Intervention de Michèle ALLIOT-MARIE, Ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des Collectivités Territoriales lors de la clôture des 12èmes assises de l'Association des Petites Villes de France - Chinon
Monsieur le Président,
Monsieur le Président du Sénat, cher Gérard LARCHER,
Mesdames, Messieurs,
Il y a des villes qui parlent à tous les Français.
Des villes qui, au détour d'une ruelle ou à l'ombre de leurs édifices, racontent l'histoire de notre pays.
Des villes qui portent en elles quelque chose de l'âme de la France.
Chinon en fait partie.
Je vous remercie, Monsieur le Maire, de nous accueillir dans votre ville magnifique.
Les petites villes de France sont un cadre de vie pour près d'1 Français sur 3.
Pour nos concitoyens, elles sont synonymes de solidarité, de proximité, de qualité du service public. A Chinon comme ailleurs, les petites villes font rimer l'urbain et l'humain.
Les Français des petites villes savent ce qu'ils doivent à l'action quotidienne des maires.
Pour eux, le maire est une figure connue. Il est souvent leur premier interlocuteur.
Celui qu'on appelle en cas de problème, à toute heure du jour et de la nuit.
Celui qui assume la responsabilité des services publics locaux.
Celui qui accompagne nos concitoyens dans les étapes importantes de leur vie.
Celui qui assure la cohésion et le "vivre ensemble" dans les petites villes de France.
Mesdames et Messieurs les Maires,
Votre engagement quotidien vous place au cœur de la démocratie locale. Il fait de vous des acteurs incontournables de la future réforme des collectivités territoriales.
Ministre des collectivités territoriales, je suis chargée de conduire cette réforme.
Elle est nécessaire. Elle est attendue.
Sur la base du rapport du comité Balladur, j'ai engagé la concertation avec les associations d'élus. Votre association siège à la table des discussions.
La concertation se poursuivra jusqu'à l'été. Un projet de loi sera déposé puis débattu au Parlement cet automne.
Ensemble, nous construirons l'avenir des communes de France.
Ensemble, nous bâtirons un nouveau partenariat entre l'Etat et les collectivités.
Une action locale efficace, lisible et adaptée aux attentes : c'est l'objectif de l'évolution institutionnelle des communes.
La concertation nous a permis de dégager des pistes de travail.
L'intercommunalité d'abord.
- La carte doit en être achevée et améliorée. C'est, je le sais, l'une de vos préoccupations.
Pour l'achever, j'ai fait le choix de l'incitation plutôt que de la contrainte, avec une échéance raisonnable.
Le préfet n'interviendra qu'en cas de désaccord majeur, pour mettre en place des périmètres intercommunaux cohérents.
La Commission départementale de coopération intercommunale doit jouer tout son rôle dans la rationalisation de la carte. Les intercommunalités existantes doivent y être mieux représentées.
Certains regroupements de communes n'ont pas fait la preuve de leur efficacité. C'est le cas des pays et de certains syndicats de communes. Pourquoi ne pas transférer leurs compétences aux intercommunalités à fiscalité propre ?
- Qui dit renforcer l'intercommunalité, dit aussi renforcer la légitimité démocratique de leurs élus.
L'élection des conseillers communautaires par fléchage sur les listes communales peut y contribuer, sans rompre le lien indispensable avec les communes. Elle ne doit pas aboutir à une légitimité concurrente de celle du maire.
Le cas du mode électoral dans les petites communes devra être approfondi. J'envisage d'abaisser le seuil démographique des 3 500 habitants, au-delà duquel le scrutin se fait par liste sans possibilité de panachage.
Deuxième piste, les fusions de communes.
Il n'est pas question d'un regroupement autoritaire des collectivités.
Certaines communes, rares il est vrai, souhaitent, au-delà des coopérations existantes, aboutir à de véritables fusions.
Les regroupements proposés le seront sur la stricte base du volontariat et du libre consentement, le cas échéant avec une incitation financière.
3e piste enfin, les métropoles visent à mieux répondre aux problématiques du milieu urbain.
Certains points méritent approfondissement : le nombre des métropoles, le statut des communes membres, l'articulation avec les autres collectivités.
Mon sentiment est qu'il existe quelques mégalopoles pour lesquelles un statut spécifique doit être mis en place.
Tous ces thèmes sont abordés dans la concertation.
Mesdames, Messieurs,
L'évolution institutionnelle des communes n'a de sens que si elle s'inscrit dans une démarche globale.
La réforme de l'organisation des communes exige une réflexion d'ensemble sur la relation entre l'Etat et les collectivités.
Ma conviction est que l'avenir de cette relation passe par plus de confiance, de clarté et de responsabilité.
La confiance d'abord.
Les collectivités doivent être entendues, écoutées, consultées. Elles doivent être mieux associées aux normes qui encadrent leur action.
Elue locale, je sais que les décisions prises à Paris ont parfois des conséquences directes sur mon budget à Saint-Jean-de-Luz.
J'ai fait créer la Commission Consultative d'Evaluation des Normes (CCEN) pour que nous puissions contrôler, ensemble, la nécessité et le coût des normes pesant sur les collectivités territoriales. Elle est au travail depuis octobre dernier.
Fondée sur la confiance, la relation de l'Etat et des collectivités doit aussi reposer sur la clarté.
La clarification des compétences est une priorité.
Aujourd'hui, le citoyen veut savoir qui fait quoi, qui est responsable de quoi. Est-il normal que le citoyen élise des représentants départementaux et régionaux sans savoir qui le représentera sur différents dossiers ?
Deux objectifs seront recherchés.
- Identifier les blocs de compétences d'abord. Des principes ont été dégagés lors de la concertation : la région a un rôle pilote pour le développement économique et la planification, le département pour ce qui concerne la solidarité sociale et territoriale.
Pour les communes, il est hors de question de remettre en cause la clause de compétence générale.
- Promouvoir la notion de chef de file est un moyen souhaité de répondre à des situations exigeant une participation multiple. Il faudra préciser et clarifier ses modalités concrètes et sa traduction juridique.
La relation entre l'Etat et les collectivités, c'est enfin une relation fondée sur la responsabilité
Elle est le corollaire de la redéfinition des compétences. Elle est une exigence pour l'autonomie financière des collectivités.
Aujourd'hui, l'Etat est devenu le premier contribuable. Cela va à l'encontre de l'autonomie.
La réforme de la taxe professionnelle, décidée par le Président de la République, donnera lieu à une compensation intégrale, pour chaque niveau de collectivité, et pour chaque commune.
Cette compensation sera assurée, pour l'essentiel, par de nouveaux impôts.
J'y travaille avec Christine Lagarde, en concertation avec vous et l'ensemble des associations d'élus, dans la perspective du prochain projet de loi de finances.
Mesdames et Messieurs,
La réforme des collectivités territoriales se fera avec les petites villes de France.
Elle s'appuiera sur votre connaissance du terrain, votre expérience de l'action publique, vos idées pour l'avenir de notre organisation institutionnelle.
Nos ambitions sont les mêmes. Nos exigences sont communes.
Pour servir nos concitoyens, pour construire l'avenir des territoires, pour faire vivre notre pacte républicain, l'Etat est à vos côtés, et il le restera.
Je vous remercie.