01.12.2009 - Lancement de la force d'intervention de la police nationale

1 décembre 2009

Intervention de M. Brice HORTEFEUX, Ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, à l'occasion du lancement de la force d'intervention de la police nationale, le 1er décembre 2009 à Bièvres, Domaine du Bel Air


Monsieur le préfet de police,
Messieurs les directeurs généraux,
Madame et Messieurs les préfets,
Messieurs les directeurs,
Messieurs les élus,
Monsieur le chef du RAID,
Mesdames, Messieurs les représentants des forces d’intervention étrangères et partenaires,
Mesdames, Messieurs,
Je suis particulièrement heureux de me trouver parmi vous, aujourd’hui, dans ce cadre splendide du domaine de Bel-Air, aux abords de ce château qui, depuis près de trois siècles, abrite des hommes et femmes de mission. En effet, après avoir hébergé le séminaire des missions étrangères, il accueille aujourd’hui des hommes et des femmes aux missions singulières, je dirais même exceptionnelles, puisqu’il est, depuis 1985, le quartier général du RAID.
Ce qui en fait la réputation du RAID comme de nos autres unités d’élite, en France comme à l’international, c’est leur capacité à parer à toute éventualité, à affronter toute situation imprévue, à gérer, à tout instant, des crises complexes susceptibles de porter gravement atteinte à l’ordre public.
Ce dispositif d’anticipation et de réponses face aux risques et aux menaces, nous le renforçons, ce matin, en officialisant la création de la Force d’intervention de la police nationale.

I. Quelle est la situation de notre pays en matière de sécurité ? Même si les choses peuvent sembler calmes sur le territoire national, nous ne sommes clairement pas à l’abri d’un événement majeur et, notamment, d’un attentat terroriste.

-> Si en apparence, aujourd’hui, la situation semble relativement calme, à quoi le devons-nous ?
Ce qui nous préserve, actuellement, c’est la qualité de notre dispositif qui intègre à la fois la prévention, le renseignement, la répression, la coordination entre les services et la coopération entre les pays.
Si nous pouvons légitimement en être fiers, nous devons cependant toujours chercher à améliorer notre capacité d’intervention dans toutes ses dimensions : humaines, techniques ou encore organisationnelles. C’est cela une police moderne, toujours en recherche de ce qui permettra d’améliorer son efficacité et sa performance.
Cela exige aussi de tirer les enseignements de ce qui, malheureusement, se produit à l’extérieur. A ce titre, les attaques qui ont ensanglanté Bombay en novembre 2008, par la parfaite synchronisation de commandos visant des objectifs multiples, ont montré l’évolution de la stratégie adoptée par certains groupes terroristes et surtout le besoin qu’il y avait de s’y adapter.
-> En France, tous les signaux attestent d’une menace bien réelle et toujours préoccupante.
Mes propos ne se veulent pas alarmistes, ils sont simplement réalistes. Ces menaces visent non seulement nos intérêts et nos ressortissants à l’étranger mais aussi notre territoire.
Je ne vous ferai pas l’injure de dresser, ici, le détail de ces menaces. Vous êtes de grands professionnels de la sécurité et les connaissez mieux que quiconque pour les prendre au sérieux et agir en conséquence.
S’il devait y avoir encore des sceptiques, je crois que l’interpellation, le 8 octobre dernier, d’un docteur en physique nucléaire et collaborateur du Centre européen pour la recherche nucléaire démontre à quel point nous avons raison d’être prudents et de rester vigilants en prêtant la plus extrême attention à tous ceux qui évoluent dans la mouvance proche d’Al Qaïda.
Il n’y a pas seulement le terrorisme islamique qui constitue une menace sérieuse pour l’ordre public et, surtout, pour la sécurité de nos concitoyens. En me déplaçant à Poitiers, le 12 octobre dernier, j’ai pu voir de près l’extrême violence dont peuvent faire preuve certains militants autonomes, évoluant au sein de la mouvance d’ultra-gauche.

II.    Face à de telles menaces, notre pays peut compter sur des unités spécialisées d’intervention dont la réputation n’est plus à faire.

-> Je veux, d’abord, parler du RAID, qui nous accueille aujourd’hui sur son site.
Connu bien au-delà du seul cercle des policiers, sa notoriété n’est pas usurpée : elle est due au grand professionnalisme de ceux qui, depuis la création de cette unité, il y a 25 ans, ont été les principaux acteurs d’opérations parfois dramatiques, souvent périlleuses et toujours délicates.
Je pense à l’arrestation en 1987 des chefs d’Action directe, à la libération, en 1993, des enfants pris en otage par Human Bomb et dont je garde un souvenir très personnel. Je pense à l’arrestation, en 2003, d’Yvan Colonna, pour l’assassinat du préfet Claude ERIGNAC, le 6 février 1998.
L’acronyme RAID, résume parfaitement l’ensemble des missions confiées à cette unité : recherche, assistance, intervention, dissuasion. Le RAID, aujourd’hui, ce sont 170 hommes et femmes, aguerris, expérimentés, professionnels, prêts à intervenir 24 heures sur 24, partout en France. Leur mission : gérer des événements graves, grâce à  l’utilisation de techniques et de moyens les plus modernes tendant à la neutralisation d’individus dangereux et déterminés.
A cet égard, j’ai eu l’occasion, mercredi dernier, de recevoir certains des membres du RAID place Beauvau, pour les féliciter du remarquable travail qu’ils ont effectué avec leurs collègues de l’office central de lutte contre le crime organisé, des directions interrégionales de la police judiciaire de Strasbourg et de Dijon, et de la direction régionale de la police judiciaire de Versailles, mais aussi de la gendarmerie afin de mettre un terme à la cavale de Jean-Pierre TREIBER. Sa cavale n’aura ainsi duré que deux mois et demi, au lieu des 8 mois que dure en moyenne une évasion. Vous avez, une fois encore, été à la hauteur de votre devise : « Servir sans faillir ».
-> Mais le RAID n’est pas la seule unité spécialisée d’intervention. Les Groupes d’Intervention de la Police Nationale l’ont même précédé, puisque leur création remonte à l’année 1972.
Il s’agissait, à l’époque, de réagir au choc provoqué dans les pays occidentaux par l’assassinat des athlètes israéliens pris en otage par des terroristes, lors des jeux olympiques de Munich. L’intérêt de disposer d’unités de police capables de faire face à des situations de crise d’une exceptionnelle gravité est alors apparu comme une impérieuse nécessité. Il existe, aujourd’hui, 7 GIPN en métropole et 3 outre-mer, pour un effectif total de 200 fonctionnaires.
Tout comme leurs collègues du RAID, les effectifs des GIPN interviennent sur les opérations potentiellement dangereuses qui nécessitent un grand professionnalisme, une très haute technicité et l’utilisation de moyens spécifiques. C’est, notamment, le cas des prises d’otages, des retranchements de malfaiteurs ou des forcenés ou des mutineries de détenus qui constituent la majeure partie des interventions en urgence réalisées par ces unités.
Les GIPN apportent également leur assistance aux services spécialisés de la police nationale pour l’interpellation d’individus dangereux, par exemple. Ils assurent des missions de protection de personnalités et de sécurisation d’itinéraires lors de déplacements officiels et peuvent être chargés de sécuriser des procès à hauts risques ou d’assurer l’escorte de détenus particulièrement dangereux.
-> Je voudrais, également, citer la Brigade anti-commando de la Brigade de recherche et d’intervention, l’une des pièces maîtresses des services de police judiciaire de la préfecture de police.
Tout le monde connaît de réputation cette célèbre « brigade anti-gang », étoffée, quand la situation l’exige, par des effectifs spécialisés venant d’autres directions de la préfecture de police comme l’unité cynophile ou la direction de l’ordre public et de la circulation.
Avec une zone territoriale d’intervention plus limitée, cette unité polyvalente remplit des missions assez analogues à celles confiées au RAID et aux GIPN.
Il s’agit de faire front au grand banditisme ou d’intervenir en situation de crise aigüe avec une maîtrise, un savoir-faire et un professionnalisme à toute épreuve. C’est aussi ce que fait le GIGN pour la gendarmerie nationale.
Voilà des unités aussi performantes que prestigieuses, qui disposent de moyens humains et techniques leur permettant de faire face à un spectre large de menaces : j’ai parlé d’attaques terroristes, de prises d’otages, d’attaques non conventionnelles, de mutineries. Ces unités ont énormément de points communs, mais elles ont, chacune, un champ d’action territorial déterminé, dans lequel chacune prouve séparément son efficacité.

III.    Il fallait, par conséquent, passer à un niveau supérieur d’organisation et unir nos forces pour mieux contrer les menaces. C’est désormais chose faite.

-> Nous avions déjà entrepris une réflexion collective sur nos modes d’action.
Nous savons pertinemment, en effet, que faire travailler plusieurs unités spécialisées, non coordonnées entre elles, sur un même dispositif est un exercice qui atteint très vite ses limites.
Je sais, par exemple, que l’exercice « Paris Lyon Marseille (PLM) » que vous avez organisé au lendemain des attentats de Bombay, afin d’apprécier nos capacités de réaction communes face à des prises d’otages simultanées, a été riche d’enseignements, de ce point de vue. Notre capacité de riposte doit être totale, et pour cela, elle doit être commune.
-> C’est précisément cette capacité de riposte qu’offre, désormais, la Force d’intervention de la police nationale.
La FIPN place, ainsi, au sein d’une même structure opérationnelle l’ensemble de ces unités spécialisées d’intervention, c'est-à-dire le RAID, les GIPN et la brigade anti-commando de la Préfecture de police, et ce, sans porter atteinte ni à l’identité, ni au fonctionnement ni aux compétences des unités qui la composent.
Il y avait déjà une réelle harmonisation des modalités de recrutement, de formation et d’équipement des personnels du RAID et des GIPN. Il y a, maintenant, un dispositif d’intervention, fort de 500 policiers particulièrement entraînés, répartis sur l’ensemble du territoire national et capables de réagir à une attaque terroriste dans les délais les plus courts.
C’est le RAID qui, désormais, assure le commandement et la coordination opérationnels de l’action des unités spécialisées d’intervention. Il constitue l’échelon central de la FIPN et en héberge l’état-major.
La création de cette nouvelle structure renforcera la cohérence des méthodes de travail de ses différentes composantes. Elle permettra l’organisation d’exercices d’entraînement communs.
Elle contribuera, ainsi, à forger une culture commune, facilitera le partage des bonnes pratiques, et concourra à la mutualisation des savoir-faire et des moyens. Le champ de compétence de cette force pourra être élargi à d’autres domaines, comme celui de la protection des grands sommets internationaux et des événements majeurs.
Concrètement, la FIPN interviendra sur décision du directeur général de la police nationale, dans le cadre normal d’exercice des compétences des autorités administratives responsables de l’ordre public. L’ensemble des unités composant cette force d’intervention pourra alors être engagée, en fonction de l’événement, en dehors de leur ressort territorial habituel.
    Mesdames et Messieurs,
Cette date du 1er décembre restera une étape importante dans l’histoire de nos services de sécurité intérieure. Les grands tacticiens disent toujours qu’il faut pouvoir disposer d’une force que l’on peut exposer pour ne pas avoir à l’employer. Je souhaite ardemment que les faits ne viennent pas les contredire.
C’est, en tout cas, le vœu que je forme, non seulement à votre intention, vous qui êtes toujours sur le qui-vive, en alerte permanente et en condition maximale, mais également, à l’intention de tous nos concitoyens. Bonne vie à la FIPN !