05.11.2010 - Projet de loi de finances 2011 - Mission relations avec les collectivités territoriales

8 novembre 2010

Intervention de M. Alain Marleix, Secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales - Assemblée nationale - Vendredi 5 novembre 2010


- Seul le prononcé fait foi -

Monsieur le Président [Marc Le Fur],
Monsieur le Rapporteur général [Gilles Carrez],
Messieurs les Rapporteurs [Marc Laffineur, Manuel Aeschlimann],
Mesdames et Messieurs députés,

Nous examinons aujourd'hui les crédits de la mission "Relations avec les collectivités territoriales" ainsi que ses 8 articles rattachés.

Mais cette mission ne porte que sur une petite partie de l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales de même qu'elle ne retrace que partiellement les principales réformes engagées en matière de finances locales.

C'est pourquoi je souhaiterais articuler mon intervention autour de trois points, qui me conduiront parfois à déborder du cadre strict de cette mission budgétaire :

1. La "clause de rendez-vous" de la réforme de la taxe professionnelle sur les collectivités territoriales ;
2. La mise en œuvre du gel des concours financiers et la poursuite de l'effort de péréquation ;
3. L'examen des crédits proprement dits de la mission.

Premier point : la clause de rendez-vous de la taxe professionnelle.

Ce projet de loi de finances concrétise, comme nous nous y étions engagés, la clause de rendez-vous qui était une attente forte des parlementaires et des élus locaux.

A cet égard , je voudrais insister sur 2 points essentiels : LA COMPENSATION et LA PEREQUATION.

La compensation, tout d'abord.

Concernant leurs ressources financières, je rappelle que les collectivités territoriales bénéficieront à nouveau l'an prochain d'une garantie tant sur le niveau que sur le dynamisme de celles-ci.

Pour illustrer mon propos, je suis en mesure de vous indiquer aujourd'hui que la compensation relais de la taxe professionnelle perçue cette année est en augmentation sensible de +3,7% par rapport au produit de TP perçu l'an dernier. Cela représente 1,1 milliard de ressources supplémentaires pour les collectivités locales : 860 millions d'euros pour le bloc communal ; 150 millions d'euros pour les départements et 120 millions d'euros pour les régions.

Ce chiffre est donc un démenti cinglant pour tous ceux qui ont crié à l'étouffement financier des collectivités locales.
Je me suis également mobilisé pour que soit réglée la question très délicate du transfert de la taxe d'habitation au niveau communal. En effet, l'existence d'abattements départementaux de taxe d'habitation venait dans certains cas compliquer ce transfert. Nous déposerons un amendement qui neutralisera les effets de la réforme pour les contribuables et aboutira à une juste compensation.

La péréquation, ensuite. Elle sera considérablement développée. Michel Piron l'a souligné dans son intervention et la péréquation, Madame Karamanli, ce ne sont pas des mots mais aussi des actes.

Le Gouvernement partage les conclusions du rapport des six parlementaires en mission sur la taxe professionnelle [parmi lesquels les députés Olivier CARRE, Marc Laffineur et Michel Dieffenbacher] concernant la péréquation sur la croissance de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE). L'article 62 du projet de loi de finances introduit donc un mécanisme "sur flux cumulés" pour les régions et les départements.

Nous proposons aussi de revoir le mécanisme sur les Droits de mutation à titre onéreux (DMTO) introduit l'an dernier à l'initiative votre collègue Marc Laffineur. C'est l'objet de l'article 61.

Je sais qu'il suscite beaucoup de débats sur le niveau de redistribution, le degré de volatilité, l'équilibre à trouver entre la croissance des DMTO d'une part, et leur niveau par habitant d'autre part.

Ce débat a vocation à se poursuivre devant votre assemblée dans les prochains jours lorsque nous examinerons les articles rattachés au projet de loi de finances et je suis persuadé que nous arriverons conjointement à un accord sur un dispositif équilibré et pragmatique.

S'agissant de la péréquation au niveau communal, ce projet de loi de finances ouvre le débat sur l'instauration, dès 2012, d'un nouveau dispositif de péréquation des ressources communales et intercommunales, selon les modalités décrites à l'article 63.

Le Gouvernement souhaite que nous puissions ainsi disposer d'une "feuille de route" pour les travaux que nous aurons à conduire en 2011, en étroite concertation avec le comité des finances locales.

Enfin, compte tenu des évolutions des ressources des collectivités territoriales, nous avons dû adapter les instruments de mesure des écarts de richesse aux nouvelles ressources fiscales des collectivités territoriales.

Cette mesure est indispensable pour la répartition des dotations de péréquation. C'est l'objet de l'article 86 du projet de loi de finances.

A cet égard, il convenait de ne pas perturber trop gravement cette répartition au moment où se mettent en place les nouvelles ressources fiscales des collectivités territoriales.

C'est pourquoi j'ai proposé, pour 2011, de conserver pour la part de potentiel financier assise sur la seule taxe professionnelle, les données utilisées pour le calcul du potentiel financier 2010, c'est-à-dire en fait les données 2009.

Naturellement, l'an prochain, un nouveau potentiel financier prendra en compte les nouvelles ressources fiscales des collectivités territoriales.

Deuxième point : La stabilisation en valeur, pour la période du budget triennal 2011-2013, des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales.

Cette décision a été prise lors de la deuxième conférence des déficits publics et elle s'inscrit dans le cadre des conclusions du rapport Carrez/ Thenault.

L'effort de maîtrise des finances publiques concerne en effet l'ensemble des dépenses publiques, d'autant que le contribuable final est toujours le même.Vous l'avez rappelé Monsieur le Député, Charles de la Verpillere.

Il suffit de rappeler le montant de ce qu'il est convenu d'appeler "l'effort financier de l'Etat" en faveur des collectivités territoriales :

- 99 milliards d'euros en incluant la fiscalité transférée en compensation des transferts de compétences ;
- 77 milliards d'euros en comptant les concours financiers et les dégrèvements législatifs d'impôts locaux.

Ce "gel" n'est ni plus ni moins la règle que l'Etat impose à l'ensemble de ses dépenses : l'association des collectivités à la maîtrise des déficits n'en fait pas pour autant, comme on l'entend parfois dire, une "variable d'ajustement".

J'insiste sur le fait que ce gel ne porte que sur une enveloppe de 50,4 milliards d'euros.
Quelques observations cependant :

1. La stabilisation des concours financiers de l'Etat ne va pas concerner toutes les dotations. Votre collègue Manuel Aeschlimann a d'ailleurs relevé que le périmètre de ce gel était plutôt favorable.

En effet, conformément aux préconisations de Messieurs Carrez et Thenault, le FCTVA n'est pas inclus dans le périmètre visé par le gel. Les dotations aux collectivités territoriales ne seront donc pas pénalisées par la croissance des investissements que celles-ci pourraient mener.
Les amendes de police "sortent" également du périmètre du gel. L'utilisation de cette ressouce, Monsieur HUNAULT, doit effectivement permettre la sécurité dans les communes.
Madame Karamanli, je vous rappelle qu'en 2010, le FCTVA a représenté 3,8 milliards d'euros supplémentaires ; ce qui a amélioré la situation financière des collectivités locales.

2. Les effets de la réforme de la taxe professionnelle, et notamment la création de la nouvelle dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP), ne pèseront pas sur les autres concours financiers de l'Etat.

3. Nous avons veillé à ce que les mécanismes de péréquation puissent continuer à progresser.

Ainsi, j'ai souhaité que, dans le texte même de la loi de finances (à l'article 81), figurent les augmentations allouées à la DSU et à la DSR :
- La Dotation de Solidarité Rurale augmentera de 50 millions d'euros
- La dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale augmentera de 77 millions d'euros. Merci à cet égard de vos propos, Monsieur le Député Pupponi.

Cela représente 6,2% d'augmentation pour chacune de ces deux dotations.
Monsieur le Député Pupponi, vos propositions seront exeminées avec attention notamment dans le cadre du CLF dont vous êtes membres.

J'observe aussi qu'un amendement défendu par Gilles Carrez en première partie de la loi de finances a permis de dégager une ressource de 149 millions qui permettra d'amoindrir voire d'annuler la baisse initialement envisagée sur les composantes de la DGF. C'est l'objet des amendements à l'article 80.

J'ajoute, et c'est important, s'agissant du complément de garantie, que nous proposons de l'écrêter non pas de manière uniforme comme les années précédentes, mais en fonction du potentiel fiscal des communes. C'est une vraie mesure de redistribution, particulièrement protectrice des petites communes : ainsi, le complément de garantie des 19 000 communes de moins de 500 habitants ne baisserait en moyenne que de 0,27 %, et seulement 8 % d'entre elles seraient contributrices.

Vous le voyez, de nombreuses mesures accompagnent la mise en œuvre de ce gel. Parmi ces mesures, je signale enfin la mise en place du "moratoire" sur les normes, depuis le mois de juillet. Pour répondre à M. Aeschlimann, je rappelle que le Premier ministre s'est prononcé en faveur d'un renforcement des pouvoirs de la CCEN. Il souhaite notamment que la consultation de la CCEN sur les projets de loi soit plus systématique.

Troisième point : l'examen proprement dit des crédits de la mission "Relations avec les collectivités territoriales".

Cette mission représente 2,559 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 2,513 milliards d'euros de crédits de paiement en 2011.

Je souhaite pour terminer insister sur quelques évolutions.

1. En concertation avec le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, j'ai lancé la fusion la dotation globale d'équipement et la dotation de développement rural pour créer une nouvelle dotation d'équipement des territoires ruraux (article 82) qui sera dotée de 615 millions d'euros. Je confirme à nouveau à Monsieur le Député DUSSOPT, que cette dotation n'a pas baissé ni en 2010, ni en 2011.
Comme le relève Michel HUNAULT, cela permettra d'améliorer, de simplifier la gestion de ces crédits déconcentrés au niveau des préfectures, d'élargir le champ des projets éligibles, et donc de mieux répondre aux besoins des territoires ruraux.

2. Par ailleurs, quelques dotations vont connaître un abondement destiné à répondre à des besoins spécifiques.
C'est le cas de la dotation spéciale de construction et d'équipement des établissements scolaires de Mayotte ou encore du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées qui progressent respectivement de 5 et de 10 millions d'euros.

3. Parallèlement, la dotation de développement urbain est reconduite non seulement en 2011, mais sur l'ensemble de la période triennale 2011-2013. L'Etat continuera ainsi d'apporter son soutien aux projets dans le domaine économique et social des communes les plus défavorisées.
Vous le voyez, cette loi de finances est le fruit d'un équilibre entre la nécessité d'assainir nos finances publiques et la poursuite des efforts en faveur des territoires défavorisés. Elle aussi le résultat d'un dialogue constant avec votre rapporteur général du budget, vos rapporteurs et le comité des finances locales.

Je vous remercie.