Mercredi 08 janvier 2014, Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, a répondu aux députés Dino Cinieri et Jean Marie Tetart, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement à l'Assemblée nationale.
Dino Cinieri député UMP de la Loire
Monsieur le Ministre de l’Intérieur, Madame la Ministre, je pense que vous n’avez pas compris la question de mon collègue, je vais la répéter. Le 18 décembre dernier, lors de son audition devant la commission de lutte contre l’insécurité, le général Soubelet, numéro trois de la gendarmerie, a déploré que les délinquants profitent du système et qu’ils sont mieux protégés que les victimes. Les mesures que vous mettez en place aggravent la récidive et favorisent le sentiment d’impunité. Monsieur le Ministre, quelle naïveté, quelle inconséquence de penser que libérer les délinquants et vider les prisons va rendre notre pays plus sûr ! Quand on sait que 65% des cambrioleurs interpellés dans les Bouches-du-Rhône en novembre 2013 sont dans la nature deux mois après. On peut légitimement douter des capacités de ce gouvernement à assurer la sécurité de nos concitoyens. Au lieu de vous attaquer aux délinquants, vous stigmatisez les policiers et les gendarmes qui doivent désormais porter un matricule à sept chiffres. Cette mesure risque d’être un facteur de déstabilisation des policiers notamment dans les quartiers sensibles où l’on déplore une montée des violences contre les forces de police. Dans une période budgétaire tendue, est-ce vraiment nécessaire de dépenser en centaines de milliers d’euros pour la fabrication et la distribution des matricules ? Cet argent ne devrait-il pas être utilisé pour moderniser les véhicules qui ont plus de 200.000 kilomètres au compteur ou alors pour rénover les commissariats délabrés ? Nos policiers, nos gendarmes exercent un métier difficile, dangereux, de nombreuses contraintes pèsent déjà sur eux car ils appartiennent à l’administration la plus contrôlée de France. Ils rendent déjà des comptes et quand ils fautent ils sont sanctionnés. Vous dites ne tolérer aucun manquement au port du matricule, on préférerait que vous n’ayez aucune tolérance pour les délinquants ou les profanateurs de lieux de culte. Alors, Monsieur le Ministre, arrêtez de stigmatiser les forces de l’ordre, revenez dans cette mesure inutilement vexatoire et mettez enfin votre énergie à faire baisser les chiffres de la délinquance !
Manuel Valls, ministre de l’Intérieur
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Député Dino Cinieri. Ceux qui ont stigmatisé la police et la gendarmerie sont ceux qui ont supprimé en cinq ans 13.700 postes de policiers et de gendarmerie. Ceux qui on stigmatisé la police et la gendarmerie c’est ceux qui ont baissé le budget de fonctionnement et d’investissement de la police et de gendarmerie de près de 18% entre 2007 et 2012, c’est vous, c’est l’opposition actuelle. Ceux qui ont stigmatisé la police et la gendarmerie c’est ceux qui n’ont eu de cesse d’opposer les forces de l’ordre à la justice. Ceux qui ont stigmatisé la police et la gendarmerie ce sont ceux qui ont créé les conditions de tension entre les forces de l’ordre et la population. Et parce que nous nous voulons faire conformément à l’engagement du président de la République de la sécurité la priorité des Français nous avons mis fin aux suppressions de postes, nous remplaçons tous les départs à la retraite, nous créons 400 à 500 postes de policiers et de gendarmes par an, nous donnons les moyens même si ce n’est pas au niveau de ce qu’on pourrait attendre puisque le budget de fonctionnement et d’investissement de la police et de la gendarmerie est pour la première fois en hausse. J’ai visité les commissariats de Livry-Gargan et d’Aulnay il y a trois jours, vous devriez avoir honte de l’état dans lequel on a laissé une grande partie des brigades de gendarmerie et des commissariats de ce pays, eh oui ! Et nous voulons donner les moyens aux policiers et aux gendarmes d’une relation apaisée avec la population parce qu’une relation de confiance entre les forces de l’ordre et la population rend plus efficace le travail des forces de l’ordre. Et avec Christiane Taubira nous voulons faire en sorte que la chaine pénale soit efficace parce que je vous rappelle que jusqu’à maintenant ce sont vos lois qui s’appliquent, pas celles de cette majorité et la loi qui sera bientôt discutée au Parlement vise à lutter contre la récidive. Donc c’est nous qui portons l’efficacité, c’set vous qui n’avez pas été à la hauteur de l’attente des Français sur leurs préoccupations en matière de sécurité !
Jean-Marie Tetart, Député UMP 9ème circonscription des Yvelines
Ma question s’adresse à Monsieur le Premier Ministre. Lors de ses vœux aux Français, le président de la République a appelé à une baisse des dépenses des collectivités locales et à une clarification de leurs compétences. Le propos est cocasse quand votre gouvernement impose des dépenses considérables aux communes, avec la pseudo-réforme des rythmes scolaires. Le propos est aussi décalé quand votre gouvernement complexifie encore le millefeuille territorial avec des métropoles et des conférences territoriales dans tous les sens. Il l’est davantage encore quand votre gouvernement invente ce scrutin ubuesque pour les conseillers départementaux, avec pour conséquence concrète dans le département des Yvelines par exemple, une augmentation du nombre de conseillers départementaux. Vous vous êtes ainsi attelé au plus grand charcutage électoral qu’aient jamais connu les territoires ruraux dont la représentation est mise à mal par vos calculs politiciens. Pas besoin de commission nationale indépendante pour réaliser ces travaux, comme cela avait été le cas pour les redécoupages législatifs de 1986 ou de 2009. Non ! Il vous suffisait de laisser faire le meilleur ouvrier de France en charcutage électoral, le ministre de l’Intérieur, qui se drape dans la posture martiale de défenseur de l’Etat de droit, mais qui défend d’abord les intérêts du PS quand votre politique les met en danger. Mais la France réagit. Habitants et élus des territoires ruraux grondent. Des départements ruraux de tous bords politiques ont rejeté vos projets de redécoupage ; même des départements urbains comme la Seine-Saint-Denis, socialiste, chère au président Bartelone. Ce matin, le département des Yvelines vient à son tour de refuser votre découpage et a voté une contre-proposition avec l’appui d’une partie de la gauche. Monsieur le Premier Ministre, quand arrêterez-vous de malmener la France rurale qui ne demande qu’une chose : le respect de ses spécificités, de ses bassins de vie et de son identité ? Quand entendrez-vous le président de la République dans sa version janvier 2014 ?
Manuel Valls, ministre de l’Intérieur
Monsieur le Président, Monsieur le Député Tetart, respectez un peu, en effet, les charcutiers qui sont une profession noble et qui, à chaque fois que vous prononcez leur nom, s’indignent de l’attitude qui est la vôtre. Nous avons souhaité changer le mode de scrutin pour les élections départementales pour une simple raison : c’est qu’il y avait un engagement qui a été pris de mettre fin au conseiller territorial qui portait un coup fatal au département et aux territoires ruraux. Et nous avons voulu mettre en place un système qui permet deux principes tout à fait essentiels. Le premier, c’est le rééquilibrage démographique que le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat ont rappelé en permanence ; et le deuxième – et vous vous y opposez, et vous n’osez pas l’avouer – c’est la parité. Aujourd’hui, il y a 13,5 % de femmes dans les conseils généraux ; grâce à ce nouveau mode de scrutin, il y aura 50 % de femmes. Les principes rappelés par la loi : le respect des territoires ruraux, des montagnes et des littoraux et… du littoral et des îles, permet là aussi de concilier et ces principes tout à fait fondamentaux et en même temps la réalité de nos territoires. La plupart des départements, la plupart des cantons n’avaient pas évolué depuis deux siècles. On peut considérer qu’il y a eu des évolutions démographiques et que désormais, les femmes, même si vous ne pensez pas cela, peuvent trouver toute leur place dans la vie politique. Pour le reste, des projets sont soumis aux conseils généraux ; ils donnent leur avis et c’est le Conseil d’Etat, après examen, qui publie les décrets. C’est tout aussi simple que cela, et vous devrez vous y faire.