Avis du Conseil d'Etat sur l'applicabilité de la directive européenne "retour" en matière de lutte contre l'immigration irrégulière

21 mars 2011

Le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a pris connaissance de l'avis rendu lundi 21 mars 2011 par le Conseil d'Etat sur l'applicabilité de la directive européenne "retour".


Cet avis précise le statut juridique de cette directive pendant la période transitoire qui s'écoulera jusqu'à sa transposition en droit français, à l'occasion de la prochaine adoption, au printemps 2011, du projet de loi relatif à l'immigration.

Cet avis laisse inchangé le cadre juridique de la majorité de nos mesures d'éloignement. Les obligations à quitter le territoire français (OQTF), qui deviennent exécutoires à l'expiration du délai d'un mois, représentent aujourd'hui plus de 50% de ces mesures ; elles sont strictement conformes aux prescriptions de la directive "retour". De même, l'avis du Conseil d'Etat ne concerne ni les mesures d'éloignement qui font suite à un refus de séjour pour fraude, ni celles qui sont prises sur un motif d'ordre public.

Le Conseil d'Etat considère que le régime des arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière (APRF), doit, dès aujourd'hui, prendre en compte les dispositions de la directive "retour". Cela signifie, en particulier, que l'administration doit assortir ces arrêtés d'un délai de départ volontaire, sous réserve des deux exceptions précédemment mentionnées d'ordre public et de fraude.

Le ministère de l'intérieur et de l'immigration prend les mesures nécessaires pour tenir compte de cet avis, qui ne remet pas fondamentalement en cause l'architecture de la politique de lutte contre l'immigration clandestine. La réponse de long terme se trouvera dans le projet de loi relatif à l'immigration, qui devrait être définitivement adopté au printemps 2011. Dans cette attente, des instructions précises seront données aux préfets pour que, dès à présent, un délai de départ volontaire soit accordé dans les conditions prévues par la directive.

Outre qu'il transpose la directive, ce projet de loi doit apporter de nouveaux outils pour mieux lutter contre l'immigration clandestine. Il prévoit d'allonger, de 32 à 45 jours, la durée maximale de rétention administrative ; il doit permettre de créer des zones d'attente temporaires lorsque des groupes de migrants arrivent sur le territoire français en dehors des points de passage frontaliers ; il propose de réorganiser l'intervention des juges dans le contentieux de l'éloignement, pour renforcer la sécurité juridique des procédures. Ces mesures sont de nature à garantir l'efficacité de notre politique de lutte contre l'immigration irrégulière. Depuis 2007, ce sont plus de 110.000 personnes qui ont été reconduites dans leur pays d'origine.

La directive n°2008/115/CE du 16 décembre 2008, dite "retour" :

Cette directive prévoit des instruments permettant de mieux lutter contre l'immigration irrégulière. Elle crée, par exemple, une interdiction de retour à portée européenne, qui pourra être prononcée en accompagnement d'une mesure d'éloignement. Elle harmonise les conditions de la rétention administrative en fixant une durée maximale de 6 mois, pouvant être prolongée, dans certains cas, d'une durée maximale de 12 mois.

La directive prévoit aussi des mesures plus favorables aux étrangers. Elle donne priorité au "départ volontaire" pour l'exécution des mesures d'éloignement. Ce délai de départ volontaire doit être compris entre 7 et 30 jours. Les Etats-membres peuvent toutefois s'abstenir d'accorder le délai de départ volontaire s'il existe un risque de fuite, si la personne constitue un danger pour la sécurité publique, l'ordre public ou la sécurité nationale, ou si elle a fait l'objet d'un refus de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse.