Matthias FEKL, ministre de l’Intérieur, a installé ce matin le service central de la police technique et scientifique (SPTCS) à Ecully (69).
Allocution du ministre de l'Intérieur.
- Seul le prononcé fait foi -
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Maire, Monsieur le Député, Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Directeur Général de la Police Nationale,
Monsieur le Préfet délégué à la défense et la sécurité,
Mesdames et Messieurs les directeurs centraux,
Monsieur le Chef du service central de la police technique et scientifique,
Monsieur le directeur de l’Institut national de la police scientifique,
Mesdames et Messieurs les représentants des organisations syndicales,
Mesdames et Messieurs les policiers du service central de la police technique et scientifique,
Mesdames et Messieurs,
Quelques minutes seulement après le lâche attentat qui a coûté la vie au capitaine Xavier Jugelé jeudi 20 avril sur les Champs Elysées, des agents de la police technique et scientifique, sous le regard des Français, sont intervenus longuement sur le véhicule du terroriste. Les Français devant leur écran, inquiets, soucieux et bouleversés, mais aussi des téléspectateurs du monde entier, ont observé le travail de vos collègues. Ils ont vu des hommes et des femmes revêtus de combinaisons blanches s’activer avec calme, avec sang-froid, avec méthode, autour et à l’intérieur du véhicule. Dans l’attente d’informations complémentaires et face à l’infamie qui venait de se produire, la police technique et scientifique donnait à voir sa mobilisation courageuse et son professionnalisme minutieux. En cet instant, mon premier hommage va à ces agents.
Je vais vous dire ma conviction. Cette image a contribué, comme celle de l’ensemble des forces de sécurité intérieure et de sécurité civile présentes sur le périmètre, à rassurer nos concitoyens. Ils ont touché du doigt la technicité et la modernité des investigations menées. Ils ont perçu la concentration à la tâche, le dévouement et le courage de ces hommes et de ces femmes mobilisés sur le terrain, que le travail des démineurs avait permis de sécuriser.
En les voyant opérer, nos concitoyens, nos voisins, pouvaient se dire que la France ne plierait pas. Ils pouvaient se dire que nous avions non seulement le droit et les valeurs de la République de notre côté, mais également avec nous les hommes, les femmes, les agents, les technologies pour traquer et neutraliser ces meurtriers.
Ce soir-là également, il n’a pas échappé non plus aux Français combien les commentateurs ont salué la rapidité, mais surtout la pertinence et l’importance du travail de la police technique et scientifique. Ils n’ont pas oublié de souligner votre mobilisation sans cesse accrue sur les théâtres des attaques terroristes qui ont frappé notre sol depuis Toulouse et Montauban, en 2012, et depuis Paris, au début de l’année 2015. Permettez-moi d’insister. Il est particulièrement juste de rendre hommage à la police technique et scientifique pour sa forte contribution aux enquêtes et à la lutte anti-terroristes. Elle a permis en effet d’identifier des individus, malheureusement parfois des victimes ce qui est une part très difficile du travail. Mais elle a permis surtout de remonter des pistes, d’interpeller complices et potentiels futurs assaillants, de démanteler des filières, donc aussi, pas à pas, de déjouer des attentats. Qu’il s’agisse des relevés papillaires, des prélèvements biologiques, d’expertiser des armes à feu et des explosifs, d’exploiter des ordinateurs, des téléphones et des GPS, d’analyser des vidéos et des fichiers numériques, ce travail est décisif. Il permet de donner des informations, des pistes, des preuves. Pour cette mission de l’ombre, menée à Paris, à Nice, à Marseille et partout ailleurs, permettez-moi de vous dire sans plus attendre la gratitude et la reconnaissance de la France. C’est un honneur pour la Police. C’est une fierté pour la France.
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Cette fierté n’est pas nouvelle mais s’est accrue. La police technique et scientifique a vécu, en une quinzaine d’années, des évolutions profondes. Auparavant réservée aux affaires criminelles les plus graves, la police judiciaire l’incarnait et les Brigades du Tigre en ont été les pionnières. Aujourd’hui, la police technique et scientifique est devenue un véritable outil de proximité destiné à lutter aussi contre la délinquance de masse et à garantir la sécurité publique.
Il restait néanmoins un paradoxe. Ce paradoxe, c’est celui d’une discipline efficace, maîtrisée, partout de plus en plus sollicitée, mais éclatée dans les différents services, sans niveau d’impulsion stratégique unique à l’échelle nationale. Ce paradoxe a pris fin le 5 avril par la signature d’un arrêté et le 6 avril par sa publication au Journal Officiel. La Police Nationale compte, depuis, un nouveau service central : le service central de la police technique et scientifique. Ce service a constitué son équipe directe : 310 agents, dont 60% de scientifiques, auxquels viendront s’ajouter fin 2017 et début 2018 les agents composant les 7 délégations zonales du SCPTS à déployer sur le territoire. Mais au total, ce service assure dorénavant et pour la première fois le suivi des 3 500 agents chargés de mission de police technique et scientifique dans le pays, ainsi que le suivi scientifique du travail de 11 000 policiers polyvalents. C’est donc un grand service qui se crée, au service d’une grande mission.
La création d’un nouveau service central est un événement. Il faut en rendre hommage à Bernard Cazeneuve et Jean-Marc Falcone, qui l’ont imaginé, l’ont porté, ont dégagé des moyens et ont pris, en octobre, la décision de le créer. La création d’un service central n’est ni une décision fréquente, ni une décision anodine. Mais c’est une décision qui, quand elle est nécessaire, doit être concertée et prise vite. Cela a été le cas, car il est toujours de la responsabilité du Ministère de l’Intérieur d’adapter et de faire progresser notre organisation de sécurité, pour répondre à temps aux enjeux et aux menaces.
Permettez-moi deux illustrations. La première est connue de nos concitoyens. La seconde ne l’est pas. La première, c’est la réforme du renseignement et la création de la DGSI par le décret du 30 avril 2014. Elle a incontestablement répondu à un tournant de la menace et a ainsi marqué l’histoire récente de la police au service de la protection de nos concitoyens. La seconde illustration a une visée interne. Il s’agit de la création, en janvier 2017, de la nouvelle direction centrale du recrutement et de la formation de la police nationale. Celle-ci a reçu pour mission de mettre un terme à l’émiettement des acteurs et des structures de formation, afin de renforcer la cohérence stratégique et le pilotage des formations. La démarche est la même pour le SCPTS.
Je le dis ici à Ecully, dans une ville qui abrite de grandes écoles, dans une ville proche également d’une grande école qui nous est chère, celle des commissaires de police à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or : la création de ce service central est une réforme utile au futur de la filière scientifique de la police et utile au-delà au futur de la police nationale. Elle l’est d’autant plus que la police technique et scientifique est une voie qui attire. Elle est un secteur de plus en plus prisé par les étudiants, mais également par des chimistes, biologistes ou informaticiens déjà dans la vie active qui cherchent un nouveau parcours. En France, statistiquement, 1 intervention de police technique et scientifique est réalisée chaque minute.
C’est une activité appelée encore à se développer. Et c’est une activité qui est, à l’international, une contribution supplémentaire au rayonnement et à la reconnaissance des forces françaises de sécurité.
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La création de ce service central n’est donc pas de l’ordre de la rupture, mais de la confirmation et de la consolidation de l’un de nos atouts majeurs. Par conséquent, ce « nouveau » service avait besoin d’un chef expérimenté.
Inspecteur général Frédéric Dupuch, vous avez été nommé le 10 avril. Vous voici le premier policier dans l’histoire de ce service central à diriger son équipe. Recevez mes félicitations et mes encouragements. Recevez nos félicitations et nos encouragements. Comme vos agents et comme nous l’attendons d’eux, nous attendons de vous le meilleur. Nous savons d’ailleurs que nous pouvons l’exiger. Votre parcours de plus de 20 années au sein de la Préfecture de Police de la Paris, contre les délinquances et le banditisme, l’atteste. Vos résultats à la direction de l’Institut national de la police scientifique, ici même à Ecully depuis 2009, l’attestent également. Votre travail de ces sept dernières années illustre même précisément la démarche souhaitée : réorganisation interne et collective des laboratoires, définition des priorités en fonction des attentes des requérants, adaptation des moyens aux besoins dominants, prise en compte des politiques nationales de sécurité, modernisation des méthodes. Le résultat de cette approche de service est clair : une production quintuplée, passée de 20 000 saisines instruites en 2008 à 120 000 en 2016, avec une implication dans toutes les investigations sensibles. La même orientation vers l’efficience et la performance doit guider le Service Central. C’est la raison pour laquelle vous vous étiez vu confier la mission de préfiguration ayant conduit à sa création. Et c’est la raison pour laquelle nous vous en avons désormais confié la direction.
Je veux également saluer le chef adjoint du service central, le contrôleur général Dominique ABBENANTI, dont l’apport pendant près de deux ans à la tête de la sous-direction de la police technique et scientifique de la direction centrale de la police judiciaire est unanimement reconnu. Vous serez vous aussi un pilier indispensable de cette nouvelle aventure humaine et professionnelle.
Enfin, je veux m’adresser à tous les agents, affectés, en cours d’affectation, ou qui le seront, sous l’autorité du Directeur Général de la Police Nationale et/ou, concernant l’agglomération parisienne, du Préfet de Police.
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A tous, je veux dire que, si la création d’un service central est la consécration d’une discipline, elle n’est que le début de votre travail.
Vous attendent d’abord, naturellement, des missions opérationnelles. L’efficacité opérationnelle de votre service est et doit rester la priorité absolue, particulièrement dans une période où le terrorisme frappe notre pays. Vos autorités attendent de vous ce travail, tout comme les Français, qui ont le souvenir d’époques dans lesquelles les outils que vous employez aujourd’hui n’existaient pas, à l’instar de nos grands fichiers criminalistiques nationaux dont vous avez la responsabilité.
Mais votre mission sera aussi, collectivement, sous la conduite de Frédéric Dupuch, une mission de pilotage. Vous aurez la responsabilité de faire évoluer les doctrines, de préciser les modalités d’intervention, d’organisation et d’analyse. Il faudra allouer au mieux les ressources locales, intensifier l’effort de formation initiale puis continue des agents, creuser des chemins de Recherche nouveaux, tirer parti de toutes les évolutions informatiques et numériques, puis développer nos activités de coopération internationale. Vous êtes les agents d’un nouveau service central, vous devrez donc agir à la fois en professionnels et en pionniers. Vous avez cette chance de pouvoir contribuer à forger un morceau de l’histoire de la police de votre pays. Saisissez-vous en, avec professionnalisme, passion et entrain.
J’insiste également sur une mission qui vous incombe et pour laquelle également vous aurez le soutien du Ministère : fédérez autour de vous. Faites-vous connaître de tous les services de la police nationale. Poursuivez votre franche coopération avec les services techniques et scientifiques de la gendarmerie nationale. Maintenant vos excellentes relations avec les équipes de la Justice. Il vous revient de contribuer à faire vivre et grandir la communauté technique et scientifique de la sécurité intérieure.
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Mesdames et Messieurs,
Je vous le dis à tous comme je l’ai dit à vos collègues médaillés, vous pouvez être fiers. Vous pouvez être fiers du choix de votre activité, passionnante et en constante mutation, au service de la sécurité et de la justice. Vous pouvez être fiers d’appartenir à la police technique et scientifique de votre pays. Soyez fiers désormais d’appartenir à ce service central. Choyez-le. Portez-le le plus haut possible, avec la volonté de servir toujours plus les Français. Ce Service est le fruit d’une grande et populaire Histoire, qu’il convient de respecter, mais c’est bien vous désormais qui êtes chargés d’écrire la sienne. L’État a confiance en vous. Les Français ont confiance en vous. Alors en avant, et longue vie au Service central de la police technique et scientifique. La République lui accorde tout son soutien.