08.06.2010 - Conclusion de la réunion des directeurs des SDIS

8 juin 2010

Intervention de M. Brice HORTEFEUX, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales - Hôtel de Beauvau


- Seul le prononcé fait foi -

Monsieur le général commandant la brigade de sapeurs-pompiers de Paris,
Monsieur l'amiral commandant le bataillon de marins-pompiers de Marseille,
Monsieur le colonel, président de l'association nationale des directeurs départementaux et directeurs départementaux adjoints des services d'incendie et de secours,
Monsieur le colonel, président de la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France,
Messieurs les directeurs départementaux,

Vous vous êtes réunis hier, à Asnières, dans le cadre de vos rencontres biannuelles avec la direction de la sécurité civile. Je tiens à remercier chacun d'entre vous d'y avoir participé.

En 2004, Nicolas SARKOZY, alors ministre de l'intérieur, vous avait reçu en ces lieux. Depuis, beaucoup de chemin a été parcouru mais, je vous le dis, ma détermination à poursuivre la modernisation de notre sécurité civile est entière.

En concluant ces travaux, je voudrais faire le point avec vous sur les défis déjà relevés et sur les réformes à entreprendre.

 

I. Vous avez, ces dernières années, relevé avec brio le défi de la départementalisation.

(1) En effet, la mutation institutionnelle voulue par le législateur en 1996 et en 2004 est désormais largement achevée.

Les services départementaux d'incendie et de secours que vous dirigez sont aujourd'hui si bien ancrés dans notre organisation administrative et opérationnelle que l'on en oublie les débats parfois difficiles qu'avait suscités, à l'époque, l'adoption de la loi de départementalisation. C'est un fait : grâce à votre action, cette mutation est désormais entrée dans les mœurs.

Bien sûr, vous continuez aujourd'hui à adapter vos méthodes et à rénover vos casernements et vos matériels : c'est la condition sine qua non pour que vous restiez toujours à la pointe en matière de secours et d'aide à nos concitoyens en détresse et qui fait de l'organisation des secours en France un modèle reconnu en Europe.

Vous avez effectué, en dix ans, un travail remarquable tant dans la mise à niveau des équipements que dans le renouvellement de votre analyse et dans la modernisation de la couverture des risques de sécurité civile de notre pays.

(2) Ce défi de la départementalisation, vous avez su le relever dans le strict respect des valeurs fondamentales du service public.

  • Exerçant vos missions en tout lieu et en toute circonstance, vous donnez à la notion de continuité du service public une dimension peu commune.

Je sais que, comme vos camarades policiers et gendarmes, vous vous trouvez exposés à la violence dans un certain nombre de quartiers sensibles.

Je sais aussi que votre profession est, par essence, incompatible avec l'exercice d'un droit de retrait.

Déjà, je vous le dis : si tous nos concitoyens doivent pouvoir compter sur votre secours rapide, il est évident que vous devez pouvoir compter en retour sur le respect et l'estime de toute la nation. Je vous engage donc vivement à porter plainte chaque fois que nécessaire. Vous pouvez, dans ce domaine, compter sur mon soutien le plus ferme.

  • Avec 7 381 centres de secours et d'incendie répartis dans toute la France, vous assurez concrètement l'égalité de tous les Français devant le service public de la sécurité civile.

Ce maillage territorial extrêmement dense, garant de l'efficacité française en matière de secours d'urgence, vous le préservez et l'adaptez aux réalités du terrain par le biais des schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques que vous soumettez aux préfets et aux élus des conseils d'administration.

  • Dans un contexte budgétaire contraint, le principe d'adaptabilité vous commande plus que jamais de toujours rechercher l'efficacité maximale.

Déjà, je constate que vous avez adopté, en matière de budget, la bonne dynamique : en effet, après une période de croissance des dépenses, les budgets des SDIS sont stabilisés depuis 3 ans.

Plus que jamais, il faut continuer dans cette voix de la modération de la dépense publique. Vous avez, en la matière, une vraie responsabilité, celle d'accompagner les élus locaux dans leurs efforts de rationalisation, de faire preuve d'imagination pour leur proposer des adaptations qui ne se fassent pas au détriment de la sécurité de nos concitoyens.

Cette attitude responsable, vous devez l'avoir par rapport à toutes les collectivités territoriales. Face à la modération des contributions départementales, on pourrait en effet être tenté de déplafonner les contingents communaux d'incendie et de secours. Un arbitrage du Premier Ministre a déjà clairement répondu à cette interrogation. Je compte sur vous pour ne pas céder à cette attitude qui serait irresponsable.

N'ayez crainte, je ne vous demande pas de maintenir l'excellence de vos résultats en vous privant simultanément des moyens de mener à bien vos missions. Je vous le dis : parler de responsabilité budgétaire, ce n'est pas demander des miracles mais faire preuve de raison. Je pense, par exemple, aux économies qu'il est possible de réaliser en explorant les pistes ouvertes en matière de mutualisation des fonctions support avec les services des conseils généraux ou d'autres services publics comme les hôpitaux. C'est la voie dans laquelle nous nous sommes résolument engagés au ministère de l'intérieur entre la police et la gendarmerie nationales.

(3) L'heure, maintenant, est à la stabilité du dispositif organisationnel pour laisser aux changements que vous avez conduit le temps de porter leurs fruits.

  • La loi de modernisation de la sécurité civile a consolidé l'équilibre entre l'Etat et les collectivités locales.

En décembre dernier, j'ai rappelé à l'Assemblée Nationale que le principe de subsidiarité demeurait notre référence commune.

Avec les SDIS, l'État et les conseils généraux avancent main dans la main pour assurer une prise en charge optimale des Français se retrouvant en situation de détresse. Grâce à ce partenariat, nous sommes capables aussi bien d'assurer les 11 000 interventions quotidiennes des sapeurs-pompiers que de mobiliser immédiatement 6 000 hommes en renfort en cas de catastrophes naturelles. Gage de notre efficacité, ce partenariat ne saurait être remis en cause. Je vous le dis très clairement : il ne saurait être question de confier les SDIS exclusivement à l'État ou aux conseils généraux.

Enfin, vos services sortent tout juste de la réforme de la départementalisation. C'est pourquoi je n'ai pas voulu que l'organisation ou le format des SDIS soient concernés par la réforme des collectivités territoriales que je suis en train de défendre devant l'Assemblée nationale.

II. Nous avons, aujourd'hui, un nouveau défi à relever, celui du volontariat.

(1) J'aurai l'occasion de le dire à vos hommes après-demain à l'occasion du traditionnel rassemblement national des drapeaux des sapeurs-pompiers de France autour de l'arc de triomphe : l'excellence de votre travail n'est pas le fruit du hasard.

Elle est le résultat d'une organisation originale dans laquelle les sapeurs-pompiers sont à la fois une composante majeure de nos forces de sécurité intérieure et les acteurs des secours de proximité. Au cœur de ce dispositif, les 200 000 pompiers volontaires de France constituent la colonne vertébrale de notre modèle de sécurité civile. A ce titre, je me réjouis de ce que les jeunes sapeurs-pompiers n'aient jamais été aussi nombreux. Avec 28 000 jeunes volontaires, la relève semble bien assurée.

Pompiers volontaires ou jeunes sapeurs-pompiers, ils se mobilisent pour nous. Il est normal que nous nous mobilisions pour eux.

Je me félicite, bien sûr, des mesures de soutien décidées, dans un contexte budgétaire pourtant contraint, par les élus locaux et les présidents des conseils d'administration des SDIS. Soutenir le volontariat dans chaque commune, c'est investir pour l'avenir et renforcer notre capacité de réaction.

Mais j'ai voulu aller plus loin et doter notre pays des moyens de soutenir le volontariat dans la durée. C'est pourquoi j'ai établi un groupe de travail pour concrétiser les conclusions de la commission ambition volontariat. Au vu des conclusions qu'il m'a présenté, il y a quelques jours, je peux vous assurer que ce groupe a parfaitement démontré que l'on pouvait parvenir à de bien meilleures solutions par la recherche de l'efficacité et de la simplification plutôt que par l'empilement continuel de nouvelles procédures et de moyens supplémentaires.

(2) Permettez-moi de m'attarder un instant sur les trois mesures phares que je veux mettre en œuvre.

  • En premier lieu, il est essentiel d'offrir au volontariat un cadre plus attractif et plus protecteur.

Il faut faire du volontariat une vraie chance d'intégration dans la vie active. C'est pourquoi j'ai donné des instructions très claires à la direction de la sécurité civile mais aussi à la direction des libertés publiques et des affaires juridiques pour qu'elles appuient autant que possible la démarche du député de la Lozère, Pierre MOREL-à-l'HUISSIER, auteur d'une proposition de loi « visant à favoriser le développement du volontariat dans le corps des sapeurs pompiers ».

  • Deuxième mesure, je veux renforcer la compatibilité du volontariat avec une activité professionnelle.

Pour cela, je souhaite que l'on passe, au niveau de la formation, d'une logique de contenus à une logique de compétences. Par ailleurs, j'ai demandé que soit conduite une étude sur le volontariat par rapport au droit communautaire, premier pas vers la promotion, au niveau européen, d'un statut de citoyen européen engagé.

Enfin, je souhaite que nous renforcions la reconnaissance dont bénéficient les volontaires non seulement auprès nos concitoyens, mais aussi, plus spécifiquement, auprès de nos partenaires.

Dans cette optique, nous allons mettre en place des campagnes d'information institutionnelles.

Par ailleurs, nous travaillons à l'amélioration de la protection sociale des volontaires.

Simples et peu coûteuses, ces mesures doivent être rapidement mises en œuvre sous votre supervision.

Je vous le dis : vous êtes les responsables de l'engagement citoyen et l'évaluation comme la valorisation de votre parcours professionnel dépendra de votre mobilisation sur le sujet. Les choses sont claires : la promotion du volontariat doit être une priorité pour vous et vos équipes.

III. Je sais que je peux compter sur vous, à la tête de vos services, pour répondre aux défis de la sécurité civile de demain. Sachez-le, vous pouvez en retour compter sur mon entier soutien, en particulier dans la modernisation des emplois de direction.

(1) Quelle est la situation ?

Le livre blanc sur la défense a réaffirmé le rôle essentiel du ministère de l'intérieur dans la politique de sécurité nationale et dans la protection de la population face aux crises de toute nature. C'est pourquoi la nouvelle stratégie de sécurité nationale a redéfini la règle de répartition des postes de chef d'état-major interministériel de zone.

Le constat est simple : les menaces nouvelles identifiées par le livre blanc ne concernent plus exclusivement le domaine de compétence du ministère de la défense. Les postes à responsabilité doivent donc être attribués à des personnels venant de tous les ministères concernés par la réponse à ces menaces.
Ainsi, trois postes de chef d'état major interministériel de zone seront réservés à des officiers supérieurs de sapeurs-pompiers et trois seront ouverts aux autres corps du Ministère. De plus, lorsque le chef d'état-major de zone ne sera pas un officier supérieur de sapeur-pompier, son adjoint le sera systématiquement.

En ce qui concerne le conseiller du préfet de zone pour la sécurité civile, il exercera d'une part les missions qui lui seront attribuées par le préfet de zone en fonction de la situation locale et, d'autre part, trois compétences primordiales :

o garantir l'adaptation de la doctrine de sécurité civile à son secteur, en particulier en ce qui concerne le pilotage des grands projets (développement du volontariat, rénovation du système d'alerte et d'information des populations, déploiement des moyens NRBC-E, ...)
o représenter l'inspection de la défense et de la sécurité civile au niveau zonal,
o assurer, auprès des SDIS, une fonction d'expertise et de diagnostic et faciliter ainsi toutes initiatives de mutualisation en adaptant les besoins aux moyens.

(2) Il fallait adapter vos postes à ce cadre rénové. C'est pourquoi nous avons lancé une réforme de modernisation des emplois de direction que vous occupez.

  • Pour cela, l'État a posé quatre principes directeurs :

o l'Etat doit être garant de la qualité de ses personnels et doit donc pouvoir mettre fin à la fonction d'un directeur départemental des services d'incendie et de secours en cas de besoin ;
o le président du conseil d'administration du SDIS, pareillement, doit pouvoir, dans certains cas, mettre fin aux fonctions de son DDSIS ;
o le directeur départemental des services d'incendie et de secours est à la fois un directeur d'établissement public et un chef de corps ;
o les postes à hautes responsabilités doivent être rendus plus attractifs.

  • Mais pour mener à bien une réforme de cette ampleur, l'État ne peut se passer du soutien de son principal partenaire en matière de sécurité civile, à savoir les collectivités territoriales. C'est pourquoi nous avons fait un certain nombre de propositions aux élus.

Concernant, la rénovation de votre parcours professionnel, d'abord, nous avons proposé :

o la construction d'un parcours qualifiant, marqué notamment par le passage obligé dans certains postes de commandement, l'instauration d'une mobilité obligatoire et la mise en place d'un brevet de directeur ;
o l'adéquation du nombre des officiers supérieurs aux besoins opérationnels ;
o le rétablissement du concours externe de capitaine ;
o la refonte du dispositif d'évaluation des directeurs et directeurs adjoints, intégrant notamment les aspects opérationnels et le management des sapeurs-pompiers volontaires.

Concernant la modernisation de la gestion, ensuite, nous souhaitons mettre en place, en partenariat avec les collectivités territoriales :

o la fonctionnalisation des emplois de directeur et directeur adjoint avec application, lorsque ce sera possible, des dispositions de droit commun de la fonction publique territoriale ;
o l'amélioration de la lisibilité du classement des SDIS en passant de cinq à trois catégories, alignées sur le classement des départements ;
o la valorisation des emplois à l'Etat dans le cadre du parcours qualifiant et de l'obligation de mobilité ;
o l'ouverture de postes au sein d'autres administrations dans lesquelles les officiers de sapeurs-pompiers pourront apporter leur expertise. C'est le sens, par exemple, de la création d'un poste de conseiller du préfet de zone que j'évoquais tout à l'heure ;
o la possibilité, pour tout directeur départemental, d'accéder au grade de colonel, permettant la constitution d'un déroulement de carrière qui pourra aller, le cas échéant, au-delà de ce grade.

(3) Enfin, avant de conclure, j'aimerais régler une question qui a mobilisé nombre d'énergie ces dernières semaines, je veux parler du secours en montagne.

J''ai demandé au directeur de la sécurité civile d'organiser la semaine prochaine, en étroite liaison avec le directeur général de la gendarmerie nationale et avec le directeur général de la police nationale, une réunion des acteurs concernés, sous le pilotage d'un préfet, membre du conseil supérieur de l'administration territoriale de l'Etat. Cette réunion devra permettre de parvenir à une solution sur le modèle du référentiel en matière de secours à personne, dont tout le monde se félicite.

Il y a, dans le secours en montagne, place pour les compétences et l'expérience de chacun. C'est la coopération des sapeurs-pompiers, des gendarmes et des CRS qui fera l'efficacité de l'action de demain.

X

Vous le voyez, nous partageons des projets ambitieux. Ils sont cohérents avec les ambitions que l'Etat et les élus locaux se fixent pour les services d'incendie et de secours et les officiers supérieurs qui les dirigent.

Un cadre institutionnel consolidé,
Un statut résolument modernisé,
Des orientations clairement affichées par vos autorités de tutelle,
telles sont les trois conditions qui permettront aux Directeurs des Services d'Incendie et de Secours de pleinement s'exprimer comme acteurs de la sécurité intérieure.

Vous allez maintenant retourner dans vos départements respectifs. Je sais que je peux compter sur vous pour continuer de relever, sur le terrain, le défi de la modernisation de notre dispositif de sécurité civile.