27.04.2010 - Ouverture de la réunion des chefs des Groupes d'Intervention Régionaux (GIR)

27 avril 2010

Intervention de M. Brice HORTEFEUX, Ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Hôtel de Beauvau


Seul le prononcé fait foi

Monsieur le préfet de police,
Monsieur le directeur général de la police nationale,
Monsieur le directeur général de la gendarmerie nationale,
Messieurs les directeurs centraux,
Mesdames et Messieurs,

Si j'ai tenu à ouvrir, ce matin, cette réunion, c'est pour mettre en valeur l'excellence du travail accompli par vos groupes.

La circulaire de création des GIR du 22 mai 2002 établissait clairement votre mission : « lutter contre l'économie souterraine et les différentes formes de délinquance organisée qui l'accompagnent, sources de destruction sociale et d'insécurité dans les quartiers ».

Par votre détermination, par vos initiatives et vos efforts, vous vous êtes hissés à la hauteur de cet objectif ambitieux. Les faits sont là : avec une moyenne de 80 opérations par mois en 2009, soit quatre fois plus qu'en 2002, vos groupes sont devenus le fer de lance de notre lutte contre les trafics.

I. Par leur format innovant et adapté à une forme de délinquance sophistiquée, les GIR que vous dirigez obtiennent, depuis 2002, d'impressionnants résultats.

(1) A délinquance complexe, réponse transversale : c'est dans cet état d'esprit que nous avons créé les GIR.

La création des GIR, en 2002, partait, en effet, d'un constat : la délinquance est de plus en plus complexe. Nos forces de sécurité devaient donc s'y adapter.

Face à une telle réalité, beaucoup auraient baissé les bras. Nicolas SARKOZY avait décidé, bien au contraire, de faire de cette situation complexe un atout opérationnel: en effet, qui dit phénomène complexe dit aussi multiplication des angles d'attaque pour le combattre. Il nous fallait donc des équipes capables de se battre sur tous les fronts en même temps. C'est ce que l'on peut appeler la coproduction de sécurité.

Concrètement, il s'agissait de faire travailler ensemble, sur des objectifs communs, policiers, gendarmes, douaniers, agents du fisc et, ponctuellement, services départementaux de l'emploi, de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Au gré de la pratique, nous avons progressivement perfectionné les GIR :

o le dispositif a fait l'objet d'une meilleure coordination, grâce à la mise en place, le 1er septembre 2008, d'une coordination nationale des GIR auprès de la direction centrale de la police judiciaire, sur la base d'une alternance du commandement entre police et gendarmerie tous les deux ans. Ce dispositif a non seulement permis d'améliorer la gestion des ressources humaines et des équipements des GIR, mais aussi de faciliter l'accompagnement de leurs activités opérationnelles grâce à la création d'une base de données commune. Le premier coordonnateur national, le commissaire Lucas PHILIPPE, achèvera son mandat le 1er août prochain. Je profite de l'occasion qui m'est donné ici pour le remercier de l'engagement total dont il a fait preuve pendant ces deux ans et pour lui souhaiter bonne chance dans ses futures fonctions ;

  •  la couverture territoriale a été améliorée, puisque, de 29 GIR en 2002, nous sommes passés à 35 GIR couvrant la métropole aussi bien que l'outre-mer. Au sein même des ressorts de chacun des GIR, la couverture territoriale est assurée au mieux puisque, là où s'en fait sentir le besoin, des antennes ont été créées ;
  •  enfin, les administrations partenaires ont été mieux impliquées. C'est dans cette optique que j'ai signé, le 23 septembre dernier, un protocole de coopération avec le ministre du budget afin d'affecter 50 contrôleurs des services fiscaux dans les services de police et de gendarmerie pour favoriser les échanges d'information dans 43 quartiers sensibles. Quoi de plus insupportable, pour les honnêtes gens qui vivent dans les quartiers sensibles, que ces trafiquants qui se pavanent dans des voitures de luxe ou s'offrent des vacances de milliardaires sans jamais être redevable du moindre euro au titre des impôts ? C'est à ce scandale que ce dispositif veut mettre fin, en donnant aux GIR la possibilité de frapper les délinquants au portefeuille.

(2) Enrichie des leçons du terrain, cette approche transversale et interministérielle innovante a porté ses fruits.

Je voudrais saluer, en effet, ici l'important travail effectué par vos GIR.

A lui seul, le ratio écrous/nombre de gardes à vue résume la force de leur action: il est, en 2009, de 21% pour les GIR alors qu'il est de 10,33% pour l'ensemble de la police et de la gendarmerie.

De plus, les GIR ont parfaitement pris en compte les deux priorités d'action que je leur avais fixées il y a quelques mois :

  •  un clair recentrage de leur action sur la lutte contre les trafics de stupéfiants, d'abord, puisque cette lutte représente, au premier trimestre 2010, 48% de leur activité. Et les résultats sont là : en 2009, les saisies de drogue ont augmenté de +17% pour l'héroïne et de +4,4% pour la résine de cannabis. Depuis 2002, ce ne sont pas moins de 417 kilos d'héroïne, de 225 kilos de cocaïne, de 13,8 tonnes de résine de cannabis et de 150 000 sachets d'ecstasy qui ont été saisis par les GIR !

Il y a seulement quelques jours, le 20 avril, le GIR Alsace a participé au démantèlement d'un important réseau et à la saisie de 1,630 kilo d'héroïne, de 360 grammes de cocaïne, de 2 kilos de résine de cannabis, de 2,7 kilos d'herbes de cannabis, 6512 cachets d'ecstasy, de 4160 euros en numéraire, de deux comptes présentant des avoirs 108 000 et 75 000 euros et d'un Beretta 9mm. Et ce n'est là qu'un succès parmi tous ceux que l'on trouve, chaque semaine, dans le bulletin des « belles affaires » édité par la coordination nationale des GIR ;

  •  une systématisation de l'approche patrimoniale dans les enquêtes, ensuite, qui a permis de saisir 41,7 millions d'euros d'avoirs criminels en 2009, soit une augmentation de +60% par rapport à 2008. Le moins que l'on puisse dire, c'est que, lorsque l'on vous fixe une priorité, vous vous y tenez ! La tendance, d'ailleurs, semble se confirmer en 2010 puisque, pour le premier trimestre, 2,2 millions d'euros en numéraire, 3,2 millions d'euros bloqués sur compte, 2,9 millions d'euros de valeurs mobilières et 178 véhicules ont déjà été saisis. Je me réjouis, par ailleurs, tout particulièrement d'apprendre que la technique d'enquête patrimoniale ajoutée aux moyens classiques permet désormais aux services d'atteindre la tête des réseaux criminels.

Mais s'ils se sont efficacement concentrés sur les priorités que je leur avais fixées, les GIR n'ont pas pour autant abandonné les autres volets de leur action.

Si la plupart des interventions des GIR restent essentiellement de caractère pénal, un effort manifeste a été fait pour augmenter l'action répressive en matière douanière et administrative.

Enfin, les GIR participent toujours efficacement à la lutte contre les infractions économiques et financières, parmi lesquelles sont recensées les fraudes aux finances publiques. Pour le premier trimestre 2010, les GIR ont ainsi dévoilé 116 faits d'escroqueries, 14 faits d'abus de biens sociaux, 51 procédures de travail dissimulé et 17 autres infractions économiques.

II. Fort de ces résultats, nous devons aller, aujourd'hui, encore plus loin. Nous devons poursuivre le recentrage de vos activités, améliorer votre gouvernance, mais aussi davantage valoriser vos actions.

(1) Vous devez, tout d'abord, poursuivre le triple recentrage proposé dans le plan de relance des GIR de janvier 2008.

Poursuivre le recentrage du champ d'intervention, d'abord. La lutte contre les narcotrafics est et reste l'une de mes priorités. Grâce aux GIR que vous dirigez et à la mutualisation des compétences qu'ils permettent, nous sommes désormais en mesure de poursuivre les trafiquants dans la rue, dans leurs repaires et jusque sur leurs comptes en banque.

Poursuivre le recentrage du territoire d'intervention, ensuite, en focalisant davantage votre action sur les quartiers sensibles. L'enjeu est primordial : il ne s'agit pas seulement de réaffirmer que la loi de la République s'applique partout et pour tous. Il s'agit aussi de soutenir les efforts des citoyens honnêtes et travailleurs en leur montrant que nous n'abandonnons aucun territoire et que le travail paie plus que le crime.

Poursuivre le recentrage de la technique d'enquête, enfin, en menant des expertises patrimoniales systématiques afin d'identifier et de saisir les produits, revenus et capitaux du crime. C'est l'une des grandes plus-values offertes par la mise en place des GIR : je vous demande de l'exploiter au maximum.

(2) J'ai signé, le 2 mars dernier, une circulaire interministérielle qui dresse la feuille de route des améliorations à apporter au dispositif des GIR en 2010. A vous de la mettre en œuvre.

J'ai demandé, tout d'abord, un renforcement de la gouvernance et ce, à tous les niveaux.

  •  Au plus haut niveau, je co-présiderai personnellement avec le Garde des Sceaux un comité de pilotage national. Représentant toutes les composantes de l'action partenariale menée par les GIR, ce comité aura pour fonction de fixer les orientations générales de l'activité des GIR, de veiller à leur bonne mise en œuvre et d'assurer le suivi de l'avancée des projets stratégiques ;
  •  au niveau national, la coordination nationale des GIR continuera de jouer un rôle majeur tant dans la définition que dans l'évaluation et le suivi de leur activité ou que dans la promotion de leurs excellents résultats. J'insiste, d'ailleurs, sur ce dernier point : lorsque l'on obtient des résultats dans la lutte contre la délinquance, il est essentiel de le faire savoir. C'est aussi une manière de créer un sentiment de sécurité chez nos concitoyens ;
  •  au niveau territorial, les comités de pilotage sont confirmés dans leur format « régional » ce qui correspond, d'ailleurs, à la pratique en vigueur. Pour autant, j'ai souhaité que ce niveau de pilotage n'ait pas pour effet d'écarter les préfets de département et les procureurs de la République qui devront être associés au processus d'animation des GIR par les préfets de région et les procureurs généraux ;
  •  enfin, au niveau le plus local, le rattachement des GIR à un service de police ou à une unité de gendarmerie est devenu hiérarchique, et non plus simplement administratif.

Enfin, il faut rappeler aux services territoriaux la nécessité de se co-saisir de façon beaucoup plus systématique avec les GIR.

Vous n'avez pas, je le sais, vocation à intervenir seul. Vous n'apportez vos compétences et votre savoir-faire qu'aux services qui ont le réflexe de vous saisir. Cette coopération opérationnelle avec les services d'enquête, j'en ai le sentiment, se renforce et s'améliore.

Mais il faut encore accroître ce réflexe. Pour cela, je souhaite que la communication autour de l'action des GIR soit renforcée : les services d'enquête penseront davantage à vous saisir s'ils ont connaissance de vos succès quotidiens. Votre action doit être valorisée. Pour cela, aussi, j'ai voulu donner une véritable identité aux GIR dont ils puissent se prévaloir auprès de leurs partenaires. C'est dans cette optique qu'a été créé, cette année, un stage d'enquêteur spécialisé GIR.

X

Vous le voyez, nous avançons avec une méthode simple : tirer, chaque fois, les enseignements du terrain pour adapter nos dispositifs et renforcer leur efficacité opérationnelle.

Grâce aux GIR et grâce aux améliorations dont ils feront preuve dans les prochains mois, nous luttons mieux contre la délinquance organisée et nous protégeons davantage les honnêtes gens.

La sécurité partout et pour tous : tel est notre objectif, telle est votre mission.