Séance de questions d'actualité au gouvernement du 26 mars 2013

Séance de questions d'actualité au gouvernement du 26 mars 2013
Mardi 26 mars 2013, Manuel Valls est intervenu à trois reprises, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement, à l'Assemblée nationale.

Mardi 26 mars 2013, Manuel Valls est intervenu à trois reprises, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement, à l'Assemblée nationale.


Question de Philippe Cochet, député du Rhône

Philippe Cochet, député UMP du Rhône

Ma question s'adresse à vous, Monsieur le Premier ministre. Honte à vous et au gouvernement. Dimanche, nous étions 1 million 400 000 personnes à Paris pour défiler contre ce projet inique que vous défendez. Le peuple gronde et vous ne l'écoutez pas. Combien de vitrines ont été cassées ? Zéro. Combien de voitures ont été dégradées ? Zéro. Devant ce succès auquel vous ne vous y attendiez pas, vous avez pris peur et fait sur réagir les forces de l'ordre qui ont gazé, mes chers collègues, des enfants, des familles, des femmes enceintes qui regagnaient leur domicile. Honte à vous et à votre gouvernement. Vous avez été incapables d'anticiper ce succès populaire. Votre responsabilité et celle de votre ministre de l'Intérieur sont entières. Et je rends hommage aux organisateurs que Monsieur Valls a injuriés. Nous sommes passés à côté d'un drame car vous avez parqué, je dis bien, vous avez parqué le peuple de France en lui refusant de défiler. Monsieur le Premier ministre, mais enfin réveillez vous !! Jusqu'à quand allez-vous mépriser le peuple de France ? Vous ne mesurez pas l'exaspération de nos compatriotes, vous abimez la France et vous maltraitez les Français...

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur le Député, le lieu de ce rassemblement a été seulement décidé jeudi dernier, du fait de l'absence de toute opération des organisateurs. Et dans ce temps très court, la préfecture de police a tout mis en œuvre pour assurer la sécurité des manifestants. Mais les organisateurs ont été dépassés par les extrémistes. Il y a eu de nombreux messages appelant à ne pas respecter l'arrêté interdisant le secteur des Champs Elysées. Les débordements étaient donc prémédités. Les forces de l'ordre ont fait cesser ces débordements auxquels se sont livrés quelques centaines d'individus extrémistes déterminés que je ne confonds pas avec les simples manifestants entraînés malgré eux. Il n'y a eu aucun tir de grenade et parler d'enfants gazés est tout le moins un douteux amalgame scandaleux, que vous n'avez pas le droit de prononcer ici dans cette hémicycle. Etaient sur place des militants du bloc identitaire des jeunesses nationalistes, du renouveau français, du GUD, d'Europe Jeunesse. Les faits qui sont reprochés à ces individus sont graves : agression physique contre les forces de l'ordre, dégradation de biens publics, jets de boulons. Ces actes – je l'ai déjà dit dans d'autres occasions – sont intolérables. Aucune exception ne peut être justifiée. Moi je suis cohérent, le gouvernement est cohérent, vous n'êtes pas cohérents. Je veux saluer, enfin, la maîtrise, le sang-froid, le professionnalisme du préfet de police, des policiers et des gendarmes, qui ont garanti l'ordre républicain et qui ont évité tout drame parce que les organisateurs n'avaient pas bien préparé ce rassemblement.

Question de Jean-Frédéric Poisson, député des Yvelines

Jean-Frédéric Poisson, député UMP des Yvelines

Monsieur le Premier ministre. Dimanche dernier, les Français vous ont pris en défaut, en défaut de prévision des effectifs de la manifestation, largement sous-estimés, en défaut au regard de l'organisation qui a été mise en place par les services du ministre de l'Intérieur et en défaut par rapport à la capacité des services d'ordre à maintenir l'ordre dans des conditions normales de sécurité pour la foule. Les conséquences sont simples à décrire, des forces de l'ordre incapables de contenir une foule très supérieure au nombre initialement prévu, des modalités d'intervention de ces mêmes forces très disproportionnées par rapport à l'immense majorité des manifestants qui étaient venus, ici, manifester pacifiquement et un dispositif débordé par les circonstances, en raison d'un nombre insuffisant d'effectifs sur place. La cause, Monsieur le Premier ministre, est le mépris, le mépris que vous affichez à répétition pour les manifestants de novembre, puis pour ceux de janvier, puis pour ceux de mars, en sous-évaluant systématiquement leur présence dans le rassemblement. Le mépris par rapport au message qu'ils portent et qu'ils essayent désespérément de vous faire entendre. Le mépris par rapport à leurs inquiétudes et à leurs arguments. Le mépris par rapport à leur demande d'être entendu et, pourquoi pas, d'être directement consultés par vos services et, pourquoi pas, par l'organisation d'un référendum. Enfin, le mépris par les consignes que vous avez données au président du Conseil économique et social, de ne pas donner droit à la pétition qu'il vous avait fait parvenir, qu'ils lui avaient fait parvenir il y a quelques semaines. Combien de manifestants, Monsieur le Premier ministre, faudra-t-il pour que, à vos oreilles, leurs demandes soient entendues ? Combien de manifestants faudra-t-il pour que les principaux aspects de ce projet de loi qui touche à la filiation soient retirés des projets qui sont les vôtres ?

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur le député Poisson. Nous respectons les manifestants et le droit de manifester est un droit démocratique inscrit dans notre Constitution. Comme il y a un autre droit qui est celui aussi qui s'impose et que vous devez également respecter, qui est le fait qu'une majorité, ici, à l'Assemblée nationale, a voté un texte de loi qui était un engagement du président de la République devant le peuple français. Mais, Monsieur le Député, les violences, les débordements, les insultes ne sont pas des moyens d'expression. Organisateurs d'une manifestation comme élus devraient condamner ces actions qui desservent leur message. Qui sont ces élus qui mettent en cause les représentants de l'Etat, le préfet de police, les forces de l'ordre ? Il y avait 2 000 policiers et gendarmes engagés sur cette manifestation. Tous les systèmes de comptage, ce sont les mêmes que vous utilisiez, ce sont ceux de la préfecture de police, disent clairement – les photos le démontrent – qu'il y avait 300 000 personnes ; 300 000 personnes, Monsieur le Député, c'est déjà significatif. Face à cela, les forces de l'ordre, sous l'autorité du préfet de police, ont contenu cette manifestation. Monsieur le Député, Mesdames et Messieurs de l'opposition, il y a une seule chose que je vous demande, c'est le respect des institutions. C'est vrai, cela a été rappelé, la justice, l'Etat de droit, un préfet de police, les forces de l'ordre, que vous voulez soutenir dans d'autres occasions, quand elles sont mises en cause et vous avez bien raison, les forces de l'ordre, les policiers et les gendarmes étaient face à des individus dangereux, venant de l'extrême droite, face à des organisateurs qui n'avaient pas respecté les consignes, pourtant confirmées par le tribunal administratif de Paris. Dans une manifestation qui avait changé de nature, les forces de l'ordre ont fait respecter la loi de la République ! La loi de la République, nous la ferons respecter !

Question de Paul Salen, député de Loire

Paul Salen, député UMP de Loire

Ma question s'adresse à Monsieur le Premier ministre. Par son arrêt du 19 mars 2013, la Cour de cassation vient d'annuler le licenciement en 2008 d'une employée de la crèche associative Baby Loup, ignorant le règlement interne de cette structure. La Cour de cassation a invalidé les jugements successifs du Conseil des Prud'hommes de Mantes-la-Jolie en 2010 et de la Cour d'appel de Versailles en 2011 qui avaient approuvé le licenciement de l'employée concernée, alors que le principe de la laïcité devrait s'appliquer. Contrairement à ce que s'est permis de faire Manuel Valls, votre ministre de l'Intérieur, la semaine dernière, je ne souhaite pas commenter cette décision de justice. Il est vrai, vous l'avez montré, Monsieur le Premier ministre, qu'il y a des commentaires de justice que vous semblez mieux accepter que d'autres. Néanmoins, il découle de cet arrêt une situation juridique nouvelle. Elle s'inscrit dans un mouvement plus vaste qui remet en cause les fondements même de la laïcité. En juillet de l'année dernière, les instances du football mondial ont admis le principe, pour les compétitions officielles qu'elles organisent, que les femmes pourront porter le voile pour pratiquer le sport. Face à cette décision, j'ai déposé une proposition de loi permettant de fixer un cadre juridique précis et visant à réaffirmer le principe de la laïcité dans le sport. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à une nouvelle remise en cause de ce pilier de notre vivre-ensemble, nous devons réagir afin de protéger cet héritage commun de la République que trop d'extrémistes aimeraient détruire. La position de la Cour de cassation nous interpelle, car elle semble inverser le postulat suivant lequel une entreprise doit être neutre, en obligeant l'employeur à définir lui-même les limites à appliquer. Plus que jamais, la République doit réaffirmer le respect des principes attachés à la laïcité, entendue comme une stricte neutralité à l'égard des cultes. Le pire serait de légiférer dans la précipitation et sous le coup de l'émotion médiatique. Mais il faut réfléchir à une action globale concernant à la fois le secteur privé et public, mais aussi le milieu associatif dans son ensemble. Alors, Monsieur le Premier ministre, nous aimerions connaître vos intentions, au-delà des déclarations vertueuses de certains de vos ministres, quand allez-vous engager ce vaste chantier, dans un esprit d'union nationale et surtout dans le respect de toutes les opinions ?

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur le Député. Vous ne voulez pas commenter une décision de justice, mais vous l'avez fait, moi comme chacun d'entre vous, je prends acte de cette décision. Mais j'ai déjà eu l'occasion de le dire, il se trouve que, avec d'autres parlementaires, avec beaucoup de personnes qui se sont engagées pour cette crèche, j'étais aux côtés de la directrice de Baby Loup et de toutes celles qui travaillaient dans cette crèche et qui avaient d'ailleurs, si on se rappelle les faits, intégré cette femme qui, ensuite, portant un foulard, contestait le règlement intérieur de cette crèche. Alain Vidalies l'a dit très bien tout à l'heure, s'il y a un vide juridique à combler, il faudra, oui, une initiative législative. Plusieurs sont sur la table, ça a été rappelé aussi par l'un d'entre vous il y a un instant. Cela doit se faire, et le ministre des Relations avec le Parlement l'a très bien dit, dans un esprit de consensus, avec la volonté de rassembler sur cette belle idée qu'est la laïcité, qui est à la fois une belle idée pour la République, mais qui est un élément et ce n'est pas souvent suffisamment souligné, un élément fondamental de l'émancipation des femmes, de l'émancipation des femmes qui travaillent dans ces crèches, dans ces crèches qui sont essentielles pour accueillir des femmes, des enfants dans ces quartiers populaires. Je ne doute pas que nous allons nous retrouver ensemble pour faire vivre la laïcité partout et notamment dans ces quartiers populaires.


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