09.06.2010 - Point presse sur l'affaire de Nantes

9 juin 2010

Déclaration de Brice HORTEFEUX, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales


-> Lorsqu'à la fin du mois d'avril j'ai été informé du comportement de Liès HEBBADJ, j'ai immédiatement demandé au préfet de la Loire-Atlantique de saisir l'autorité judiciaire pour que la vérité soit connue.
   
-> Une enquête approfondie a été menée par la police judiciaire. Je tiens à en remercier le directeur général de la police nationale, Frédéric PECHENARD, et le directeur central de la police judiciaire, Christian LOTHION, ainsi que les policiers qui ont concouru à cette enquête.
Liès HEBBADJ est désormais livré à la justice.
Il est mis en examen pour différents délits : travail dissimulé, aide au séjour irrégulier, fraudes aux prestations sociales, c'est-à-dire fraude à l'obtention indue de l'allocation de parent isolé et revenu de solidarité active, fausse déclaration à la caisse d'allocations familiales, escroquerie par l'emploi de manœuvres frauduleuses pour tromper la caisse d'allocations familiales et se faire remettre indument des prestations.
Il est désormais placé sous contrôle judiciaire, avec interdiction de quitter le territoire français.
Les peines encourues sont lourdes – de l'emprisonnement et de fortes amendes. La justice décidera.
-> Il ne s'agit pas, pour moi, d'un simple fait divers mais d'un fait de société. Au-delà de cette situation particulière, il y a aujourd'hui des dérives, que l'on ne peut accepter et en face desquelles l'on ne doit pas fermer les yeux.
Je les bloquerai,
je les bloquerai sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, en liaison avec le Garde des Sceaux, avec le Parlement.
-> Concrètement, nous n'avons pas besoin de nouvelle loi. Il faut d'abord appliquer celles qui existent. Et il faut les adapter à la réalité de notre temps.
Il faut faire évoluer notre droit pour pouvoir lutter plus fermement contre certains comportements – « polygamie de fait », perception injustifiée de prestations sociales – qui ne sont, aujourd'hui, pas suffisamment réprimées.
La définition que le code pénal fait de la polygamie n'est pas adaptée à la réalité d'aujourd'hui :

  • •  la polygamie, c'est le fait de se marier civilement alors qu'on est déjà marié civilement (1)  ;
  • •  c'est une définition qui a pour conséquence que personne ou presque n'est juridiquement polygame en France : le droit ne tient pas compte des mariages religieux ni des situations de communauté de vie et d'intérêts qui constituent, en réalité, une « polygamie de fait », organisée pour qu'un homme vive des prestations sociales perçues par ses femmes ;
  • •  cette « polygamie de fait » est pourtant une réalité : 16 à 20 000 familles, soit jusqu'à 180 000 personnes (enfants compris), vivraient, dans les faits, en situation de polygamie dans notre pays (d'après un rapport de Commission nationale consultative des droits de l'homme).

Je veux que, demain, nous puissions protéger les femmes et les enfants qui sont sous l'emprise d'individus sans scrupule imposant un système organisé de contrôle et d'exploitation.
Je veux que, demain, nous puissions empêcher tout à la fois la polygamie et la perception injustifiée de prestations sociales qui y sont souvent liées.
Concrètement, pour en finir avec ces dérives, je proposerai au Président de la République et au Premier ministre des mesures d'adaptation du droit.
->  Faut-il aller plus loin en adaptant aussi le droit de la nationalité ? Ce n'est pas une question taboue ! Lorsqu'un étranger acquiert la nationalité grâce à son mariage avec une Française et que, dans les années qui suivent, il vit dans une situation de polygamie de fait en abusant du système d'aides sociales, est-il normal qu'il conserve la nationalité française ?
Ma réponse est non !

L'acquisition de la nationalité, c'est un contrat. Et comme tout contrat, il peut être rompu. Rejoindre notre communauté nationale, ce ne sont pas seulement des droits, c'est aussi le devoir de respecter les règles fondamentales du pays d'accueil.
->  Ce sont des questions difficiles. Mais je n'ai pas peur de les traiter.
Je n'accepte pas que des fraudeurs narguent tous ceux qui travaillent, tous ceux qui paient les cotisations sociales, tous ceux qui veulent s'intégrer.
Ceux qui travaillent ou recherchent du travail, ceux qui paient les cotisations sociales, ceux qui veulent s'intégrer doivent être défendus et respectés.
Les fraudeurs, eux, doivent être punis.
Ils doivent bien le savoir : la puissance publique finit toujours par l'emporter.

(1)D'après le code pénal, "le fait, pour une personne engagée dans les liens du mariage, d'en contracter un autre avant la dissolution du précédent, est puni d'un an d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende".