04.10.2008 - 115è congrès national de la Fédération Nationale des Sapeurs-pompiers

4 octobre 2008

Intervention de Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales, lors du 115è congrès national de la Fédération Nationale des Sapeurs-pompiers


Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,

Je vous remercie de votre accueil. C'est un plaisir pour moi d'être parmi vous, ici à Rennes, à l'occasion de votre congrès national.

Les Français sont profondément attachés aux sapeurs-pompiers. Ils ont toutes les raisons de l'être.

Plus de 250 000 sapeurs-pompiers, volontaires, professionnels, militaires, réalisent chaque année près de quatre millions d'interventions au service de nos concitoyens.

Cette année encore, ils ont forcé l'admiration en France, dans le Nord, à Hautmont, à Maubeuge, également en Ardèche, dans la Drôme, en Haute-Savoie, à Chamonix, mais aussi en Chine, en Roumanie, et ces dernières semaines à Haïti.

Tous partagent les mêmes valeurs de solidarité, de fraternité et de désintéressement.

Tous sont prêts à risquer leur vie pour sauver celles de nos concitoyens, et ce quel que soit leur nom, leur âge et leur origine.

Nous n'oublions pas le sacrifice des onze sapeurs-pompiers, civils et militaires, disparus dans l'exercice de leur devoir au cours des douze derniers mois. Ils resteront pour tous un exemple de courage, de dévouement et d'abnégation.

Mes pensées vont aussi aux pompiers blessés en interventions et à leur famille. J'adresse à chacune et chacun tous mes vœux chaleureux de rétablissement.

A tous, je veux dire l'hommage de la Nation.

***

Monsieur le Président, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. Je vous remercie de vos propos sur la réforme du secours à personnes.

Mon ambition était de donner aux acteurs du secours les moyens d'agir efficacement au service de tous.

Le travail accompli par les sapeurs-pompiers et les urgentistes a mis un terme à des divisions aussi anciennes qu'infondées.

Adopté fin juin, le référentiel commun sur le secours à personne et l'aide médicale urgente doit être maintenant mis en œuvre.

Dans les départements, chacun travaille désormais à s'approprier et expliquer le référentiel. La démarche ne devrait pas poser de grande difficulté, car nous avons fait le choix du pragmatisme : partir de ce qui marche sur le terrain et sans coût financier supplémentaire.

Il nous reste à mieux associer les élus locaux.

J'ai souhaité que la nouvelle Conférence Nationale des Services d'Incendie et de Secours soit saisie dès sa première réunion, en novembre prochain, et que le Référentiel, reconnu de tous, bénéficie de l'encadrement juridique et financier d'un arrêté interministériel avec le Ministère de la Santé.

Le comité rédactionnel, transformé en instance permanente de suivi et d'appui aux acteurs locaux, aura un rôle de pédagogie et de réflexion permanent.

Voilà, Monsieur le Président, ce que nous avons déjà fait ensemble. Je vous propose aujourd'hui de poursuivre le chemin de la réforme et de la modernisation.

Mon ambition est de préparer avec vous l'avenir de la sécurité civile dans notre pays. 

L'avenir, c'est l'évolution des missions des sapeurs-pompiers.

 C'est aussi la préservation du volontariat.

Le Livre Blanc de Défense et de Sécurité place la sécurité civile au cœur de la nouvelle stratégie nationale de sécurité, au même titre que la sécurité intérieure.

Les sapeurs-pompiers ont été associés à son élaboration.

J'ai tenu à ce que les travaux préparatoires au Livre Blanc réunissent auprès des professionnels de la défense nationale ceux de la sécurité civile.

Ainsi, des Directeurs départementaux des services d'incendie et de secours ont pu exposer les missions quotidiennes de la sécurité civile et l'organisation mise en place en cas de grave crise civile.

Je veux maintenant associer les sapeurs-pompiers à la mise en œuvre du Livre Blanc.

Je vais mettre en place des groupes de travail sur toutes les grandes questions de sécurité civile. Vous y serez pleinement associés.

Sur le renforcement de l'échelon zonal d'abord.

L'échelon zonal a prouvé toute efficacité en matière opérationnelle.

J'en renforcerai la dimension interministérielle tout en confortant le rôle des sapeurs-pompiers par une adaptation des emplois supérieurs.

Pour améliorer la coopération civilo-militaire dans les zones de défense, j'ai, en outre, demandé un inventaire des capacités militaires pouvant renforcer les moyens civils en situation de crise.

Cela concerne les vecteurs de transports terrestres comme aériens, les menaces radiologique, bactériologique et chimique (NRBC) ou les dispositifs de communication et de commandement.

Le système d'alerte des populations est une deuxième piste de travail.

Il doit être repensé et adapté en fonction des bassins de risques.

En complément du système traditionnel et reconnu des sirènes d'alerte des bâtiments publics, il doit pouvoir s'appuyer sur les médias traditionnels et aussi sur des moyens modernes et efficaces de notre vie quotidienne. Téléphones portables, ordinateurs de poche (PDA), panneaux urbains électroniques d'information, doivent permettre d'envoyer des messages rapides d'alerte et de consignes à nos concitoyens en cas de crises.

J'en ai validé le principe.

La future Loi d'Orientation et de Programmation pour la Sécurité (LOPSI) en assurera le financement.

Le réseau ANTARES sera mis à contribution via un centre opérationnel départemental permanent à désigner.

Les menaces nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique (NRBC), enfin, doivent faire l'objet d'un effort particulier.

J'ai fixé trois objectifs à atteindre en cinq ans :

- tripler le nombre de chaînes de décontamination
- équiper les intervenants de moyens de détection et d'analyse performants
- renforcer l'entraînement en commun des primo-intervenants

L'Etat y consacrera des crédits d'investissement destinés aux financements des équipements.

Je souhaite qu'à terme, après discussion avec les élus, par voie de conventionnement, que les SDIS puissent prendre en charge le fonctionnement de ces moyens.

Vous le voyez, Monsieur le Président, les sapeurs-pompiers auront toute leur place, à tous les échelons territoriaux, dans la mise en œuvre des préconisations du Livre Blanc.

Les missions évoluent, les financements seront consolidés.

Vous évoquez la question des contingents communaux et intercommunaux d'incendie et de secours.

Les élus des départements, communes et établissements intercommunaux ont été consultés. Nous avons décidé, avec le Premier Ministre, qu'ils seront maintenus tels quels.

En pérennisant les contingents communaux, c'est le lien des SDIS et des collectivités territoriales, en particulier les communes, qui se trouve réaffirmé.

La maîtrise des finances publiques est cependant une exigence qui s'impose à tous. Il n'est donc pas souhaitable d'accompagner cette consolidation d'un signal trop inflationniste. Il en va de l'intérêt des collectivités territoriales et de l'avenir de notre pays.

Mesdames, Messieurs,

Les missions de la sécurité civile doivent s'adapter aux nouveaux enjeux de la protection des Français du XXIème siècle.

A la modernisation des missions doit correspondre une modernisation de l'engagement même des hommes et des femmes de la sécurité civile.

L'avenir du volontariat est aujourd'hui l'une de mes principales préoccupations.

Le volontariat est au cœur du modèle français de sécurité civile.

80 % des sapeurs-pompiers sont volontaires.

Ils sont les principaux garants du droit reconnu à nos concitoyens de pouvoir bénéficier, en tout lieu et à tout moment, de secours rapides, efficaces et à coûts maîtrisés.

Modèle d'engagement citoyen, le volontariat n'échappe pas aux profondes mutations sociales, économiques et culturelles de notre pays.

Cette richesse, il nous appartient de la préserver. Le volontariat est au cœur de mes priorités.

Nous devons poursuivre sans relâche nos efforts pour conforter et soutenir le volontariat dans un cadre d'action attractif et protecteur.

La première urgence, c'est de renforcer l'attractivité du volontariat.

L'attractivité financière certes.

Elle n'est plus aujourd'hui ce qu'elle était il y a dix ans.

Nous devons réfléchir à l'adaptation du régime des vacations aux contraintes et aux missions des sapeurs-pompiers volontaires.

Les vacations doivent mieux prendre en compte la diversité des missions dans les bassins de risques desquels ils dépendent.

Les vacations doivent aussi prendre en compte les besoins réels. Les programmes de formation doivent être allégés, en donnant la priorité à la qualité, mais aussi en favorisant le plus possible la validation des acquis de l'expérience.

Les propositions devront, bien entendu, être analysées et discutées préalablement avec les élus, pour s'assurer de l'adéquation du contenu de la formation aux besoins du volontariat, et de la compatibilité du coût avec le budget des SDIS.

Je demande donc au directeur de la sécurité civile d'engager immédiatement sur ce point la concertation avec l'Assemblée des Départements de France et votre Fédération.

Je souhaite que nous soyons en mesure de présenter, au premier trimestre 2009, un projet de décret à la Conférence Nationale des Services d'Incendie et de Secours (CNSIS) et à la Commission Consultative sur l'Evaluation des Normes (CCEN).

La compatibilité avec une activité professionnelle aussi.

Cela implique l'association des employeurs publics et privés.

J'ai tenu à ce que le ministère de l'Intérieur soit exemplaire dans ce domaine. C'est pourquoi j'ai signé la première convention de disponibilité des fonctionnaires placés sous mon autorité et qui, par ailleurs, sont sapeurs-pompiers volontaires.

J'ai également signé en juin dernier une convention cadre avec le groupe La Poste, qui permettra aux 600 sapeurs-pompiers volontaires de cette entreprise de bénéficier de 20 jours de disponibilités rémunérés, dont 10 peuvent être consacrés à la formation.

D'autres conventions seront bientôt conclues. Je signerai prochainement avec le ministre de la Défense une convention cadre au profit des militaires et personnels civils ; elle concernera 2 000 sapeurs-pompiers volontaires.

L'action de l'Etat est relayée dans les départements par les SDIS. Je veux vous en féliciter.

En deux ans, vous disposez tous d'un bureau du volontariat.

8 000 conventions ont été signées avec les PME.

Ces 8 000 employeurs bénéficient d'exonérations pour les heures de salariés en interventions.

J'ai demandé à mon collègue, Eric Woerth, ministre du budget et des comptes publics, d'étudier l'intégration des commerçants, des artisans et des professions libérales à ce dispositif prometteur.

Nous aurons réussi lorsque 20 000 entreprises auront signé ces conventions. Je souhaite sensibiliser les préfets pour atteindre cet objectif dans les trois prochaines années.

Après l'urgence, il faut aller encore plus loin et penser à long terme.

Le long terme, c'est la mise en œuvre d'une  charte de l'engagement volontaire des sapeurs – pompiers.

Nous devons réfléchir ensemble aux moyens de renforcer la protection du volontariat de le rendre plus attractif, compte tenu de l'évolution des modes de vie.

Une charte de l'engagement volontaire ne peut être que spécifique.

Le volontariat n'est pas un métier. Il faut exclure toute tentative d'assimilation à un statut de fonctionnaires.

C'est une forme originale d'engagement ouverte à chaque membre de notre communauté nationale, afin d'exercer de manière active et solidaire sa citoyenneté.

Pour définir la nouvelle charte de l'engagement volontaire des sapeurs-pompiers, ma méthode sera celle du pragmatisme et de la concertation.

Elle se fondera d'un inventaire général des dispositions régissant le volontariat dans tous les domaines :

  •  accès à l'engagement,
  •  régime d'indemnisation,
  •  prestation de fidélisation et de reconnaissance,
  •  règles de l'honorariat.

Cette charte doit être spécifique. Elle doit aussi être adaptée aux mutations prévisibles du volontariat.

La société évolue, le volontariat aussi.

Il est temps de nous donner une approche prospective du volontariat.

Il est temps de comprendre pourquoi :

- deux jeunes sapeurs-pompiers sur trois ne deviennent pas volontaires,
- pourquoi les durées moyennes d'engagement ne dépassent pas dix ans,
- pourquoi seulement 10 % de la grande masse des sapeurs-pompiers volontaires sont des étudiants.

J'ai donc décidé la création d'une commission "Ambition volontariat", en partenariat avec les associations d'élus et  votre Fédération, sous le pilotage de la direction de la sécurité civile et de la délégation à la prospective et à la  stratégie, que j'ai créée au ministère de l'intérieur.

Elle sera chargée de mener cette réflexion et de me faire des propositions dans six mois pour consolider le cadre d'exercice du volontariat et renforcer son attractivité pour notre jeunesse, tout en préservant sa nature.

Mesdames, Messieurs,

Le 14 Juillet dernier, je vous accueillais pour la première fois à l'Hôtel de Beauvau après votre descente des Champs-Elysées. Je le ferai désormais chaque année.

Il existe un lien particulier entre les sapeurs-pompiers, le ministère de l'Intérieur et la Nation.

Vos valeurs sont celles qui nous apprennent à vivre ensemble.

Votre engagement renforce les liens de solidarité sur tous les territoires de la République.

Votre avenir se confond avec celui de notre pays.

C'est pour cela que je forme de grandes ambitions pour les sapeurs-pompiers.

C'est pour cela aussi que vous pourrez toujours compter sur mon soutien et ma reconnaissance.

Je vous remercie.