.
Fonctionnaires, militaires, magistrats, élus, journalistes, représentants du monde de l'entreprise, de la 19ème session, aujourd'hui vous les rejoignez.

Vous en ressortirez avec une vision changée des questions de sécurité.
Vous contribuerez à faire avancer cette chaîne de la sécurité que je souhaite mettre en œuvre.

Ne l'oubliez jamais, chacun a sa place dans notre combat commun contre l'insécurité, de la prévention jusqu'à la répression.

Je souhaite aussi saluer les auditeurs étrangers qui ont choisi de suivre cette session.

Leur présence est autant un hommage rendu à la qualité de l'INHES, qu'un acte fort de la coopération internationale, de plus en plus essentielle en matière de sécurité, et que j'entends développer.
Mesdames, Messieurs,

Durant cette session, vous allez vous plonger au cœur des problématiques de sécurité, d'aujourd'hui et de demain.

Face aux risques et aux défis à relever, la France a besoin d'un grand ministère moderne de la sécurité intérieure.

C'est mon ambition pour le ministère de l'Intérieur.

Répondre à cette ambition exige un renforcement et une valorisation de tous les moyens, humains, matériels, et structurels.

Des moyens humains :

La sécurité, ce sont d'abord des hommes et des femmes.

Aucun matériel, aucune technologie ne saurait remplacer la compétence, le dévouement, le courage, de celles et ceux qui servent la police, la gendarmerie, les services d'incendie et de secours.

Ils ont fait le choix d'un métier difficile et dangereux au service de la protection et de la sécurité des Français.

Mettre en valeur leur rôle, perfectionner leurs compétences, adapter leurs savoir-faire, soutenir leur motivation, les faire connaître, respecter et aimer, voilà ma ligne d'action.

Renforcer la formation initiale et permanente, la mettre à la hauteur des défis modernes, c'est garantir l'efficacité et la propre sécurité des personnels.

Favoriser la promotion professionnelle, c'est garantir la motivation, reconnaître l'excellence, assurer la promotion sociale.
Renforcer leur motivation, c'est aussi permettre à chacun d'exercer pleinement ses compétences, son savoir faire, dans le respect de son choix d'engagement.

L'intérêt de l'agent comme du service de la sécurité, c'est aussi la fidélisation.

Je veux mettre en œuvre une véritable politique pour éviter ces situations trop souvent absurdes, où les agents les moins expérimentés se retrouvent dans les zones les plus difficiles, sans être accompagnés et encadrés par ceux qui connaissent les lieux et les personnes.
La sécurité exige aussi la connaissance de l'environnement.

L'efficacité de l'action des forces de sécurité suppose que nous sachions leur donner les meilleures conditions d'exercice de leurs missions.

Les policiers comme les gendarmes pourront d'autant mieux assurer la sécurité des populations et des territoires que leur environnement personnel, individuel et familial, sera serein, que la gestion des ressources humaines sera adaptée, que les conditions sociales spécifiques à leur métier seront assurées.

Je veux poursuivre les efforts engagés en matière de logement. Beaucoup a été fait, mais beaucoup reste à faire, pour les policiers comme pour les gendarmes.

Les moyens technologiques

La recherche met aujourd'hui à notre service les moyens technologiques de notre efficacité.

Nous devons plus que jamais nous mobiliser au service d'un objectif : la modernisation de nos systèmes de sécurité.

Le renseignement, la prévention, l'investigation, devront de plus en plus s'appuyer sur la technologie la plus avancée.

La priorité que je donne à cette modernisation est inscrite dans le budget 2008, avec 1 milliard d'€ de crédits d'investissement. Elle sera aussi la priorité de la prochaine Loi d'Orientation et de Programmation (LOPSI).

La police technique et scientifique est l'une de mes priorités. 

J'ai lancé, dès mon arrivée Place Beauvau, le regroupement des laboratoires de police technique et scientifique en Ile-de-France sur un site unique qui accueillera également le centre des technologies de la sécurité intérieure.

Les fichiers automatisés des empreintes digitales (FAED) et des empreintes génétiques (FNAEG), qui favorisent très largement l'élucidation, doivent être adaptés à l'accroissement considérable du volume de données traitées.

De nouveaux outils technologiques comme le système de lecture automatique des plaques d'immatriculation (LAPI) seront également développés dès 2008.

La mise en service de drones facilitera la surveillance et la sécurisation de grands évènements sportifs, la gestion des flux de circulation routière, ou encore l'observation des manifestations les plus importantes.

Enfin, vous le savez, j'accorde une importance toute particulière au développement de la vidéosurveillance.

Elle est une nécessité face au terrorisme, et un atout contre l'insécurité.
Je suis donc décidée à tripler le nombre de caméras d'ici fin 2009.

Les vieilles réticences sont en train de disparaître. Plus on connaîtra, mieux on expliquera la vidéosurveillance, davantage sera comprise son utilité pour la sécurité.

Je serai particulièrement vigilante à ce que la sécurité des Français soit toujours assurée dans le respect de leurs libertés.

Des moyens de prospective

Au-delà de la gestion des hommes et de la technologie, la modernité relève aussi de la capacité de penser l'avenir et d'anticiper les moyens d'agir.

La société évolue, et la délinquance avec elle.

La question du terrorisme de masse n'était pas une préoccupation quotidienne il y a 10 ans. La cybercriminalité était un épiphénomène il y a encore quelques années. Les catastrophes naturelles prennent des formes et une acuité inédite.

Qui peut aujourd'hui dire avec certitude, ou même avec une forte probabilité, quelles seront ou ne seront pas les menaces de  demain ?

Le rôle du ministère de l'Intérieur n'est pas seulement de répondre aux besoins d'aujourd'hui, mais aussi d'anticiper les attentes de demain. Pas uniquement de lutter contre la délinquance actuelle, mais bien aussi de prévoir et de prévenir celle du futur.

Pour cela, nous devons disposer d'une vision stratégique propre s'appuyant notamment sur l'évolution du contexte extérieur, tant international qu'européen et national.

C'est pourquoi je vais créer, d'ici la fin de l'année, une direction prospective, à même de donner à notre ministère la profondeur de champ que la dictature du quotidien risque constamment d'occulter.

Son rôle sera de prévoir, en liaison avec les centres de recherche, les phénomènes futurs et de proposer les moyens d'y répondre en les anticipant.

L'INHES s'inscrit tout naturellement dans cette démarche.
Pour répondre à cette large réflexion, votre Institut doit être le lieu de l'innovation et de la rigueur.

Je tiens à féliciter Pierre MONZANI qui, en peu de temps, a su renforcer le goût du débat, la liberté de parole et le sens des responsabilités.

La mutation de la revue "les Cahiers de la sécurité", ainsi que l'ouverture internationale et le souci d'aborder les sujets les plus sensibles, constituent des progrès notables.
Chacun de ses trois départements a œuvré dans ce sens :

le département de l'Observatoire national de la délinquance, cher à Alain BAUER, donne aux statistiques en la matière une sérénité scientifique et un statut international, sous la conduite de Christophe SOULLEZ ;

le département de la Sécurité économique, sous l'autorité de Gérard PARDINI, joue un rôle majeur dans le dispositif d'intelligence économique du ministère et a beaucoup œuvré pour dynamiser cette réflexion essentielle à mes yeux et trop fréquemment oubliée en France;

le département de la Formation, des études et des recherches, dirigé par Pierre-Antoine MAILFAIT, a su fidéliser les auditeurs et instaurer des liens forts entre universitaires et praticiens comme entre sécurité publique et sécurité privée.

Vous me permettrez, Monsieur le Directeur, et vous aussi, Monsieur le Préfet Bernard HAGELSTEEN, qui veillez à la présidence du Conseil de l'Institut, de féliciter à travers vos trois chefs de département, l'ensemble de vos collaborateurs.

Et c'est parce que je sais la qualité et la force de l'Institut que je m'engage sans réserve dans le projet, dont chacun ici a entendu parler, de rapprochement de l'INHES, de l'IHEDN, du CHEAR et de l'IERSE.

Successivement ministre de la Défense et ministre de l'Intérieur, je sais d'expérience combien sécurité intérieure et la sécurité extérieure sont intrinsèquement liées dans un monde où la menace est globale.

Les évolutions géostratégiques, l'interpénétration du crime organisé, la mondialisation, les redoutables changements d'échelle des grands trafics et des réseaux terroristes, tout nous amène à globaliser nous aussi notre approche pour y faire face et surtout pour anticiper la menace.

Pour penser ces fronts communs, pour orienter l'action par une prospective adaptée, il faut que nos grands instituts se rapprochent et coopèrent.

C'est toute l'ambition et la logique de ce projet.

Nos forces spéciales en Afghanistan et nos services de renseignement anti-terroristes avaient le même ennemi.

Nos policiers et gendarmes qui interpellent les dealers et notre marine nationale qui arraisonne des navires de transport de drogue ont le même ennemi.

Nous devons concevoir des alliances qui dépassent elles aussi les frontières.

Avec la présidence française de l'Union européenne, l'année prochaine, nous serons amenés à endosser des responsabilités particulières et à porter des projets concrets liés au contrôle aux frontières, à la modernisation des titres ou encore à la coordination et l'échange de renseignements.

Je veux que la France soit aux avant-postes de la construction de l'Europe de la sécurité, comme elle l'a été pour l'Europe de la Défense.

Je vous remercie.