17.01.2012 - Conférence de presse relative à la sécurité

17 janvier 2012

Discours de Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, lors de la conférence de presse relative à la sécurité - Mardi 17 janvier 2012.


Mesdames et Messieurs,

Comme c'est devenu la tradition, c'est une présentation à deux voix à laquelle nous allons nous livrer avec Alain Bauer, le Président de l'Observatoire National de la délinquance et des réponses pénales. Nous allons vous présenter l'évolution de la sécurité dans notre pays en 2011 d'abord, et plus largement au cours de la période récente, afin que par votre intermédiaire, les Français soient à même d'apprécier le plus objectivement possible les résultats obtenus.

Alain Bauer vous fera une présentation conforme à la méthodologie qui a été mise au point par l'Observatoire. C'est une présentation fine et détaillée dont les données sont agrégées par de grands indicateurs de faits criminels et délictueux : les atteintes aux biens, les atteintes violentes à l'intégrité physique, les infractions économiques et financières.

Pour ma part, je vous présenterai encore une fois le chiffre global de la délinquance. Je dis encore une fois, car si ce chiffre additionne des éléments trop divers, il a tout de même deux avantages : celui, d'abord, d'exprimer des tendances qui, en tant que telles, sont incontestables et celui, ensuite, d'exister depuis 1972. Je n'ai pas voulu que certains commentateurs puissent regretter qu'en cette fin de cycle politique qu'est l'année 2011, j'aie souhaité en quelque sorte cassé le thermomètre. Je pense que dès l'an prochain, il sera bon de ne retenir que la méthodologie de l'Observatoire. J'ajouterai, bien sûr, quelques commentaires sur l'activité de nos forces de l'ordre et sur la politique de sécurité que, sous l'autorité du Président de la République et du Premier Ministre, je mets en oeuvre au quotidien.

En 2011, la délinquance globale c'est-à-dire, tous les faits de criminalité et de délinquance parvenus à la connaissance de la police et de la gendarmerie, que ce soit à la suite de plaintes, ou à leur initiative propre, a baissé pour la neuvième année consécutive. Elle a baissé de 0,34 % soit de près de 12.000 faits. Depuis 2007, cette délinquance générale a baissé de 7,8 % soit de 290.000 faits. Et depuis 2002, elle a baissé de 16,47 % soit de 678.000 faits. Je précise par ailleurs que depuis 2002, la population française a augmenté de 3 millions 200.000 habitants.

La délinquance de proximité, c'est-à-dire, celle qui est constituée de tout ce qui est coups, agressions et vols sous les diverses qualifications pénales a baissé en 2011 de 4, 15 % soit 60.000 faits. Depuis 2007, elle a baissé de 20 % soit 364.000 faits. Depuis 2002, elle a baissé de près de 40 %.

Je rappelle pour que les choses soient bien claires à l'esprit de tous que sous le dernier gouvernement de gauche, entre 1997 et 2002, la délinquance générale avait augmenté de 17,76 %, soit 620.000 faits et que la délinquance de proximité avait augmenté de 9,84 % soit 207.000 faits.

Sans empiéter sur l'exposé d'Alain Bauer, je précise qu'en 2011 :

  • Les atteintes aux biens ont diminué de 1,74 % soit 38.000 faits. Depuis 2002, la baisse est de 30 %. A cette rubrique, cependant, un point noir, que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer : si le nombre decambriolages de locaux industriels et commerciaux a baissé de 11 % en revanche, le nombre des cambriolages de résidences secondaires et principales a augmenté de 16 %. C'est une tendance que nous enregistrons depuis deux ans. Cette évolution tient notamment aux raids qui sont commis par les équipes de malfaiteurs venus de l'étranger, notamment d'Europe Centrale et Orientale. Cela m'a entraîné à demander à la Commission Européenne, la mise au point d'un plan spécifique animé par Europol et Eurojust. Cette criminalité est en effet, transnationale. De surcroît, plusieurs pays voisins du nôtre sont touchés de la même façon.
  • Les atteintes violentes à l'intégrité physique se stabilisent. L'augmentation est de 0,1 %. Depuis 2002, l'augmentation est de 22,8 %. Mais je voudrais souligner que cette catégorie d'infractions recouvre 2 sous-ensembles qui sont extrêmement différents. Le premier sous-ensemble est celui des violences commises à l'intérieur du cercle familial. C'est ce type de violence qui a augmenté. Il est encore en très légère augmentation de 0,2 % en 2011. Cette augmentation, il faut en avoir conscience, résulte notamment des efforts qui ont été déployés par les pouvoirs publics afin d'inciter les personnes victimes de violences familiales et notamment les femmes, à porter plainte. Et même si les statistiques en souffrent, nous ne devons pas regretter, bien au contraire, que ce fléau de la vie familiale soit ainsi révélé au grand jour et puisse recevoir des réponses appropriées.

Le deuxième sous-ensemble est celui des violences crapuleuses. Ce sous-ensemble est en baisse de 10 % depuis 2002. Il est en baisse en 2011 de 0,1 %.

Et puisqu'il est de bon ton à gauche de dire et de répéter que les violences aux personnes sont un échec des Gouvernements qui se sont succédés depuis 2002 – ce qui est un pur mensonge comme je viens de le démontrer – je lui rappellerai que pendant les 5 dernières années où elle a été au pouvoir les violences aux personnes avaient augmenté de 70 %.

Un mot de Paris. En 2011, la délinquance générale y a chuté de 2,3 %. Depuis 2002, elle a baissé de 25 %.

Je voudrais souligner aussi deux indicateurs importants de l'activité de la police et de la gendarmerie : l'évolution du nombre des infractions révélées par l'activité des services et le taux d'élucidation des affaires criminelles et délictuelles.

Les IRAS ont progressé d'une année sur l'autre de 6,4 %. 23.000 faits supplémentaires ont ainsi été révélés par les initiatives des services. Cela témoigne de l'engagement des policiers et des gendarmes. Cela démontre également, s'il en était besoin, que le gouvernement ne cherche pas à faire baisser artificiellement les statistiques.

Quant au taux d'élucidation, il atteint en 2011 38,62%, en augmentation de 1,17 point par rapport à 2010. Je rappelle qu'il était de 26 % en 2002. C'est un progrès considérable de 48 % qui a ainsi été réalisé afin de déférer à la justice les responsables des crimes et des délits et de rendre justice aux victimes. Ce résultat est notamment dû aux efforts considérables qui ont été déployés dans le domaine de la police technique et scientifique. Je rappelle que les effectifs spécialisés de police scientifique ont cru de 45 % entre 2007 et 2011 passant de 1.200 à plus de 1.700. Je veux aussi évoquer la montée en puissance du fichier national des empreintes génétiques dont je dois dire que j'ai du mal à comprendre comment certaines formations politiques peuvent encore le contester.

Quelques indications maintenant sur la politique que je compte mener cette année, afin d'améliorer encore la sécurité des Français. Des Français qui légitimement ont toujours des attentes fortes dans ce domaine, tout simplement parce que la sécurité c'est la première des libertés et que le premier des droits c'est de pouvoir se déplacer sans être agressé ou ennuyé et de conserver la libre disposition des biens que l'on a pu acquérir. Le premier axe de notre action, c'est de continuer à faire reculer la délinquance, de la faire reculer sous toutes ses formes et bien sûr de concentrer nos efforts sur les comportements qui traumatisent le plus nos concitoyens ou qui sont les plus générateurs de délinquance. A la rubrique des actes qui traumatisent nos concitoyens, je retiens bien sûr les atteintes physiques aux personnes. Celles-ci doivent continuer à reculer. Au chapitre des actes les plus générateurs de délinquance, je veux retenir l'économie souterraine et notamment le trafic des stupéfiants. Notre lutte contre les stupéfiants doit être sans merci. Ce trafic entraîne des délits de tous ordres. C'est aussi un problème sanitaire considérable. A la différence d'autres formations politiques, ce gouvernement n'entend pas dépénaliser l'usage des stupéfiants. Je précise d'ailleurs que la coopération renforcée que nous développons avec l'administration fiscale et l'administration douanière nous permettra d'intensifier la poursuite de l'infraction de non justification de ressources qui en inversant la charge de la preuve offre la possibilité de capter les revenus issus d'activités délictueuses. La lutte contre les cambriolages bien sûr tiendra une place prioritaire dans l'action générale destinée à faire reculer la délinquance. A cet égard, je tiens à saluer l'initiative prise par un certain nombre de parlementaires en concertation avec le Ministère de l'Intérieur, de déposer une proposition de loi permettant d'étendre la peine complémentaire d'interdiction du territoire français aux étrangers qui résident depuis peu de temps dans notre pays et qui se sont adonnés à des actes de criminalité ou de délinquance.

Le deuxième axe d'action est celui qui consistera à accroître encore la présence de la police et de la gendarmerie sur la voie publique. Je m'empresse de dire tout de suite, qu'il ne s'agit pas d'un retour de la police de proximité, mais d'une politique de présence. Je n'entends pas revenir à la police de proximité qui a été mise en place sous le gouvernement de M. Jospin entre 1997 et 2002 tout simplement parce qu'elle a été un échec retentissant. Elle s'est traduite, en effet, par une explosion de 17,7 % de la délinquance de notre pays et cela tout simplement parce qu'elle n'assumait pas la totalité des fonctions de la police et notamment la fonction répressive, celle qui consiste à arrêter les délinquants pour les déférer à la justice. Au dernier trimestre de 2011, le recrutement de 1.000 adjoints de sécurité et gendarmes adjoints volontaires, le recours à des réservistes de la police et de la gendarmerie, le recours aux heures supplémentaires ont permis de déployer sur le terrain 4.000 fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie supplémentaires. La méthodologie des patrouilleurs a vu le jour. Ce sont ainsi, chaque mois, 40.000 patrouilles supplémentaires qui se font dans nos villes soit 25 % de plus qu'avant l'été. En 2012, les efforts en ce sens continueront. Des rationalisations du fonctionnement des services sont encore possibles afin de dégager des effectifs qui seront plus nombreux au contact de nos concitoyens sur la voie publique. Une meilleure articulation avec les polices municipales là où elles existent permettra de démultiplier du reste, ces efforts.

Le troisième axe d'action pour l'année prochaine, consistera dans un renforcement de la lutte contre les incivilités. Les incivilités, ce sont ces comportements agressifs ou incorrects, qui ne sont pas pénalement qualifiables mais qui perturbent gravement la vie de nos concitoyens. Ce n'est peut-être pas un délit que de bousculer une personne dans le métro le matin ou de l'insulter, mais la personne qui est la victime de ces agissements en est légitimement, profondément affectée. Contre ces comportements, il faut que nous renforcions notre action. La loi relative à la prévention de la délinquance, qui a été publiée en 2007, a mis en place à cet effet des outils, les Conseils des droits et des devoirs. Certains maires les ont mis en place sous d'autres formes et d'autres appellations. Mais toutes ces instances, ne sont pas encore suffisamment nombreuses. Leur esprit est de réprimander, de remettre dans le droit chemin, ceux qui se laissent aller à ces fameuses incivilités. Là où les maires ont décidé de faire des remontrances, en compagnie du procureur de la République, du Directeur Départemental de la Sécurité Publique et du Commandant de groupement de Gendarmerie, à ceux qui se laissent aller à l'agressivité et aux mauvaises manières, les choses s'améliorent. J'appelle tous les maires de France à aller dans ce sens.

En terminant, je voudrais rappeler l'esprit dans lequel le Gouvernement conduit la politique de sécurité qui est la sienne.

Le Gouvernement considère tout d'abord que la sécurité doit être pour tous. Certains estiment que seules les zones dites sensibles doivent faire l'objet d'efforts prioritaires en faveur de la sécurité. Je considère pour ma part, que tous ceux qui habitent dans notre pays ont droit à la sécurité, qu'ils habitent dans des zones sensibles ou dans des zones tranquilles, dans des grandes villes, dans des villes moyennes ou dans des villages.

La deuxième caractéristique de l'état d'esprit de ce Gouvernement dans la mise en oeuvre de sa politique de sécurité, c'est le réalisme. Le réalisme, c'est de considérer qu'on peut toujours faire mieux en matière de sécurité et que ce n'est pas être sécuritaire que de vouloir que nos compatriotes vivent une vie tranquille. C'était la volonté de Nicolas Sarkozy lorsqu'il était ministre de l'Intérieur. Ce l'est encore maintenant qu'il est Président de la République. Et pour cela, il faut faire des choix clairs entre les victimes et les coupables de crimes et de délits. Pour le Gouvernement, le choix est très clair, la priorité, ce sont les victimes. Il se refuse à admettre qu'en excusant les coupables, au nom des problèmes que génère la société on se lie les mains pour mener une politique de sécurité efficace.

Je laisse maintenant la parole au Président du Conseil d'orientation de l'ONDRP, puis nous répondrons à vos questions.