Séance de questions d'actualité au Gouvernement du 28 mars 2013 au Sénat

Séance de questions d'actualité au Gouvernement du 28 mars 2013 au Sénat
Jeudi 28 mars 2013, Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, a répondu à une question du sénateur Pierre Charon, sur les suites de la manifestation contre le mariage pour tous, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement au Sénat.

Jeudi 28 mars 2013, Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, a répondu à une question du sénateur Pierre Charon, sur les suites de la manifestation contre le mariage pour tous, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement au Sénat.


Pierre Charon, sénateur (UMP) de Paris

Monsieur le président, mesdames et messieurs les ministres, chers collègues. Ma question s'adresse à Monsieur le ministre de l'Intérieur. Monsieur le Ministre, dimanche 24 mars dernier, les opposants à la loi dite « de mariage pour tous » se sont à nouveau réunis pour une manifestation familiale et pacifique. Une fois de plus, vos services ont annoncé des chiffres de participation aberrants, confirmés encore hier soir à 300 000, qui démontrent une volonté délibérée de mentir aux Français afin de minimiser les réalités de ce mouvement de contestation, énorme mouvement de contestation. Vous avez, ainsi, égaré, le 13 janvier, 700 000 manifestants et plus d'un million cette fois-ci. Je conçois que le gouvernement soit agacé par la détermination et la mobilisation massive des opposants à ce texte, mais cet agacement ne saurait ni justifier la manipulation grossière des chiffres, ni les instructions données par vous-même de la salle de commandement de la PP, assisté du préfet de police. Comment expliquez-vous l'utilisation de ce que vous appelez « les aérosols » sur les femmes, les pères de famille et les enfants ? Jusqu'à présent, les aérosols servent plus pour les asthmatiques que pour les manifestants. Pourquoi pas des vaporisateurs non plus ? Alors qu'il s'agit de lacrymogènes, disons les mots, n'ayez pas peur des mots. Vous avez parlé de groupes extrémistes hier encore à l'Assemblée nationale, fortement secoué par mes collègues députés. Mais, monsieur le ministre, je ne sais pas si quelques agités ont pu se faufiler dans la foule mais toutes les images et les vidéos sont accablantes pour vous et vos services. Vos extrémistes sont des fillettes de huit ans, des personnes âgées, des bonnes sœurs, des familles nombreuses et des élus de la République. Rendez publiques les nombreuses plaintes de journalistes contre vos services qui ont été déposées à la PP. D'ailleurs, à l'heure où je vos parle, un enfant de quatorze ans est toujours hospitalisé,  ne sachant pas s'il récupèrera l'usage d'un œil. Monsieur le Ministre, quand le pouvoir s'en prend aux enfants, c'est la République qui saigne. Comment pouvez-vous expliquer aux Français que, une semaine plus tôt, les CRS étaient restés impassibles devant les syndicats de PSA qui faisaient brûler des pneus sur cette même avenue de la Grande Armée ? Comment pouvez-vous affirmer que les organisateurs ont été débordés par la manifestation ? Pardon, ce sont vos services de renseignement qui, la veille encore, prévoyaient 100 000 personnes au doigt mouillé. Effectivement, si vous attendiez quinze fois moins de manifestants, il n'est pas anormal que vos services aient été débordés et que l'on déplore ces incidents. C'est une irresponsabilité du préfet de police de Paris, Monsieur Boucault, d'avoir figé les manifestants sans prévoir d'issue au cortège. Vous savez ce que c'est ? Ça revient à peu près à remplir une boîte de nuit sans sortie de secours. Cela dit, quand on nomme un directeur de l'ENA patron du maintien de l'ordre et que l'on court entre les fauteuils du Grand Rex et la salle de commandement de la PP, il ne faut pas s'étonner que ça déborde. C'est pourquoi, Monsieur le Ministre, devant l'absence de vos réponses (…) nous avons décidé, avec un certain nombre de collègues sénateurs, de demander l'ouverture d'une commission d'enquête afin qu'elle éclaircisse les conditions dans laquelle la préfecture (…) n'a pas anticipé, n'a pas encadré et a menti aux Français sur la participation.

Manuel Valls, ministre de l'Intérieur

Monsieur le président, Monsieur le Sénateur. Que cherchez-vous, Monsieur Charon, à remettre en cause la parole de l'Etat, celle du préfet de police, à contester, par ailleurs, la légitimité du Parlement, celle des représentants de la Nation – vous allez être saisi d'un texte, celui du mariage pour tous, dans quelques jours – qui ont majoritairement adopté à l'Assemblée nationale le projet de loi à l'Assemblée nationale ? Vous avez gouverné, vous avez assumé des responsabilités, vos amis, pas vous, et, après ce que j'ai entendu, heureusement, Monsieur Charon, vous avez été confronté à des mouvements sociaux, à la nécessité du maintien de l'ordre, à la colère aussi des Français et, là, vous venez donner des leçons ici. Monsieur Charon, vous qui avez souvent fréquenté, vous qui avez souvent fréquenté la préfecture de police, vous savez parfaitement que la méthode de comptage est la même pour tous les rassemblements et toutes les manifestations, la même qui est utilisée depuis des années. Et le chiffre de 300 000, qui peut penser, et le chiffre de 300 000 est déjà très important, mais qui peut penser que, dans Paris, il y avait, dimanche dernier, plus d'un million de manifestants ? Mais, enfin, ça n'a aucun sens. Et pourquoi pas deux millions, et pourquoi pas trois millions ? Vous essayez de tromper les Français sur ce sujet-là et ce chiffre de 300 000 vient d'être démontré. Et, derrière vos accusations, il y a des professionnels, des fonctionnaires consciencieux. Il y avait 2 000 policiers et gendarmes dimanche dernier, 2 000, et c'était adapté au chiffre que nous avions parce que nous savions qu'il y avait à peu près le même nombre… Non, ne croyez pas vos officines. Vous les avez trop fréquentées, Monsieur Charon, vous avez trop fréquenté les officines de la République et vous savez bien de quoi il s'agit. Et, derrière, et la preuve, et, d'ailleurs, je les tiens à votre disposition, les photographies de la manifestation ont été publiées hier, et vous le savez, sur le site de la préfecture de police parce que nous n'avons rien à cacher. Les manifestants ont annoncé un chiffre, mais quel mode de comptage ont-ils utilisé ? Vous pensez pouvoir confirmer sa fiabilité ? C'était peut-être l'une de vos rares manifestations, à moins que vous ayez participé à d'autres manifestations il y a quelques années. Vous voyez, cette polémique n'a pas lieu d'être. Les débordements qui ont eu lieu, alors même que les consignes de la préfecture étaient claires, sont inacceptables et, quand on se réclame souvent, sur d'autres sujets, du parti de l'ordre, il est bien étonnant de voir, ici, un parlementaire saluer ceux qui s'en prennent aux forces de l'ordre. Il y a eu, il y a eu de nombreux appels répétés sur Internet et sur les réseaux sociaux pour braver une décision préfectorale, pour braver une décision préfectorale confirmée, et je vous le rappelle, par le Tribunal administratif de Paris. Enfin, les organisateurs ne pouvaient ignorer, et vous ne pouvez pas l'ignorer et, là aussi, les photos, les images, les médias l'ont montré, le rôle des extrémistes du Bloc identitaire, je le rappelle, des Jeunesses nationalistes, du Renouveau français, du GUD, d'Europe Jeunesse, qui étaient sur place et qui brandissaient leurs bras devant les forces de l'ordre et, ça aussi, Monsieur Charon, vous l'excusez et vous trouvez normal que vous, un parlementaire, acceptiez qu'il y ait des hommes qui soient mis en cause. Les forces de l'ordre sont intervenues et, moi, je suis cohérent, il ne peut pas y avoir, dans une démocratie, le moindre débordement et les forces de l'ordre, le préfet de police, et vous n'avez pas le droit, ici, au Sénat, à l'Assemblée, de mettre en cause un homme d'Etat qu'est le préfet Bernard Boucault. C'est inacceptable, c'est d'une lâcheté inacceptable, monsieur Charon…


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