27.08.2009 - Centre interministériel de crise "pandémie grippale"

27 août 2009

Intervention de M. Brice HORTEFEUX, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, lors de la réunion du Centre interministériel de crise "pandémie grippale"


Mesdames et Messieurs les Ministres [Roselyne BACHELOT-NARQUIN, Xavier DARCOS, Luc CHATEL, Nadine MORANO, Marie-Luce PENCHARD, Nora BERRA],
Mesdames et messieurs,

- Depuis que le Président de la République m'a confié, sous l'autorité du Premier ministre, et en étroite collaboration avec Roselyne BACHELOT-NARQUIN, le pilotage de la coordination interministérielle du dispositif de lutte contre cette pandémie, c'est le troisième point de presse que j'ai l'honneur de présider, Place Beauvau, après une réunion, à l'échelon ministériel, du centre interministériel de crise « pandémie grippale ».

- A l'occasion de la rentrée et compte tenu des récents développements survenus outre-mer, nous avons voulu faire un point sur la l'évolution de la situation, mais aussi vous présenter la démarche pragmatique adoptée par le Gouvernement pour lutter contre la propagation de la Grippe A (H1N1) et, enfin, évoquer les prochaines étapes de notre action.

I. Concrètement, aujourd'hui, où en sommes-nous ? Comparativement au Royaume-Uni et à l'Espagne, la France – tout au moins la métropole – est relativement épargnée par le virus.

- Nous sommes, pour l'instant, confrontés à un virus peu virulent mais doté d'une très forte capacité de contamination.
- En métropole, sa circulation est avérée mais reste toutefois limitée.

La situation est plus préoccupante outre-mer. La Martinique et la Guadeloupe ont dépassé le seuil épidémique. En Nouvelle-Calédonie, 35 000 cas potentiels ont été recensés depuis le début de l'épidémie. En Polynésie, les estimations sont en forte hausse, de l'ordre de 10 000 cas cumulés. Une amorce de circulation plus active a été constatée à la Réunion. Selon un bilan de la cellule épidémiologique Réunion-Mayotte, 9 000 Réunionnais ont été contaminés par cette grippe depuis juin, dont 3 500 lors de la première semaine d'août. Roselyne BACHELOT-NARQUIN et Marie-Luce PENCHARD qui se rendent sur place, demain, y reviendront dans quelques instants.
- En tout, depuis le début de l'épidémie, 10 décès, dont 8 outre-mer, sont à déplorer.

II. Si la France a été moins exposée à cette pandémie mondiale que bien d'autres pays, c'est parce que le Gouvernement a fait les bons choix, que ce soit en termes d'objectif, de stratégie et de méthodes.

  1. (1) Notre objectif est clair : tout mettre en œuvre pour garantir aux Français et aux Françaises la meilleure protection possible, aujourd'hui et dans les mois à venir, face à un « adversaire » par définition invisible, évolutif et très mobile.
  2. (2) Pour remplir cet objectif, nous nous sommes dotés d'une stratégie qui repose sur trois piliers.

Premier pilier : l'endiguement pour contenir le virus et diminuer le plus possible les risques de propagation.

C'est ce que nous avons fait, début mai, avec les touristes revenant du Mexique en mettant en place, quelques jours durant, un dispositif d'accueil spécial à l'aéroport de Roissy. Dirigés vers un aérogare spécifique, tous les passagers présentant des syndromes grippaux ont eu accès à des moyens d'information ainsi qu'un examen médical personnalisé. Instaurée le 5 mai, cette mesure a été levée le 14 par la cellule interministérielle de crise.
C'est ce que nous avons fait, aussi, avec le navire de croisière « Voyagers of the Seas ». Quand, le 1er août dernier, nous avons appris que ce paquebot comptait, à son bord, 60 membres d'équipage atteints par le virus, nous avons immédiatement suspendu le débarquement à Marseille de ses 5 100 passagers. Parallèlement, nous avons lancé une enquête épidémiologique qui a permis de détecter 4 cas avérés supplémentaires. Toutes les personnes présentant des symptômes ont été mises à l'isolement avec filtration d'air et placées sous traitement, tandis que les autres ont finalement été autorisées à débarquer.

C'est ce que nous avons fait, enfin, avec plusieurs colonies de vacances. A Megève le 11 juillet, à Canet en Roussillon le 30 juillet ou, pas plus tard que samedi dernier sur la commune des Mathes-La Palmyre près de Royan, en Charente-Maritime, où nous avons isolé 86 enfants originaires d'Ivry-sur-Seine après que 2 d'entre eux ont été déclarés porteurs du virus. Ils ont reçu des traitements mais n'ont pas été hospitalisés et ont pu regagner la colonie.

Deuxième pilier de notre stratégie : l'anticipation.

En tant qu'autorités publiques, il est de notre devoir de prendre en compte tous les cas de figure. A ce titre, il est de notre responsabilité – quoi qu'en disent certains – de nous préparer, dès à présent, aux différents scénarios susceptibles de se réaliser.
J'observe, d'ailleurs, que l'évolution de la situation épidémiologique chez nos voisins européens mais aussi, à l'intérieur même de nos frontières, au sein de nos départements et collectivités d'outre-mer situés dans l'hémisphère Sud, conforte pleinement la démarche adoptée par le Gouvernement.

Au quotidien, cette anticipation s'accompagne d'une observation objective des faits. Concrètement, nous analysons les choix retenus par d'autres pays, plus touchés que nous, à ce stade. Parce qu'ils sont aux avant-postes de la pandémie, ils constituent des cas d'études sur les mesures à prendre et à ne pas prendre. Chaque expérience est différente, mais chaque expérience est, aussi, riche d'enseignements. Nous tirons systématiquement les leçons de chacune.

Troisième pilier : l'adaptation

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Il serait illusoire de croire que, face aux perturbations que fait peser la grippe A sur le bon fonctionnement de notre pays, il existe une solution toute faite qui, tel un passe-partout, aurait raison de tous les obstacles.
Si tel n'est, hélas, pas le cas, nous sommes cependant en mesure, grâce aux connaissances acquises par notre observation attentive de la pandémie, d'apporter une réponse adaptée à chaque nouveau problème.
Une réponse adaptée, qu'est-ce que c'est ?
C'est une réponse qui est à la fois :

  • - proportionnée à l'importance de la situation, sans excès de prudence, ni excès de banalisation;
  • - mais aussi équilibrée au regard des problèmes que pose une crise sanitaire de cette nature, avec une prise en compte de toutes ses dimensions, qu'elles soient médicales, sociales et économiques.
  1. (3) Pour mettre en œuvre cette stratégie, nous avons mis au point une méthode pragmatique en cinq axes.

Premier axe : mobiliser tous les acteurs
La présence à mes côtés, ce matin, de la ministre de la santé et des sports, Roselyne BACHELOT-NARQUIN, de celui du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, Xavier DARCOS, et de celui de l'éducation nationale, Luc CHATEL, ainsi que des secrétaires d'État chargées de la famille et de la solidarité, Nadine MORANO, de l'outre-mer, Marie-Luce PENCHARD et des aînés, Nora BERRA constitue, à cet égard, un excellent indicateur du très fort degré d'implication des pouvoirs publics face au défi posé par la grippe A.
Cet investissement politique se double, chaque semaine, de réunions hebdomadaires au plus haut niveau administratif animées par nos directeurs de cabinet ou les secrétaires généraux de nos ministères respectifs. Au total, depuis son activation par le Premier ministre le 30 avril dernier, le Centre interministériel de crise, qui élabore les décisions majeures, s'est réuni à 24 reprises. Depuis le mois de juillet, il s'est réuni chaque semaine sans la moindre interruption, même au mois d'août.

Deuxième axe : veiller en permanence à la cohérence des dispositifs.

L'implication de chacun est indispensable, mais elle n'est pas suffisante pour apporter une réponse cohérente.
En effet, la réussite de tout travail collectif passe obligatoirement par une coordination étroite et un dialogue soutenu.

Cela vaut au sein de l'État : c'est d'ailleurs tout l'objet du CIC qui permet, dans chaque dossier, de partager l'information, de confronter les points de vue et, ainsi, de dégager des priorités et des objectifs ciblés et unanimement partagés.
Mais cela vaut aussi à un tout autre niveau, et tout particulièrement à l'échelle du continent. C'est pourquoi nous accordons la plus grande vigilance à la cohérence des réponses apportées par les différents pays de l'Union européenne.

Troisième axe : travailler en partenariat

Cette logique de cohérence nous porte, en effet, naturellement vers une démarche de partenariat.
Partenariat avec les élus locaux : j'ai, par exemple, adressé, durant l'été, un courrier sur les plans de continuité d'activité à l'ensemble des exécutifs territoriaux, que sont les maires, les présidents de conseil général et les présidents de conseil régional. J'ajoute que nous avons préparé une circulaire sur le rôle des collectivités territoriales en situation de pandémie et que nous allons la mettre au point avec les associations d'élus.
Et partenariat aussi avec les différents secteurs économiques, les entreprises et les partenaires sociaux, ainsi que vous l'expliquera Xavier DARCOS.

Quatrième axe : se préparer au fur et à mesure

A défaut d'avoir une réponse passe-partout, nous pouvons compter sur une méthode tout-terrain qui consiste à préparer, au fur et à mesure, les réponses aux différentes situations que nous sommes susceptibles de rencontrer, afin d'en disposer en temps utiles.
Très concrètement, je pense, par exemple, à la question des grands rassemblements de personnes, comme les événements sportifs ou les spectacles. Si cette question ne se pose, à l'évidence, pas dans l'immédiat, elle pourrait tout à fait se retrouver sur le devant de la scène dans les mois à venir. C'est pourquoi j'ai chargé le secrétaire général du ministère de l'intérieur d'engager une réflexion à ce sujet, avec les ministères de la culture et des sports, mais aussi avec les divers représentants des secteurs concernés.

Cinquième et dernier axe : informer et sensibiliser sans affoler

A la lumière de l'évolution de la situation dans les autres pays et aussi dans nos propres territoires, il apparaît de plus en plus clairement que ne pas sensibiliser, ne pas se préparer aux conditions fortement prévisibles ou, encore, considérer que le Gouvernement en fait trop, serait tout simplement irresponsable.
Je le dis avec force : cette légèreté est totalement étrangère à notre conception de l'action politique. Face à la grippe A, nous n'avons qu'une ligne de conduite : protéger la santé de nos concitoyens et limiter l'impact socio-économique de la pandémie.

III. Après la forte mobilisation de l'été, des échéances majeures sont devant nous.

- Je voudrais, tout d'abord, saluer l'important travail qui a été réalisé au cœur de l'été par les services de l'État.
C'est ainsi que j'ai pu, après avoir réuni par deux fois les préfets au ministère de l'intérieur – le 1er et 15 juillet derniers –, leur donner des instructions précises concernant :

  • -    le basculement de la prise en charge des malades par le secteur médical libéral ;
  • -    les modalités de gestion des cas grippaux dans les centres de vacances accueillant des mineurs et sur les lieux de vacances collectifs ;
  • -    la doctrine relative à la fermeture des établissements d'enseignement avec, tout récemment, la circulaire du 19 août.

- Si ce dispositif va, bien entendu, être complété comme je l'ai indiqué précédemment, dans l'immédiat, nous devons nous concentrer sur 4 sujets d'actualité : c'est la situation outre-mer, les plans de continuité d'activité, la campagne de vaccination et, enfin, la rentrée scolaire.
Sur ces 4 échéances majeures parce qu'imminentes, je laisse, à présent, aux ministres concernés le soin de vous dire quelques mots.