14.11.2011 - Déplacement dans le Var à la suite des inondations provoquées par les intempéries du 3 au 6 novembre 2011

14 novembre 2011

Intervention de M. Claude Guéant, Ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration - Draguignan


- seul le prononcé fait foi -

    En ce début de mois de novembre, vos deux régions ont été touchées par des intempéries d’une intensité et d’une durée exceptionnelles avec, pour conséquence, la crue rapide, impressionnante et dévastatrice de plusieurs fleuves côtiers ou cours d’eau. Qu’on les nomme « épisode cévenol » ou « système convectif », ces orages sont pour vous de grandes épreuves. Je ne saurais oublier les riverains de la mer, notamment dans les Alpes-Maritimes, dont certains commerces ont été endommagés par la houle.
    Les images que nous voyons à la télévision ne rendent pas justice des traumatismes que constituent ces inondations, sans doute plus encore dans le Var où elles ravivent le souvenir encore récent des inondations de juin 2010. Les habitants du Gard n’ont pas oublié, non plus, l’horreur du mois de septembre 2002, qui a dévasté Aramon, au bord du Vidourle, et des communes riveraines du Gardon. Les habitants de Cuxhac, dans l’Aude, ne peuvent oublier 1999.
    Mes pensées vont d’abord, naturellement, aux familles des huit personnes [6 morts ou disparus emportés par les eaux et 2 intoxiqués au monoxyde de carbone au cours d’une opération de pompage] victimes de cette catastrophe.
    Mais elles vont aussi, plus largement, à tous ceux qui ont vécu ces derniers jours dans l’inquiétude, tous ceux qui ont été coupés du monde, tous ceux qui ont vu leur habitation sinistrée ou leur outil de travail détruit.
    À tous, habitants de l’Hérault, du Gard, de la Lozère, du Var, des Alpes-Maritimes et de la Corse, je veux dire : vous n’êtes pas seuls.
    Face à ce déchaînement des éléments, la solidarité nationale sera forte et rapide.
Cette solidarité s’est exprimée, d’abord, au cœur de la crise.
    Avant même le déclenchement des intempéries, l’efficacité de nos mécanismes de prévention et d’alerte ont permis de prendre les mesures nécessaires :

  • alerte des populations, d’abord, avec le placement par Météo-France de 23 départements en « vigilance orange », de 3 départements en « vigilance rouge » et le déclenchement, pour la première fois, d’une vigilance « vague-submersion » sur le littoral ; je veux aussi remercier les services de Météo-France, ainsi que les experts du SCHAPI (service central hydrométéorologique d’appui à la prévision des inondations, les « chasseurs d’orages »).Des vies ont été sauvées grâce à ce dispositif pendant les intempéries et je salue les pompiers, départementaux mobilisés par les SDIS ou nationaux, envoyés par la sécurité civile du ministère de l’intérieur
  • évacuation préventive de près de 2.000 personnes, ensuite ;
  • et enfin, pré-positionnement par l’Etat d’importants moyens nationaux en renfort – jusqu’à 10 hélicoptères et 450 sapeurs-sauveteurs militaires de la sécurité civile – qui ont ainsi pu venir appuyer immédiatement les forces des départements sinistrés.

Grâce à leur mobilisation, 6.500 interventions ont pu être menées à bien dont un peu plus de 600 [614] sauvetages et plus de 150 hélitreuillages [154] ;
Je pense, aussi, à la forte mobilisation des préfets et des maires qui se sont dépensés sans compter pour répondre aux besoins et au désarroi de leurs administrés.
A tous, j’adresse l’expression de ma reconnaissance.
Je pense, enfin, aux mesures immédiatement prises par le Gouvernement afin que se manifestent sur le terrain, concrètement et sans retard, la solidarité nationale :

  • dès le 7 novembre, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises a débloqué à ma demande 300.000 euros de crédits d’extrême urgence à la préfecture du Var afin de répondre aux besoins de première nécessité, notamment nourriture et hébergement, de ceux qui avaient tout perdu ;
  • le même jour, Frédéric LEFEBVRE s’est rendu sur place, au nom du gouvernement, afin de lancer sans attendre le plan d’aide aux entreprises touchées par les intempéries.

    Au cœur des intempéries, l’État était présent à vos côtés pour gérer la crise, pour prendre les premières mesures. Parce que nous avons agi ensemble, en parfaite concertation et coordination, notre gestion des événements a permis de sauver des vies et de répondre à la détresse de nos concitoyens touchés par les inondations.
Mais la solidarité nationale ne s’arrête pas avec la fin des intempéries et l’amorce de la décrue.
    L’élan de solidarité nationale au cœur de la crise est nécessaire. Il est essentiel. Il est – même – naturel, au moment où les images de la catastrophe rendent tangibles, pour tous, la détresse des populations soumises aux éléments.
    Mais la fin des précipitations ne marque pas un retour immédiat à la normale. Il faut maintenant nettoyer, indemniser et relancer l’activité. Pour que l’ampleur de la tâche s’ajoutant au traumatisme de la catastrophe ne plonge pas les sinistrés dans le désarroi, l’État doit être présent aussi, pendant cette période.
    Cet engagement, l’engagement de vous soutenir jusqu’au retour complet à la normale, je suis venu aujourd’hui le prendre solennellement devant vous.
    L’État se mobilise à vos côtés pour vous permettre de tourner la page aussi vite que possible.
    Ce que les inondations ont détruit, nous allons le reconstruire ensemble, nous allons le reconstruire vite et nous allons le reconstruire selon des procédures simplifiées.
    Concernant, l’indemnisation des victimes, vous savez qu’elle est conditionnée par la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Selon la procédure normale, cette reconnaissance n’intervient qu’après constitution de dossiers par chaque victime et examen de ceux-ci par une commission interministérielle. Cette procédure normale doit rester la règle, je m’empresse de le dire. Mais elle n’est pas adaptée, du point de vue du Gouvernement, à des populations comme celles du Var, confrontées à deux catastrophes majeures successives et rapprochées.
Dans un esprit de justice et de bon sens, nous traiterons les habitants de la région Languedoc-Roussillon comme ceux de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et de la région Corse le cas échéant, en fonction des rapports des préfets.
Pour permettre une indemnisation plus rapide des victimes, nous avons donc décidé de recourir à la procédure accélérée : en s’appuyant sur l’expertise transmise par les préfectures, je signerai avant la fin de de cette semaine l’arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturel. Très concrètement, cela signifie que les indemnisations pourront commencer dès cette semaine et non dans plusieurs semaines, comme cela aurait été le cas en suivant la procédure normale.
    Cette reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle va ainsi permettre aux assurances d’intervenir vers les particuliers, les entreprises et les collectivités territoriales. J’ai demandé à Bernard SPITZ, président de la fédération française des sociétés d’assurance mutuelle, de m’accompagner aujourd’hui, afin de prendre la mesure de la situation et de garantir le bon fonctionnement des mécanismes d’indemnisation. Je lui suis profondément reconnaissant de sa venue. Je demande également aux préfets d’être à l’écoute et de faciliter le dialogue entre les victimes et les assurances, notamment par l’intermédiaire des médiateurs départementaux qui sont mis en place. Il faut une garantie d’action, avec des évaluations rapide. Le temps des assurances doit être le plus proche possible de celui des victimes, qui attendent souvent dans l’angoisse une juste et rapide indemnisation de leurs sinistres.
    À ces indemnisations doivent s’ajouter les accompagnements financiers des différents acteurs économiques.
    Notre action doit être rapide car, pour ces acteurs, le temps passé à attendre est un temps improductif. Cette période d’inactivité forcée a donc un coût qui s’ajoute au coût intrinsèque des dégâts.
    Notre action doit aussi être simple : l’objectif est de venir en aide aux acteurs économiques et non de les assommer de procédures administratives lourdes et complexes. C’est pourquoi nous avons retenu une logique de guichet unique permettant de mobiliser tous les dispositifs en un seul lieu : les chambres de commerce et d’industrie ou les chambres de métiers et d’artisanat en fonction des acteurs concernés.
    Concrètement, nous allons agir dans quatre directions pour aider à la relance de l’activité économique:

  • première direction, nous allons apporter une aide exceptionnelle aux entreprises et aux exploitations agricoles :
  • pour les entreprises commerciales, artisanales et de services situées dans les cantons ayant fait l’objet d’un arrêté de reconnaissance de catastrophe naturelle et ayant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 1 million d’euros, le Gouvernement a décidé la mise en place d’un « FISAC-intempéries » sur le modèle de ce qui avait été fait à l’occasion des inondations de juin 2010 ;
  • dans le secteur agricole, la procédure des calamités agricoles sera mise en œuvre, ainsi que l’a rappelé Bruno LEMAIRE. Sous le contrôle des préfets de département des missions d'enquête seront chargées d'identifier, de localiser et de quantifier les dommages considérés comme non assurables, afin qu’ils fassent l'objet d'une indemnisation par le Fonds national de gestion des risques en agriculture ;
  • deuxième direction, dans les départements du Gard, de l’Hérault, de la Lozère, des Alpes-Maritimes et du Var, et bien sûr, en fonction de ce que nous dirons les préfets, le cas échéant en Corse, les services des finances publiques examineront, au cas par cas, les possibilités de dérogation et de délais, afin qu’aucune entreprise fragilisée par les intempéries ne soit mise en péril par ses obligations fiscales ou sociales ;
  • troisième direction, nous allons accompagner les entreprises dans leurs démarches auprès des assureurs :
  • concernant, immédiatement, l’indemnisation des dommages, je rappelle que la franchise en matière d’inondation est fixée par voie réglementaire à 10% des biens de l’entreprise ;
  • concernant ensuite, les entreprises qui se verraient refuser un contrat d’assurance en raison du risque important ou récurrent d’inondation de ses locaux, François BAROIN a rappelé qu’elles pourront se tourner vers le bureau central de tarification. Celui-ci imposera à l’assureur de les prendre en charge évitant ainsi qu’une discontinuité n’apparaisse dans leur couverture face aux risques naturels ; il n’y aura donc pas de trou dans la garantie ;
  • par ailleurs, je tiens à rappeler que le meilleur moyen, et à vrai dire le seul soutenable sur le moyen terme pour qu’à l’avenir les entreprises et les particuliers soient prémunis contre les franchises élevées est que leur commune se dote d’un plan de prévention des risques naturels.
  • quatrième et dernière direction, nous allons, dans les départements que j’ai cités, soutenir les entreprises afin de maintenir l’emploi des salariés mis au chômage partiel par les dégâts causés à leur outil de travail. Je demande aux préfets qui coordonneront ce dispositif de veiller à la rapidité des procédures.

    Solidarité avec les particuliers, solidarité avec les entreprises, l’État se mobilise, aussi, pour les collectivités territoriales.
    Comme cela est prévu en cas de catastrophe naturelle de grande ampleur, je vais demander au Premier ministre l’envoi d’une mission réunissant l’inspection générale des finances, l’inspection générale de l’administration et le conseil général de l’environnement et du développement durable. Elle sera déployée dans les tous prochains jours sur le terrain, dans les départements dont les préfets nous ferons des demandes, afin d’évaluer les dégâts infligés aux biens non assurables des collectivités tels que les routes, les réseaux de distribution et d’assainissement de l’eau, les stations d’épuration et de relevage des eaux ou encore les dispositifs d’écoulement des eaux. J’ai souhaité que Michel ROUZEAU, inspecteur général de l’administration, soit présent aujourd’hui dans ce déplacement afin que la coordination à mettre en place s’établisse rapidement et que cette mission interministérielle rende des conclusions précises et rapides dans les deux mois.
    En se basant sur ses conclusions, l’État attribuera aux collectivités touchées des aides exceptionnelles, qui pourront couvrir jusqu’à 80% du montant des travaux nécessaires en fonction des situations financières. Ces aides se feront à partir de l’ouverture de crédits exceptionnels à la ligne « calamités publiques » du programme 122 de la mission « relations avec les collectivités territoriales ». Le directeur général des collectivités locales est à mes côtés pour garantir la procédure.
    Particuliers, acteurs économiques ou collectivités territoriales, c’est bien à l’ensemble des sinistrés que l’État apporte durablement et efficacement son soutien.
    Au-delà de cette mobilisation exceptionnelle, traduction concrète de la solidarité de la Nation avec les sinistrés, le devoir de l’État est aussi de limiter les risques de répétition d’une telle catastrophe.
    Identifier et promouvoir les dispositifs susceptibles de limiter l’exposition des populations et des entreprises aux risques naturels, c’est précisément l’objet des plans de prévention des risques naturels. C’est pourquoi j’incite très fortement toutes les communes qui n’en sont pas encore dotées à élaborer un tel plan et à le transcrire rapidement dans leurs dispositions d’urbanisme. On ne peut plus accepter que des constructions continuent de se réaliser en zone inondable, c’est essentiel. Je souhaite avec les élus que les préfets y veillent et fasse respecter l’obligation de l’adoption de plan prévention des risques dans les communes qui ont été sinistrées.
    Enfin sur l’ensemble des mesures d’accompagnement et de soutien que je viens de vous décrire, je souhaite une mobilisation totale des préfets et des services de l’Etat afin de garantir une cohérence et une efficacité dans l’action. La gestion commune de la crise a été exemplaire, il est primordiale que la phase qui commence maintenant soit tout autant réussie afin que nos concitoyens, nos entreprises et nos territoires puissent reconstruire rapidement leur avenir.