Lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement à l'Assemblée nationale du mardi 23 avril 2013, Manuel Valls a répondu aux questions des députés Valérie Pécresse et Etienne Blanc.
Valérie Pécresse, députée UMP des Yvelines
Monsieur le Président, mes chers collègues, ma question s'adresse au Premier ministre. Le 16 mars dernier, vers 23 heures, une bande d'une vingtaine de voyous encagoulés prenaient d'assaut une rame de RER D en gare de Grigny. Les passagers pris au piège se sont retrouvés sous la menace des coups et des gaz lacrymogènes. Cet acte d'une violence inouïe n'est pas un acte isolé, les chiffres sont sans appel. Dans les transports en Ile-de-France, en janvier et en février, les vols à la tire ont augmenté de 29% dans les RER et dans les trains et de 50% dans les bus. Face à cette dégradation de la sécurité, votre gouvernement semble impuissant. J'en veux pour preuve la relaxe prononcée par le tribunal d'Evry d'une personne interpellée qui selon le parquet avait été identifiée par la vidéosurveillance. J'en veux pour autre preuve la nouvelle arrestation d'un autre membre de la bande remis en liberté pour des actes de violence gare du Nord à Paris. Alors la spectaculaire et médiatique arrestation de cette bande n'a d'égal que le silence de votre gouvernement sur les suites judiciaires de cette affaire. Alors, Monsieur le Premier ministre, je vous le demande, que sont devenues précisément les 16 personnes interpellées dans l'affaire du RER D à Grigny par respect pour les familles et pour le travail remarquable des forces de l'ordre, le ministère public va-t-il faire appel de la relaxe du tribunal d'Evry ? Et, enfin, quelles mesures comptez-vous prendre pour mettre fin à l'impunité, ce sentiment qui conduit à la hausse de la délinquance dans tout le pays depuis votre élection ?
Manuel Valls, ministre de l'Intérieur
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, Madame Valérie Pécresse. Même vous, même vous, vous enfourchez le cheval de la démagogie, de la mise en cause de la justice ! Même vous, qui avez été ministre, qui avez gouverné, vous mettez en cause ici la justice, les magistrats qui sont indépendants ! Même vous, vous vous attaquez à l'Etat de droit ! Même vous, vous mettez en cause cette justice qui, comme vous le savez, agit de manière indépendante ! Même vous, parce que vous êtes candidate à la région Ile-de-France, vous mettez en cause l'Etat de droit ! Même vous, alors que vos collègues il y a quelques jours s'attaquaient aux forces de l'ordre qui faisaient leur travail, vous venez ici nous donner des leçons, même vous, Madame Pécresse ! Ca suffit ! Ca suffit, cette démagogie ! Ca suffit, cette démagogie qui n'arrête pas de créer ce climat dans le pays ! Alors, Madame Pécresse, ce que je veux vous dire, c'est que les forces de l'ordre, elles, elles sont déterminées à s'attaquer à cette délinquance que vous n'avez pas été capables d'endiguer parce que vous ne ferez croire à personne que la violence dans les RER, dans les quartiers que vous avez abandonnés, sont le fruit de la politique que nous menons depuis des mois ! Alors nous nous agissons pendant que vous vous faites de la démagogie !
Etienne Blanc, député UMP de l'Ain
Oui, je vous remercie, Monsieur le Président. Ma question s'adresse à Monsieur le Premier ministre. Monsieur le Premier ministre, depuis le mois de novembre, un grand nombre de Français vous apostrophent. Ils vous disent et ils ont le droit de le faire, que l'on ne peut changer une civilisation en utilisant une loi ordinaire. Face à ces demandes, vous affichez un souverain mépris. Ils sont descendus dans la rue, ils ont couvert le Champ de Mars ; ils ont couvert l'avenue de la Grande Armée ; ils ont couvert l'Esplanade des Invalides. Vous ne les avez pas écoutés et vous ne les avez pas entendus. Et voici que maintenant avec votre gouvernement qui est soutenu par moins d'un Français sur cinq, vous avez décidé d'utiliser les moyens de l'Etat pour les discréditer. Ils veulent vous parler ? Vous leur envoyez les forces de l'ordre. Oui, Monsieur le ministre de l'Intérieur, ces forces de l'ordre qui seraient mieux dans le métro qu'aux Invalides, que sur le Champ de Mars ou qu'aux abords de l'Assemblée nationale. Ils veulent vous parler et vous utilisez les moyens médiatiques, publics, que vous détournez pour les ridiculiser. Ils veulent, Monsieur le Premier ministre, ils veulent vous envoyer un message clair, alors vous leur envoyez les procureurs, les avocats généraux. Vous les citez maintenant devant les tribunaux correctionnels pour des peccadilles, parce qu'ils portent une chemise avec une impression qui ne vous plaît pas. Monsieur le Premier ministre, vous et votre gouvernement humiliez aujourd'hui une grande partie des Français. Pensez-vous que le mépris et que l'humiliation, ce soit une bonne méthode pour gouverner la France ?
Manuel Valls, Ministre de l'Intérieur
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Député. De quelle humiliation parlez-vous ? Depuis des mois le pays, et c'est légitime, s'est saisi d'un débat qui concerne toute la société : le Parlement, l'Assemblée et le Sénat discutent de ce sujet depuis des semaines. L’Assemblée nationale en toute légitimité va voter dans un instant un texte de loi important qui a déjà été adopté par beaucoup de pays en Europe et dans le monde. De quelles violences parlez-vous ? Sinon de celles, de ceux qui après avoir mis en cause la justice, contestent la légitimité du président de la République ; contestent la légitimité du Sénat ; contestent la légitimité de l'Assemblée nationale ; contestent la légitimité des parlementaires de faire et de voter la loi. De quelles violences parlez-vous ? De celles des groupes extrémistes, d'Extrême droite qui, à Paris et à Lyon, s'en prennent aux Institutions de la République. De quelles violences parlez-vous ? Sinon de celles qui s'en prennent à des couples homosexuels, à des gays, à des lesbiennes, à Lyon, à Nice, à Bordeaux, à Lille, à Paris. De quelles violences parlez-vous ? De ces groupes qui s'en prennent par des menaces directes à des parlementaires de la République de gauche et de droite pour qu'ils ne votent pas ces lois. De quelles violences parlez-vous ? Sinon de ceux qui s'en prennent aux forces de l'ordre. Alors, Monsieur le Député, respectez les Institutions de la République et faites en sorte que, oui, l'apaisement revienne et que le Parlement en toute liberté décide de la loi, la loi de la République.