Intervention de Monsieur Dominique de VILLEPIN au Quartier Drouot de Mulhouse
Merci,
D'abord je voudrais vous remercier, chacune et chacun, d'avoir bien voulu participer à cette réunion de travail ; je dis bien réunion de travail parce que nous sommes ici ensemble pour essayer de trouver des solutions ; je l'ai dit ce matin, il n'y a pas de “ potion magique ” pour les problèmes que nous évoquons, les problèmes du Drouot, les problèmes de l'ensemble des quartiers sensibles qui sont concernés.
Vous savez que nous avons été amené à recenser un certain nombre de quartiers sensibles - 24 quartiers - à travers le territoire national, pour justement essayer une approche nouvelle.
Le choix traditionnel, c'était une approche indifférenciée - la première possibilité - , essayer de façon un peu abstraite, de façon un peu artificielle, d'apporter des réponses sur l'ensemble des quartiers du territoire.
Ce n'est pas la démarche que nous avons retenue, et je crois que nous avons bien fait, parce qu'en vous écoutant, on se rend compte qu'il y a une diversité d'attentes. Plusieurs d'entre vous l'ont exprimé ; il y a à la fois de l'attente de ce qui pourrait arriver, de ce qui pourrait changer et en même temps de l'inquiétude, de la peur du quotidien.
Cette diversité s'exprime aussi dans les réponses que l'on peut apporter ; l'Inspecteur d'Académie a présenté un certain nombre de pistes, le Président du C.E.P.I. a aussi indiqué un certain nombre de pistes et de propositions qui peuvent produire à terme à profondément changer l'offre, notamment dans le domaine de l'emploi.
Donc, il faut mettre tout cela ensemble pour essayer d'avancer, en tirant les leçons de l'expérience.
Identifier donc 24 quartiers, tirer les leçons, en profondeur, de la situation, après avoir examiné chacune de ces situations et puis, après, essayer de façon pragmatique de généraliser, d'étendre à l'ensemble des autres quartiers qui concernent notre pays.
Alors quelles sont les caractéristiques de ces quartiers qui ont été retenus, quels sont les points communs, qu'est-ce qui fait véritablement la cible ?
D'abord, ils sont tous concernés par la multiplication des violences urbaines et en même temps, ils sont tous marqués par une volonté de changer les choses ; c'est ce que j'ai pu constater ici fortement ce matin : il y a le désir de ne pas baisser les bras, il y a le désir de relever un défi commun.
C'est donc un travail de long terme que nous voulons engager, avec chacun, avec la Mairie, avec le Conseil Général, avec le Conseil Régional, avec l'ensemble des institutions et des partenaires concernés.
Donc, voilà pour l'approche générale concernant le choix de cette cible, 24 quartiers sensibles.
Pourquoi avoir choisi Drouot ce matin, pour commencer, puisque c'est la première visite que j'effectue dans ces quartiers ?
D'abord, et le Maire l'a très bien dit, c'est un quartier qui fait mentir les préjugés habituels que l'on a ; on imagine des tours immenses, on imagine des habitations à taille totalement inhumaines ; ici, quand on se promène, on voit bien que nous avons un quartier qui ne correspond pas à l'image traditionnelle que l'on a.
Et pourtant, les problèmes sont là. Drouot a connu un regain de violence atypique en 2003 alors que les chiffres diminuaient dans le reste de la ville ; c'est très frappant : une diminution très sensible des chiffres de l'insécurité partout dans Mulhouse, et pourtant ici il y a eu une augmentation très forte.
Parallèlement, cela ne conduit pas à une baisse des initiatives, à une baisse de l'enthousiasme et de la mobilisation pour essayer de faire quelque chose, en dépit des événements, et en particulier ce qui a concerné la Maison des Jeunes.
On voit que les initiatives peuvent prendre des formes extrêmement diverses, qu'il s'agissent d'initiatives en matière d'artisanat, de formation ; on le voit aussi à travers ce qui est fait par les collectivités locales dans le cadre du nouveau contrat local de sécurité, signé en 2002.
C'est pour cela qu'il était important pour moi de venir sur le terrain, d'abord pour vous écouter, pour rendre hommage aussi au travail qui est fait par l'ensemble de ceux qui sont mobilisés au quotidien ici dans ce quartier.
Alors quels sont, très rapidement, les principaux problèmes que l'on identifie ?
Je commencerai par la délinquance ; le Ministre de l'Intérieur a bien sûr une responsabilité première en ce domaine. C'est l'autorité de l'Etat, c'est la responsabilité de l'Etat que de faire en sorte que cette délinquance régresse. Cette délinquance dont on voit bien qu'elle a des conséquence lourdes sur le pacte social qui est l'exigence première dans notre pays.
En 2003, il y a une augmentation de 20% des faits constatés dans ce quartier, Drouot, alors que les faits constatés dans le même domaine, étaient en recul de 13% dans l'ensemble de Mulhouse, et cela doit évidemment nous interpeller les uns et les autres.
Les conséquences de ces actes, dans la vie quotidienne de chacun, sont extrêmement lourdes ; une voiture brûlée, parce que cette voiture a souvent été achetée à crédit, parce que l'assurance ne fonctionnera pas toujours de manière satisfaisante, ce sont des dommages extrêmement lourds qui sont payés par ces familles dans leurs vies personnelles.
Je comprends aussi, et certains l'ont exprimé, le découragement, la lassitude qu'il peut y avoir à faire face, jour après jour, à des incivilités, à des agressions, à des actions gratuites sans justifications, qui peuvent là encore décourager profondément.
Il y a un deuxième champ de difficultés, que vous avez là encore exprimé fortement, c'est tout ce qui touche à la situation économique et sociale, tout ce qui touche au chômage, qui atteint particulièrement Drouot avec un chiffre de 22% qui vise évidemment plus particulièrement les plus jeunes. Sentiment aussi, qui accompagne évidemment cette situation de la délinquance, du chômage, sentiment d'isolement, sentiment d'être en marge du reste de la ville.
Face à tout cela, il y a bien sûr un risque, risque que nous n'acceptons pas, d'un enchaînement, d'une spirale d'échecs qui conduirait à d'avantage de difficultés et d'avantage de marginalisation.
Alors, comment engager aujourd'hui et inverser cette tendance ?
D'abord, il y a un principe qu'il faut rappeler, parce que c'est un principe de base de la vie collective, c'est cette notion centrale dans la vie des uns et des autres, c'est le respect.
Sans respect, respect de l'autre, respect de la règle commune - celle qui fonde notre vie en commun - sans respect de l'autorité de l'Etat, il n'y a pas de dialogue possible. Et l'objectif, c'est bien de retrouver, à partir de ce respect, la confiance et le bien-être collectif et individuel.
Le bien-être, ce sont des choses extrêmement simples que chacun vit au quotidien ; c'est la possibilité de sortir tranquillement de chez soi le soir, c'est la possibilité d'avoir des relations avec ses amis, sa famille, c'est de pouvoir rappeler aussi la règle, quand celle-ci n'est pas respectée, sans pour autant se voir entouré, menacé, insulté.
La règle, c'est quelque chose qui doit faire l'objet d'un consensus de la part de tous.
Je vois bien dans un quartier, et c'est le miracle d'un quartier comme celui-ci, quelle est la solidarité qui s'exprime en dépit des difficultés ; il y a une force du lien social, parce que souvent c'est difficile, parce qu'on est confronté à des situations exigeantes, et bien il y a une solidarité, une relation qui se crée, dans des moments qui peuvent être des moments heureux ou des moments plus malheureux.
Et l'attachement ici des habitants à ce quartier, il a été exprimé fortement par certains, c'est un attachement à Drouot, c'est une volonté de vivre ici, de faire sa vie dans un cadre de vie qui a été évidemment bien conservé.
A partir de cela, quelle est la méthode que nous voulons employer pour essayer de changer les choses ?
D'abord, première règle, s'appuyer sur ce qui a été fait et entrepris avec beaucoup d'énergie et de ténacité au fil des années par la ville, par son Maire, Jean-Marie Bockel, toujours présents dans l'ensemble des projets de prévention que j'ai pu examiner et discuter avec les uns et les autres ce matin.
Cet engagement d'ailleurs, montre bien que le défi que nous devons relever, c'est un défi républicain, c'est un défi qui dépasse les clivages politiques partisans et qui suppose que nous nous rassemblions, et c'est bien aujourd'hui ce dont nous voulons témoigner les uns et les autres : mobilisation du Conseil Général, mobilisation du Conseil Régional, à partir des politiques économiques et sociales, et de ce point de vue, je tiens évidemment à remercier le Président du Conseil Général, Monsieur Butner, ainsi que Madame Grosskost, qui représente Monsieur Zeller, et qui connaît bien évidemment l'ensemble des problèmes que nous évoquons, particulièrement mobilisée comme Présidente de la commission “ politique urbaine et politique des jeunes ” au Conseil Régional.
Face à l'urgence, il faut donc que nous puissions dessiner et choisir un certain nombre d'axes privilégiés.
D'abord, il faut que nous puissions adapter de façon plus fine, de façon plus ciblée, l'ensemble des dispositifs en matière d'insertion, qu'il s'agisse de données économiques ou dans le domaine éducatif, en essayant d'associer étroitement l'ensemble des partenaires.
Il faut évidemment, de ce point de vue, arriver à une implication de chacun. On a vu à quel point des chefs d'entreprises mobilisés, motivés, peuvent changer la donne en offrant l'emploi, en offrant une chance, et de ce point de vue, cette égalité des chances, la possibilité de tendre la main pour permettre de rentrer dans la vie active, sortir de cette situation de chômage, c'est tout à fait essentiel.
On a vu aussi, pour ceux qui l'ont évoquée, l'importance de la mobilisation des familles, des parents. Il est évident que recréer le cadre social, recréer la responsabilité dans le cadre social, c'est tout à fait essentiel.
Il faut donc mobiliser les compétences, savoir les mettre d'avantage en réseau, et de ce point de vue, nous avons nous, l'Etat, une responsabilité particulière, en faisant en sorte que les administrations puissent se parler d'avantage, puissent travailler d'avantage ensemble. Je l'ai évoqué ce matin avec le Préfet, avec les magistrats, les policiers, les gendarmes. Je sais que l'Education Nationale est particulièrement impliquée dans ce qui est un vrai problème dans un quartier comme Drouot, c'est la lutte contre l'absentéisme scolaire. Il est bien évident que faire en sorte que chacun puisse trouver sa place à l'école, c'est une garantie, non seulement supérieure pour le futur, mais aussi un élément d'intégration sociale, un élément d'acceptation du cadre qui est le notre.
Les travailleurs sociaux ont évidemment un rôle difficile ; je veux saluer l'action qui est la leur, qu'ils relèvent des collectivités ou du monde associatif ; ils sont essentiels pour permettre de faire en sorte que personne ne reste au bord du chemin.
Il y a, on l'a vu dans nombre d'interventions, un champ très important qui est celui de l'innovation.
Il s'agit de lancer des initiatives, de s'appuyer sur des actions qui peuvent marcher et qui peuvent être transposées ailleurs.
Alors, je veux vous dire un mot, avant de rentrer dans des pistes plus concrètes, à partir de ce qui a été évoqué aujourd'hui, sur la conviction qui est la mienne concernant la prévention.
La prévention, c'est une dimension nouvelle ; on s'intéresse de plus en plus à ce dispositif de prévention et il est essentiel ; la sanction, la répression ne peuvent pas aller sans ce travail de prévention, c'est une seule et même chose, c'est un principe de responsabilité qui s'applique à l'action politique et à la responsabilité politique ; il faut donc mener les deux de pair.
Nous voulons poursuivre l'importance accordée à cette prévention, et lui donner encore plus d'importance à travers un travail législatif ; c'est tout le sens de la Loi “ prévention ”qui est en préparation et à laquelle nous avons déjà beaucoup travaillé avec Dominique Perben, à laquelle nous allons encore beaucoup travailler avec Jean-Louis Borloo notamment et le Ministre de l'Education Nationale également. La démarche se veut originale ; très souvent, on fait une loi, on pose un cadre, et puis après on en voit les conséquences et les difficultés qui se posent.
Là, c'est la démarche inverse ; nous voulons, à travers l'examen très concret des problèmes auxquels sont confrontés les quartiers, tirer un certain nombre d'enseignements, de leçons, notamment à partir de la visite des 24 quartiers sensibles retenus, et à partir de là, déterminer et fixer par la loi, le cadre qui nous permettra d'être plus efficaces.
Il y a donc la volonté de prendre en compte l'expérience, les difficultés que nous observerons sur le terrain, avant même de faire cette loi “ prévention ”, qui sera évidemment essentielle dans le dispositif.
Je voudrai aborder quelques sujets qui concernent spécifiquement cette loi et qui posent un certain nombre d'interrogations.
D'abord, concernant le secret partagé, qui est évidemment au cœur des préoccupations ici d'un certain nombre de travailleurs sociaux.
Je veux indiquer qu'il ne s'agit en aucun cas d'entrer dans une logique qui a, à juste titre, pu être dénoncée, qui est celle de la délation. Il s'agit tout simplement d'apporter des réponses à des problèmes qui existent et à partir de là essayer de partager une information et faire en sorte que ceux qui peuvent agir ensemble puissent partager cette information, pour essayer d'améliorer la réponse, les solutions. C'est une question de justesse de la démarche, à la fois d'efficacité, mais dans le respect, je l'ai dit, d'un principe républicain tout à fait essentiel.
Le défi, nous le voyons bien, la question, nous la connaissons : comment des professionnels peuvent-ils partager entre eux une information qui est à même d'aider des personnes qui sont en danger ? cette question, nous devons l'aborder très franchement, en évitant les pièges et les amalgames, et c'est pour cela que la consultation avec Jean-Louis Borloo, Dominique Perben et François Fillon doit se poursuivre en ce domaine pour faire des propositions qui permettront à la fois de satisfaire à ce principe de prévention et en même temps de faire avancer les choses, parce que sans partage de l'information, et bien les réponses ne sont pas apportées comme nous le souhaiterions.
Il est important aussi, deuxième aspect, de faire évoluer le dispositif territorial de prévention et mieux articuler l'action des différentes collectivités.
Nous avons actuellement un système qui a sa logique, où la prévention de la délinquance est partagée principalement entre l'Etat, le conseil général et les municipalités.
Aujourd'hui, nous voyons bien que ce système ne connaît pas tous les développements souhaitables ; il faut un meilleur pilotage, il faut d'avantage de coordination si nous voulons être véritablement efficaces.
Faut-il, dès lors, maintenir le système existant en l'aménageant à la marge ? ou faut-il au contraire le revoir en profondeur, en s'appuyant d'avantage sur le maire pour en faire le pilote global de cette action de prévention, en étroite association avec les autres collectivités ? c'est cela que nous allons examiner au vu des expériences sur le terrain. Cette question est au cœur de l'évaluation que nous allons faire et évidemment en fonction des constatations, des expérimentations, nous serons amenés à en tirer les conclusions qui s'imposent.
Vous me permettrez maintenant de dégager, à partir des témoignages et des expériences du quartier Drouot, de retenir un certain nombre de pistes, voir de tirer quelques leçons.
Au plan institutionnel d'abord, c'est l'exigence de coordination ; il y a beaucoup de choses qui sont faites, mais il faut que les choses soient d'avantage coordonnées, rassemblées, et de ce point de vue, je voudrais saluer le dispositif qui a été mis en place dans le cadre du contrat local de sécurité, en 2002, dispositif de coordination de la prévention et de la sécurité.
Toutes les institutions nationales et locales se retrouvent ici avec la volonté d'agir, et il y a véritablement un besoin, on le sent, d'un interlocuteur pour les habitants. C'est un domaine où il faut continuer d'essayer d'accroître la coordination, car elle est indispensable.
Je retiens aussi la nécessité d'impliquer chacun ; chacun doit trouver sa place dans ce système : les institutions bien sûr, mais aussi les parents. C'est tout le sens de l'action, de la mission des parents. Ils ont évidemment un rôle essentiel à jouer et, en l'absence des parents, il faut bien essayer de trouver des réponses alternatives qui permettent de traiter ces questions. Parents qui ont souvent besoin de soutien, besoin d'être appuyés dans leurs efforts, besoin aussi, on le voit, dans un certain nombre de problèmes techniques, dans certains problèmes juridiques qui parfois déroutent les habitants, et c'est tout le sens ici de la Maison de la Justice et du Droit qui permet de traiter au quotidien, de pouvoir expliquer un certain nombre de procédures, un certain nombre de décisions de justice ; cela permet la meilleure compréhension, cela permet à chacun de bien saisir ce à quoi il est confronté, et je pense qu'il est essentiel de répondre ainsi aux questions des habitants du quartier.
Le rôle des médiateurs me paraît aussi tout à fait intéressant ; il faut souligner ici, et j'ai pu en saluer tout à l'heure quelques uns, la présence des médiateurs ; c'est un élément de facilitation, un élément de meilleure connaissance des problèmes auxquels les uns et les autres sont confrontés ; il y a un besoin de favoriser cette interaction à l'intérieur d'un quartier comme celui-ci.
Je voudrais aussi saluer un certain nombre d'initiatives originales qui peuvent constituer un point de départ, qui mériteraient d'être développées voir étendues ailleurs.
Par exemple, dans le cadre du Service d'hygiène municipal, qui agit face à tout ce qui concerne les appartements insalubres, les chiens dangereux, les bruits, les problèmes d'urbanisme, toute une série de questions difficiles, ces initiatives des comités d'hygiène sont des réponse particulièrement adaptées qui permettent de concentrer l'action sur ces problèmes spécifiques qui pourrissent la vie quotidienne.
Autres initiatives, celles qui visent à répondre aux dégradations urbaines ; quand on est confronté à ce type de dégradations, évidemment il faut réagir et le faire vite, notamment, en particulier face aux tags qui se sont multipliés sur notre territoire. De ce point de vue, le recrutement par la Mairie d'anciens taggeurs, qui s'engagent à remettre les choses en ordre, me paraît une initiative qui mérite d'être soulignée et encouragée parce qu'elle apporte une réponse immédiate à un problème qui évidemment enlaidit les quartiers.
L'accroissement du nombre de postes de travail d'intérêt général est aussi une réponse ; ces postes ont été augmentés, il faudra encore les augmenter dans le futur, mais je crois qu'on a là une réponse appropriée qui permet de traiter autrement la question de la sanction. Chaque sanction doit bien sûr être adaptée et là, il y a possibilité de répondre directement à un délit qui est commis en apportant une réponse par celui qui l'a commis ; je pense qu'il y a là une proximité dans la réponse qui mérite aussi d'être encouragée.
Autre besoin, autre initiatives sur lesquelles il faut travailler, c'est évidemment la nécessaire prise en compte des victimes ; l'association “ vis ma vie ”, en allant au plus près pour répondre aux problèmes qui sont posés aux victimes de violences ; c'est bien sûr une nécessité ; trop souvent, ces victimes gardent silencieusement pour elles les chocs, les agressions dont elles ont été victimes ; on a besoin d'aller vers ces victimes pour véritablement pouvoir leur apporter une réponse.
Au delà de cet aspect institutionnel de coordination, de mobilisation, qui évidemment sollicite chaque association, chaque groupe, chaque institution, je voudrais ajouter aussi à quel point ce qui se fait ici sur le plan économique me paraît intéressant. Je retiens en particulier le dynamisme et l'engagement des chefs d'entreprises, dans le cadre du CEPI - le club des entreprises pour l'insertion - , 8 chefs d'entreprises qui offrent dès maintenant 41 contrats de qualification ou d'apprentissage aux habitants du Drouot, c'est véritablement une initiative qui peut changer les choses ; réussir ce type d'expériences, transformer ces contrats en emploi, , dès lors que chacun joue le jeu et accepte de répondre positivement à ces propositions, c'est le début de changements en profondeur qui peuvent répondre à ce qui a été exprimé à plusieurs reprises ici, c'est à dire le besoin du travail, le besoin de reprendre une vie normale, le besoin de prendre sa place à la fois dans le quartier et dans la cité.
Au plan éducatif, je voudrais retenir deux axes parmi un certain nombre de réactions ou d'éléments qui m'ont été présentés dans le cadre des réunions du matin.
D'abord, la lutte contre l'absentéisme, qui nourrit la délinquance, et je sais que c'est un point sur lequel l'Inspecteur d'Académie est mobilisé et l'ensemble de l'Education Nationale, c'est un point qui est évidemment tout à fait essentiel ; pouvoir, à travers l'école, mobiliser chacun des jeunes, offrir une perspective, c'est véritablement quelque chose qui doit faire l'objet d'un effort particulier.
Aussi, la nécessité de prendre en charge les élèves sans qualifications.
Il y a là deux problèmes spécifiques qui doivent être traités et qui méritent qu'on s'y attarde.
L'importance du rôle des femmes, des familles est tout à fait essentiel. On sait que par ce biais là, il y a un principe de responsabilité, il y a une réponse immédiate qui peut être donnée et le fait d'aider les mères, les familles, c'est, je crois, s'inscrire au plus près de la réponse.
Sur ce qui est plus spécifiquement l'action des services de police, je voudrais me féliciter de l'engagement de la police dans ce dispositif partenarial, et aussi en particulier tout ce qui est fait par le Centre loisirs jeunes qui remplit sa mission ; ce qu'on m'a rapporté ce matin montre bien qu'il répond à un besoin, et je souhaite en particulier insister sur le volet éducatif, le volet éducatif structurant - c'est le domaine de responsabilité qui est le mien - au delà des activités souvent ludiques de ces centres. Il faut continuer d'aller dans ce sens et élargir la mission de ces centres, qui, je crois, fonctionnent de manière satisfaisante.
Ce partenariat se concrétisera aussi grâce à l'installation, avec le concours de la Mairie et du Conseil Général, d'un travailleur social dans les locaux du commissariat, afin de prendre en compte en temps réel les besoins des victimes ; la présence de quelqu'un qui connaît l'ensemble de ces questions et qui peut tout de suite agir, je crois que c'est un atout supplémentaire dans le dispositif. On a besoin de cette capacité de dialogue, de cette présence humaine, qui modifie complètement la réponse qui est apportée par les services de police.
Bien sûr, il faut prendre en compte le besoin d'une présence accrue des effectifs de police ; le renforcement des effectifs, ce sera fait par 8 agents supplémentaires sur l'ensemble de la circonscription de Mulhouse, dont 5 spécifiquement pour le quartier Drouot ; ce sera fait pour aussi par le redéploiement de 10 emplois d'adjoints de sécurité, et je recommande tout particulièrement au Préfet, qui a la maîtrise du recrutement des ADS, que les jeunes de ce quartier puissent accéder à ces fonctions ; il est très important qu'ils soient partie prenante de ces exigences de sécurité, c'est leur avenir, c'est celui des habitants de ce quartier, celui de leurs familles, et la possibilité qui leur est offerte de travailler comme adjoint de sécurité, je crois que c'est véritablement la continuité et la responsabilité vis-à-vis de l'ensemble du quartier.
Un véhicule supplémentaire vient d'être affecté, à ma demande, à l'unité chargée de lutter conte les violences urbaines, ce qui participe aussi de notre volonté d'apporter au quotidien des réponses spécifiques.
Je n'oublie pas, au delà de ces réponses, économiques, institutionnelles, sociales, éducatives, dans le domaine de la sécurité, je n'oublie pas l'importance que revêt pour chacun d'entre vous le quotidien, l'importance des relations humaines, l'importance d'une implication de chacun à travers un travail d'animation qui fasse que ce quartier puisse développer sa vie collective ; l'attente qui existe vis-à-vis du monde associatif, la maison des jeunes par exemple, montre bien que de ce point de vue chacun mesure bien ce que peut apporter une institution comme celle-ci ; le comité d'animation Drouot, créé à l'initiative du conseil de quartier et des habitants, fait un travail formidable pour essayer de revitaliser cette vie collective, de resserrer les liens entre les habitants, et je crois qu'on a, à travers toutes ces initiatives, beaucoup de pistes, beaucoup d'axes, et beaucoup d'espoirs qui méritent d'être encouragés.
C'est le sens, une fois de plus, du travail que nous pouvons faire sur chacun de ces quartiers, et à partir de là, à partir du travail que vous allez faire au cours des prochaines semaines, parce que votre souci, c'est évidemment d'inscrire ce travail dans la durée, à partir de ce qui a déjà été fait, à partir de ce que vous allez faire, de ce que nous allons vous aider à faire au cours des prochaines semaines, évaluer le fonctionnement d'un certain nombre de ces dispositifs pour pouvoir privilégier tel ou tel.
C'est bien donc en responsabilité, non pas avec une “ baguette magique ”, que nous pouvons traiter les problèmes spécifiques auxquels vous êtes confrontés au quotidien à Drouot, mais c'est dans la durée, dans la responsabilité, en partenariat, avec les élus, avec les responsables administratifs, avec le secteur associatif, que je crois que nous pourrons finalement tracer le chemin.
On le voit bien ce chemin, il se dessine, on voit bien clairement là où est la lumière ; et bien il faut très solidement regrouper nos énergies, se mobiliser, se donner rendez-vous, car il est important qu'il y ait des réponses, et la possibilité très clairement, par étapes, de faire le point et le bilan.
Aujourd'hui, c'est une première étape qui s'ouvre, il y en aura d'autres, et c'est bien en ce sens, non pas en créant de faux espoirs, mais en essayant, avec beaucoup de pragmatisme, beaucoup d'humilité aussi, car nous savons que la tâche est rude et que depuis des décennies beaucoup s'emploient à essayer de traiter ces problèmes, mais avec la conviction qu'il y a des solutions aux problèmes spécifiques auxquels un quartier comme Drouot est confronté ; il y a surtout un formidable espoir dans la vitalité des habitants de ce quartier qui veulent vivre différemment, mettre ensemble leurs énergies et qui veulent donc se mobiliser, convaincus que nous sommes tous que la solution n'est pas dans la main d'un seul, mais dans la main de tous ceux qui veulent bien participer à cette aventure collective.
Je vous remercie.